Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite à présent répondre aux différents orateurs qui se sont exprimés au cours de la discussion générale.
M. Charon, dans son intervention, a taxé ce projet de loi de texte politique. Sans doute était-ce une critique dans sa bouche, mais, pour ma part, j'y ai vu un immense compliment. Oui, monsieur le sénateur, ce projet de loi est éminemment politique parce qu’il exprime une volonté, parce qu'il a un objectif et parce qu’il se donne les moyens de le mettre en œuvre. Il s'agit non pas de créer du logement pour une quelconque clientèle électorale, mais bien de rendre accessible le logement pour celles et ceux qui ont besoin.
Il est absolument indispensable de ne pas se tromper sur le diagnostic. À cet égard, les chiffres que vous avez cités tout à l'heure sont parfaitement inexacts. Aujourd'hui, dans l'ensemble du parc HLM de France, seuls 13 % des locataires – et non pas 50 % – dépassent le plafond de ressources au moment de l'entrée dans les lieux. Quant à ceux dont les revenus sont supérieurs à 200 % du plafond, ils ne représentent que 0, 5 % du total, soit un taux encore plus faible.
Conséquence, parmi d’autres, de la crise, les occupants du parc HLM en France seraient plutôt en voie d'appauvrissement, ce qui est d'ailleurs une source d’inquiétude. C'est cette situation que nous devons traiter et ce projet de loi vise à apporter une première réponse au problème.
Nous avons fait le choix de nous appuyer sur une loi existante. Le travail parlementaire qui a été mené sur l'initiative d’abord de Louis Besson, puis de Jean-Claude Gayssot, qui a fait voter la loi SRU, a été très intéressant et très utile. C’est pourquoi j'ai fait le choix non pas de rédiger un nouveau texte, mais de tirer le bilan de la loi SRU tout en cherchant à améliorer celle-ci. S’agissant du travail parlementaire, il me semble que c'est une bonne méthode et je pense aussi que les membres d’un gouvernement – en tout cas, c'est ainsi que je conçois mon rôle – ont vocation à faire évoluer les lois, sans forcément vouloir laisser leur nom à un texte. Est-il bien nécessaire, mesdames, messieurs les sénateurs, de vouloir sans cesse réinventer l'eau tiède ?
Il était en revanche absolument indispensable de faire évoluer cette loi sur deux points : d'une part, augmenter le nombre minimum de logements sociaux – je reviendrai sur les arguments des uns et des autres – ; d’autre part, aggraver les pénalités.
Cette dernière mesure était nécessaire, parce que ce système de pénalités s’est révélé extrêmement incitatif. Aujourd'hui, sur les 977 communes qui sont soumises à la loi, 613 respectent leurs engagements. Cela signifie que le dispositif s’est révélé efficace pour celles et ceux qui le souhaitent. Je regrette que Mme Giudicelli ne soit plus là parce qu'elle doit bien connaître M. Giudicelli, maire de Menton depuis 1989, commune qui compte aujourd'hui 7 % de logement social, alors même, et c’est aisément vérifiable, qu’elle poursuit de grands programmes de construction de logements neufs aux quatre coins de son territoire.
Aussi, la volonté des uns et la force des sanctions à l’égard des autres qui refusent de participer à cet effort collectif sont des éléments déterminants. Et si les sanctions ne s'appliquent que dans de très rares cas, c'est que l’effet dissuasif de ce projet de loi aura été suffisant et que l’objectif aura été atteint.
Pourquoi faut-il augmenter le pourcentage de logements sociaux ? Parce que la pression existe et qu'elle est très forte. Mais c'est pour cette raison aussi que, dans ce projet de loi, nous avons fait le choix du pragmatisme. Ainsi, si la situation de tension n'existe pas dans une agglomération, le seuil sera maintenu à 20 %. Le seuil de 25 % ne sera mis en œuvre que dans les communes où la pression est socialement identifiée.
En réponse notamment à Mme Lienemann et à M. Dilain, je confirme que la question est bien celle de la pression sociale, c'est-à-dire la demande de logement social, le niveau des revenus. Il est question non pas de la pression générale sur le parc, mais bien de l'identification du critère social des personnes qui sont en situation de demande de logements. C'est bien ce que prévoit le projet de loi. C'est également pour cette raison que la question de l'équilibre entre les différentes formes de logement – et les différentes formes de financement correspondantes : PLS, PLUS et PLAI – est essentielle.
Monsieur Dallier, votre intervention pouvait paraître extrêmement séduisante de prime abord. Ce que j'aimerais savoir, mais ce que nous ne saurons jamais ni vous ni moi, c'est ce qu'aurait fait le brillant maire des Pavillons-sous-Bois si la loi SRU n'avait pas existé. Croyez-vous que ce volontarisme en faveur de la construction de logements sociaux aurait été si fort ? Cela restera une question sans réponse pour vous comme pour moi.