Intervention de Roger Karoutchi

Réunion du 11 septembre 2012 à 21h30
Logement — Exception d'irrecevabilité

Photo de Roger KaroutchiRoger Karoutchi :

Les droits des parlementaires s’exercent naturellement en conférence des présidents, à qui la Constitution reconnaît désormais la possibilité de se prononcer sur l’opportunité de l’engagement de la procédure accélérée par le Gouvernement – article 45 de la Constitution – et sur le respect par l’étude d’impact accompagnant chaque projet de loi des prescriptions édictées par la loi organique – c’est l’article 39.

Mes chers collègues, pour réunir le Parlement en session extraordinaire, encore faut-il avoir un ordre du jour ; pour avoir un ordre du jour, faut-il avoir préparé des projets de loi ; et, pour avoir des projets de loi, faut-il avoir un programme viable et un agenda maîtrisé.

Le calendrier qui a été imposé au Sénat, madame la ministre, est contraire à tous les principes constitutionnels résultant de la réforme de 2008 ou même à ceux qui lui préexistaient.

La conférence des présidents de notre assemblée se réunissait, le 5 septembre dernier, pour inscrire un texte délibéré le matin même en conseil des ministres, et organiser nos travaux, alors même que le décret signé par le Président de la République convoquant la session extraordinaire était paru au Journal officiel le matin même de la conférence des présidents. Ce décret étant incomplet, il a été corrigé au Journal officiel le lendemain.

Lors de la réunion de la conférence des présidents, pas un sénateur n’avait en main le projet de loi et son étude d’impact, puisqu’il n’a été transmis qu’à seize heures passées. La procédure accélérée, qui était indispensable pour pouvoir inscrire le texte dès aujourd’hui, n’était toujours pas engagée. Elle ne le fut que vers dix-neuf heures.

Le Gouvernement nous impose d’examiner ce texte dès aujourd’hui, moins de six jours après son dépôt, alors qu’il concerne directement – Mme la ministre a raison de dire que c’est important – l’avenir de nos collectivités, dont le Sénat est le représentant constitutionnel.

En d’autres termes, s’agissant d’un texte essentiel pour le Sénat, nous n’aurons disposé que d’un délai de six jours entre le dépôt du texte et sa discussion.

La majorité sénatoriale décide apparemment de laisser faire, renonçant à ses prérogatives constitutionnelles.

Si le règlement du Sénat prévoit, dans son article 28 ter, un délai de deux semaines entre l’examen du texte en commission et son passage en séance, c’est bien pour garantir le respect de ces droits.

La majorité a, en outre, accepté de joindre au rapport de la commission des affaires économiques, l’examen d’une proposition de loi de Mme Borvo Cohen-Seat. Je ne mets pas en doute la qualité de ce texte, mais cela constitue à nos yeux l’inscription déguisée d’une proposition de loi qui ne figure pas dans le décret de convocation de la session extraordinaire. Là encore, en quoi a-t-on respecté les droits du Parlement ?

Madame la ministre, chers collègues de la majorité comme de l’opposition, si, dans le passé, il nous est arrivé de raboter les délais de deux ou trois jours, ce qui nous a valu d’être copieusement houspillés - l’ancien secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement que je suis peut en témoigner, de même que mes successeurs -, je n’ai jamais vu un texte de cette importance arriver devant une assemblée sans étude d’impact, sans analyse cohérente de la commission, sans travaux préalables, sans possibilité d’amender dans les temps.

On convoque subitement le Parlement : il doit débattre sur un texte, peu importe la façon dont il aura préparé la discussion. C’est la négation même du travail parlementaire !

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