Intervention de Vincent Peillon

Réunion du 25 septembre 2012 à 14h30
Création des emplois d'avenir — Article 2

Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale :

Madame la sénatrice, avant de répondre aux différentes interrogations qui sont les vôtres, je tiens à remercier de la qualité de leurs interventions celles et ceux qui ont pris la parole sur cet article 2.

Plusieurs interventions ont salué les dispositions proposées et en ont souligné l’importance, mais d’autres, vie démocratique oblige, ont évidemment porté le fer de la critique, ce qui ne peut que nous inciter à améliorer nos propositions.

Malgré tout, madame Primas, je veux insister sur cette confusion fondamentale – j’ai déjà eu l’occasion de m’en expliquer à l’Assemblée nationale – que vous entretenez sur la notion même de justice et d’égalité.

Au sein même de l’éducation nationale, il y a longtemps que nous avons compris, comme vous-mêmes, dans vos rangs, que l’égalité n’est jamais arithmétique : elle doit être proportionnelle. C’est ce qui justifie, chère madame, le système de bourse mis en place et le fait que les sommes versées à ce titre ou les tarifs des cantines de nos écoles varient en fonction des niveaux de revenus.

Pensons aux conditions, bien différentes, précisément, dans lesquelles les jeunes de notre pays accomplissent leurs études, conditions souvent rendues encore plus difficiles par la mastérisation, ainsi que différents orateurs l’ont rappelé. En nous attaquant à ces vraies injustices, nous rééquilibrons les deux plateaux de la balance. En donnant à certains ce que d’autres leur ont enlevé, nous rétablissons la justice.

À vous entendre, il y aurait une injustice particulière à n’accorder ce type d’emplois qu’aux jeunes résidant dans des zones en difficulté. Mais vous avez tellement raison que le texte répond à votre préoccupation. Comme vous le savez sans doute, l’emploi de l’adverbe « notamment » laisse la possibilité d’ouvrir le dispositif à d’autres publics. Votre argument n’a donc pas lieu d’être.

Vous avez, sur un tout autre plan, suggéré que les jeunes qui renonceraient finalement à enseigner aient à rembourser les sommes engagées par l’État. Je vous rappelle que nous avons choisi un dispositif qui repose sur la contractualisation. L’emploi d’avenir professeur est un vrai travail qu’il convient, bien entendu, de rémunérer. Une fois le travail effectué, aucun remboursement ne pourra être demandé puisque les jeunes concernés ne seront pas des élèves fonctionnaires.

Pour ce qui concerne les bourses, vous n’êtes pas sans savoir qu’un système de restitution existe déjà : les étudiants boursiers qui n’honorent pas leurs engagements – ils sont, me semble-t-il, entre 5 000 et 6 000 chaque année – se voient demander le remboursement des sommes versées.

Gardez à l’esprit l’essentiel. En réalité, nous sortons de longues années de très grandes difficultés. Disant cela, je me situe bien au-delà du clivage gauche-droite sur l’éducation. Il n’est qu’à voir, d’ailleurs, le rassemblement qui s’opère autour de priorités affichées et l’espérance qui renaît dans une certaine jeunesse : ce qui repart au travers du dispositif proposé, c’est la promotion sociale et républicaine, et l’essentiel est là.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne veux être désobligeant avec personne, mais force est de constater que nous sommes d’une génération à laquelle l’État a tendu la main lorsqu’elle a voulu le servir. Que ce soit au travers des écoles normales ou des IPES, lorsqu’un jeune, quel que soit son milieu d’origine, se destinait à ce beau métier et souhaitait servir l’État, alors, ce dernier lui tendait la main.

Cela fait des années que pareille attention à l’égard de la jeunesse n’existe plus. Et c’est de la responsabilité des adultes : nous avons rendu encore bien plus difficiles les conditions d’étude et de travail pour ceux qui aspirent à servir l’État et exercer ce beau métier.

Dans notre pays, depuis plus d’un siècle, la promotion sociale et républicaine était assurée, d’abord, par l’école. Alors, notre projet est peut-être trop modeste, mais, dans ce genre de situation, quand on veut soi-même servir, on est content de remettre les choses en marche et dans la bonne direction.

S’il faut faire mieux à l’avenir, nous nous y emploierons. En tout cas, nous avons déjà commencé à agir. §

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