Madame la ministre, je suis très sensible au fait que vous souhaitiez étudier de près le cas de ma commune. Cependant, je ne plaide pas seulement pour elle, car j’imagine que bien d’autres communes ayant également rempli leurs objectifs doivent rencontrer des problèmes similaires.
Qu’il me soit permis de citer une nouvelle fois quelques chiffres. En 2000, on m’a demandé de construire 860 logements sociaux et on m’a donné vingt ans pour le faire. À mi-parcours, j’ai rempli la moitié du contrat. Vous me demandez maintenant de réaliser 1 200 logements sociaux et vous me donnez douze ans pour les construire, soit une accélération du rythme par trois. Au cours des deux dernières périodes triennales, la production a été de 200 % ; il faudra maintenant qu’elle soit portée à 300 % pendant toutes les périodes triennales à venir jusqu’en 2025. Voilà le problème !
Je vous le répète donc : c’est impossible.
Vous me renvoyez au préfet, madame la ministre. Peut-être serez-vous ministre jusqu’en 2025 ? Il est plus vraisemblable que vous aurez des successeurs et que de nombreux préfets se succéderont en Seine-Saint-Denis jusqu’en 2025. Vous nous poussez dans les cordes en nous disant : arrangez-vous avec le préfet ! C’est ça qui ne va pas.
Par ailleurs, je souhaite insister sur un point qui n’a pas suffisamment été abordé.
Pour construire, il faut que les collectivités disposent des moyens financiers nécessaires à la réalisation des équipements publics. Or nous entrons dans une période difficile. Nous verrons bien en loi de finances à quelle sauce seront mangées les collectivités locales.
Je prendrai à nouveau l’exemple de mon département : en Seine-Saint-Denis, la situation financière est telle que le département ne donne plus aucune subvention aux communes pour l’investissement, ni en matière culturelle, ni en matière de petite enfance, ni en matière sportive.
La région d’Île-de-France, madame la ministre, vient de conditionner ses aides à l’investissement. Dans ces conditions, toute collectivité qui n’aura pas déjà au moins 30 % de logements sociaux ne sera plus aidée comme les autres. Les collectivités ne recevront rien du département, rien de la région – la région conditionne ses aides et fixe un seuil sans tenir compte des efforts réalisés –, et les dotations d’État baissent : et vous me demandez de construire 1 200 logements sociaux ! D’autant qu’il faudra également construire à peu près 1 200 logements privés pour faire de la mixité. Ma commune va devoir accroître sa population de 25 %, elle n’a pas d’argent pour réaliser les équipements publics et vous menacez de multiplier par cinq les prélèvements ! J’espère que ma démonstration est suffisamment forte. En tout état de cause, c’est la démonstration d’un élu de bonne foi.
Allonger la période jusqu’en 2037, comme le prévoyait l’amendement n° 173 rectifié, était peut-être trop important ; mais l’amendement n° 172 rectifié, en donnant six ans de plus, soit le même quantum de temps qu’en 2000, offrait une bonne solution de repli. Vous auriez pu l’accepter.