Intervention de Éric Doligé

Réunion du 1er décembre 2010 à 10h30
Loi de finances pour 2011 — Outre-mer

Photo de Éric DoligéÉric Doligé, rapporteur spécial de la commission des finances :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je prends la suite de Marc Massion, qui vous a présenté le cadrage global du budget de la mission et de son premier programme.

J’en viens au second programme de la mission, intitulé « Conditions de vie outre-mer » et composé en réalité d’actions très disparates. Je me concentrerai sur les points les plus marquants.

Les crédits de ce programme diminuent assez fortement en 2011 : ils baissent ainsi de 6 % en autorisations d’engagement et de 10, 4 % en crédits de paiement. Deux raisons expliquent principalement cette baisse.

Tout d’abord, les crédits consacrés au fonds exceptionnel d’investissement, le FEI, créé par la LODEOM pour participer aux investissements des collectivités territoriales d’outre-mer, passent de 40 à 10 millions d’euros. Le Gouvernement justifie cette baisse par la sortie du plan de relance. Je relève toutefois que la création du FEI a précédé le plan de relance et qu’il était alors, dès sa création, doté de 40 millions d’euros.

Ensuite, la seconde raison qui explique la diminution des crédits est la fin des versements au titre de l’ex-fonds pour la reconversion de l’économie de Polynésie française, prévue par la convention du 25 juillet 1996 dans le cadre de l’arrêt des essais nucléaires. Cette fin était programmée pour 2011 et conduit à une baisse des crédits de 30 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 46 millions d’euros en crédits de paiement.

En matière de logement, les effets de la LODEOM ne se font pas encore sentir. Seuls 6 200 logements neufs ont été construits en 2009, pour des besoins estimés depuis fort longtemps à 45 000 logements par an.

Outre la crise économique, deux raisons expliquent ce retard. D’une part, les décrets d’application de la LODEOM pour le recentrage de la défiscalisation sur le logement social ne sont parus qu’au début de l’année 2010. Les opérateurs ont donc attendu la mise en place du nouveau dispositif, qui devrait monter en charge progressivement. D’autre part, la nouvelle possibilité de cumul de la défiscalisation et des crédits de la ligne budgétaire unique, ou LBU, pour le financement des opérations de logement nécessite un temps d’adaptation des procédures. Beaucoup d’informations remontent du terrain pour nous signaler des difficultés de mise en œuvre de la nouvelle réglementation issue de la LODEOM tant au niveau local qu’au niveau du ministère des finances.

Nous avons besoin d’être rassurés sur ce point, madame la ministre, et nous proposerons des amendements en la matière.

D’après les informations que vous nous avez transmises, les premiers chiffres disponibles pour 2010 indiquent un décollage par rapport à 2009. Espérons-le !

Le dernier élément de ce programme est la réforme du dispositif de continuité territoriale, qui regroupe 51, 6 millions d’euros de crédits. Cette réforme n’a pas encore pu entrer pleinement en vigueur, les décrets d’application de la LODEOM n’étant parus qu’il y a une dizaine de jours. Vous pourrez probablement, madame la ministre, nous donner des informations plus détaillées sur ce point.

Le nouveau fonds de continuité territoriale doit par ailleurs être géré par l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, l’ADOM, seul opérateur de la mission, dont le nom et les compétences ont été modifiés et dont les crédits vont quadrupler pour cela en 2011. Or nous avons très peu d’informations sur cette agence, dont la performance était jusqu’à aujourd’hui assez limitée. C’est pourquoi la commission a confié à la Cour des comptes une mission de contrôle sur l’ADOM, en application de l’article 58-2 de la loi organique relative aux lois de finances.

J’en viens aux articles rattachés.

L’article 77 réforme la dotation globale de développement économique, la DGDE, versée chaque année par l’État à la Polynésie française. Cette dotation, d’un montant fixe de 151 millions d’euros par an, fonctionne mal. Elle n’existe qu’en vertu d’une convention passée entre l’État et le territoire et, malgré cinq avenants en sept ans – presque autant que de changements de gouvernement durant cette période –, le contrôle de l’utilisation des fonds s’est révélé très difficile.

L’article 77 tend donc à une réforme bienvenue en créant, à la place de la DGDE, trois dotations distinctes, dont le montant total sera égal au montant actuel versé au territoire : tout d’abord, une dotation globale d’autonomie, attribuée à la collectivité de la Polynésie française pour financer son fonctionnement, sur le modèle de la dotation globale de financement, la DGF, qui évoluera d’ailleurs au même rythme que cette dernière ; ensuite, une dotation d’investissement versée directement par l’État aux communes polynésiennes – c’est là la nouveauté –, car, comme l’avaient relevé nos collègues Christian Cointat et Bernard Frimat, dans un rapport fait au nom de la commission des lois, le financement des communes par la collectivité polynésienne engendre actuellement effets pervers et clientélisme ; enfin, un concours financier, dont les modalités resteront fixées par une convention, servira uniquement à financer les investissements structurants de la Polynésie française.

Cette réforme me paraît aller dans le bon sens. Elle doit permettre de pérenniser l’effort de l’État envers la Polynésie, de l’inscrire dans la loi et non dans une convention sujette à interprétation, de distinguer les fonds versés pour le fonctionnement et pour l’investissement et, enfin, de remédier aux problèmes de financement des communes polynésiennes.

La commission des finances vous proposera toutefois d’adopter deux amendements qui précisent et stabilisent le dispositif présenté par le Gouvernement.

Quatre autres articles, sur lesquels la commission des finances ne propose pas de modification, ont été ajoutés à l’Assemblée nationale.

L’article 77 bis doit permettre à l’État de céder à titre gratuit des terrains de son domaine privé pour la réalisation d’opérations de logement ou d’aménagements publics. Je ne suis pas certain que ce dispositif, qui existe déjà en Guyane, soit à même de résoudre les problèmes de disponibilité du foncier que l’outre-mer rencontre mais il constitue toutefois un sérieux pas en avant.

L’article 77 ter doit permettre de faciliter la mise en œuvre du dispositif d’aide à la rénovation des hôtels que nous avons voté dans la LODEOM.

L’article 77 quater, quant à lui, met en œuvre un plan d’apurement des dettes sociales des entreprises hôtelières dans les Antilles. La commission des finances a validé ce dispositif, mais souhaite toutefois que ne soit pas multiplié ce type d’apurements et que le paiement des cotisations sociales par les entreprises d’outre-mer reste le droit commun.

Enfin, l’article 77 quinquies doit permettre le déploiement en outre-mer de la télévision numérique terrestre, la TNT, tout en préservant la diversité culturelle des petites chaînes de télévision.

Sous le bénéfice de ces diverses observations et des amendements qu’elle vous présentera, la commission des finances vous propose d’adopter les crédits de la mission « Outre-mer » ainsi que les cinq articles rattachés à cette mission.

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