Intervention de Jean-Jacques Lozach

Réunion du 25 septembre 2012 à 9h30
Création des emplois d'avenir — Article 2

Photo de Jean-Jacques LozachJean-Jacques Lozach :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'institution des emplois d'avenir en général, des emplois d'avenir professeur en particulier, restera non seulement un bel exemple de volontarisme politique, à un moment où la gravité de la crise économique et l'ampleur du chômage l'exigent, mais aussi l'expression marquante d'une vigoureuse volonté de progrès social, par et pour l'emploi.

Elle est l'illustration de la combinaison de deux priorités nationales : l'éducation, d'une part, l'emploi de la jeunesse, d'autre part. Il ne s'agira nullement d'emplois artificiels, car ils ont un objectif clair et concret : l'enseignement.

Elle rappelle les 320 000 emplois jeunes du gouvernement Jospin, mesure qui avait fait baisser très fortement le chômage des jeunes et contribué à établir un climat de confiance essentiel pour la reprise économique. Beaucoup, filles et garçons, ont pu se resocialiser en remplissant des fonctions au service de la collectivité. Ces emplois leur ont redonné le sens de l'utilité sociale, tout en étant ce marchepied facilitateur de leur entrée dans la vie professionnelle.

Même si, bien sûr, toute action s'inscrit dans la durée, les débuts d'un mandat présidentiel sont les moments où l'on pose les fondations et où s'engagent les réformes. Les emplois d'avenir y occupent une place essentielle.

Dans le cadre de ces 150 000 emplois d'avenir, la mise en place des emplois d'avenir professeur vise notamment à susciter de nouvelles vocations. Ils sont à relier, bien sûr, à la future loi d'orientation et de programmation sur la refondation de l'école, qui concrétisera l'engagement de recruter 60 000 enseignants sur cinq ans.

Le Gouvernement se donne les moyens d'agir. Il a la volonté de bâtir, pour des publics particuliers, des programmes situés à la charnière du système éducatif et de la formation professionnelle, et concernant des zones de solidarité prioritaires. Ne doit pas être sous-estimé l'effet de diffusion de l'espoir dans les milieux les plus démunis.

Avec l'article 2, est en jeu la rénovation de l'école, une école maltraitée au cours de ces cinq dernières années, avec l'application dogmatique de la RGPP et la suppression de près de 80 000 postes. La réforme de la mastérisation, dénoncée par la Cour des Comptes en 2010, a produit une accumulation de conséquences négatives : baisse de l'attrait des métiers de l'enseignement, mise à l'écart des étudiants issus des milieux les plus modestes, qualité de la formation en baisse.

Lorsqu'on sait que 44 % d'étudiants en licence sont boursiers, alors qu'ils ne sont que 33 % en master, on se rend compte que, sans doute, la précarité financière a obligé beaucoup de ces jeunes gens à stopper leurs études. C'est à ces personnes, souvent issues de milieux modestes et défavorisés, qu'il faut envoyer un signal fort.

L'article 2 du projet de loi propose de remettre en marche l'ascenseur social. Les emplois d'avenir professeur pourront être proposés par les établissements publics locaux d'enseignement, collèges et lycées, les établissements privés conventionnés, ainsi que les établissements d'enseignement et de formation professionnelle agricoles.

Priorité sera donnée aux étudiants effectuant leurs études dans une académie ou dans une discipline qui connaît des besoins de recrutement particuliers, et qui ont résidé ou effectué leurs études secondaires dans une zone urbaine sensible, une zone de revitalisation rurale, un département ou une collectivité d'outre-mer ou un établissement de l'éducation prioritaire.

Je me félicite du vote, par nos collègues à l'Assemblée nationale, d'un amendement qui a intégré les ZRR dans le dispositif. En effet, exclusions sociale et territoriale vont souvent de pair. À partir du 1er novembre 2012, les jeunes issus des zones concernées pourront d'abord accomplir des tâches péri-éducatives dans des établissements, puis, petit à petit, des activités qui les formeront à l'enseignement. Un tuteur les accompagnera. Le revenu qu'ils recevront viendra compléter leur bourse, ce qui leur permettra de se concentrer sur l'étude et la pratique du métier d'enseignant. L'étudiant sélectionné s'engagera à poursuivre sa formation supérieure et à se présenter aux concours de recrutement du premier ou du second degré.

Je note avec satisfaction que l'âge limite de vingt-cinq ans pour bénéficier du dispositif est porté à trente ans pour certaines personnes en situation de handicap. Je souhaiterais d'ailleurs que vous me précisiez, monsieur le ministre, si des étudiants ayant connu un cursus difficile à la suite d'une maladie grave pourront, eux aussi, bénéficier de cette dérogation. J'estime que serait justice eu égard aux efforts qu'ont dû accomplir ces jeunes gens et les épreuves qu'ils ont traversées.

En définitive, nous devons redonner à nos jeunes la fierté d'être enseignant et la vision d'une école de la République méritocratique et diverse. Il est regrettable de constater que ce sont majoritairement des personnes issues des classes moyennes et supérieures qui ont réussi les concours depuis la réforme de la mastérisation. Bien sûr, je ne remets pas en cause de leur capacité à s'occuper d'une classe, mais le fait est qu'il existe un écart de plus en plus important entre les origines sociales des enseignants et la composition de la société. Or la promotion sociale ne peut véritablement fonctionner que lorsqu'il y a adéquation entre la structure du corps enseignant et celle de la société française.

Nous en sommes ici à la première étape d'une réforme de grande ampleur. Nous devrons ensuite aller vers le rétablissement de la formation initiale, qui se fera autour des « écoles supérieures du professorat et de l'éducation ». Professionnalisation et progressivité de l'entrée dans le métier seront les deux principes à suivre.

À nos collègues de l'opposition, qui s'inquiètent de la dépense induite par ces 18 000 emplois d'avenir professeur d'ici à 2015, nous répondons simplement : cessez de voir l'éducation comme une dépense contraignante ! C'est bien au contraire un engagement fort en faveur de notre jeunesse et, partant, de l'avenir de la France.

Aussi, j'appelle tous mes collègues, par-delà les clivages partisans, à soutenir cette réforme, portée par un dispositif rapidement opérationnel.

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