Le Gouvernement se trouve dans une position quelque peu inconfortable puisque l'amendement de M. Tropeano vise à rétablir une modification adoptée par l'Assemblée nationale avec son accord. Je vais donc essayer de reprendre les données du problème.
D'une part, dans certaines zones très précisément et exclusivement délimitées, des jeunes qui ont fait l'effort de poursuivre des études jusqu'au baccalauréat, voire au-delà, rencontrent de très grandes difficultés à trouver un emploi ou une formation, parce qu'ils sont issus de ces zones défavorisées. Si nous leur offrons la possibilité d'obtenir un emploi d'avenir, ils deviendront des exemples et créeront un effet d'entraînement sur les autres jeunes concernés – selon le modèle du « grand frère qui a réussi ». On peut espérer renforcer ainsi la cohésion sociale dans les quartiers ou les zones rurales concernés. À titre personnel, cette idée ne me déplaît pas et le Gouvernement estime que cette possibilité reste ouverte dans le texte issu du travail de la commission.
D'autre part, M. le rapporteur nous a rappelé que les 150 000 emplois d'avenir doivent s'adresser prioritairement à ceux qui rencontrent les plus grandes difficultés, c'est-à-dire les jeunes qui n'ont aucune qualification ou un très faible niveau de qualification. Or le public que vise votre amendement, monsieur le sénateur, a déjà acquis un certain niveau de qualification.
Nous nous trouvons donc en présence de deux préoccupations contradictoires. J'ai dit durant tout ce débat – et je ne vais pas changer de position ! – qu'il est fondamental de faire un effort en faveur de ces 500 000 jeunes sans formation et sans emploi. En même temps, dans certaines zones difficiles, j'ai envie de voir ceux qui ont fait l'effort de se former obtenir leur « récompense », en espérant un effet d'entraînement sur ceux qui n'ont pas consenti cet effort jusqu'à présent et n'ont pas la possibilité d'atteindre un niveau de qualification suffisant. Tels sont les termes du débat.
M'adressant à ceux d'entre vous qui, comme M. le rapporteur, sont sensibles à l'idée de concentrer le dispositif des emplois d'avenir sur les publics les plus défavorisés, je peux prendre l'engagement suivant : si le texte adopté prévoit une possibilité d'ouverture aux titulaires d'une qualification plus élevée, le Gouvernement donnera des instructions extrêmement fermes aux préfets et aux comités de pilotage chargés d'appliquer la loi au niveau local, afin qu'ils retiennent des critères extrêmement restrictifs, pour ne pas défavoriser la plus grande part du public potentiel visé. Il leur incombera d'effectuer leur choix avec une subtilité extrême – mais les élus et les missions locales savent souvent très exactement à qui il convient de mettre le pied à l'étrier, afin de créer un effet porteur pour l'ensemble du quartier. Le Gouvernement donnera donc des directives très fermes pour que les exceptions, si elles devaient être possibles, soient extrêmement limitées.