Séance en hémicycle du 1er décembre 2010 à 10h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • LODEOM
  • défiscalisation
  • logement
  • l’outre-mer
  • outre-mer

La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010, relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, M. le Premier ministre, par lettre en date du 30 novembre 2010, a demandé au président du Sénat de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente en matière de libertés publiques, sur le projet de nomination par M. le Président de la République de M. Éric Molinié à la présidence de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité.

Cette demande d’avis a été transmise à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le Premier ministre a transmis au Sénat, en application de l’article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, l’avenant n° 1 à la convention « santé et biotechnologies » publiée au Journal officiel le 20 juillet 2010.

Acte est donné du dépôt de ce document.

Il a été transmis à la commission des finances ainsi qu’à la commission des affaires sociales et à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire. Il est disponible au bureau de la distribution.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le mardi 30 novembre, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité (2010-96 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2011, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 110 rectifié, rapport n° 111).

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Outre-mer » (et articles 77 à 77 quinquies).

La parole est à M. Marc Massion, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre présentation des crédits de la mission « Outre-mer » pour 2011 s’articule en deux parties.

Tout d’abord, je vous exposerai le cadrage global du budget de la mission et son premier programme. Puis, Éric Doligé vous présentera de manière plus détaillée l’évolution des crédits du second programme et, rapidement, les articles rattachés à la mission.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je souhaiterais faire un point sur l’état d’application de la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, votée le 27 mai 2009.

Si la grande majorité des décrets d’application sont aujourd’hui parus, dix-huit mois après l’adoption de la LODEOM, trois mesures restent toutefois encore inapplicables, faute de décrets d’application : l’aide au fret pour les entreprises, le groupement d’intérêt public censé régler le problème de l’indivision et le dispositif de transparence des prix pratiqués par les transporteurs aériens. Outre ces mesures, de nombreux décrets d’application ne sont parus que dans le courant de l’année 2010, ce qui explique que les dispositifs concernés ne produisent pas encore leur plein effet.

Venons-en au projet de budget pour 2011. Il constitue une rupture par rapport aux budgets des trois années précédentes.

En effet, pour la première fois depuis la stabilisation de sa maquette, en 2008, la mission « Outre-mer » voit ses crédits diminuer dans le projet de loi de finances pour 2011 par rapport aux crédits votés dans la loi de finances initiale pour 2010. La baisse reste toutefois limitée puisqu’elle s’élève à 0, 5 % en autorisations d’engagement et à 2, 3 % en crédits de paiement. Cette contraction des dotations porte exclusivement sur les crédits du programme Conditions de vie outre-mer et sera détaillée par Éric Doligé.

En dépit de ce constat, le sort de la mission « Outre-mer » reste enviable au sein du budget général de l’État. En effet, entre 2008 et 2011, le montant des autorisations d’engagement de la mission aura globalement augmenté de 22, 9 % et celui des crédits de paiement de 15 %.

Une rupture peut également être relevée en matière de dépenses fiscales rattachées à la mission « Outre-mer ». En effet, depuis 2008, le montant des niches fiscales rattachées à la mission n’a cessé de progresser. À cet égard, la LODEOM a conduit à une augmentation globale de ce montant, puisque les niches créées ont coûté légèrement plus que les niches supprimées ou réduites.

Les mesures que nous avons votées la semaine dernière dans la première partie du projet de loi de finances pour 2011 et celles que nous examinerons la semaine prochaine dans sa seconde partie devraient conduire, pour la première fois, à la diminution de ces niches. Celle-ci ne pourra être constatée qu’en 2012 puisque la réduction des niches fiscales portera sur les revenus de l’année 2011.

En 2011, la dépense fiscale outre-mer continue donc d’augmenter, quoique à un rythme ralenti. Elle progressera de 1, 9 % entre 2010 et 2011 pour s’établir à 3, 24 milliards d’euros.

Venons-en au premier des deux programmes de la mission, consacré à l’emploi outre-mer. Deux éléments majeurs se dégagent de son analyse.

Premièrement, comme d’habitude, les crédits consacrés au remboursement à la sécurité sociale des exonérations de charges spécifiques à l’outre-mer sont sous-budgétisés. Il devrait manquer, d’après les besoins identifiés par les organismes de sécurité sociale, 63 millions d’euros en 2011. Il est donc à craindre, comme c’est arrivé en 2007, en 2008 et en 2009, que le Gouvernement ne soit amené à ouvrir, en cours de gestion ou par loi de finances rectificative, les crédits nécessaires.

La commission des finances vous présentera donc un amendement pour remédier partiellement à cette sous-budgétisation. Cet amendement tend à transférer les crédits consacrés à l’agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna vers les exonérations de charges sociales.

Je vous rassure, mes chers collègues, et je m’adresse notamment à M. le sénateur de Wallis-et-Futuna : l’objectif est non pas du tout de remettre en cause cet établissement, mais de soulever le problème de sa gestion par le ministère de l’outre-mer, lequel n’est pas en mesure de l’assurer de manière satisfaisante. Il nous semble que cette gestion devrait être assumée par le ministère en charge de la santé, mais je développerai ce point lors de la présentation de l’amendement.

Deuxièmement, concernant le programme Emploi outre-mer, on constate que, si les crédits augmentent, c’est en raison de la montée en puissance du service militaire adapté, le SMA. Ce dispositif d’intégration des jeunes ultramarins non diplômés, à travers une formation citoyenne, militaire et professionnelle, a fait ses preuves par le passé, de sorte que le Président de la République a annoncé en 2009 le doublement du nombre de jeunes bénéficiaires. Nous avions formulé des inquiétudes sur ce point en constatant que le budget consacré au SMA ne connaissait pas, parallèlement, un doublement.

Le projet de loi de finances pour 2011 est de nature à apaiser nos inquiétudes.

D’une part, les crédits consacrés au SMA augmentent fortement : ils progressent ainsi de 40, 5 % en autorisations d’engagement et de 37, 1 % en crédits de paiement, pour s’élever à 201 millions d’euros en autorisations d’engagement et à 181 millions d’euros en crédits de paiement.

D’autre part, nous savons désormais que les nouveaux publics du SMA seront non plus seulement des jeunes non diplômés, mais aussi des personnes, parfois diplômées, en situation de chômage de longue durée. Elles recevront des formations d’une durée plus courte que les actuels volontaires du SMA, ce qui permet de doubler le nombre de bénéficiaires du dispositif sans doubler les moyens qui lui sont affectés. Il faudra toutefois, dans nos contrôles à venir, vérifier que le dispositif du nouveau SMA est aussi efficace que l’ancien.

Je cède maintenant la parole à Éric Doligé pour présenter au Sénat les autres orientations de ce projet de budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Éric Doligé, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je prends la suite de Marc Massion, qui vous a présenté le cadrage global du budget de la mission et de son premier programme.

J’en viens au second programme de la mission, intitulé « Conditions de vie outre-mer » et composé en réalité d’actions très disparates. Je me concentrerai sur les points les plus marquants.

Les crédits de ce programme diminuent assez fortement en 2011 : ils baissent ainsi de 6 % en autorisations d’engagement et de 10, 4 % en crédits de paiement. Deux raisons expliquent principalement cette baisse.

Tout d’abord, les crédits consacrés au fonds exceptionnel d’investissement, le FEI, créé par la LODEOM pour participer aux investissements des collectivités territoriales d’outre-mer, passent de 40 à 10 millions d’euros. Le Gouvernement justifie cette baisse par la sortie du plan de relance. Je relève toutefois que la création du FEI a précédé le plan de relance et qu’il était alors, dès sa création, doté de 40 millions d’euros.

Ensuite, la seconde raison qui explique la diminution des crédits est la fin des versements au titre de l’ex-fonds pour la reconversion de l’économie de Polynésie française, prévue par la convention du 25 juillet 1996 dans le cadre de l’arrêt des essais nucléaires. Cette fin était programmée pour 2011 et conduit à une baisse des crédits de 30 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 46 millions d’euros en crédits de paiement.

En matière de logement, les effets de la LODEOM ne se font pas encore sentir. Seuls 6 200 logements neufs ont été construits en 2009, pour des besoins estimés depuis fort longtemps à 45 000 logements par an.

Outre la crise économique, deux raisons expliquent ce retard. D’une part, les décrets d’application de la LODEOM pour le recentrage de la défiscalisation sur le logement social ne sont parus qu’au début de l’année 2010. Les opérateurs ont donc attendu la mise en place du nouveau dispositif, qui devrait monter en charge progressivement. D’autre part, la nouvelle possibilité de cumul de la défiscalisation et des crédits de la ligne budgétaire unique, ou LBU, pour le financement des opérations de logement nécessite un temps d’adaptation des procédures. Beaucoup d’informations remontent du terrain pour nous signaler des difficultés de mise en œuvre de la nouvelle réglementation issue de la LODEOM tant au niveau local qu’au niveau du ministère des finances.

Nous avons besoin d’être rassurés sur ce point, madame la ministre, et nous proposerons des amendements en la matière.

D’après les informations que vous nous avez transmises, les premiers chiffres disponibles pour 2010 indiquent un décollage par rapport à 2009. Espérons-le !

Le dernier élément de ce programme est la réforme du dispositif de continuité territoriale, qui regroupe 51, 6 millions d’euros de crédits. Cette réforme n’a pas encore pu entrer pleinement en vigueur, les décrets d’application de la LODEOM n’étant parus qu’il y a une dizaine de jours. Vous pourrez probablement, madame la ministre, nous donner des informations plus détaillées sur ce point.

Le nouveau fonds de continuité territoriale doit par ailleurs être géré par l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, l’ADOM, seul opérateur de la mission, dont le nom et les compétences ont été modifiés et dont les crédits vont quadrupler pour cela en 2011. Or nous avons très peu d’informations sur cette agence, dont la performance était jusqu’à aujourd’hui assez limitée. C’est pourquoi la commission a confié à la Cour des comptes une mission de contrôle sur l’ADOM, en application de l’article 58-2 de la loi organique relative aux lois de finances.

J’en viens aux articles rattachés.

L’article 77 réforme la dotation globale de développement économique, la DGDE, versée chaque année par l’État à la Polynésie française. Cette dotation, d’un montant fixe de 151 millions d’euros par an, fonctionne mal. Elle n’existe qu’en vertu d’une convention passée entre l’État et le territoire et, malgré cinq avenants en sept ans – presque autant que de changements de gouvernement durant cette période –, le contrôle de l’utilisation des fonds s’est révélé très difficile.

L’article 77 tend donc à une réforme bienvenue en créant, à la place de la DGDE, trois dotations distinctes, dont le montant total sera égal au montant actuel versé au territoire : tout d’abord, une dotation globale d’autonomie, attribuée à la collectivité de la Polynésie française pour financer son fonctionnement, sur le modèle de la dotation globale de financement, la DGF, qui évoluera d’ailleurs au même rythme que cette dernière ; ensuite, une dotation d’investissement versée directement par l’État aux communes polynésiennes – c’est là la nouveauté –, car, comme l’avaient relevé nos collègues Christian Cointat et Bernard Frimat, dans un rapport fait au nom de la commission des lois, le financement des communes par la collectivité polynésienne engendre actuellement effets pervers et clientélisme ; enfin, un concours financier, dont les modalités resteront fixées par une convention, servira uniquement à financer les investissements structurants de la Polynésie française.

Cette réforme me paraît aller dans le bon sens. Elle doit permettre de pérenniser l’effort de l’État envers la Polynésie, de l’inscrire dans la loi et non dans une convention sujette à interprétation, de distinguer les fonds versés pour le fonctionnement et pour l’investissement et, enfin, de remédier aux problèmes de financement des communes polynésiennes.

La commission des finances vous proposera toutefois d’adopter deux amendements qui précisent et stabilisent le dispositif présenté par le Gouvernement.

Quatre autres articles, sur lesquels la commission des finances ne propose pas de modification, ont été ajoutés à l’Assemblée nationale.

L’article 77 bis doit permettre à l’État de céder à titre gratuit des terrains de son domaine privé pour la réalisation d’opérations de logement ou d’aménagements publics. Je ne suis pas certain que ce dispositif, qui existe déjà en Guyane, soit à même de résoudre les problèmes de disponibilité du foncier que l’outre-mer rencontre mais il constitue toutefois un sérieux pas en avant.

L’article 77 ter doit permettre de faciliter la mise en œuvre du dispositif d’aide à la rénovation des hôtels que nous avons voté dans la LODEOM.

L’article 77 quater, quant à lui, met en œuvre un plan d’apurement des dettes sociales des entreprises hôtelières dans les Antilles. La commission des finances a validé ce dispositif, mais souhaite toutefois que ne soit pas multiplié ce type d’apurements et que le paiement des cotisations sociales par les entreprises d’outre-mer reste le droit commun.

Enfin, l’article 77 quinquies doit permettre le déploiement en outre-mer de la télévision numérique terrestre, la TNT, tout en préservant la diversité culturelle des petites chaînes de télévision.

Sous le bénéfice de ces diverses observations et des amendements qu’elle vous présentera, la commission des finances vous propose d’adopter les crédits de la mission « Outre-mer » ainsi que les cinq articles rattachés à cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Anne-Marie Payet, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Payet

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits de la mission « Outre-mer » pour 2011 ont été excellemment présentés par Eric Doligé et Marc Massion, rapporteurs spéciaux, et je les en remercie. La commission des affaires sociales a donné un avis favorable à leur adoption. Je n’évoquerai aujourd’hui que quelques-uns des sujets qui la concernent plus directement.

La santé est le premier sujet sur lequel je m’attarderai. Le Gouvernement a annoncé, il y a deux ans et demi, un plan santé pour l’outre-mer, et le comité interministériel de l’outre-mer, ou CIOM, a parlé de « faire de la santé une activité de pointe outre-mer ». Certes, le déploiement des études médicales est en cours et le numerus clausus a été très légèrement augmenté, mais les actions mettent du temps à se concrétiser sur le terrain.

Ainsi, que l’on prenne l’exemple de la télémédecine, des réseaux de téléenseignement et de visioconférences, de la mise aux normes sismiques des hôpitaux, de la révision des coefficients géographiques et de la valorisation des surcoûts relatifs aux activités déséquilibrées, ou encore de la lutte contre la drépanocytose, on nous indique soit qu’ils seront instruits ultérieurement, soit, dans le meilleur des cas, qu’ils feront l’objet d’un état des lieux, d’un bilan général ou d’études.

Sur ce point, justement, 20 000 euros, ce qui est dérisoire, étaient prévus en 2010 pour financer une étude afin de caractériser les décès infantiles des départements d’outre-mer et les comparer à ceux de la métropole. Est-il besoin de rappeler que les taux de mortalité infantile et maternelle sont dramatiquement élevés outre-mer ? En est-on vraiment encore à devoir « caractériser ces décès » ?

Plus largement, la première tranche du plan Hôpital 2012 n’est destinée qu’à hauteur de 2, 2 % à l’outre-mer, ce qui me semble loin d’être suffisant au regard des besoins.

Ma première question, madame la ministre, est donc la suivante : quelles actions concrètes seront menées en 2011 sur le terrain pour améliorer la santé publique outre-mer ? Nous examinerons tout à l’heure un amendement sur la vente de tabac dans les départements d’outre-mer, qui va, me semble-t-il, en ce sens.

Le logement est le second sujet que je souhaite aborder. Je ne reviendrai pas sur le diagnostic et sur l’état des lieux que tout le monde connaît et partage. Quelques éléments sont certes positifs : le décret sur la surcharge foncière a été adopté récemment et les crédits destinés au Fonds régional d’aménagement foncier urbain, le FRAFU, sont en nette augmentation en 2011.

Toutefois, deux problèmes majeurs subsistent. Tout d’abord, les engagements de la LBU sont stables en 2011 mais les crédits de paiement sont en baisse de 10 %. Le Gouvernement assure que la programmation sera respectée. On peut s’en étonner, alors que les crédits pour 2010 sont presque entièrement consommés. Comment, dans ces conditions, résoudre la crise aiguë du logement avec des crédits en baisse ?

Le nouveau dispositif de défiscalisation du logement social pose encore de nombreux problèmes d’application concrète, qui risquent de retarder les opérations, que ce soit en termes d’agrément, de procédure ou de cumul avec la LBU. Le rapport de nos collègues députés Gaël Yanno et Claude Bartolone du 29 septembre 2010 sur l’application de la LODEOM est très éclairant à cet égard.

La commission des affaires sociales a déposé plusieurs amendements pour fluidifier les procédures. Ils constituent un premier pas, un signal, et j’espère qu’ils pourront être largement adoptés.

Nos territoires connaissent des contraintes fortes, liées au climat, à la géographie, parfois à l’histoire, si bien que l’action publique est déterminante pour permettre à tous de se loger.

Madame la ministre, vous avez rencontré, le 12 novembre 2010, des représentants des bailleurs sociaux. J’ai également auditionné certains d’entre eux : ils sont très inquiets. Pouvez-vous nous indiquer les conclusions que vous avez tirées de cette réunion et les mesures que le Gouvernement compte adopter pour améliorer la situation ?

Avant de conclure, je dirai quelques mots sur le revenu de solidarité active, le RSA : il va enfin entrer en vigueur le 1er janvier 2011 et doit coexister, durant une certaine période, avec le revenu supplémentaire temporaire d’activité, le RSTA, qui avait été créé à la suite de la crise sociale du printemps 2009.

Madame la ministre, il ne me semble pas que le décret prolongeant le RSTA ait été publié : quand comptez-vous le faire et quelles dispositions contiendra-t-il exactement ? Il serait tout de même préférable que les bénéficiaires, qui devront choisir de manière irréversible entre les deux prestations, d’une part, et les gestionnaires, caisse d’allocations familiales et caisse générale de sécurité sociale, d’autre part, soient au courant suffisamment longtemps à l’avance.

En conclusion, madame la ministre, je vous poserai une dernière question. La répartition des crédits du fonds exceptionnel d’investissement, du plan Hôpital 2012, de l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH, ou encore de l’ancienne dotation de continuité territoriale ne tient pas compte de l’importance démographique de chacun des départements d’outre-mer. Comment expliquer que la Réunion, avec ses 800 000 mille habitants, reçoivent parfois moins, voire nettement moins, que d’autres départements ?

L’outre-mer a besoin de politiques stables et durables. D’importantes annonces ont été faites par le CIOM, voilà maintenant un an. J’espère que l’année 2011 permettra d’avancer avec courage sur la voie des réformes.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Lise

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en réponse à la grave crise qu’ont connue nos outre-mer au début de l’année 2009, le Gouvernement a fait des annonces nombreuses et importantes, dans le cadre de la LODEOM et du CIOM. Ces annonces ont suscité des espoirs importants dans nos outre-mer, cela a été dit. Elles tardent cependant vraiment à porter les effets attendus à cause des retards ou de l’absence de mise en œuvre effective des mesures correspondantes.

Au vu de l’évolution non seulement des crédits de la mission outre-mer, mais aussi de l’effort budgétaire global prévu pour 2011, je ne peux que faire part d’une certaine déception.

La déception est encore plus grande quand on analyse les autres mesures du projet de loi de finances qui concernent l’outre-mer, notamment l’article 13 que la Haute Assemblée a adopté la semaine dernière et qui supprime le dispositif de défiscalisation dans le secteur du photovoltaïque, qui est pourtant l’un des secteurs les plus prometteurs pour le développement endogène de nos outre-mer.

Au lieu du développement endogène, tant évoqué lors des débats sur la LODEOM, j’ai le sentiment, madame la ministre, que la logique actuelle est celle d’un « mal-développement » endogène.

Je ne m’attarderai pas sur les crédits de la mission « Outre-mer » inscrits au projet de loi de finances pour 2011, dont l’évolution a déjà été présentée par nos rapporteurs spéciaux. Je relève cependant qu’ils diminuent de 0, 5 % en autorisations d’engagement et de 2, 3 % en crédits de paiement. Il s’agit de la première diminution réellement affichée depuis trois ans.

Les outre-mer participent donc à la politique de rigueur. Cela n’est pas anormal, j’en conviens. Je considère cependant que, en toute équité, l’effort qui leur est demandé devrait davantage tenir compte de leur « mal-développement » et de la situation économique et sociale très préoccupante qui est la leur.

Je souhaite évoquer plus longuement une problématique essentielle dans nos outre-mer : le logement. Près de 60 000 demandes de logements sociaux sont aujourd’hui en attente dans les quatre départements d’outre-mer. Rapporté à la population de l’hexagone, ce chiffre correspond à près de deux millions de demandes en attente ! C’est dire l’ampleur de l’enjeu !

Le CIOM avait annoncé que le niveau de la LBU serait maintenu. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, il est bien conservé en autorisations d’engagement, ce dont je me réjouis. Les crédits de paiement sont, en revanche, en recul de près de 10 %. En matière de logement social, ils reculent même de près de 34 %. Cette diminution serait justifiée par la sous-consommation chronique des crédits de la LBU, nous dit-on. Je m’étonne de cet argument. On constate en effet, dans le département de la Martinique, que les crédits prévus en 2010 sont déjà consommés à hauteur de 99 % en ce moment !

Par ailleurs, le dispositif de défiscalisation dans le logement social mis en place par la LODEOM n’a pas fait, pour l’heure, la preuve de son efficacité. À ce jour, il n’a permis la construction effective d’aucun logement social. Seuls 829 logements ont été agréés au titre de ce dispositif entre la fin de l’année 2009 et le 30 septembre 2010. Ce bilan est notamment lié à des difficultés d’application. D’une part, les modalités d’instruction des dossiers diffèrent entre LBU et défiscalisation. D’autre part, et surtout, les modalités de cumul entre LBU et défiscalisation posent aujourd’hui problème. Cela a été dit.

Alors que la possibilité de cumul avait été clairement évoquée par votre prédécesseur lors des débats sur la LODEOM, vous avez publié, madame la ministre, une circulaire le 1er juin 2010 qui s’éloigne de l’esprit de la loi. Je ne peux que le regretter car cela freine la réalisation de certaines opérations. Je précise que je ne souhaite pas pour autant que le cumul prenne un caractère systématique.

Je sais que vous avez reçu le 12 novembre 2010 les bailleurs sociaux. À mon tour, je vous demande quelles initiatives vous comptez prendre au cours des prochaines semaines afin que ce dispositif se révèle réellement efficace. Plus généralement, quelles mesures prendrez-vous dans les prochains mois afin d’opérer une réelle relance de la politique du logement social pour répondre à l’ampleur des besoins, tant sur le plan social que sur le plan économique ?

En conclusion, la commission de l’économie a, malgré mes réserves, émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer » pour 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Christian Cointat, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cointat

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Albert Einstein nous a appris les charmes de la relativité ; aussi devons-nous être conscients que, dans un monde de disette financière où le budget ne cesse de se contracter par phases successives, tel un cycle sans fin, le statu quo peut apparaître comme une forme de progression. Tel est le cas, du moins pour l’essentiel, du budget destiné à l’outre-mer, tant au niveau de la mission « Outre-mer» qu’à l’échelon global. Cela souligne une nouvelle fois la volonté manifeste de l’État d’assurer un effort soutenu pour l’ensemble des collectivités ultramarines. Nous pouvons donc manifester une certaine satisfaction ou plutôt, pour être plus exact, une satisfaction relative !

La notion d’« économie », dont on nous rebat en permanence les oreilles au point de perdre de vue la finalité du budget – il s’agit de financer du mieux possible des dépenses jugées utiles qui sont l’expression de choix politiques – comporte des effets pervers, masquant souvent, par une lecture immédiate, les résultats à moyen et à long terme.

Pour « gagner » quelques sous, entend-on dire, alors qu’il s’agit non pas de gain, mais d’un renoncement à agir, on peut, par de malencontreux coups de rabot financiers, se priver de l’atteinte des objectifs retenus.

Alphonse Allais disait, sous forme de boutade : « II faut demander plus à l’impôt et moins au contribuable » ! En réalité, ce n’est pas une boutade. Il faut sortir du carcan dogmatique qui nous étouffe et empêche une utilisation optimale des crédits. Alors, on pourra dépenser moins tout en agissant plus.

Je n’entrerai pas dans le détail des crédits prévus pour la mission « Outre-mer » qui ont été excellemment présentés par les rapporteurs spéciaux. Je concentrerai simplement mon intervention sur deux points auxquels la commission des lois est attachée, à savoir les instruments de la dépense et la gestion de celle-ci.

En effet, il ne suffit pas de disposer des moyens de l’action, encore faut-il les utiliser au mieux des besoins et de la façon la plus adaptée à ces nécessités. Or, dans ces domaines, il semble que des progrès substantiels pourraient être réalisés.

Le premier point que j’aborderai concerne les indicateurs de performance. Ces derniers se révèlent rudimentaires ou parcellaires au point de ne pouvoir remplir pleinement leur fonction d’information et d’évaluation.

Compte tenu de l’ampleur de l’effort budgétaire et fiscal déployé, en particulier en matière de défiscalisation et d’allégement des charges sociales, il serait opportun que l’État s’assure de manière beaucoup plus approfondie de l’efficacité économique et sociale des différents instruments financiers utilisés, comme de l’emploi des crédits attribués. Or des interrogations subsistent à ce sujet.

Certes, une évaluation est présentée, mais elle n’est ni suffisante ni très significative à cet égard et ne permet pas au Parlement de mesurer clairement le rendement global et relatif des choix effectués, ni de connaître leur impact réel par rapport aux objectifs poursuivis.

En définitive, cette question est liée à celle de la réorganisation de l’administration centrale chargée de l’outre-mer, qui constitue le deuxième point que je souhaite soulever dans cette brève intervention.

Interministérielle par nature, la politique de l’État en faveur des populations et des collectivités d’outre-mer requiert impérativement une forte coordination et une autorité de pilotage capable d’exercer cette dernière et de veiller à l’intégration correcte de la dimension ultramarine dans toutes les politiques publiques et par tous les départements ministériels. Alors que, trop souvent, l’outre-mer est encore insuffisamment pris en compte, tout semble démontrer que le ministère chargé de l’outre-mer et la délégation générale à l’outre-mer ne disposent pas réellement de cette autorité au sein du Gouvernement pour jouer pleinement ce rôle de coordination et pouvoir peser suffisamment dans les arbitrages interministériels.

Or l’outre-mer a besoin d’une administration centrale solide, qui puisse l’accompagner vers son avenir, une administration qui dispose de véritables capacités d’évaluation et de prospective, une administration qui soit à même d’effectuer l’analyse, évoquée précédemment, de l’efficacité des dispositifs spécifiques en faveur de l’outre-mer.

La réforme déjà effectuée de la délégation générale à l’outre-mer n’est pas satisfaisante et n’a pas atteint ses objectifs. Rattachée au ministère de l’intérieur, cette délégation n’a pas l’autorité suffisante pour assurer sa mission de coordination interministérielle. De plus, ses effectifs ne paraissent pas adaptés aux missions qui devraient être les siennes en termes de conception, de pilotage, d’évaluation et de coordination. Il faut aller plus loin. Je veux en cet instant rendre hommage à notre collègue Marc Massion, dont le rapport traite excellemment de cette question.

La commission des lois plaide donc pour le rattachement direct au Premier ministre de l’administration centrale de l’outre-mer, sous forme d’une délégation interministérielle, d’une mission interministérielle, ou mieux encore d’un secrétariat général à l’outre-mer, à l’instar du secrétariat général aux affaires européennes.

Cette remise à niveau est particulièrement urgente pour accompagner les profondes évolutions en cours outre-mer.

On ne le dira jamais assez, l’outre-mer est une chance pour la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cointat

Nous ne devons jamais l’oublier, et encore moins quand nos compatriotes ultramarins ont besoin de nous. Et ils ont besoin de nous !

Aussi, sous réserve de ces observations, la commission des lois donne un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Richard Tuheiava applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle également que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt-cinq minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Jean-Etienne Antoinette.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Étienne Antoinette

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, lorsque je considère le budget qui nous est soumis aujourd’hui, d’aussi loin que ma mémoire politique se le rappelle, il me vient un constat navrant et pathétique, que tous les apparents rebondissements de l’histoire n’arrivent plus à masquer : au fond, pour l’outre-mer, rien de nouveau sous le soleil !

Cette période de l’année ressemble à un long feuilleton télévisé, dont on pourrait rater quatre ou cinq épisodes sans rien perdre du fil de l’intrigue. Rien ne change, en vérité.

Toujours à la même période, en présence pratiquement des mêmes collègues, on reprend les chiffres, et toujours on retrouve les perpétuelles oppositions entre le discours insistant sur le coût de l’outre-mer pour la France, et un autre, peut-être naïf, qui présente ces territoires comme « une chance pour la République ».

Que sommes-nous exactement ? Que sont vraiment les outre-mer pour la France ? Seraient-ils juste un thème de trop dans la liste des sujets que doit traiter le Parlement, et qui agace les rapporteurs de la commission des finances ? Les outre-mer seraient-ils simplement le prix à payer par la France – est-il si élevé ? – pour pouvoir se vanter d’être la deuxième puissance maritime du monde ou de posséder la plus belle réserve de biodiversité des pays d’Europe, ou encore le port spatial de l’Europe ?

À la fin de l’année 2008, j’ai suivi le débat sur le budget de l’outre-mer, déjà très contesté par les parlementaires ultramarins, lors de l’élaboration de la loi de finances de 2009. Et j’ai suivi la crise sociale de 2009, qui avait déjà commencé en Guyane à la fin de l’année précédente. Puis j’ai suivi le vote en urgence de la LODEOM, les états généraux de l’outre-mer et enfin le comité interministériel de l’outre-mer.

J’ai entendu discours, annonces, engagements, espoirs, et j’ai vu la réaffirmation, au sein de la population guyanaise, du contrat qui lie la République et ses territoires périphériques.

Au mois de janvier dernier, l’espoir s’est même traduit par un vote des Martiniquais et des Guyanais pour un maintien de leurs départements dans la République sous le régime en vigueur de l’identité législative !

Aujourd’hui, je ne suis pas le plus déçu. Un dicton cynique ne dit-il pas : « Les promesses n’engagent que ceux qui y croient » ? La vérité est bien là : les lois de finances aiment bien dévoyer, sinon défaire, presque aussitôt ce que les lois pour l’outre-mer, telles la LOOM, la loi d’orientation pour l’outre-mer, la LOPOM, la loi de programme pour l’outre-mer, la LODEOM, la loi pour le développement économique des outre-mer, essaient péniblement de faire.

Aujourd’hui, on atteint le fond du puits. En effet, pire que tout, ce gouvernement qui n’écoute pas la rue – et ce n’est pas moi qui le dis ! – n’écoute bien que la rue dès lors qu’il s’agit de l’outre-mer ! Du moins – n’exagérons rien ! –seulement quand ses cris menacent des intérêts politiques et commerciaux notoirement inéquitables, et qui lui sont particulièrement liés.

Et, dans ces cas-là, on promet tout ce qui peut calmer la foule. On peut même se dépêcher d’inscrire dans une loi les dispositions adéquates. Mais une loi, n’est-ce pas un acte majeur, dévoyé dès lors en une recette miracle ?

Ne serait-il pas aussi tout à fait inconsidéré de diminuer les recettes de l’État, le temps de publier les décrets, en particulier si l’on se donne beaucoup de mal à laisser un peu traîner les choses... La prochaine loi de finances sera venue, la rue se sera calmée, et l’on pourra reprendre tranquillement ce que l’on avait donné, et même plus !

Lorsque j’analyse le projet de loi de finances pour 2011, en particulier le budget de la mission « Outre-mer », je découvre le scénario d’un mauvais feuilleton, indigne d’un État démocratique. J’observe le reniement par l’État de ses valeurs, le déni de ses propres engagements et le mépris pour des citoyens déjà vulnérables, qui sont abusés.

Alors non, aujourd’hui, je ne veux pas entrer dans la bataille des chiffres du budget pour 2011. Nous le savons tous, il diminue. Il doit nous renvoyer au bilan de la LODEOM, et donc à un nouvel exemple des inconséquences de ce gouvernement.

Aujourd’hui, je ne veux pas refaire le procès d’une défiscalisation qui a été privilégiée au détriment de l’aide budgétaire à une structuration véritable des filières de développement économique, et qui dévoile toutes ses limites.

Aujourd’hui, je ne veux pas m’appesantir sur la manière dont le Gouvernement, dans les faits, ne prend aucun compte ni des actuelles conditions de logement des ultramarins sur leur propre territoire ni des problèmes de la formation, de la jeunesse, de l’emploi, du développement économique, ni m’attarder sur les 15 000 foyers qui, en Guyane, vivront encore pour un temps indéterminé sans avoir accès à l’électricité, juste à côté de la base d’où sont lancés pourtant les vecteurs Ariane et d’où le seront bientôt les lanceurs Véga et Soyouz.

Aujourd’hui, je voudrais savoir quel projet du Gouvernement sous-tend tout cela.

Selon moi, ce projet est vide. Il sonne creux. Il se pare des oripeaux du changement institutionnel pour mieux masquer son manque de contenu et son absence totale de perspective.

Sans m’y appesantir davantage, je vais plutôt me projeter dans l’avenir et tenter de parer au désastre qui nous attend.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Étienne Antoinette

En effet, en ces temps où l’on annonce la rigueur, je m’attache à rechercher de nouvelles ressources pour les collectivités territoriales des outre-mer, plus particulièrement pour la Guyane.

Je verrai donc le moment venu, en fonction de l’accueil qui sera réservé aux amendements que j’ai déposés, jusqu’où va la volonté de ce gouvernement de mettre en péril le développement des outre-mer, en fermant toutes les écoutilles, en brouillant toutes les pistes.

Aujourd’hui, j’ai juste envie de vous faire une seule demande, madame la ministre : si vous ne pouvez faire davantage à l’égard des outre-mer, de grâce, au moins ne nous empêchez pas de faire ce que nous pouvons avec ce que nous avons, principalement avec nos ressources naturelles et nos moyens humains !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Denis Detcheverry.

Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Paul Virapoullé, Adrien Giraud et Charles Revet applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Detcheverry

Madame la ministre, vous nous présentez un projet de budget en diminution sensible. Soit ! Compte tenu de la situation des finances de l’État, on peut effectivement penser que des efforts, auxquels chacun doit contribuer, y compris l’outre-mer, sont indispensables. Je suis d’accord à condition que le remède ne soit pas pire que le mal et que, à terme, cela ne coûte pas plus cher.

Au cours de ces deux dernières années, on a beaucoup entendu parler de l’outre-mer, parfois sur fond d’inquiétude, lors de manifestations bruyantes des populations locales, ou sur un ton bien plus positif, comme lors des états généraux de l’outre-mer qui ont mis en exergue non seulement les problèmes de nos territoires, mais aussi leurs incontestables possibilités de développement.

Aujourd’hui, le Gouvernement a décidé que l’année 2011 serait l’année des outre-mer. Je ne peux que m’en réjouir. Au même moment, certaines réalités et décisions auxquelles nous sommes confrontés m’étonnent, voire m’inquiètent.

On entend régulièrement soutenir dans les discours que l’évolution de l’outre-mer passe obligatoirement par la valorisation de son environnement maritime, qui place la France au deuxième rang mondial, par la valorisation de sa biodiversité, qui représente 10 % de la biodiversité mondiale, ainsi que par son intégration géographique grâce au développement des coopérations régionales.

J’adhère totalement à ce programme, comme nombre de mes collègues ultramarins. Mais une question me taraude : comment y parvenir avec des réductions budgétaires ? Comment faire plus avec moins ?

Certes, il est possible d’optimiser les dépenses avec une meilleure gestion, mais il faut rester réaliste. Alors que les objectifs affichés lors des états généraux sont déjà ambitieux, donc difficiles à atteindre, ils pourraient se limiter à de vaines déclarations en raison de telles restrictions.

Une autre source d’inquiétude est la place de l’outre-mer dans la politique européenne. Nous savons que l’Union européenne s’apprête à signer des accords de libre-échange avec le Canada ainsi qu’avec certains États d’Amérique du Sud. Malheureusement, les territoires ultramarins des zones concernées n’ont nullement été associés aux négociations. Quid de la coopération régionale ? Plus généralement, quelle est la place réservée à l’outre-mer au sein de la politique économique européenne ?

À Saint-Pierre-et-Miquelon, malgré mes propositions pour dynamiser et pérenniser les relations et les échanges avec le Canada, les accords de coopération régionale signés en 1994 n’ont toujours rien apporté en matière économique.

Je maintiens ce que je vous ai déjà dit, madame la ministre : la coopération régionale ne pourra exister que si la politique nationale y croit et s’y attèle sérieusement.

Il ressort des récents contacts que j’ai pu avoir avec les provinces du Canada atlantique que cette coopération, à laquelle elles se sont intéressées ces dernières années, leur semble impossible à mettre en œuvre compte tenu du nombre d’obstacles relatifs au montage des dossiers.

En effet, en raison de notre petite taille, certaines compétences incontournables font défaut localement. Je l’ai dit et je le répète, madame la ministre, nous ne pouvons assumer à tous les niveaux l’autonomie que nous confère l’article 74 de la Constitution.

J’en profite pour parler de la télévision numérique terrestre, ou TNT, à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui, par le biais des médias, nous fait rayonner à travers le Canada. Sa gestion risque de mettre fin à ce rayonnement, ainsi qu’à celui de la France, auprès de nos amis canadiens.

Initialement prévue pour offrir un accès gratuit à un plus grand nombre de chaînes avec une meilleure qualité de réception, de son et d’image, la TNT peut produire l’effet inverse à Saint-Pierre-et-Miquelon. En effet, l’arrivée de la TNT est imposée chez nous avec un cryptage des chaînes, dont peut-être la chaîne locale.

Nous ne pourrons donc plus diffuser à travers tout le Canada, comme nous le faisons actuellement et depuis bientôt onze ans, pour environ 600 000 téléspectateurs potentiels. En outre, la population devra investir dans des décodeurs onéreux, ce qui va quelque peu à l’encontre du principe de gratuité de la TNT.

Ce coût sera difficile à assumer, surtout pour les retraités dont la situation n’est pas bien prise en compte depuis quelques années. Je pense notamment à ceux dont la pension est faible – nous en avons parlé à plusieurs reprises. En outre, Saint-Pierre-et-Miquelon se trouve dans la zone dollar et subit en même temps une inflation. Avec des retraites de misère, nos seniors pourront très difficilement s’offrir la TNT.

J’en viens à un autre sujet d’inquiétude. Madame la ministre, voilà un an, dans ce même hémicycle, j’obtenais votre promesse pour la mise en place à Saint-Pierre-et-Miquelon de l’aide au fret à destination des petites entreprises exportatrices de l’archipel. Nous attendons toujours la mise en application de cette mesure dont l’économie locale a crucialement besoin pour avoir une chance d’être compétitive. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Revenons à 2011. À l’heure où je vous parle, je ne sais pas comment cette année de l’outre-mer se déroulera. Comment cela se traduira-t-il dans les faits, que ce soit sur le terrain ou dans l’Hexagone ? Les parlementaires ultramarins que nous sommes n’ont, à ce jour, pas été associés au projet par l’État.

J’espère qu’il y aura notamment une vraie mise en valeur de l’incroyable biodiversité de l’outre-mer, auprès tant de nos compatriotes métropolitains que de nos voisins géographiques respectifs. Même les ultramarins ont besoin de découvrir ou de redécouvrir leur environnement.

Après avoir appris que Saint-Pierre-et-Miquelon avait été oublié par certaines instances nationales, j’ai récemment entrepris de faire connaitre la richesse de la biodiversité de mon archipel auprès des ministères de l’outre-mer, de l’écologie, de la recherche et de l’enseignement supérieur, ainsi qu’auprès du Conservatoire du littoral, de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité, la FRB, de l’Agence des aires marines protégées et de France nature environnement, ou FNE. J’espère que Saint-Pierre-et-Miquelon sera pris en compte à l’avenir, dans le cadre de l’environnement.

Comme vous pouvez le constater, madame la ministre, je suis très inquiet. Pouvez-vous me rassurer en répondant à ces questions dont dépend l’avenir de l’outre-mer, et plus particulièrement celui de Saint-Pierre-et-Miquelon ?

Applaudissements sur les travées du RDSE, de l ’ Union centriste et de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gélita Hoarau

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, alors que 2011 se veut l’année des outre-mer, à l’occasion de laquelle serait faite la promotion de nos territoires, et l’année pendant laquelle nos diversités, nos richesses en termes de culture, d’institutions, de développement durable, d’économie et d’entreprises seraient mises en lumière, force est de constater que le budget de cette même année fait fi de ces atouts, pis encore, exacerbe nos problèmes et nos difficultés.

À l’instar des autres départements d’outre-mer et de l’ensemble du territoire national, la Réunion subit les effets de la crise monétaire, financière et structurelle. Nous avons assisté, au début de l’année dernière, aux manifestations de cette crise structurelle, lors des mouvements sociaux ayant secoué une partie des outre-mer et sur lesquels je ne reviendrai pas aujourd’hui.

Cette double crise affecte profondément, durablement et peut-être inexorablement, si rien n’est entrepris dès maintenant, les sociétés ultramarines.

Plus qu’ailleurs, les ménages subissent de plein fouet la hausse du chômage. Cette augmentation amène le taux de chômage de la Réunion à un triste record, celui du taux le plus élevé de toute l’Union européenne, soit 29 % ! On peut comprendre que les ménages se trouvent alors dans une situation financière critique, expliquant la hausse de l’endettement.

Plus qu’ailleurs, les entreprises, inscrites dans un tissu économique déjà fragile, ne pourront résister à ces crises, conjuguées aux récentes mesures et réformes gouvernementales ou aux aléas électoraux. Avec la fin des grands travaux à la Réunion, le secteur du bâtiment et des travaux publics, dit BTP, a perdu en l’espace d’un an 22 % de ses effectifs !

Plus qu’ailleurs, les collectivités territoriales sont confrontées au besoin de rattrapage en équipements et infrastructures et à une forte demande sociale, alors que, concomitamment, leurs ressources financières diminuent.

Pour des observateurs réunionnais, cette double crise aura, à terme, de graves conséquences. Je cite la revue Perspectives économiques de la Réunion : « Dans les années qui viennent, la Réunion va traverser une crise majeure identique aux deux ou trois grandes crises qui ont façonné son histoire depuis le début du peuplement. Celle-ci ressemblera sans doute beaucoup à la crise du sucre du 19ème siècle ».

Telles sont les sombres perspectives auxquelles vous nous condamnez alors que des solutions autres, émises par les ultramarins, vous ont déjà été présentées.

De même, l’opinion publique réunionnaise est inquiète et pessimiste pour l’avenir : 81 % des Réunionnais considèrent le chômage comme la préoccupation majeure, 76 % craignent une dégradation du pouvoir d’achat et 70 % pensent que la situation économique est mauvaise. Ces indicateurs datant d’août 2010 sont à leur plus bas niveau jamais recensé jusqu’ici.

Le Gouvernement n’a pas toujours sous-estimé la situation ultramarine, ne serait-ce que dans les discours ou dans les intentions. Ainsi, nous avons eu la stratégie de croissance pour l’outre-mer, la STRACOM, présentée par votre prédécesseur, M. Yves Jégo, il y a plus de deux ans.

On nous annonçait que le Président de la République était, selon le rapport de présentation, le « porteur d’une nouvelle vision pour l’outre-mer fondée sur une volonté de croissance durable » et qu’il s’agissait « de doter nos économies ultramarines de la capacité d’affronter les grands défis de l’époque en fondant la croissance de chaque territoire sur ses singularités ».

Pour de telles ambitions, aussi louables qu’unanimement soutenues, on s’attendait à ce que le budget de l’outre-mer pour 2009-2012 connaisse une progression exceptionnelle.

Ensuite, il y a eu la loi pour le développement économique des outre-mer, dite LODEOM, les états généraux de l’outre-mer et le conseil interministériel pour l’outre-mer, le CIOM, du 6 novembre 2009, visant les mêmes objectifs.

Nous nous attendions donc à des mesures et à un budget à la hauteur de ces buts. Malheureusement, ces intentions ne sont pas suivies de faits.

Vingt et un mois après l’adoption de la LODEOM et un an après le CIOM, certaines dispositions manquent à l’appel.

Où sont les mesures de lutte pour réglementer le fonctionnement du marché, la concurrence et les prix, ainsi que pour faire baisser le coût de la vie ? Où est le développement des productions locales promis avec le développement endogène ? Quels sont les objectifs du Gouvernement et les moyens qu’il propose de mettre en œuvre pour favoriser l’insertion régionale ?

Dans la LODEOM, il était prévu que les compagnies aériennes vous transmettent avant le 1er septembre 2010 un rapport sur leur politique tarifaire. Où est ce rapport, madame la ministre ? Il en est de même de l’étude relative à l’octroi de mer.

Est prévue, en 2011, la publication par le Gouvernement d’un rapport indiquant les mesures qu’il entend prendre ou proposer pour répondre à la situation financière des communes d’outre-mer, dont les villes-capitales, jugée préoccupante du fait de la particularité de la matière fiscale. Où en est ce rapport ?

À ces questionnements qui restent en suspens, s’ajoutent un budget aujourd’hui en diminution pour les outre-mer et, de fait, un désengagement du Gouvernement, bien que vous vous appliquiez, madame la ministre, à soutenir que tel n’est pas le cas.

Ainsi, les crédits de l’État pour l’outre mer, s’élevant à 16 milliards d’euros, subissent une baisse de 150 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 300 millions d’euros en crédits de paiement.

Ceux de la mission « Outre-mer » diminuent par rapport à 2010 de 0, 55 % pour les autorisations d’engagement et de 2, 28 % pour les crédits de paiement.

Cette mesure drastique n’épargne aucun domaine, même les secteurs névralgiques considérés comme prioritaires par la LODEOM.

Ainsi, concernant le logement social, vous maintenez l’illusion de crédits constants quand les crédits de paiement ne cessent de diminuer. Vous nous annoncez, madame la ministre, des crédits de 274 millions d’euros en autorisations d’engagement pour 2011, et ce jusqu’en 2013, alors que, conjointement, les crédits de paiement diminuent de 21 millions d’euros de 2010 à 2011.

Or, vous n’êtes pas sans savoir le besoin urgent de logements sociaux en outre-mer. À la Réunion, 22 600 familles sont dans l’attente d’un logement social. Tous les ans, sur les 6 500 nouveaux ménages, plus de 70 % relèvent du logement social.

Cette année, toutes les dotations de la ligne budgétaire unique, ou LBU, affectées à la Réunion ont été utilisées pour la construction de 3 000 logements. Pourtant, 2 000 logements supplémentaires auraient pu être livrés si la demande d’une rallonge de 20 millions d’euros avait été acceptée.

En outre, quelques mois seulement après l’adoption de la LODEOM, les bailleurs sociaux vous ont alertée, madame la ministre, sur les problèmes de la mise en application de la défiscalisation. Lors de votre rencontre en novembre dernier, vous avez annoncé la rédaction d’une nouvelle circulaire. Pouvez-vous nous assurer que cette dernière verra le jour très prochainement et mettra fin aux incertitudes juridiques et aux obstacles administratifs freinant l’instruction des dossiers en attente d’agrément fiscal ?

Bercy est-il prêt à clarifier les modalités de financement du logement social par la défiscalisation, qui doit rester un complément à la LBU et non se substituer à elle ?

Le Fonds régional d’aménagement foncier et urbain, le FRAFU, se voit appliquer le même traitement : 32, 5 millions d’euros en autorisations d’engagement mais seulement 25, 7 millions d’euros en crédits de paiement. Idem pour la résorption de l’habitat insalubre, la RHI.

Le risque de voir l’État contracter des dettes auprès des opérateurs du logement est bien présent.

Aucun secteur n’est épargné par cet abaissement de crédits. Dans le programme Emploi outre-mer, les crédits de paiement destinés au soutien aux entreprises diminuent de 1, 7 %. Jusqu’à hier, il était question que les contrats aidés subissent eux aussi une coupe sévère, puisque le Gouvernement, avec assurance et aveuglement, décide de baisser leur financement de plus de 40 millions d’euros sur un an et de 100 millions d’euros sur deux ans.

Mais, de passage à la Réunion, vous annonciez 1 800 contrats supplémentaires. Est-ce pour la fin de cette année, ou pour 2011, ou jusqu’à 2014 ?

Cet assèchement budgétaire est également dû au rabotage de la défiscalisation des investissements productifs réalisés outre-mer, représentant un crédit pour l’État de plus de 300 millions d’euros pour l’année 2011.

Lors des débats à l’Assemblée nationale, sur ce même texte, vous avez rappelé l’annonce par le Président de la République, dans la convention outre-mer, de sa volonté de corriger les effets d’aubaine de la défiscalisation, qui, selon le Gouvernement, doit se faire par des mesures radicales, au risque de voir disparaître une filière porteuse d’emplois, d’innovation et d’ambition environnementale : je veux bien sûr parler du photovoltaïque.

Tout cela, madame la ministre, nous pousse à nous interroger sur l’efficacité des mesures classiques utilisées jusqu’à présent pour tenter de résoudre nos problèmes. Ne sommes-nous pas arrivés à la fin d’un cycle où les méthodes classiques, qui reposent sur un peu plus ou un peu moins de défiscalisation, apparaissent comme totalement inopérantes ?

Même si votre budget ne baissait pas et s’il augmentait de 5 ou 10 %, ou plus, ce qui n’est évidemment pas le cas, nos problèmes auraient-ils, pour autant, été résolus ?

Aussi, madame la ministre, le moment n’est-il pas venu de réfléchir à un autre mode de développement pour tout l’outre-mer ?

Telles sont, madame la ministre, les remarques que je voulais formuler à l’occasion du débat sur le budget de la mission « Outre-mer ». Il est évident que cela ne pousse pas à l’optimisme ni à la confiance. Et comme les mesures de rigueur perdureront encore au moins trois ans, on comprend l’inquiétude qui s’empare de la population et des jeunes en particulier, de plus en plus en proie au désespoir et à la colère.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Constant Fleming

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les documents mis à notre disposition dans le cadre de ce débat nous donnent la mesure de l’effort budgétaire, par habitant et par collectivité d’outre-mer, qui doit être consenti par l’État en 2011.

Cet effort est très inégal, puisqu’il est compris entre 177 euros et 12 441 euros par habitant, selon les cas. Une telle disparité n’a en soi rien pour surprendre : il convient de prendre en compte la situation de chaque collectivité d’outre-mer.

Force est pourtant de constater, madame la ministre, que le document que je viens d’évoquer fait apparaître une anomalie en ce qui concerne la collectivité de Saint-Martin, pour laquelle l’appartenance à la nation se traduira par un effort de solidarité budgétaire de seulement 688 euros par habitant en 2011.

Sans doute la collectivité de Saint-Martin dispose-t-elle, désormais, d’une compétence fiscale lui permettant de collecter des ressources propres mieux adaptées à ses besoins. Toutefois, la Polynésie française, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna et la Nouvelle-Calédonie disposent également, et depuis beaucoup plus longtemps, de la compétence fiscale. Or l’effort de solidarité nationale y est entre cinq et vingt fois supérieur.

Pour mesurer le soutien à apporter à une collectivité, il faut prendre en considération le niveau de revenu de ses habitants, me direz-vous. Néanmoins, tel n’a pas été le cas, à l’évidence, pour Saint-Martin : de cette collectivité perdure une image de paradis fiscal totalement contraire à la réalité, cette dernière étant elle-même largement imposée par une évolution démographique trop souvent ignorée.

Saint-Martin, madame la ministre, comptait 6 000 habitants en 1980. Aujourd'hui, elle en accueille officiellement 35 000, et plus probablement 40 000.

Ce bouleversement démographique n’a nullement été dû à un afflux massif d’amateurs fortunés de villégiature tropicale, mais bien plutôt à une immigration régionale causée par la misère, l’insuffisance de soins, de formation ou d’espoir de travail et par toutes les calamités liées au sous-développement, dont la situation d’Haïti nous donne le désolant exemple.

Or je suis obligé de le rappeler, c’est l’État, compétent en matière d’immigration, qui, en 1992, a régularisé la situation de milliers d’étrangers ayant, de surcroît, profité du regroupement familial.

La commune de Saint-Martin a ainsi dû faire face à une augmentation massive de sa population, qu’il a fallu prendre en charge sur le plan tant de la santé que de la scolarité, sans oublier, bien sûr, celui du logement. Sur une population estimée à 40 000 personnes, il y a aujourd’hui près de 10 000 enfants en âge scolaire.

La collectivité de Saint-Martin gère seize groupes scolaires, d’écoles maternelles et primaires, ainsi que, depuis le 15 juillet 2007, trois collèges, un lycée et une annexe de lycée. En outre, elle s’apprête à construire un nouvel établissement à la fois collège et lycée en PPP, c'est-à-dire en partenariat public-privé.

Madame la ministre, le résultat statistique de cette situation – la Commission européenne vient encore de le constater –, est que Saint-Martin appartient aux régions les moins favorisées de l’Union européenne, celles où le niveau de revenu par habitant est inférieur à 75 % de la moyenne européenne et où le taux de chômage est particulièrement élevé.

Pour les régions d’outre-mer se trouvant dans une situation comparable, madame la ministre, l’effort national de solidarité budgétaire est, en moyenne, huit fois supérieur.

L’oubli, par la République et par ses services, de cette partie d’île du nord de la Caraïbe qu’est Saint-Martin n’est pas une nouveauté. Les Saint-Martinois y sont accoutumés. Ils ont eu le courage d’en tirer la conséquence institutionnelle qui s’imposait, en votant pour le nouveau statut d’autonomie qui leur était proposé.

Les Saint-Martinois espéraient cependant, de la part de l’État, un accompagnement attentif et résolu des premiers pas de leur nouvelle collectivité sur la voie de la responsabilité. Cette attente, madame la ministre, a largement été déçue. La mise en œuvre du nouveau statut de Saint-Martin n’a fait l’objet ni de la préparation soigneuse qui eût été nécessaire ni des efforts de mise à niveau que des décennies de négligence avaient rendus indispensables.

Du jour au lendemain, la collectivité s’est trouvée privée de moyens nécessaires à son fonctionnement : elle a perdu l’important instrument de financement des dépenses communales qu’était la ressource d’octroi de mer, ainsi que la garantie des douzièmes provisoires en matière d’impôts directs locaux, dont dépend l’équilibre de trésorerie d’une collectivité locale.

Certaines impositions, telles que la taxe d’habitation, n’ont pu être conservées, faute d’une anticipation des adaptations nécessaires des outils informatiques. Les compensations financières prévues par la loi statutaire de 2007 n’ont pas été assurées. Le plan de rattrapage en matière d’équipements publics prévu par la même loi organique n’a jamais vu le jour.

La liste complète des dysfonctionnements qui ont accompagné la mise en œuvre du nouveau statut de la collectivité de Saint-Martin serait trop longue, madame la ministre, pour le cadre de cette intervention.

Toutefois, la collectivité en éprouve aujourd’hui les effets. Alors qu’elle a accompli, ainsi que les contribuables saint-martinois, des efforts considérables, en termes à la fois de modération de la dépense publique et de mise en place et d’acceptation d’impôts nouveaux, l’impréparation du changement statutaire a conduit à une situation de déséquilibre de trésorerie et de déséquilibre budgétaire, qu’avait annoncés la mission de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale de l’administration, diligentée sur l’initiative de la collectivité elle-même.

Saint-Martin demande en conséquence à l’État, madame la ministre, une répartition de l’effort de solidarité nationale en faveur des collectivités d’outre-mer qui lui soit moins défavorable, une plus grande vigilance à l’égard de ses besoins spécifiques et un meilleur engagement des services publics dans l’accomplissement des missions qui sont les leurs.

Surtout, Saint-Martin demande le simple respect de ses droits, dont l’un, prévu par la Constitution de la République et réaffirmé par la loi organique statutaire, est que tout transfert de compétences s’accompagne des moyens permettant l’exercice de celles-ci.

La collectivité de Saint-Martin, madame la ministre, doit exercer les compétences qui étaient celles de la commune du même nom. Pour cela, celle-ci bénéficiait de l’importante ressource que représentait, je l’ai rappelé, une fraction du produit d’octroi de mer collecté en Guadeloupe.

Je conçois fort bien qu’il ne puisse plus être demandé à la région Guadeloupe de poursuivre l’effort de solidarité qu’elle accomplissait au profit d’une commune qui était partie intégrante de son territoire. Je ne puis pour autant admettre que le principe constitutionnel de compensation financière des transferts de compétence soit, en ce qui concerne Saint-Martin, passé par pertes et profits.

En reprenant à son compte, en vue du financement des dépenses de nature communale auxquelles la collectivité de Saint-Martin ne peut se dérober, l’obligation constitutionnelle à la pleine compensation d’une charge transférée, l’État contribuera simultanément au rééquilibrage de l’effort budgétaire national en faveur des collectivités d’outre-mer, dans lequel, ainsi que je le rappelais au début de mon intervention, Saint-Martin est bien loin de trouver le juste compte que commanderait la prise en considération de sa situation réelle.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Mme Nathalie Goulet applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Giraud

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Mayotte entre dans une nouvelle phase de son développement avec l’accession prévue, en avril 2011, de cette collectivité au statut de département d’outre-mer, en conséquence directe de la consultation populaire du 29 mars 2009.

Au mois d’octobre dernier, la discussion au sein de notre assemblée du projet de loi organique relatif au département de Mayotte m’a donné l’occasion de faire le point sur la situation actuelle de notre collectivité et sur les retards de son développement économique et social, avant d’aborder les questions relatives à l’organisation de ce 101e département de la République française.

Madame la ministre, les sociétés évoluent. Les besoins de Mayotte ne sont plus ceux d’hier.

Le Gouvernement a souhaité que la solidarité nationale continue de s’exercer au mieux des intérêts de cette collectivité qui a, encore aujourd’hui, le plus grand besoin d’un accompagnement fort de l’État dans cette phase importante de son évolution et de sa mise à niveau.

Madame la ministre, nous vous demandons, dans toute la mesure du possible, de prendre en compte, dans un premier temps, nos retards dans le domaine des infrastructures indispensables pour nos progrès à venir, à savoir les routes et voies de communications, les hôpitaux et dispensaires nécessaires à l’amélioration de la santé publique, le réseau d’assainissement, ainsi que – j’y reviens une fois de plus – la construction d’un « véritable » aéroport répondant, dans sa conception architecturale, aux attentes tant des élus que de la population.

Cette question devrait faire l’objet d’un nouvel examen permettant autant que possible de rapprocher les points de vue sur ce projet particulièrement important pour l’avenir de Mayotte. Il est évident, en effet, qu’un tel chantier doit se fonder sur un consensus aussi large que possible et ne pas susciter d’inutiles polémiques.

En dépit d’un cadre budgétaire national dont je connais toutes les contraintes, et malgré les efforts déjà accomplis par l’État afin de résorber nos retards de développement, je souhaite que soit octroyé à Mayotte un concours financier spécifique destiné à permettre aux communes de faire face aux lourdes charges de cette période de transition, jusqu’à l’installation, en 2014, de l’organisation départementale et en attendant, bien entendu, l’application progressive de la fiscalité locale, qui apportera aux municipalités les ressources nécessaires à leur fonctionnement.

Madame la ministre, il me semble indispensable qu’une formation adaptée soit apportée à plusieurs catégories de fonctionnaires qui sont, dès à présent, appelés à mettre en œuvre concrètement la départementalisation sur le plan administratif, technique et financier.

Par ailleurs, je souhaite appeler tout spécialement votre attention sur l’état du réseau routier de Mayotte, qui se compose de 90 kilomètres de routes nationales et de 139 kilomètres de voies départementales.

Debut de section - PermalienPhoto de Adrien Giraud

La direction de l’équipement est responsable de la gestion des routes nationales, pour le compte de l’État, et des routes départementales, pour celui de notre collectivité.

Ces routes ont été dimensionnées à une époque où le trafic routier était faible. Elles sont souvent détériorées et déformées faute de moyens d’entretien régulier, à la suite, notamment, des inévitables dégâts résultant de la saison des pluies. L’érosion est alors considérable : c’est pourquoi le réseau routier se dégrade rapidement. Et il faut tenir compte également de l’augmentation importante du trafic des poids lourds entre les principaux pôles économiques.

Quelques aménagements ont déjà été réalisés – je pense aux rocades de M’tsapéré en 2002 et de Passamainty en 2005 – pour désengorger ce trafic très intense.

Partant du constat que des besoins cruciaux perdurent à Mayotte, en particulier en termes d’infrastructures, le treizième contrat de projet État-Mayotte 2008-2014 a retenu comme son quatrième axe la mise en œuvre d’un aménagement équilibré du territoire par la création, l’amélioration et la sécurisation du réseau routier. Le coût prévu de cette action s’élève à 20 millions d'euros pour le réseau national, à la charge de l’État.

À la fin de cette année, un peu plus de 8 millions d'euros auront été consommés, soit la totalité des crédits ouverts entre 2009 et 2010. Il reste donc 12 millions d’euros à honorer pour les prochaines années. Je souhaite obtenir du Gouvernement toutes les assurances sur le respect de ces engagements si importants pour nombre d’entreprises locales, c’est-à-dire pour l’emploi des Mahorais.

S’agissant de la programmation routière, hors ouvrages d’art, concernant le réseau national, les montants d’autorisations d’engagement s’élèvent à 4 millions d’euros par an pour les trois prochaines années.

La dernière étude réalisée par le Centre d’études techniques de l’équipement d’Aix constate que les besoins d’entretien et de régénération du réseau de Mayotte sont de 15 millions d’euros afin, simplement, de réaliser les travaux nécessaires pour remettre et maintenir le patrimoine en état, sans en modifier les caractéristiques.

En ce qui concerne l’amélioration du réseau routier, les besoins sont estimés à 30 millions d’euros, dont un peu plus de 11 millions d’euros sont financés par le contrat de projet État-Mayotte. Près de 20 millions d’euros supplémentaires seront donc nécessaires afin de mettre le réseau routier en état.

Madame la ministre, je n’insisterai pas davantage sur l’état du réseau départemental : on peut évaluer à environ 35 millions d’euros les besoins d’investissements qui seront nécessaires au cours des prochaines années pour assurer la sécurité de ces routes et qui ne peuvent être financés par les communes mahoraises, faute de moyens.

Nous espérons que vous nous apporterez les éclaircissements nécessaires sur l’état actuel de ces dossiers, suivis avec une grande impatience à Mayotte. En effet, leur intérêt économique pour les entreprises rejoint les besoins de la population en termes de sécurité routière et d’amélioration des échanges de toute nature, tant à l’intérieur de la collectivité que dans ses relations avec l’extérieur, en particulier dans le domaine du tourisme.

En conclusion, il est évident que les Mahorais peuvent enfin, dans le cadre départemental, consacrer tous leurs efforts au développement économique, ainsi qu’aux progrès sociaux et culturels de notre collectivité.

La réponse apportée par les Mahorais lors de la consultation du 29 mars 2009 signifie également que le temps est désormais venu de tirer les conséquences de l’évolution politique récente, qui appelle bien évidemment de vigoureuses actions de « rattrapage » lancées et accompagnées par l’État.

Lors de la discussion budgétaire de l’an dernier, j’ai eu l’occasion d’appeler l’attention du Gouvernement sur nos priorités, car nous le savons bien, comme dit le proverbe, « Paris ne s’est pas construite en un jour ». Il s’agit néanmoins pour nous d’urgences économiques et sociales qui s’appellent éducation, modernisation foncière, logement. Je sais pouvoir compter sur la vigilance et l’engagement du Gouvernement pour relever de tels défis avec Mayotte.

Permettez-moi enfin de rappeler, une fois encore, que Mayotte a depuis longtemps formulé le vœu d’accéder au statut de région ultrapériphérique de l’Europe communautaire, au même titre que les actuels départements d’outre-mer.

Madame la ministre, les Mahorais attendent beaucoup de votre action. Je sais que vous aurez le souci de ne pas les décevoir.

Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Tuheiava

Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les précédents orateurs ayant déjà largement commenté les crédits de la mission « Outre-mer », je ne m’appesantirai guère davantage, notamment compte tenu du temps qui m’est imparti.

Concernant d’autres dispositions du projet de loi de finances pour 2011 qui touchent à l’outre-mer, je salue particulièrement l’effort de maintien de la défiscalisation en faveur du logement social outre-mer.

Cependant, je ne peux que déplorer, encore une fois, le frein politique mis à l’investissement photovoltaïque en outre-mer, sujet qui a déjà été débattu la semaine dernière.

L’arrêt de la défiscalisation dans ce secteur – il est certes modéré par les récents débats parlementaires qui ont permis d’épargner temporairement les petites installations – se situe tout de même à l’opposé des objectifs du Grenelle de l’environnement et de la volonté gouvernementale affirmée au travers de la LODEOM, la loi pour le développement économique des outre-mer, d’aller vers une plus grande autonomie énergétique de l’outre-mer dans le cadre d’un développement économique endogène.

Sur le plan énergétique, nous le savons, les territoires ultramarins sont encore très fortement dépendants des importations pétrolières, avec toutes les conséquences qui en résultent. La commission d’évaluation créée récemment se penchera sur l’impact réel des défiscalisations en matière photovoltaïque, ce qui offrira à la Polynésie française une chance de démontrer l’extrême brutalité de cette mesure dans ce secteur dont la durée de vie n’a été que d’une seule année dans notre, c'est-à-dire notre pays.

Madame la ministre, vous le savez mieux que nous, dans le secteur des énergies renouvelables, la nation a tout à gagner que nos outre-mer puissent être des pôles avancés, à la condition essentielle et préalable que la priorité aux intérêts des départements et collectivités d’outre-mer soit assurée conformément à la Charte des Nations unies ou, tout au moins, que l’exigence onusienne émergente du « partage des bénéfices de la croissance » soit appliquée en faveur des populations ultramarines concernées.

En Polynésie française, la phase de faisabilité d’une centrale-pilote d’énergie thermique des mers offshore d’une puissance de 5 mégawatts est sur le point d’être lancée. Nous la soutenons, tout comme vous, madame la ministre.

Le système d’air conditionné par refroidissement à l’eau de mer, le système SWAC, ou, qui y a été testé pour la toute première fois avec succès voilà déjà plusieurs années, alimente désormais plusieurs établissements hôteliers de renom.

Le développement de l’exploitation des énergies marines, en particulier de l’énergie hydrolienne, fait partie des atouts concurrentiels dont nous pouvons tirer parti.

En d’autres termes, la puissance d’un État viendra de la mer !

On ne le répète pas assez, les outre-mer représentent 97 % de la surface maritime française et la Polynésie représente 49 % de cette surface maritime ultramarine. Je sais donc au nom de quel potentiel je m’exprime devant la nation.

De plus en plus, les outre-mer français prennent conscience de leurs énormes potentiels propres, endogènes et de ce que représenterait, pour la nation, l’union de telles capacités !

Cependant, nous ne sommes ni à la fin du XIXe siècle, période sombre pour une partie de nos outre-mer, ni en 1958, dans un contexte politique de reconstruction nationale, ni encore en 1973, au lendemain du choc pétrolier à la suite duquel la dette publique de la France a pris naissance et où l’on gérait l’outre-mer français – passez-moi l’expression – « à la hussarde » !

En 2010, les lignes ont bougé.

La nation doit avoir et se donner les moyens de ses grandes ambitions. L’outre-mer français en fait-il partie ?

On ne peut pas satisfaire tout le monde, c’est vrai. Serait-ce alors à dire qu’il y aurait « trop de monde » et plus assez de moyens ?

Nos outre-mer réclament un accompagnement institutionnel et financier qui soit cohérent et loyal, suivant leur histoire propre, leurs aspirations ou leur statut institutionnel.

Ils réclament un partenariat renouvelé avec un État qui leur conférerait les outils institutionnels et les moyens financiers de leur développement économique endogène ou de leur décollage propre.

La Nouvelle-Calédonie s’est brillamment, mais non sans douleur, placée dans cette dernière perspective, et nous la saluons fièrement à ce titre. Madame la ministre, le jour viendra, j’en suis convaincu, où la Polynésie française saura prendre cet envol en toute maturité.

Néanmoins, à présent, nous ne pouvons plus supporter, à l’orée des nouveaux défis énergétiques, climatiques, financiers, diplomatiques qui nous attendent en ce début du XXIe siècle, de pâtir en silence d’une politique nationale anachronique envers les outre-mer français, politique qui, en réalité, est pilotée en filigrane tant par les ambitions technologiques d’un puissant lobby militaro-industriel français que par la rigueur budgétaire de Bercy.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Tuheiava

Le véritable problème de fond qui rend difficilement crédible l’esprit même d’un « partenariat renouvelé » entre État et outre-mer français est que les éléments d’appréciation et de discussion dont disposent nos populations et nos élus ultramarins ne sont pas loyalement mis à la disposition de ces derniers, comme s’ils ne devaient pas en avoir conscience, afin d’être maintenus dans une sorte d’ignorance organisée devenue la normalité.

Près de quarante-quatre ans après le premier tir d’expérimentation nucléaire en Polynésie française et quinze ans après l’arrêt définitif des essais nucléaires en 1998, j’ai posé à plusieurs reprises au ministre de la défense la question écrite très simple consistant à savoir si au moins un rapport financier avait été officiellement établi sur les retombées financières, économiques, technologiques, diplomatiques des essais nucléaires pour la région. En effet, 193 expérimentations nucléaires ont été réalisées en Polynésie française pendant une période de quarante ans. Je n’ai obtenu aucune réponse !

Chacun de nous ici sait pourtant que l’industrie des microprocesseurs informatiques, de la fibre optique, …

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Tuheiava

Je termine, monsieur le président !

Toutes les innovations que je viens de citer, auxquelles s’ajoutent les programmes de fusée Ariane et les centrales électriques nucléaires, sont issues de l’expertise française, développée directement à partir des quarante années d’expérimentations en Polynésie française…

C’est cela le point de départ d’un partenariat rénové et loyal avec nous, madame la ministre !

Je poursuivrai mon propos au sujet du projet de loi de finances pour 2011, notamment sur l’article 77 et la dotation globale de développement économique, dans le cadre des explications de vote, puisque le temps qui m’était imparti est épuisé.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Marsin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les années 2009 et 2010 ont été riches en événements pour l’outre-mer, d’un point de vue tant économique et social que politique et normatif !

La crise de mars 2009, révélatrice du malaise qui gangrène nos territoires depuis un certain temps, a déclenché une réaction en chaîne de bonnes intentions pour refonder la confiance et encourager la croissance, notamment les états généraux de l’outre-mer, la mission commune d’information du Sénat sur la situation des départements d’outre-mer, l’adoption de la LODEOM dans cet hémicycle, ou encore la première réunion du Conseil interministériel de l’outre-mer.

Toujours en quête de reconnaissance et forts de leurs richesses, nos territoires seront à l’honneur en 2011, lors des manifestations de « l’année des outre-mer ». Toutefois, comment donner toute sa portée à ce clin d’œil à l’outre-mer si la crise économique et sociale, à l’échelon local, déstabilise les forces vives et angoisse nos concitoyens ? C’est contre cet état de fait qu’il faudrait lutter par des orientations et des moyens adaptés !

Madame la ministre, vous l’aurez compris, même si je peux me réjouir des manifestations culturelles à venir, sans doute utiles pour une meilleure connaissance des outre-mer et pour la promotion de ces territoires, je regrette amèrement que les arbitrages du projet de loi de finances pour 2011 ne soient pas porteurs d’impulsions de nature à promouvoir le développement endogène, tant scandé lors des états généraux, ou à stimuler la croissance des économies locales.

En effet, des dispositions de telle nature auraient permis de contrer les tendances observées : hausse spectaculaire du chômage en 2009, de plus de 23 %, augmentation de plus de 11 % du nombre de demandes d’emploi en attente, en particulier de celles des jeunes et des seniors, repli de la consommation des ménages, de l’investissement, des échanges commerciaux, avec un recul de 23 % des importations et de 14 % des exportations, paralysie de l’économie et, surtout, crise du secteur du bâtiment et des travaux publics, conséquence inévitable des blocages qui pénalisent la production de logements sociaux.

Malheureusement, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2011 ne me semble pas contenir les impulsions nécessaires pour faire face à une telle situation ; cela est d’autant plus vrai que, au-delà des lignes budgétaires, même rabotées, qui sont affichées, les procédures de traitement des dossiers visent inexorablement, nous semble-t-il, à limiter efficacement la consommation des crédits budgétés.

À propos de lignes budgétaires, madame la ministre, c’est la première année depuis trois ans que votre budget est en légère baisse : moins 0, 5 % en autorisations d’engagement et moins 2, 3 % en crédits de paiement.

Même s’il ne représente que 16 % de l’effort budgétaire global de la nation envers l’outre-mer – ce qui, nous l’avons déjà dit et répété, ne permet pas d’avoir une vision nette de l’action globale de l’État dans nos territoires, c’est tout de même ce budget qui nous renseigne sur la volonté politique du Gouvernement à agir, résolument ou non, dans les compartiments essentiels de la vie et de la société au sein des extensions ultramarines de la République que constituent nos territoires.

Dans ce cru 2011 du budget des outre-mer, je me contenterai de pointer trois sujets cruciaux : l’emploi, le logement et la continuité territoriale.

D’abord, en matière d’emplois, les chiffres que j’ai rappelés précédemment sont éloquents et alarmants ! Même si les objectifs fixés par le Président de la République sur trois ans pour le SMA, le service militaire adapté, ne seront pas atteints, ce dispositif est efficace ; il connaît un certain succès et constitue un excellent vecteur de qualification pour nos jeunes.

Pour autant, au-delà de la gravité de la situation des jeunes, il ne faudrait pas méconnaître la situation des seniors, qui risque de se dégrader avec la mise en œuvre des nouvelles dispositions relatives aux retraites ; d’où l’impératif d’un développement économique pour répondre à leur demande.

Concernant les crédits consacrés au soutien aux entreprises, aux exonérations de charges patronales, je note l’effort qui est consenti pour apurer la dette de l’État envers les organismes sociaux. Mais, surtout, madame la ministre, il faut tout faire pour éviter qu’elle ne se reconstitue rapidement, une tendance que l’on observe peut-être d’ores et déjà.

Ensuite, sur la question du logement social, je reste vraiment inquiet. Madame la ministre, je vous ai récemment interpellée à ce sujet en mettant l’accent sur les 7 000 logements en attente de construction, la chute de plus de 35 % de l’activité du BTP, la destruction d’emplois, les plans sociaux en cours d’élaboration et les 20 000 Guadeloupéens qui attendent désespérément un logement ! Les réponses que vous m’avez fournies ne m’ont pas satisfait et elles ont d’ailleurs provoqué un profond émoi chez les professionnels du logement, notamment en Guadeloupe.

Or, dans le projet de budget que nous examinons, les crédits consacrés à cette question stagnent en autorisations d’engagement et chutent de plus de 9 % en crédits de paiement ! C’est dire si la crise risque de perdurer, sinon de s’aggraver. J’insiste donc de nouveau sur la nécessité de simplifier la procédure de délivrance des agréments, de débloquer les dossiers en cours et de rassurer les opérateurs immobiliers en affirmant la possibilité de combiner les deux sources de financement que sont la défiscalisation prévue par la LODEOM et la ligne budgétaire, socle du financement du logement social !

Enfin, concernant la continuité territoriale, vecteur symbolique de citoyenneté, de solidarité et d’unité nationales, je regrette que, dix-huit mois après le vote de la LODEOM, les dispositions majeures prévues ne puissent entrer en vigueur !

Madame la ministre, en matière de développement économique, de chômage, de logement, de cherté de la vie, de situation des collectivités territoriales, les clignotants sont au rouge !

Après les espérances suscitées par les conclusions et décisions issues des états généraux de 2009, l’année 2010 se termine sur une réelle déception. Cela a été largement exprimé ce matin.

Que sera 2011 ? Ce projet de budget ne me permet pas d’être optimiste ! Je vous invite, et à travers vous le Gouvernement, à ne pas laisser pourrir la situation, car, croyez-moi, les conséquences pourraient être désastreuses pour tous, et à tout point de vue !

Bien entendu, madame la ministre, je ne voterai pas a priori contre votre projet de budget, car je veux penser que vous entendrez et comprendrez mon appel. Il n’en reste pas moins que j’écouterai attentivement vos réponses à mes interrogations comme à celles de mes collègues.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Terrade

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous aurions dû aujourd’hui examiner un budget audacieux, à la hauteur des promesses qui ont été faites en réponse à la crise sociale qui a durement touché l'outre-mer.

Au lieu de cela, ce budget suit cette année le même chemin que celui que le Gouvernement impose à l’ensemble de nos politiques publiques : la voie de la régression. C’est le moins que l’on puisse dire ! En effet, on observe une diminution des crédits de 46 millions d’euros par rapport à l’an passé.

Il y a eu la crise, me direz-vous. Mais, madame la ministre, la crise ne justifie pas que vous puissiez ainsi vous exonérer des engagements essentiels de l’État car, en dernier ressort, ce sont les populations à risque, celles qui sont les plus fragiles et les plus exposées qui en font les frais !

Déjà, la crise de 2009 a fortement endommagé les finances des collectivités. L’octroi de mer a subi des tirs croisés de toutes sortes et le gel des dotations des collectivités pour trois ans aggravera encore cette situation.

Ce choix paraît difficilement défendable, car il s’agit de résorber en trois ans une trentaine d’années de dérapages non contrôlés en en faisant porter la responsabilité par ceux qui n’y sont pour rien.

À qui la faute ? Elle est imputable, certainement pas à ceux qui, pour la plupart, vivent en dessous du seuil de pauvreté, mais bel et bien aux tenants du capitalisme et du libéralisme dont ce gouvernement est trop souvent le fidèle porte-voix.

Ce budget devait être le reflet des dispositifs qui ont été votés dans le cadre de la loi pour le développement économique des outre-mer. Or, dix-huit mois après sa promulgation, celle-ci n’est que partiellement mise en œuvre.

La ligne budgétaire unique s’amenuise de 21 millions d’euros et les crédits consacrés aux logements sociaux et très sociaux perdent la somme, si l’on peut dire « modique », de 34 millions d’euros. Quand on connaît l’immensité des besoins en outre-mer, les chiffres parlent d’eux-mêmes !

Pour prendre l’exemple cité ma collègue Gélita Hoarau concernant La Réunion, 22 600 familles ont déposé une demande de logement. Or, comme l’a souligné le rapporteur spécial Éric Doligé, en 2009, seuls 6 200 logements ont été construits en outre-mer, alors qu’il en faudrait au minimum 45 000 par an pour faire face aux 60 000 demandes en attente. Ce décalage est dramatique. Qui plus est, il entre encore une fois en contradiction avec la promesse de rallonge budgétaire de 20 millions d'euros, attendue par les bailleurs sociaux.

Ainsi devient-il plus qu’urgent d’augmenter la ligne budgétaire unique, comme il devient essentiel de rectifier le tir quant à la mise en œuvre de la défiscalisation appliquée au logement social, pensée et voulue par le Gouvernement. Au regard des dérives constatées pendant la crise, il nous paraît inopportun, voire indécent, de faire dépendre le logement social des arbitrages d’investisseurs privés.

Le logement social ne peut pas et ne doit pas devenir un instrument de régulation des finances publiques.

Offrir à tous ceux qui en ont besoin un habitat décent contre un loyer adapté et maîtrisé : telle est la politique du logement que nous souhaitons voir mise en œuvre, aussi bien en outre-mer qu’en métropole.

Par ailleurs, les décisions du conseil interministériel de l’outre-mer du 6 novembre 2009 sont, elles aussi, au point mort : 137 mesures ont été annoncées pour les outre-mer, dont 71 mesures transversales à l’ensemble des collectivités ultramarines. Aujourd’hui, la banane est menacée par des multinationales américaines avides, favorisées par les règles de l’Organisation mondiale du commerce, qui s’appliquent avec tranchant et sans appel.

Le tourisme décline et le chômage atteint des sommets pour les ultramarins. Le taux de chômage est deux fois plus élevé dans les départements d'outre-mer qu’en métropole et augmente six fois plus vite : il atteint 22, 7 % en Guadeloupe, 21, 2 % en Martinique, 20, 6 % en Guyane et 29 % à La Réunion. Mais, surtout, il touche de plein fouet les jeunes, dans des proportions encore plus importantes. Faut-il rappeler que les départements d’outre-mer sont les régions d’Europe où le chômage des jeunes atteint des niveaux record ?

Madame la ministre, face à l’ensemble de ces problématiques, c’est votre responsabilité qui est engagée.

Certes, ce ne sont pas les « plans d’action » qui ont manqué ces dernières années : loi d’orientation pour l’outre-mer, loi de programme pour l'outre-mer, loi pour le développement économique des outre-mer. Au total, la liste est longue des mesures grandiloquentes, qui ont toutes rendu l’âme ou la rendront, puisque ce budget 2011 manque cruellement d’audace !

Madame la ministre, dix-huit mois après le vote de la LODEOM, les dispositions prévues ne sont toujours pas toutes en vigueur et, un an après votre engagement solennel au Sénat, certains décrets d’application ne sont pas encore publiés.

Le nouveau dispositif de continuité territoriale balbutie, les pratiques des compagnies aériennes flottent dans un clair-obscur. Quant au rapport de synthèse prévu par la loi sur les coûts et les prix des transporteurs soumis à l’obligation de service public, les parlementaires attendent toujours, la transparence aussi !

Nous regrettons que, une fois de plus, l’outre-mer soit relégué au second plan et méprisé de la sorte. Au final, ce budget pour 2011 n’est pas à la hauteur des engagements pris. C’est inadmissible !

Nos concitoyens ultramarins méritent bien mieux que le sort que vous entendez leur réserver dans le présent projet de loi de finances. C'est la raison pour laquelle le groupe CRC-SPG votera contre les crédits de la mission « Outre-mer ».

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

M. Roger Romani remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Laufoaulu

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la discussion sur le budget nous ramène toujours au fondement de cet exercice, la solidarité nationale. Mise en commun selon les moyens, redistribution selon les besoins, telle est la philosophie qui la fonde.

L’examen des crédits de la mission « Outre-mer » est l’occasion de rendre hommage à notre grand pays qui n’oublie pas ses territoires du bout du monde, réfutant l’idée commune selon laquelle « loin des yeux, loin du cœur ».

Mon sentiment de reconnaissance est d’autant plus vif que Wallis-et-Futuna a bénéficié directement de la solidarité nationale, au travers du fonds de secours mis en place dans cette mission « Outre-mer ».

En effet, au mois de mars dernier, un violent cyclone a touché nos îles, causant d’énormes dégâts. Dès le lendemain, madame la ministre, vous avez annoncé l’aide d’urgence, une aide alimentaire et, bien sûr, l’aide pour la reconstruction.

Il reste beaucoup à faire pour effacer complètement les dégâts, mais les familles sont volontaires et enthousiastes dans leurs travaux de reconstruction et reconnaissantes pour l’aide obtenue.

Je veux souligner l’arrivée à Wallis et Futuna, cette nuit, de la TNT, comme partout en outre-mer. Huit chaînes gratuites dans tous les foyers, c’est une ouverture formidable sur le monde. Cette situation est peu commune dans cette région océanienne. C’est encore la solidarité des Français qui le permet.

J’en viens au projet de budget pour 2011. La mission « Outre-mer » voit ses crédits se réduire. La crise est passée par là et l’outre-mer doit naturellement prendre sa place dans l’effort national.

La perspective d’un retour aux moyens antérieurs dès le budget pour 2012 est réjouissante et le sacrifice consenti en ces temps de crise n’en est que mieux accepté.

Pour ce qui concerne plus directement Wallis-et-Futuna, madame la ministre, je souhaite savoir ce qu’il en est de l’aide au fret dont pourra bénéficier ma collectivité selon l’article 24 de la LODEOM. C’est un formidable moyen de dynamiser la production locale, surtout pour la consommation intérieure, et aussi – pourquoi pas ? – une amorce d’exportation qui reste insignifiante aujourd’hui.

Cela m’amène d’ailleurs à vous interroger sur l’insertion de Wallis-et-Futuna dans son environnement régional. Je sais que vous avez demandé à Ubifrance d’assurer un certain nombre de missions fort utiles pour favoriser l’exportation provenant de l’outre-mer. Wallis-et-Futuna pourrait-il bénéficier de cette expertise ?

Ce sont des mesures comme l’aide au fret qui contribuent à étoffer et à renforcer une petite économie locale. Je pense aussi à la prime à la création d’emploi mise en place par l’article 16 de la loi « Girardin », qui a donné de bons résultats. Mais je souhaite vous proposer, madame la ministre, de revoir les modalités de son attribution pour la rendre encore plus performante.

Pouvez-vous aussi me préciser comment évolue le projet de service militaire adapté à Futuna ? Le SMA a fait ses preuves : il a entraîné l’adhésion de tous, et le Président de la République s’est engagé à en doubler les effectifs. Nous comptons beaucoup sur ce dispositif pour former une partie de nos jeunes sur place, notamment ceux qui se voient refuser leur demande d’incorporation dans l’armée.

La formation professionnelle de notre jeunesse constitue un objectif majeur : c’est la garantie d’un emploi. Le dispositif « formation-mobilité » permet à de nombreux jeunes de venir en métropole pour y acquérir les compétences nécessaires pour leur insertion dans le marché du travail.

Une convention du 27 juin 2007 entre l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, la LADOM, anciennement l’ANT, l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer, et le territoire précise les dispositions visant cette formation et donne au Service de l’inspection du travail et des affaires sociales, le SITAS, de Wallis-et-Futuna, la coordination de l’ensemble de préparation à la mobilité.

Cependant, la convention d’objectifs et de moyens 2009-2011 entre le ministère de l’outre-mer et l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité énonce le principe selon lequel cet opérateur de l’État a en charge le suivi intégral des dossiers de formation et la coordination entre les différents acteurs.

Les nouveaux décrets relatifs aux dispositifs de mobilité ont retenu, pour Wallis-et-Futuna, le principe de la gestion dérogatoire.

Compte tenu de ces évolutions réglementaires, sans doute serait-il nécessaire de clarifier les rôles des différents partenaires, c'est-à-dire le SITAS, la LADOM et l’AFPA, l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, pour l’intérêt des jeunes Wallisiens et Futuniens, comme l’a souligné le directeur de la LADOM. La situation actuelle semble confuse et pourrait rapidement aboutir à des conflits de compétence.

Madame la ministre, je tiens à exprimer la grande satisfaction des responsables du territoire quant au suivi de nos jeunes stagiaires par la LADOM en métropole. Toutefois, la phase relative à l’insertion dans le marché du travail nous rend pour le moment demandeurs de plus d’informations. Je n’oublie pas non plus le suivi de nos stagiaires dans le cadre de notre dispositif « Quarante cadres pour le territoire ».

Madame la ministre, j’en viens à un sujet difficile, celui de la desserte inter-îles, dont le poids financier devient de plus en plus insupportable pour le budget de la collectivité. Je relaie donc la demande du territoire pour un renouvellement de l’aide supplémentaire accordée à la fin de 2009 pour le fonctionnement de cette desserte.

Le coût annuel prévisionnel pour 2010 de la subvention d’équilibre versée par le territoire représente 300 millions de francs CFP, soit près de 10 % du budget de fonctionnement de la collectivité.

En 2009, la dotation initiale de l’État a atteint 1, 455 million d'euros, complétée en fin d’année par un million d’euros supplémentaires, correspondant à un engagement pris par le ministre d’alors, en charge de l'outre-mer, d’imputer à l’État le surcoût de la mise en exploitation du deuxième appareil.

Pour 2010, la dotation de l’État s’élève à 1, 6 million d'euros. Les élus souhaitent que l’État puisse apporter en fin d’année un complément de financement équivalent à celui qui a été attribué à la fin de l’année 2009.

La subvention d’équilibre, dénommée depuis 2009 « subvention de fonctionnement », correspond à un engagement pris par le ministre en charge de l’outre-mer. Son montant a beaucoup fluctué ces dix dernières années. Après avoir atteint un sommet de plus de 2 millions d’euros en 2004, pour permettre au budget territorial de revenir à l’équilibre, il s’est stabilisé ces dernières années pour atteindre 506 998 euros en 2008 et en 2009.

En 2010, son montant a été fixé à 470 000 euros, une nette baisse par rapport aux deux années antérieures.

Aussi, compte tenu des charges exceptionnelles auxquelles le territoire a eu à faire face en 2010, notamment avec le cyclone Tomas qui a entraîné, au-delà des dégâts directs et immédiats, une baisse de l’activité économique et le nécessaire financement, notamment, de la reconstruction du réseau téléphonique de Futuna, il serait formidable que l’État puisse apporter, en fin d’année, un complément de financement, de telle sorte que la subvention atteigne un niveau au moins équivalent à celui de 2009.

Dans un tout autre registre, je souhaite, en tant que représentant du Sénat au comité national de l’Initiative française pour les récifs coralliens, l’IFRECOR, dire l’importance de cet organisme pour nos collectivités d’outre-mer.

Ce dernier existe maintenant depuis 1999 et effectue un travail essentiel. Le ministère de l’outre-mer, qui en partage la tutelle avec le ministère de l’écologie, finance les comités locaux, et je l’en remercie. Le prochain comité national fera, la semaine prochaine, le bilan de la deuxième phase, pour la période 2006-2010, de mise en œuvre du plan cadre. Il fera également adopter le contenu et l’animation de la troisième phase, qui courra de 2011 à 2015.

Enfin, puisque le temps m’est compté, je voudrais, d’ores et déjà, avant d’y revenir plus longuement au moment de la discussion de l’amendement que nos rapporteurs spéciaux de la commission des finances ont décidé de déposer, sans concertation et avec ce que je ressens un peu comme du mépris

Exclamations.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Laufoaulu

Le budget prévu sera sans doute insuffisant, car la communauté hospitalière de territoire, CHT, de Nouméa, vers laquelle nous sommes obligés d’évacuer bon nombre de nos malades, augmente ses tarifs de plus de 5 % chaque année ! Ne pourriez-vous, madame la ministre, nous aider dans nos relations avec la CHT ?

Madame la ministre, à la veille de 2011, année de l’outre-mer, je vous renouvelle ma confiance et voterai ces crédits.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Madame la ministre, il y a une phrase que vous aimez prononcer depuis quelque temps : « L’outre-mer doit s’inscrire également dans l’effort national de maîtrise de la dépense publique ». C’est une phrase qu’apprécie fortement votre ministre de tutelle, puisqu’il n’a pas hésité à déclarer, s’adressant aux maires ultramarins lors du récent Congrès des maires : « L’État s’impose des règles très strictes pour limiter la casse, les déficits et ce qui peut nous arriver avec Bruxelles ; cela s’applique à tout le monde. L’outre-mer ne peut être totalement exonéré de cet effort national et, sur ce sujet, Marie-Luce Penchard a tenu un discours de vérité, un discours de femme d’État ».

C’est un très bon point pour vous, madame la ministre ! Mais, vous le savez certainement mieux que M. Hortefeux, la situation des outre-mer n’est en rien semblable à celle de la métropole et chaque territoire d’outre-mer présente ses propres particularités. De ce fait, ils méritent une attention différente.

Soyez rassurée, madame la ministre, je ne vais pas vous faire un inventaire à la Prévert de tous les maux des outre-mer, ni vous rappeler le malheureux souvenir des événements qui ont émaillé nos territoires en 2009.

Je souhaite m’inscrire non dans la complainte, mais dans la volonté d’agir avec les moyens que vous êtes censée mettre à la disposition de mon département de Guyane dans cette période de restriction budgétaire.

Les crédits qui lui sont réservés dans le projet de loi de finances pour 2011 s’élèvent, toutes missions confondues, à 1, 3 milliard d’euros, soit une baisse notable de 40 millions d’euros par rapport à 2010, sur laquelle je n’épiloguerai pas. Considérons-la comme notre tribut à l’effort national !

Plus que sur l’évolution des chiffres, concentrons-nous sur l’effectivité des actions, sur leur adéquation à la réelle problématique du territoire. Le temps qui m’est imparti m’oblige à n’intervenir que sur quelques questions, que je juge essentielles.

Je commencerai par l’enseignement scolaire dont la situation demeure particulièrement préoccupante, au point qu’un ancien recteur n’a pas hésité à conférer à la Guyane le triste privilège « des plus mauvais résultats de France sur tous les plans ».

Nous vivons des situations ubuesques, dont l’une a récemment poussé de jeunes étudiants à bloquer le rectorat. Ils manifestaient leur colère d’avoir découvert, après s’être inscrits à une formation, en l’occurrence, le brevet de technicien supérieur, BTS Études et économie de la construction, qu’elle ne serait pas lancée. C’était un « BTS fantôme », pour reprendre leurs propres termes… Tout cela témoigne d’une situation catastrophique, qui devrait nécessiter la mise en place d’un « plan Marshall ». Or tel n’est pas le cas, on en est même très loin !

Tout en saluant la pérennisation de la dotation spéciale d’équipement scolaire, je regrette que la mission « Enseignement scolaire » elle-même ne progresse que de 2 %, taux nettement inférieur à la population scolarisable, laquelle progresse de plus de 5 % chaque année. Doit-on continuer, madame la ministre, à enfoncer dans le gouffre de l’illettrisme et des échecs scolaires une jeunesse aussi nombreuse ?

J’en viens à un autre sujet d’importance, le logement, qui est aussi une priorité urgente. Et pour cause ! En Guyane, 15 % de la population vit dans des logements insalubres ou illicites. Ces derniers, au nombre de 19 000, abritent 30 000 personnes. En outre, 13 000 demandes de logements ne peuvent être satisfaites dans le secteur locatif social. Pourtant, 80 % de la population est éligible au logement social.

C’est une véritable crise aigüe du logement à laquelle on assiste et que l’on n’arrive pas à juguler. Il est vrai que vous avez fixé des objectifs encore plus ambitieux que ceux qui figuraient dans la loi instituant le droit au logement opposable, dite loi DALO, soit 5 700 logements locatifs sociaux par an, contre 5 400 pour l’ensemble des DOM, en misant sur une stabilisation de la Ligne budgétaire unique, la LBU, et sur le nouveau dispositif de défiscalisation créé par la LODEOM.

Mais quand on regarde de plus près, on s’aperçoit que vous faites reculer de 30 % les crédits de paiements de la LBU et que les dossiers immobiliers montés en défiscalisation ont du mal à sortir tant la procédure paraît complexe. Il en résulte que, pour l’heure, les résultats sont loin d’être à la hauteur des besoins. En conséquence, madame la ministre, peut-on espérer que votre système de financement du logement social, que vous défendez si bien, deviendra vite opérationnel ?

Madame la ministre, un troisième point m’a fortement interpellé dans l’examen de votre budget. Il s’agit, outre les retards pris dans l’application des mesures de la LODEOM, de la réduction plus que significative de crédits, voire leur suppression. Ils concernaient pourtant des actions qui, selon moi, concouraient ou pouvaient concourir à la politique de développement endogène, dispositif préconisé par le chef de l’État pour sortir les outre-mer de leur non-développement.

Parmi les sujets essentiels, je veux citer le rabotage des niches fiscales avec, notamment, l’exclusion des investissements réalisés dans le secteur photovoltaïque du champ des investissements éligibles à la défiscalisation. C’était, entre autres, pour beaucoup de communes de Guyane encore enclavées, la seule possibilité de fournir en électricité leurs nombreux sites à l’écart. L’amendement que j’ai présenté, à cet effet, même s’il a semblé être entendu par M. Baroin, ancien ministre de l’outre-mer, bien au fait des choses, n’a pas été retenu pour autant.

Je citerai également un autre sujet d’importance, la réduction des crédits du Fonds exceptionnel d’investissement, le FEI. Ce fonds, créé par l’article 31 de la LODEOM afin de participer au financement d’équipements structurants en partenariat avec les collectivités territoriales d’outre-mer, voit le montant de ses autorisations d’engagement ramené à 10 millions d’euros. Les autorisations d’engagement ouvertes en 2010 s’élèvent à près de 60 millions d’euros pour un montant en provenance du FEI de près de 39 millions d’euros destiné à des opérations de financement d’écoles, de réseaux d’assainissement ou d’infrastructures de transport.

La Guyane a bénéficié, à elle seule, au titre de ce fonds, de 4, 9 millions d’euros. Il paraît donc incompréhensible qu’il soit ramené à un tel montant.

Je citerai, enfin, l’appui à l’accès aux financements bancaires auquel je délivre une mention spéciale ! Cette initiative répondait à une demande récurrente des socioprofessionnels locaux. Elle a été relayée par la proposition n° 34 de la mission d’information du Sénat sur la situation des DOM, dont l’objet était : « Étendre aux agriculteurs et aux pêcheurs des départements outre-mer les dispositifs de garantie et d’aide applicables en métropole. »

Tout en saluant cette initiative, il convient d’en limiter la portée : le fonds de garantie ne sera doté que de 5 millions d’euros en crédits de paiement en 2011, et aucun crédit n’est prévu en autorisations d’engagement pour 2011, alors que le fonds était doté de 10 millions d’euros.

En dépit de l’instauration de ce fonds, les banques continuent à voir avec la plus grande frilosité la clientèle venant des secteurs productifs.

Par ailleurs, un certain nombre de dispositifs existant en métropole, les dispositifs OSEO, ne sont toujours pas appliqués aujourd’hui dans les DOM, même s’il existe une convention-cadre de partenariat signée entre OSEO et l’Agence française de développement, l’AFD, dont « l’objet est d’étendre la gamme des produits financiers distribués par l’AFD qui concerne désormais l’ensemble des produits OSEO ». Cela demeure un point à éclaircir ou à clarifier dans les délais les plus brefs si l’on veut réellement faire décoller économiquement « les outre-mer ».

Madame la ministre, mon temps est malheureusement écoulé, et je le regrette, car j’aurais voulu également aborder la situation catastrophique de la santé en Guyane. À ce propos, quid du plan santé outre-mer ?

J’aurais aimé vous parler aussi de l’exploitation aurifère et du rôle qu’elle peut jouer pour la Guyane, de l’orpaillage clandestin et de ses ravages.

Je vous remercie à l’avance de bien vouloir répondre à toutes les questions que je vous ai posées.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. –M. Jean-Paul Virapoullé applaudit également.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le budget qui nous est soumis s’inscrit dans le contexte que nous connaissons. Les finances publiques sont en berne cette année, et les perspectives à moyen terme ne poussent pas davantage à l’optimisme.

Dans cette situation, le budget de l’outre-mer accuse donc une diminution raisonnable, que je qualifierai, pour ma part, de contribution républicaine.

Ainsi, il ne sera pas dit demain que l’outre-mer a contribué à l’augmentation du déficit et de la dette publique, au moins en 2011.

En effet, si je récuse, au nom de cette contribution républicaine, l’idée que l’on parle d’effort de la nation lorsqu’il s’agit des dépenses consacrées à l’outre-mer, j’approuve, en revanche, qu’il soit demandé un effort à l’outre-mer comme au reste de la nation. Celui-ci se traduit par une baisse de 0, 6 % des autorisations d’engagement et de 2, 3 % des crédits de paiement.

Certes, les retards demeurent et, de ce point de vue, je comprends l’amertume de certains de mes collègues. Je la comprends d’autant mieux que la LODEOM votée voilà à peine un an subit, par la force des choses, le « coup de rabot » national.

En rabotant les niches fiscales dont fait partie la défiscalisation outre-mer, l’État espère diminuer son manque à gagner fiscal. Il est vrai que la remise en cause des politiques de développement de manière récurrente n’est pas de nature à favoriser la stabilité du cadre économique, qui est si nécessaire pour susciter la confiance des investisseurs et les inciter à prendre des risques outre-mer.

Je me permets d’insister : si la contribution me semble légitime, il faut néanmoins espérer désormais que l’objectif d’économie de la dépense fiscale ne se traduise pas par la diminution de l’investissement dissuadé par le « coup de rabot ». Dans ce cas, on aurait alors créé un cercle vicieux qui obligerait l’État à rendre d’une main ce qu’il aurait gagné de l’autre.

Vous devez sans doute, au moins pour certains, être étonnés de m’entendre parler ainsi de la défiscalisation. Je crois que chacun ici connaît la position de Saint-Barthélemy, donc la mienne, sur le sujet. En réalité, ce n’est pas tant la défiscalisation en elle-même que je soutiens que la stabilité du cadre économique.

À cet égard, madame la ministre, mes chers collègues, je ne peux que me réjouir des amendements adoptés par l’Assemblée nationale sur l’initiative de Gaël Yanno. Je reste, en effet, persuadé que la défiscalisation ne peut être un outil utile à l’économie qu’à la condition que l’investissement ne soit pas uniquement guidé par l’opportunisme fiscal. C’est pour cela que la collectivité de Saint-Barthélemy a choisi d’autoriser les investissements en défiscalisation dans des secteurs ciblés et en nombre limité.

Ainsi, les dispositions relatives à la transparence et, si j’ose dire, à la moralisation du dispositif, introduites par l’Assemblée nationale, vont dans le sens d’une saine clarification des règles bénéficiant avant tout à l’économie locale. De même, l’augmentation de 2 % du taux de rétrocession s’inscrit dans cette même logique.

Selon moi, ces amendements adressent un message consistant à rappeler l’objectif principal de la défiscalisation, à savoir l’augmentation de l’investissement en outre-mer, la compensation du déficit de capitalisation, et pas seulement la réduction de l’impôt. Il était plus que temps !

C’est à ce prix que l’outre-mer cessera d’être considéré comme un terrain de jeux pour payer moins d’impôts, au mépris de l’intérêt de l’économie locale et du développement durable.

Dans cette même philosophie, j’ai cosigné les amendements présentés par notre collègue Jean-Paul Virapoullé, afin d’introduire un agrément au premier euro pour les investissements dans le domaine du photovoltaïque, car l’accroissement des contrôles est une autre manière de faire des économies en évitant une utilisation détournée des fonds publics.

J’aurais néanmoins souhaité que ce principe d’agrément au premier euro soit étendu à l’ensemble des investissements éligibles. Cela aurait renforcé l’effet de la disposition de la LODEOM, fort opportunément introduite par la commission des finances, qui permet aux présidents de région de rendre un avis sur les projets d’investissement soumis à agrément. En effet, qui mieux que les collectivités locales peut juger de l’opportunité d’un investissement en ayant une vue globale sur l’économie ?

Une entreprise ne devrait pas, en effet, avoir la possibilité d’investir dans un domaine qui ne correspond ni aux besoins réels ni à la volonté politique de la collectivité concernée, d’autant que, lorsqu’on parle de défiscalisation, il s’agit d’argent public. On se situe donc du point de vue non pas uniquement de l’intérêt de l’entreprise, mais aussi de celui de la collectivité.

C’est d’ailleurs pour cela que je vous félicite, madame la ministre, d’avoir préservé le logement social car, même si Saint-Barthélemy n’est pas concernée, s’il est un secteur qui relève de l’action publique et de la solidarité, c’est bien celui du logement.

Pour terminer sur la défiscalisation, permettez-moi de dire quelques mots sur le photovoltaïque, qui a provoqué des remous en métropole comme en outre-mer. Dans ce débat, je distinguerai l’investissement artisanal ou familial des projets photovoltaïques à caractère industriel.

Le premier me semble devoir être encouragé, car il contribue largement à faire évoluer les mentalités et le rapport à l’énergie en favorisant une meilleure gestion de sa consommation. Plus les foyers deviendront autonomes grâce au solaire, plus ils auront conscience de leur consommation dès lors qu’ils en sont les gestionnaires. C’est mon avis. On pourrait donc, outre-mer mieux qu’ailleurs, développer ce type de comportement compte tenu de la disponibilité de l’énergie solaire. Je reste pour autant conscient du coût élevé de l’équipement, mais convaincu que le déplacement de l’avantage fiscal sur le solaire privé pourrait favoriser une baisse des prix.

Je suis moins enthousiaste s’agissant des centrales photovoltaïques. La « surchauffe » provoquée par un surcroît d’investissements évoquée par nos collègues de l’Assemblée nationale montre bien que le secteur est particulièrement dynamique. La suppression de l’avantage fiscal ne devrait donc pas se traduire par un arrêt total des investissements. On sait en outre que, au-delà de 30 % d’énergies renouvelables, la stabilité du réseau électrique n’est plus assurée.

Je partage, là encore, l’avis de mon collègue Jean-Paul Virapoullé. Par son amendement, celui-ci a proposé un compromis afin de ne pas remettre en cause les projets engagés.

J’évoquerai enfin un point qui concerne particulièrement Saint-Barthélemy. Comme j’ai eu à vous l’exposer, madame la ministre, il me plairait que les conditions d’accès au fonds d’échanges à but éducatif, culturel et sportif pour les associations sportives de Saint-Barthélemy puissent être adaptées, afin de tenir compte notamment de leur difficulté à constituer des ligues, eu égard à l’étroitesse de l’île et au nombre de licenciés. Ces associations sont, dès lors, tributaires de fréquents déplacements pour les compétitions et le système actuel contribue à limiter les ambitions, voire à exclure nos jeunes de toute compétition à partir d’un certain niveau.

Madame la ministre, au-delà de ce budget, cette discussion est l’occasion de vous dire ma satisfaction de la politique conduite en faveur de l’outre-mer.

Les engagements du CIOM ont été respectés. Toutes les conditions sont actuellement réunies pour que la LODEOM puisse jouer pleinement son rôle ; je pense en particulier aux dispositions relatives à la continuité territoriale. L’année 2011 sera l’année des outre-mer. Dans la mise en œuvre progressive de la politique de la mer, l’outre-mer a retrouvé la place qu’il mérite, puisque, à cet instant, tous les comités maritimes ont été mis en place et sont en ordre de marche – ce n’est pas le cas sur la façade maritime métropolitaine – et que le secteur du logement, secteur prioritaire, a été préservé.

Je ne reviendrai pas sur la diminution globale des crédits, l’essentiel ayant été dit.

Il va sans dire, madame la ministre, mes chers collègues, que je voterai les crédits de la mission « Outre-mer ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. Adrien Giraud applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Nous voici de nouveau réunis, madame la ministre, pour l’examen du projet de budget de la mission « Outre-mer ».

Comme vous le savez, les départements d'outre-mer cumulent un grand nombre de handicaps structurels économiques et sociaux. Comme vous le savez aussi, cette situation est particulièrement aggravée par la crise à laquelle nous sommes confrontés depuis deux ans.

En 2009, le PIB outre-mer a reculé de 6, 5 %, et les investissements de 25 %.

La précarité progresse inexorablement : plus de 20 % des ménages vivent désormais sous le seuil de pauvreté. Le chômage est trois fois plus élevé que dans l’Hexagone et touche particulièrement les jeunes et les plus de 50 ans.

Les collectivités locales sont exsangues. Elles compensent, tant bien que mal, depuis trois décennies, une situation globale de développement défavorable, accentuée par des ressources fiscales extrêmement faibles.

Cette dramatique réalité, madame la ministre, vous la connaissez. Et pourtant tout indique dans les prévisions de la mission « Outre-mer » pour 2011 que vous n’êtes pas parvenue à la faire comprendre à vos collègues de Bercy.

Dans ces prévisions pour 2011, l’outre-mer est en effet perdant sur tous les fronts.

Premièrement, cela a été dit et répété, les crédits de la mission « Outre-mer » diminuent en crédits de paiement de 2, 3 %, soit deux fois plus que le reste des dépenses de l’État.

Deuxièmement, la volte-face opérée sur les dispositifs de défiscalisation va, de toute évidence, finir de mettre à mal les investissements privés.

Mais soyons concrets ! Examinons les points clés de votre budget.

Sur le logement, l’État ne respecte pas ses engagements.

Alors que la LBU était censée demeurer le « socle du financement du logement social », vous avez procédé à un véritable « tour de passe-passe » en la remplaçant, dans les faits, par la défiscalisation.

Ainsi, les crédits de paiement consacrés à la construction de logements locatifs sociaux et très sociaux diminuent de 34 millions d’euros. À titre d’illustration, cela équivaut purement et simplement à la suppression de l’ensemble de la LBU pour la Martinique.

La manœuvre peut vous sembler habile, mais, dans la pratique, elle va contribuer à l’accélération de l’effondrement, largement engagé, du secteur du BTP et évidemment à la non-production des logements nécessaires.

Parallèlement, les aides pour l’accession à la propriété diminuent de 8 millions d’euros, et les aides pour l’amélioration de l’habitat privé de 3 millions d’euros.

En matière d’aménagement du territoire, les crédits destinés aux contrats de plan État-région et aux contrats de projet et de développement sont en baisse de 12 millions d’euros !

En ce qui concerne la continuité territoriale, les fonds dédiés sont rognés de 3 millions d’euros, et les moyens des collectivités territoriales amputés de 31 millions d’euros.

Les crédits d’appui à l’accès au financement bancaire diminuent également en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, avec une baisse respective de 18 millions d'euros et de 2, 5 millions d'euros.

Même les moyens en faveur de l’emploi, qui est pourtant présenté comme la priorité de ce gouvernement et de votre ministère, se trouvent dégradés. Ainsi, les crédits pour la compensation des exonérations de charges sociales sont réduits de 34 millions d’euros !

Par ailleurs, le décret d’application concernant l’aide au fret prévue par la LODEOM n’est toujours pas sorti, alors que la TVA NPR a été supprimée dès la loi de finances pour 2009.

J’arrête ici cette triste liste pour ce qui est de la mission « Outre-mer ».

Le plus grave, c’est que, parallèlement, sont prises des mesures de remise en cause de la défiscalisation, qui vont bien au-delà du coup de rabot national de 10 %.

En 2006, Nicolas Sarkozy, qui n’était pas encore Président de la République, parlait ainsi de la loi Girardin de 2003 : « Des engagements ont été pris par l’État sur quinze ans, ils doivent être respectés. »

En 2008, deux ans après ce discours, les dispositifs d’exonération des charges sociales et de défiscalisation sont revus à la baisse, et ce sans évaluation préalable.

En 2009, la LODEOM réécrit, une nouvelle fois, ces dispositifs.

Aujourd’hui, un an plus tard, ils sont de nouveau remis en cause dans le projet de loi de finances pour 2011 que nous examinons.

Désormais, la chose est convenue, à chaque loi de finances, hop ! un coup de rabot.

Il est temps que le Gouvernement comprenne que nous avons besoin de dispositifs stables et pérennes pour assurer notre développement. Qu’il pourfende les tricheurs et les profiteurs, c’est nécessaire, et même urgent. Mais, de grâce ! qu’il ne place pas les acteurs économiques des outre-mer dans une situation d’insécurité juridique et financière permanente.

Madame la ministre, les outre-mer, ce sont des territoires et des hommes, pas une variable d’ajustement des politiques budgétaires d’un État qui n’honore pas ses engagements.

L’année 2011, année des outre-mer, devrait être, à mon sens, l’année des retards rattrapés. Malheureusement, j’ai bien peur qu’elle ne soit que l’année des occasions perdues !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – MM. Adrien Giraud et Jean-Paul Virapoullé applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Soibahadine Ibrahim Ramadani

Madame la ministre, je tiens à vous remercier chaleureusement d’avoir réservé à Mayotte votre premier déplacement outre-mer au lendemain de votre reconduction dans vos fonctions.

S’agissant du projet de budget 2011 de l’outre-mer, je note tout d’abord que c’est un budget contraint, qui participe à l’effort national de réduction des déficits publics voulu par le Président de la République.

Les crédits spécifiques de la mission « Outre-mer » obéissent aux mêmes règles d’évolution. Ils s’élèvent à 2, 15 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 1, 97 milliard d’euros en crédits de paiement, contre respectivement 2, 6 milliards d’euros et 1, 99 milliard d’euros en 2010.

Toutefois, les projections 2011-2013 des crédits de la mission indiquent une légère tendance à la hausse.

Au sein de ces crédits, la part de Mayotte progresse de 4, 2 % en autorisations d’engagement, avec 607, 48 millions d’euros en 2011, contre 582, 75 millions d’euros en 2010, mais diminue en crédits de paiement, avec 574, 64 millions d’euros en 2011, contre 576, 10 millions d’euros en 2010.

Ce budget appelle quatre remarques.

Premièrement, 44 % des crédits sont consacrés à l’enseignement scolaire, avec une enveloppe de 252, 43 millions d’euros en crédits de paiement ; cette mission est portée par deux mesures fortes.

Il s’agit, d’une part, du doublement des crédits affectés aux constructions scolaires du premier degré, soit 10 millions d’euros issus de la dotation scolaire et du fonds d’aide à l’équipement communal et visant à résorber le déficit antérieur en nombre de salles de classes et à absorber la poussée démographique. Cependant, cette enveloppe est insuffisante si l’on ajoute la nécessité de rénover les écoles en vue de leur rétrocession aux communes en 2013.

Il s’agit, d'autre part, d’un nouvel engagement de l’État, essentiel pour acter la poursuite du financement des constructions et rénovations des collèges et des lycées en vue d’accompagner les évolutions démographiques et de préparer les transferts de compétences.

Deuxièmement, il est à noter le maintien des dotations spécifiques des communes jusqu’en 2011 pour certaines et jusqu’en 2013 pour d’autres, afin de garantir leurs ressources et de préparer l’arrivée de la fiscalité locale de droit commun en 2014. Pour gagner du temps, je ne mentionnerai pas les montants des dotations prévues, tout le monde les connaît.

Je saisis cette occasion pour saluer l’envoi prochain à Mayotte d’une mission chargée d’examiner les difficultés financières de nos collectivités locales, ce qui rejoint le souhait exprimé lors de notre séminaire parlementaire du 26 novembre dernier.

Troisièmement, il faut souligner la montée en puissance des crédits du fonds de développement économique, social et culturel, doté, en 2011, de 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2, 6 millions d’euros en crédits de paiement, contre 600 000 euros en 2010. Vous le savez, 70 % des crédits du fonds seront affectés au secteur public, et 30 % au secteur privé. Précision importante, ces crédits seront disponibles dès l’installation du département.

En revanche, le montant du fonds exceptionnel d’investissement outre-mer chute de 40 millions en 2010 à 10 millions d’euros en 2011. Les crédits alloués à ce fonds viennent en complément de ceux qui sont déjà affectés au contrat de projet État-Mayotte 2008-2013, lesquels connaissent une hausse de 8, 2 % en 2011. À ce propos, une question se pose : où en est la piste longue, après la mise en concession de l’aérogare, l’arrivée récente de la TNT, la télévision numérique terrestre, et prochainement du haut débit en 2011 ?

Madame la ministre, si les crédits inscrits dans ce fonds devaient se révéler insuffisants au regard des besoins nouveaux créés par la départementalisation, il sera toujours possible, je l’espère, d’abonder ces crédits puisque votre plan budgétaire court de 2011 à 2013 et que ce fonds s’étend sur trois ans.

Quatrièmement, la revalorisation de l’allocation des personnes âgées sans retraite interviendra avec effet rétroactif à compter du 1er avril 2010, sous réserve de la parution du décret correspondant, tandis que la revalorisation des allocations pour adultes handicapés et pour élèves handicapés interviendra, dans les mêmes conditions, à compter du 1er janvier 2010.

Je souhaite maintenant aborder rapidement un certain nombre d’autres points.

Comme vous le savez, madame la ministre, l’aquaculture est une filière prometteuse, qui concourt au développement endogène à Mayotte ; c’est pourquoi il est urgent de la soutenir grâce en particulier à une parution rapide du décret relatif à l’aide au fret, prévue par la LODEOM.

Par ailleurs, madame la ministre, pourriez-vous préciser l’état d’avancement du projet de création d’un établissement public foncier arrêté par le CIOM ?

En outre, je salue la création récente de l’Observatoire des mineurs isolés, à la suite des propositions de notre excellente collègue Isabelle Debré, en espérant que l’on pourra ainsi mieux encadrer ces enfants, notamment en matière d’obligation scolaire.

Après la mise en place de la carte vitale, ce qui bloque aujourd’hui c’est l’absence d’une CMU et d’une CMU complémentaire, indispensables, me semble-t-il, pour envisager une mise en vigueur éventuelle de l’aide médicale d’État, l’AME. Sur ces points, pourriez-vous, madame la ministre, nous indiquer les intentions du Gouvernement, dans la lignée de la mission qui séjournera à Mayotte du 6 au 10 décembre prochain ?

Enfin, il est encourageant de noter que le Sénat prolonge, jusqu’au 30 juin 2011, la défiscalisation des projets d’installation de panneaux photovoltaïques en outre-mer dont la puissance est inférieure à 20 kilovoltampères.

Madame la ministre, sous le bénéfice de ces quelques observations, je voterai bien sûr votre projet de budget pour 2011.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP. – M. Adrien Giraud applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Lise

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si je devais m’en tenir à un exercice de comparaison des crédits de la mission « Outre-mer » votée en 2010 et de ceux qui sont prévus pour 2011, je pourrais me contenter de dire que, dans le contexte budgétaire actuel, vous avez su, madame la ministre, obtenir un arbitrage assez favorable. En effet, votre budget ne baisse que de 2, 3 % en crédits de paiement. Je mesure bien les difficultés que vous avez dû surmonter pour arriver à ce résultat.

Mais, vous le savez bien, ce n’est pas ce qu’attendent de moi ceux que je représente au sein de cette Haute Assemblée. Car, à l’évidence, ils souhaitent que je saisisse l’occasion qui m’est donnée d’appeler, une fois encore, l’attention du Gouvernement et du Sénat sur une situation qui, vous le savez aussi, est plus que préoccupante.

La Martinique, en effet, va très mal ! Elle s’enfonce dans une récession de plus en plus inquiétante, qui dépasse déjà les 7 %.

Pratiquement tous les secteurs d’activité sont touchés, avec évidemment pour conséquence une détérioration continue du marché de l’emploi. Le nombre de demandeurs d’emploi a ainsi progressé de 4, 1 % en un an, portant le taux de chômage à plus de 25 % ! Un pourcentage qui, s’agissant des jeunes de moins de 25 ans, dépasse 61 % !

Parmi les secteurs les plus affectés se trouve celui du bâtiment et travaux publics, qui connaît cette année une nouvelle réduction de son chiffre d’affaires, après une baisse de 30 % en 2009, la baisse d’activité se faisant surtout ressentir dans le secteur du logement privé.

Le tourisme est aussi confronté à de très grandes difficultés. Il accuse une baisse de plus de 8 % du tourisme de séjour et de 20 % du tourisme de croisière.

Dans ces conditions, la situation sociale ne peut que continuer à se dégrader : un nombre croissant de Martiniquais subit les conséquences du chômage et de l’emploi précaire, le nombre d’allocataires du RMI est reparti à la hausse, un cinquième de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté et, enfin, la situation des retraités se détériore de plus en plus.

Les collectivités territoriales font évidemment le maximum pour jouer le rôle d’amortisseur social. Dans le même temps, elles s’efforcent de soutenir les secteurs économiques en crise, mais elles connaissent presque toutes de grandes difficultés financières. C’est notamment le cas, bien sûr, du département, qui doit faire face à une véritable explosion de la demande sociale alors même qu’il voit geler des dotations déjà insuffisantes et croître une dette de l’État qui atteint plus de 71 millions d’euros.

Aussi, on comprend le sentiment de déception qu’éprouvent les Martiniquais face à la présente loi de finances. Ils estiment, à bon droit, qu’en matière d’économies budgétaires les départements d’outre-mer ont, de façon anticipée, très largement apporté leur contribution.

En effet, la LODEOM, votée en mai 2009, comportait déjà des mesures de restriction en matière de défiscalisation et d’exonération de charges sociales pour les entreprises. Qui plus est, certains dispositifs importants de cette loi ne sont toujours pas applicables ou susceptibles d’être concrètement mis en œuvre, alors même qu’ils ont été présentés comme particulièrement prometteurs. C’est le cas des zones franches d’activité, de l’aide au fret, de l’aide à la rénovation hôtelière et, surtout, du nouvel outil de défiscalisation dans le logement social.

Les économies ainsi réalisées par l’État peuvent être évaluées à près de 900 millions d’euros. On aurait dû en tenir compte dans l’application de la politique actuelle de rigueur.

En effet, ces économies ont été opérées sur des dispositifs trouvant, pour la plupart, leur justification dans la nécessité d’apporter des réponses adaptées à un mal-développement structurel. C’est ce dernier que l’on s’empresse de perdre de vue dès qu’il s’agit de passer des grands effets d’annonce à l’action effective, tout comme on oublie alors les accents lyriques sur ce qu’apportent les outre-mer à la France et à l’Europe pour se livrer aux plus froids raisonnements comptables.

Et ce sont ces raisonnements comptables qui prévalent actuellement dans le cadre d’une politique marquée par une réduction de l’effort global pour l’outre-mer, de près de 1 % en autorisations d’engagement après une baisse de 4, 2 % en 2010, et par des coups portés à la défiscalisation. Je regrette évidemment que le Gouvernement soit resté sourd aux propositions d’amendements tendant à sauver un secteur innovant comme celui du photovoltaïque.

Madame la ministre, vous l’avez compris, la déception que je suis obligé d’exprimer ne concerne pas essentiellement votre budget. Je tiens, malgré tout, à m’interroger sur le niveau des crédits inscrits sur la LBU. Je connais le discours sur leur sous-consommation. Je veux cependant attirer votre attention sur le fait que cette année, en Martinique, le CDH du 16 novembre a mis en évidence que 99 % des crédits de paiement délégués étaient déjà consommés et qu’il existait, compte tenu des programmes locatifs sociaux pouvant encore être lancés, un besoin complémentaire en autorisations d’engagement de 10, 7 millions d’euros pour 2010.

En réalité, c’est donc l’ensemble de la politique actuellement menée qui s’avère particulièrement décevante face aux enjeux réels du développement des départements d’outre-mer. Elle l’est, évidemment, à la mesure des espoirs suscités par de trop fréquents et bruyants effets d’annonce.

Madame la ministre, ce qu’il faut, c’est une courageuse remise en cause de cette politique. Cela pourrait commencer par une réelle attention portée aux différents amendements qu’il nous a été possible de déposer aujourd’hui.

Ensuite par la mise en œuvre rapide, et sans inutile contrainte procédurale, de tous les dispositifs de la LODEOM et de toutes les mesures du Comité interministériel de l’outre-mer.

Enfin, par l’inscription de crédits supplémentaires, dans le cadre d’un collectif budgétaire, de façon à dynamiser la politique du logement social et à redonner aux collectivités territoriales asphyxiées les moyens de faire face à leurs responsabilités et à celles que l’État les incite à assumer à sa place.

En ce qui concerne la Martinique, vous le comprendrez, madame la ministre, j’ajoute, pour terminer, le souhait que, conformément aux engagements du Président de la République, la collectivité unique sur laquelle les électeurs ont été consultés il y a dix mois fasse l’objet d’un débat au Parlement le plus rapidement possible.

Dans une situation aussi alarmante que celle que connaît la Martinique, on comprendrait difficilement que l’on tarde trop à doter ses élus d’un instrument de nature à accroître l’efficacité des politiques locales de développement.

Un développement qu’il devient urgent de concevoir et de promouvoir à la hauteur de l’engagement des forces vives de la Martinique et des attentes d’une jeunesse impatiente de participer à la construction de son avenir.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce n’est pas facile d’être ministre de l’outre-mer en période de crise. Ce n’est pas facile non plus de diriger ou d’appartenir à la majorité, à l’opposition, mais il faut prendre ses responsabilités ! Je vais, en quelques mots, vous dire ce que je pense.

Je considère que l’effort de l’État à l’égard de l’outre-mer n’a pas fait défaut et les chiffres que nos rapporteurs de la commission des finances ont signalés tant en crédits budgétaires qu’en effort sur la défiscalisation, qui représente pas moins de 3, 4 milliards d’euros, montrent que la solidarité nationale continue à jouer en cette période difficile.

Mais connaissez-vous des régions où il n’y a pas de problème ? Connaissez-vous des régions où il n’y a pas de chômage ? même si la situation est plus grave chez nous. C’est la raison pour laquelle je pense qu’il faut poser le décor de notre action pour les mois à venir.

Madame la ministre, ce n’est pas tant au niveau des crédits que sur la mise en œuvre des politiques qu’il faut agir. Le CIOM de l’année dernière a fait naître une grande espérance outre-mer et lorsque nous circulons sur le terrain, nous constatons que tous les efforts faits – je prends l’exemple de la LODEOM – à travers l’amendement « bagasse » et celui sur l’impôt foncier, avec la réorientation des crédits budgétaires et la défiscalisation sur le logement social, ont suscité un grand espoir et sauvé des pans entiers de l’économie locale.

Mais – je le dis parce que je soutiens totalement la majorité, le Président de la République et le Gouvernement – je suis désolé de constater sur le terrain que les efforts que nous faisons ne sont pas bien ressentis par la population. La faute à qui ?

D’abord, les populations de métropole, d’Europe, du monde et des outre-mer sont inquiètes. Les crises se succèdent avec une fréquence rapprochée. C’est vrai ici, c’est vrai chez nous ! Mais, noyées dans l’océan, ces crises font plus mal en outre-mer. L’inquiétude y est plus grande et le vécu est donc ressenti différemment.

À cette condition réelle s’ajoute une seconde raison. Madame la ministre, si vous avez fait personnellement des efforts considérables pour mettre en œuvre la LODEOM, je sais, en tant que parlementaire de longue date, que le ministère de l’outre-mer n’est pas toujours soutenu par les autres ministères comme il devrait l’être !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

C’est vrai, et je suis là pour le dire !

Il faut que le Gouvernement soit plus solidaire de notre ministre de l’outre-mer. Pourquoi attendre un an pour que les décrets d’application soient publiés ? Pourquoi prendre des circulaires ou des décrets qui ont retardé ou quelque peu dénaturé notre politique de logement social ? Pourquoi nous dire ici même qu’il fallait un groupement d’intérêt public pour l’ensemble de l’outre-mer et aujourd’hui s’apercevoir qu’il en faut un à La Réunion et un autre dans les Antilles !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Effectivement, on l’avait dit en commission des lois ! C’est retarder la reprise en main des terres en indivis qui auraient permis au logement de se développer.

Je suis intimement convaincu qu’il faut commencer par procéder à un rééquilibrage entre la décentralisation et la déconcentration. Les préfets d’outre-mer n’ont pas assez de pouvoir.

Tout récemment encore, alors qu’il organisait une réunion de lutte contre l’illettrisme, le sous-préfet délégué à la cohésion sociale a invité le recteur. Ce dernier lui a répondu qu’il ne viendrait pas dans la mesure où il ne dépend pas du préfet. Le sous-préfet ne va tout de même pas envoyer les gendarmes chercher le recteur !

Sourires.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Nous proposerons prochainement un amendement sur ce sujet.

Cet exemple est réel. Je ne raconte pas d’histoires. Je suis là pour vous dire comment les choses se passent et je suis totalement libre ! Je proposerai, bientôt, sous une forme à déterminer avec le président de la commission des lois, qu’outre-mer les recteurs dépendent des préfets.

M. Claude Lise rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Virapoullé

Au CIOM, nous avions décidé, compte tenu de la décentralisation, de renforcer le pouvoir des préfets. Cela n’a pas été fait !

Nous avions également prévu de rapidement mettre en place une politique de la pêche. Nous représentons, dans l’océan Indien, sept fois la Méditerranée. Si ce territoire était chinois ou japonais, il serait la première richesse de la Chine ou du Japon ! Mais nous, nous tournons le dos à la mer ! Cela ne peut pas continuer ainsi. Et je ne parle pas de la Polynésie dont la surface maritime équivaut à celle de l’Europe.

J’appelle aujourd’hui à faire acte de solidarité avec notre ministre et je demande l’organisation d’un deuxième CIOM. Pour cela, je souhaite m’adresser au chef de l’État, que nous soutenons et dans sa politique de gouvernance européenne et dans sa volonté de remettre de l’ordre dans le désordre monétaire, financier et économique international durant sa présidence du G20 : Monsieur le Président, puisque vous avez eu la volonté de faire un CIOM pour clarifier les relations entre la métropole et les outre-mer, faites un bilan d’évaluation au bout d’un an pour que nous puissions y voir clair. Nous verrons ainsi là où ça avance et là où ça bloque.

Aujourd’hui, je soutiens bien sûr le budget de l’outre-mer, qui, en cette période de crise, a été l’un de ceux qui a le moins diminué.

Madame la ministre, je m’adresse à vos collègues du Gouvernement : soyez solidaires de notre ministre de l’outre-mer ! Ne considérez pas son département ministériel comme un ministère de seconde zone ! Donnez-lui un coup de main pour que les décrets soient publiés dans les délais et que les politiques du logement, de la pêche, de la solidarité et de la lutte contre l’illettrisme se mettent en place ! Aidez-le pour que la politique de mise en œuvre des traités européens et de l’article 349 du traité de Lisbonne, qui prévoit des spécificités dans le domaine des échanges commerciaux internationaux et des accords de partenariat économique, ou APE, se mette enfin en place par un règlement, que nous aurons le temps d’élaborer ensemble, madame la ministre !

Je vous soutiens, madame la ministre, et voterai ce budget, tout en mettant des bémols là où il faut. Il est de la responsabilité gouvernementale et il revient au chef de l’État et à la majorité qui le soutient de faire collectivement un effort non pas au niveau budgétaire, mais au niveau de la conception – mieux vaut prévenir que guérir ! – et de la mise en œuvre, en fluidifiant et simplifiant les procédures et les textes afin que les dispositions adoptées par le Parlement ne soient pas dénaturées et que la population ait un ressenti à la hauteur de nos engagements. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gillot

Madame la ministre, le projet de budget que vous nous soumettez aujourd’hui s’inscrit dans le contexte de crise internationale qui frappe durement l’ensemble de la France.

À cette même tribune, j’ai eu l’occasion d’affirmer que l’outre-mer était prêt à apporter sa contribution à l’effort de la nation. Mais je ne peux que regretter que la période critique que nous traversons conduise le Gouvernement à proposer un budget d’austérité, exigeant des territoires d’outre-mer qu’ils participent plus que tous les autres à la nécessaire maîtrise des déficits publics.

Une fois encore, cette démarche traduit une certaine vision souvent stigmatisante de l’outre-mer, et il est indéniable que votre projet de budget n’est pas à la hauteur des enjeux des populations ultramarines.

Le sujet d’inquiétude le plus important est sans nul doute l’assèchement, à hauteur de 330 millions d’euros environ, des investissements outre-mer, qui résulte du nouveau coup de rabot de 10 % des dépenses fiscales et de la suppression brutale de la défiscalisation dans le secteur du photovoltaïque.

Au surplus, il s’agit de la quatrième modification en deux ans du régime de défiscalisation, alors même que les investisseurs ont avant tout besoin de stabilité juridique et fiscale, comme le rappelait judicieusement, en 2006, M. Nicolas Sarkozy.

Au final, nous subissons un coup de rabot global, qui est en totale contradiction avec la LODEOM, puisque toutes les activités considérées comme « prioritaires », à savoir l’agroalimentaire, le tourisme ou encore les énergies renouvelables, sont touchées.

En outre, madame la ministre, votre projet de budget reflète une baisse sensible des crédits destinés aux outre-mer, qui est deux fois plus importante que pour les autres dépenses de l’État, lesquelles diminuent en pratique de 1, 5 %, contre 2, 3 % pour l’outre-mer.

Cette baisse affecte en particulier, comme on pouvait le craindre lors de la discussion de la LODEOM, les crédits de paiement en faveur du logement social, qui diminuent de 31 %, soit 34 millions d’euros.

Ce projet de budget consacre donc la LBU comme la nouvelle variable d’ajustement de la mission « Outre-mer », laissant craindre, à terme, le financement du logement social par la seule défiscalisation. Nous comptons sur votre vigilance, madame la ministre, pour réaffirmer la sanctuarisation de la LBU.

Dans ces conditions, votre objectif affiché de construire 5 700 logements semble irréaliste, poussant les socioprofessionnels à affirmer que ce sont moins de 5 000 logements sociaux qui seront mis en chantier outre-mer, alors que, pour la seule Guadeloupe, 20 000 dossiers sont en attente.

Madame la ministre, dans ce projet de budget, vous affichez également la volonté de donner la priorité à l’activité et à l’emploi. Je rejoins naturellement votre ambition, mais je regrette tout de même qu’elle ne trouve pas de traduction budgétaire convaincante ; en témoignent les crédits dédiés à la compensation des exonérations de charges sociales qui sont en baisse de 34 millions d’euros.

Je me réjouis également de la montée en puissance du plan « SMA 6000 », mais je déplore que l’annonce de ce plan censé doubler en trois ans la capacité de formation se traduise par une diminution de la durée de formation de chaque jeune.

Dans le même ordre d’idées, je ne puis que regretter que les crédits du dispositif passeport-mobilité formation professionnelle diminuent de près de 3 millions d’euros.

Tout cela, vous en conviendrez avec moi, madame la ministre, n’est pas de nature à dissiper les peurs de la jeunesse, une volonté pourtant affichée par le Premier ministre dans son récent discours de politique générale.

Je veux parler de cette jeunesse qui espère l’élaboration d’un véritable plan d’urgence pour l’emploi et la formation des jeunes, abondé notamment par la mobilisation d’une partie des indécents bénéfices réalisés par les compagnies pétrolières aux Antilles.

Sur tous ces points, madame la ministre, la jeunesse de l’outre-mer attend des réponses concrètes et des engagements tenus.

Des réponses concrètes, c’est également ce qu’attendent les collectivités d’outre-mer. Or, sur ce point, à l’instar des crédits consacrés à l’investissement des collectivités locales, qui diminuent de 20 millions d’euros pour les contrats de plan État-région, les actions du Gouvernement sont en net recul.

J’en veux pour preuve les 3, 3 millions d’euros prévus, comme en 2010, pour le plan Séisme aux Antilles, mais qui sont largement en dessous des besoins de reconstruction, s’agissant notamment d’établissements scolaires.

J’en veux également pour preuve les 93 millions d’euros qui restent, depuis 2004, à la charge du conseil général de la Guadeloupe, du fait de l’insuffisante compensation des dépenses de RMI, ce qui m’amène à vous interroger sur la révision des bases du calcul des dotations affectées dans la perspective de l’entrée en vigueur du RSA en janvier prochain.

J’en veux, enfin, pour preuve la diminution de 30 millions d’euros du Fonds exceptionnel d’investissement, dont 3 millions d’euros seulement seront consacrés, au titre des crédits de paiement, à de nouveaux chantiers.

Avant de conclure, je souhaite attirer tout particulièrement votre attention, madame la ministre, sur deux sujets brûlants d’actualité.

Le premier, ce sont les projets susceptibles de relancer la commande publique, des projets tant demandés en Guadeloupe, mais qui ne démarrent pas, faute de mobilisation des crédits de l’État. Je veux parler de la reconstruction du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre–Abymes et de la construction des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes prévus au PRIAC, le programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie.

Je sollicite, en conséquence, madame la ministre, une prompte intervention de votre part auprès du ministère des affaires sociales pour faire en sorte que ces crédits soient débloqués dans des délais très brefs.

Le second sujet d’importance concerne le projet de décret prévoyant d’imposer au conseil général de réguler la délivrance des licences de débit de tabac en les limitant à 550 au maximum pour la Guadeloupe.

Une telle mesure induirait des conséquences dramatiques pour ce secteur d’activité en termes d’emplois et ne serait pas non plus sans incidence sur le fonctionnement des services de la collectivité.

Nous voulons améliorer la santé publique et sommes disposés à soutenir Mme Payet en ce sens. Mais, dans l’attente d’une étude de fond, afin de mieux cerner les enjeux de la filière, nous vous demandons, madame la ministre, de surseoir aujourd'hui à l’application de ce décret.

Vous l’aurez, je l’espère, compris, madame la ministre, face à tous ces enjeux, nous n’attendons pas simplement que vous nous écoutiez ; nous attendons des réponses aux préoccupations concrètes de la population de la Guadeloupe et que vous teniez vos engagements.

À défaut, notre sens des responsabilités, plus fort que la sincère considération que nous vous portons, nous obligera à voter contre un tel budget d’austérité, déconnecté des enjeux de notre territoire. §

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de Mme Catherine Tasca.