Intervention de Jean-Michel Baylet

Réunion du 2 octobre 2012 à 9h30
Débat sur l'application de la loi pour l'égalité des droits et des chances la participation et la citoyenneté des personnes handicapées

Photo de Jean-Michel BayletJean-Michel Baylet :

Vous le savez, les conseils généraux sont désormais identifiés comme l'échelon de la solidarité. C'est ainsi que, presque naturellement, il leur a incombé de piloter la mise en œuvre des grandes dispositions de la loi de 2005. Ces avancées se sont pourtant parfois heurtées à de grandes difficultés.

La première concerne les MDPH. Comment ne pas souscrire à cette belle idée consistant à simplifier les démarches des personnes handicapées en instituant un interlocuteur unique dans chaque département ?

Permettez-moi de citer l'exemple d'un département que je connais bien, le Tarn-et-Garonne, où nous nous sommes dotés d'une MDPH dès la fin de l'année 2005. Oh, il a fallu « essuyer les plâtres », au sens propre comme au figuré ! Comme dans les autres départements, nous nous sommes heurtés aux problèmes de gestion du personnel, du fait de la multiplicité des statuts en présence.

La loi « Paul Blanc » a apporté, c'est vrai, des améliorations dans le fonctionnement des MDPH. Elle prévoit notamment la mise en place de contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens afin de pérenniser les ressources des MDPH et leur permettre de ne plus naviguer à vue, comme ce fut le cas à leurs débuts.

Cependant, cela a été dit, nous sommes encore, tant d'années après, dans l'attente de l'ensemble des décrets d'application relatifs à ce texte.

La PCH était une autre innovation majeure. Se substituant à l'allocation compensatrice pour tierce personne, ou ACTP, elle opérait un changement de paradigme : elle considérait le handicap comme un préjudice et, à ce titre, celui-ci devait être réparé. Là encore, la MDPH est au centre du dispositif, car c'est elle qui, en lien avec les personnes handicapées, procède à l'évaluation des besoins.

La PCH, après des débuts en douceur, a vu le nombre de ses bénéficiaires augmenter rapidement. Cette forte croissance, si elle témoigne de l'efficacité du dispositif, suscite, vous le comprendrez, des inquiétudes dans les conseils généraux, car elle s'accompagne mécaniquement d'une hausse des dépenses à leur charge des départements.

De plus, nous avons pu constater une diminution inquiétante, en proportion, de la participation de la CNSA au financement de la PCH. Comme indiqué dans le rapport d'information, le concours de la CNSA est resté globalement stable en valeur absolue, mais il ne représente désormais plus qu'un tiers des dépenses au titre de la PCH. Il revient donc aux départements de supporter seuls l'accroissement des dépenses, qui culminent à plus de 1, 4 milliard d'euros.

Je m'interroge donc sur les propositions 8 et 9 du rapport, relatives à l'élargissement du périmètre de la PCH. Je ne remets pas en cause le bien-fondé de ces propositions, qui sont généreuses ; je me permets seulement de poser la question de leur financement. Et le fait que le Gouvernement envisage, compte tenu du contexte, une baisse de plus de 2 milliards d'euros des dotations aux collectivités sur la période 2013-2015 ne sera pas de nature à faciliter la tâche des conseils généraux !

L'élargissement des bénéficiaires de la PCH ne pourra être envisagé que si la proposition 10, qui consiste à pérenniser les fonds départementaux par le biais de règles contraignantes fixant les engagements des différents contributeurs, est réellement mise en œuvre.

Il en va de même pour les fonds départementaux de compensation, qui devaient être abondés par l'État, la CPAM, les conseils généraux et la MSA. Après deux années de fonctionnement, l'État, malheureusement, a suspendu unilatéralement – une fois de plus ! – sa participation au financement des fonds pendant trois années, en 2008, 2009 et 2010.

J'ai choisi l'exemple de la PCH et des fonds départementaux de compensation, mais j'aurais également pu parler du désengagement de l'État en matière de formation professionnelle des personnes handicapées. Ce dernier n'a-t-il pas confié à l'Association de gestion des fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées, l'AGEFIPH, la gestion de plusieurs dispositifs relevant pourtant de sa compétence, et ce sans compensation financière ?

Au-delà du problème de l'état d'application de la loi, le législateur doit s'interroger sur sa faisabilité même. Dans le cas présent, le décalage entre des objectifs élevés et les moyens disponibles constituerait presque un motif de ne pas mobiliser les seconds pour s'approcher des premiers.

Ce décalage pose également la question des outils de pilotage, de suivi et d'évaluation des lois. Le 25 septembre dernier, à l'Assemblée nationale, lors de la séance de questions au Gouvernement, vous ne disiez pas autre chose, madame la ministre. Vous voyez que j'ai de bonnes lectures ! §

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