Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 1er octobre 2012 à 21h30
Débat sur la réforme de la carte judiciaire

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest :

Les juges d’instruction ont été supprimés dans certaines juridictions ou leur nombre a été réduit, mais les pôles de l’instruction n’ont pas véritablement été mis en œuvre. Il est vrai que des juridictions spécialisées ont été développées, de façon plutôt satisfaisante, pour certains contentieux, comme celui de la santé ou du terrorisme. De même, en matière de droit de la mer, un certain nombre de choses ont été faites.

Nous avons également évoqué les juges de proximité. Personnellement, j’y étais favorable, tout en étant opposé aux juridictions de proximité. Selon moi, leur création était une erreur, et nous l’avions d’ailleurs dit à l’époque. Mais un Président de la République, pas le dernier, voulait, paraît-il, ces juridictions. Personne n’a osé lui dire que l’idée n’était pas bonne, ce qu’il aurait très bien compris.

On aurait dû confier aux juges d’instance la responsabilité de choisir des juges qui auraient dépendu de lui et qui, en fonction de leurs compétences, auraient été chargés d’un certain nombre de petits contentieux. Il faut garder cette idée. Certains citoyens qui ont une expérience professionnelle et qui d’ailleurs sont souvent délégués du procureur auraient très bien pu rendre service à la justice.

Je me souviens très bien que l’association des juges d’instance n’était pas d’accord avec les juridictions de proximité, mais n’était absolument pas hostile aux juges suppléants à qui auraient pu être confiés un certain nombre de contentieux. L’idée, je le répète, n’est pas complètement aberrante.

Je remarque que l’institution judiciaire a une certaine capacité à rejeter les greffons ! Souvenez-vous des magistrats à titre temporaire, qui n’ont jamais réussi à passer la barre, alors que le concept aurait pu être intéressant. D’ailleurs, dans les plus hautes juridictions, tout le monde se satisfait d’avoir des conseillers référendaires…

Madame le garde des sceaux, je m’écarte du sujet de la carte judiciaire, mais je tiens à dire qu’il est dommage que l’on n’ait pas, comme dans les juridictions allemandes notamment, des assistants. Enfin, il y en a, mais pour tellement peu d’heures que le système ne marche pas aussi bien qu’il le pourrait. Ces assistants pourraient être extrêmement utiles aux magistrats pour préparer un certain nombre de jugements ou d’arrêts. Ou alors il faut accepter que les greffiers, quand ils ne sont pas chargés de tâches administratives, deviennent ces assistants.

Monsieur Détraigne, votre rapport est intéressant, mais le tribunal de première instance n’est pas facile à mettre en œuvre. Malgré plusieurs essais, l’idée n’a pas été suivie. Vous avez avancé que cela était peut-être dû à l’inamovibilité des juges, mais, pour moi, ce n’est pas la cause principale. D’ailleurs, de fait, ce tribunal ne favorisera pas la proximité ; il permettra simplement de faire tourner les magistrats d’instance. Mais cela se fait déjà lorsque les magistrats ne sont pas occupés à temps plein dans un tribunal. Aussi, cela ne me paraît pas être une voie très efficace pour améliorer le fonctionnement de la justice.

Madame le garde des sceaux, je vous remercie d’avoir écouté une voix un peu moins critique que les autres. Puisqu’il n’y avait que des procureurs, il fallait bien un avocat ! J’ai joué ce rôle, en montrant que tout n’était pas si mauvais dans cette réforme, qui comportait aussi des points positifs.

Je voudrais conclure en vous faisant part de mon inquiétude quant à la judiciarisation de notre société.

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