Tout au long de la discussion de ce projet de loi, nous avons apprécié, madame la ministre, votre volonté constructive.
Cependant, si nous partageons les préoccupations et les objectifs du Gouvernement, nous continuons de considérer que ce texte ne permettra pas de résoudre durablement les difficultés liées à la spéculation foncière.
En effet, les débats l’ont démontré, régler la question foncière est un préalable à l’élaboration d’une politique de construction. Plus précisément, sans intervention sur la structure même du marché foncier, l’action publique en la matière restera vaine. C’est d’ailleurs sur ce fondement, madame la ministre, que vous avez émis un avis favorable sur l’un de nos amendements, prévoyant la remise au Parlement d’un rapport sur l’élaboration d’un mécanisme permettant de réguler la valeur foncière et de définir des critères objectifs. Nous en prenons acte, et nous espérons être associés aux travaux du Gouvernement sur ce point.
À l’heure où l’on demande aux collectivités de fournir un effort supplémentaire dans le domaine de la construction, est-ce bien à celles-ci d’assumer les difficultés liées à l’acquisition foncière ? Nous ne le pensons pas. Selon nous, le dispositif de la proposition de loi que nous avons déposée le 30 juillet dernier constituait un mécanisme plus cohérent et pérenne.
Durant ces débats, vous avez opposé l’agence nationale foncière dont nous préconisons la création aux établissements publics fonciers, alors que leur vocation est différente : la première est propriétaire foncier et a pour domaine de compétence le logement, les seconds réalisent des opérations de portage et s’occupent plus généralement de l’ensemble des problématiques d’aménagement.
Aujourd’hui, les établissements publics fonciers jouent bien leur rôle au service de l’intérêt général ; il faut les conforter dans leurs missions tout en réfléchissant à la mise en place d’autres outils spécifiques pour le foncier affecté au logement.
Le dispositif de cession des terrains de l’État et des établissements publics avec décote s’apparente à une arme à un coup ; son application est limitée dans le temps et ne concerne que 930 parcelles, ce qui semble bien loin d’être à la hauteur de la demande sociale actuelle. Le présent texte ne constitue donc qu’une étape, et nous estimons nécessaire de revenir sur la question foncière par le biais d’un examen approfondi de notre proposition de création d’une agence nationale foncière.
Madame la ministre, vous nous avez assuré que la question du foncier serait au cœur du travail législatif des prochaines semaines. Dont acte ! Nous souhaitons être associés à la réflexion sur ce problème majeur.
Les collectivités, dont nous nous sommes faits les porte-parole, sont confrontées à des difficultés concrètes pour engager des programmes de construction de logements. Tout le monde en convient, construire plus et mieux est nécessaire. Mais comment, et avec quels crédits ? Demander des efforts supplémentaires en matière de construction à des collectivités déjà exsangues suppose que l’on facilite leur intervention dans ce domaine grâce à des dispositifs adaptés.
Madame la ministre, quel sera le rôle de la banque publique d’investissement dont la création est annoncée ? Accompagnera-t-elle les collectivités ? À quelle échéance ? Qu’en sera-t-il des crédits pour l’aide à la pierre dans la future loi de finances ? Nous attendons du Gouvernement qu’il prenne de véritables engagements sur ce point.
Nous approuvons le renforcement des objectifs et des sanctions de la loi SRU : il s’agit d’une avancée notable, d’un premier pas vers la reconnaissance de la nécessité de construire davantage de logements accessibles, c’est-à-dire de type PLAI, et vers une plus grande intransigeance envers les collectivités contrevenantes qui revendiquent cyniquement leur attitude. Nous regrettons que vous ayez refusé que les pouvoirs des préfets en la matière soient liés et que la prise d’un arrêté de carence soit une simple faculté.
Nous nous félicitons d’avoir tenu ferme quant à la défense de l’esprit de la loi SRU, non seulement en nous opposant aux velléités d’intégrer l’accession sociale à la propriété aux objectifs en matière de construction, mais également en affirmant que l’échelon de réalisation des objectifs doit rester celui de la commune, pour éviter que certains élus locaux ne se défaussent sur d’autres territoires au risque de susciter de véritables déséquilibres sociaux. Mon collègue Christian Favier a illustré ce point.
La construction de logements sociaux en cœur de ville n’est pas seulement une obligation morale et sociale ; c’est une exigence qui découle de notre détermination à lutter contre les fractures sociales et territoriales, ainsi que contre l’étalement urbain, qui défigure les campagnes. La ville de demain doit permettre la mixité des usages, en alliant développement économique, équipements publics et offre de logements accessibles. Assurer la mixité sociale est la condition d’un urbanisme réussi.
En conclusion, je souhaite réaffirmer, au côté d’acteurs du logement tels que le DAL ou la Fondation Abbé Pierre, la nécessité de redéfinir une politique publique nationale du logement.
Madame la ministre, nous vous rappelons solennellement l’exigence de renforcer les crédits alloués au logement. Mettre la rigueur en œuvre ne peut être un objectif politique. Cela constitue le meilleur moyen de ne pas se donner les moyens de garantir un véritable droit au logement.
Nous vous donnons acte que le présent projet de loi constitue un premier pas. C’est la raison pour laquelle nous le voterons.