Intervention de René Teulade

Réunion du 25 septembre 2012 à 14h30
Création des emplois d'avenir — Article 2

Photo de René TeuladeRené Teulade :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons, la jeunesse est la priorité du présent quinquennat, ce qui ne signifie pas pour autant que les autres citoyens soient des citoyens de seconde zone.

En disant cela, je pense notamment aux seniors, qui ont subi une double épreuve.

D’une part, ils ont été frappés par l’allongement de la durée de cotisation lié à la réforme des retraites de 2010, dont l’iniquité a été en partie corrigée par le Gouvernement grâce à la publication du décret du 2 juillet dernier, lequel ouvre le droit à la retraite à soixante ans pour les carrières longues.

D’autre part, ils ont été victimes de la détérioration de l’emploi. En effet, les seniors restent, à l’instar des jeunes, désespérément plongés dans l’obscurité du chômage. Autrement dit, il a été demandé aux plus de cinquante-cinq ans de « travailler plus », sans même réfléchir aux mécanismes propres à favoriser leur employabilité, mécanismes qui sont devenus indispensables. S’il ne s’agit que de prolonger leur période de chômage, et donc de renforcer leur précarité, il est inutile et même contre-productif d’imposer aux seniors de prendre leur retraite plus tardivement.

Par conséquent, il est urgent de répondre à la problématique de l’emploi des seniors. À cet égard, nous ne pouvons que nous réjouir puisque ce sera l’un des objectifs du contrat de génération, qui sera prochainement présenté par le Gouvernement.

Après ce bref préambule qui me semblait nécessaire, plutôt que de me pencher sur le dispositif même des emplois d’avenir professeur, j’aimerais me concentrer sur leur philosophie.

Ces emplois ne permettent pas seulement de corriger une situation inacceptable, source d’indignation, à savoir le fait que, même si les étudiants boursiers réussissent statistiquement mieux que les étudiants non boursiers, ils sont, faute de moyens financiers, moins nombreux à accéder au niveau master.

En outre, ces emplois ne sont pas uniquement un moyen pour l’État de répondre au problème soulevé par l’éventuel manque de candidats aux épreuves d’admissibilité aux concours de l’enseignement, près de 40 000 enseignants devant être recrutés d’ici à 2013.

Au-delà des faits et des chiffres, point une idée, qui transcende cette mesure : la jeunesse que l’on aide aujourd’hui à esquisser son avenir sera celle qui esquissera l’avenir de la jeunesse future, au travers de la transmission d’un savoir. Cette idée de la transmission du savoir, que nous retrouverons dans le contrat de génération, prend davantage d’envergure avec les emplois d’avenir professeur. Pourquoi ?

Tout d’abord, ils s’adressent prioritairement aux étudiants boursiers ayant résidé ou effectué leurs études dans des zones défavorisées, zone urbaine sensible, zone de revitalisation rurale ou collectivité d’outre-mer. Or, si nous en sommes arrivés à des situations dramatiques dans certains territoires de notre pays, avec la disparition des services publics, l’émergence de zones de non-droit et d’un sentiment d’abandon ressenti par les populations, c’est précisément parce que nous avons oublié de transmettre ce savoir, et, partant, de le partager. En d’autres termes, nous avons tout simplement délaissé ces habitants, les abandonnant à leurs tribulations et tourments.

Alors, au fond, quoi de plus juste que d’accorder une chance et un avenir à celles et ceux que le destin a d’emblée oubliés et que nous-mêmes aurions peut-être fini par oublier si n’étaient pas prises des mesures telles que celle-ci et d’autres qui sont annoncées ?

Comme l’a écrit un célèbre auteur grec du XXe siècle, « les meilleurs professeurs sont ceux qui savent se transformer en ponts et qui invitent leurs élèves à les franchir ». L’idée de transmission est inhérente au métier d’enseignant, et nous sommes un certain nombre ici à le savoir. Elle prend d’autant plus de grandeur et de majesté qu’il s’agit de transmettre à la jeunesse ce besoin de prendre part à l’avenir.

Par conséquent, je ne peux que soutenir activement les dispositions de l’article 2, car, au-delà de sa logique économique, j’en retiens l’esprit, qui met en lumière une valeur longtemps effacée au bénéfice d’un individualisme peu éclairé et peu éclairant. Cette valeur, c’est celle du partage.

Faisons en sorte que la jeunesse, notre jeunesse, reste un symbole d’espérance qui illuminera notre société. §

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