Intervention de Frédéric Van Roekeghem

Commission des affaires sociales — Réunion du 22 juin 2011 : 4ème réunion
Certification des comptes sociaux — Audition de M. Frédéric Van roekeghem directeur général de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés cnam

Frédéric Van Roekeghem, directeur général de la Cnam :

Elle a refusé en revanche de certifier ceux de la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP), considérant que les données échangées par les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) et les Urssaf n'étaient pas sûres, ni par conséquent le calcul des taux applicables aux employeurs. Ce problème, qui tient à l'absence d'un système informatique intégré, peut être résolu sans trop de difficultés. Dans l'ensemble, les comptes de l'assurance maladie et de la branche AT-MP reflètent la situation économique réelle de ces deux régimes. Point de charges ou de recettes exceptionnelles cette année qui viennent creuser l'écart entre le résultat courant et le résultat comptable. Le déficit de l'assurance maladie en 2010 a atteint 11,6 milliards d'euros, celui de la branche AT-MP, 700 millions : ces chiffres sont élevés, mais sincères. Si tout va bien, les prévisions arrêtées fin 2010 pourraient être légèrement supérieures à la consommation finale des fonds.

Ce résultat n'est pas mauvais, étant donné l'ampleur de la crise de 2009. Le solde de la branche maladie s'est détérioré de 6 milliards d'euros entre 2007 et 2009 - le déficit passant de 4,4 à 10,6 milliards -, puis d'un milliard en 2010. Grâce à la reprise économique qui s'amorce et au pilotage des dépenses par l'Ondam, nous espérons inverser la tendance en 2011. C'est aussi grâce à ces efforts que les comptes sociaux ont mieux résisté à la crise de 2008-2010 qu'à celle de 2001-2003. Ce n'est pas sans conséquences sur les revenus des professions sanitaires ni sur l'évolution des dépenses hospitalières. D'une manière générale, les dépenses de santé n'ont progressé cette année que de 3 %, au lieu de 6 % en 2003 ; l'effort a été particulièrement important pour les soins de ville.

Ce ralentissement est dû aux réformes structurelles entreprises depuis quelques années, et d'abord à un meilleur pilotage tarifaire : nous avons ainsi économisé 800 millions d'euros sur les prix de biologie et de radiologie. La part des génériques a augmenté de trente points entre 2004 et 2010, pour se stabiliser autour de 80 %, lorsqu'un générique est disponible. D'après un benchmarking international, le volume des médicaments consommés augmente moins vite en France qu'ailleurs en Europe : 0,5 % entre 2006 et 2009 au sein de huit classes thérapeutiques, au lieu de 4,3 % en Allemagne, 4,5 % en Italie, 3,8 % aux Pays-Bas, 4,6 % en Espagne, 2,9 % en Suisse et au Royaume-Uni. L'effet Mediator nous aidera peut-être. La France reste néanmoins le pays où les dépenses de médicaments par habitant sont les plus élevées : nous en détaillerons les raisons dans notre prochain rapport « produits et charges ». Le traitement journaliser de Simvastatine, un anti-cholestérol génériqué, coûte par exemple 44 centimes en France contre 14 en Allemagne et 4 au Royaume-Uni... Les Allemands ne se fournissent pourtant pas auprès de laboratoires « exotiques », mais de Novartis.

Un autre facteur de progrès réside dans la multiplication des contrôles des arrêts de travail : leur nombre est passé de 400 000 à 2 millions en quelques années. Nous estimons l'économie à 1 milliard d'euros : entre 2004 et 2006, le nombre d'indemnités journalières a baissé de 11 %. Le mouvement est reparti à la hausse depuis, en raison de l'augmentation de la population et de son vieillissement. La chirurgie ambulatoire a également progressé. La convergence tarifaire engagée fait économiser 150 millions par an. Nous commençons à mettre en place des référentiels d'arrêts de travail, domaine dans lequel la France est très en retard, comme pour les référentiels de traitements. Enfin nous luttons contre la fraude : un récent rapport de l'Assemblée nationale a fait le point sur la question.

La situation comptable est donc moins mauvaise qu'en 2003 : en euros constants, le déficit s'élevait en 2003 à 13,5 milliards d'euros, contre 11,6 milliards en 2010 et, nous l'espérons, environ 10 milliards cette année. Les comptes reflètent la crise, mais les dépenses sont correctement provisionnées, comme l'a reconnu la Cour des comptes.

Il reste cependant des marges de progression. Les pharmacies d'officine, par exemple, reçoivent 550 millions d'ordonnances et prescriptions, ce qui représente des tonnes de papier, transportées dans des semi-remorques : cela n'autorise pas un contrôle efficace. Nous comptons donc dématérialiser les ordonnances dans les officines : dans chaque département, trois ou quatre pharmacies se livrent déjà à une expérience que nous espérons généraliser d'ici à six mois ou un an, en concertation avec les syndicats de pharmaciens. Cela implique la conclusion d'une convention de preuve prévoyant la conservation des documents pendant soixante jours et l'opposabilité des images récupérées. A terme, il faudra dématérialiser les prescriptions dès l'origine, mais cela implique que les cabinets médicaux soient tous informatisés, ce qui n'est pas encore le cas.

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