Intervention de Claude Domeizel

Réunion du 2 octobre 2012 à 9h30
Débat sur l'application de la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision

Photo de Claude DomeizelClaude Domeizel :

Autre argument : le maintien après 20 heures du parrainage– ce fameux parrainage dont on a beaucoup parlé, mais auquel personne n'a rien compris – était une erreur.

Monsieur Legendre, ce ne sont que quelques exemples, mais je pourrais en citer d'autres. Vous voyez bien que le verre était vraiment à moitié plein d'erreurs.

Cette réforme de 2009 s'apparente en fait à une réforme idéologique qui serait la résultante d'une idée dominante chez les gouvernements successifs de droite depuis vingt ans, selon laquelle le service public audiovisuel n'est pas un bien sacré. Sans parler du fait que l'une des « mesures phare » de ce projet de loi, la suppression de la publicité en prime time sur la télévision publique, était déjà entrée en vigueur dès le 5 janvier, avant même que nous ayons fini d'en débattre. Avouez que c'est le comble du mépris à l'égard du Parlement !

Nous l'avions dit haut et fort, mais nos protestations étaient restées vaines Nous avons cependant joué le jeu en présentant près de 150 amendements, dont certains ont même été votés – je le précise – par la majorité d'alors.

La France a été l'un des rares pays à aller si loin dans la transposition de la directive Services. Sous le prétexte de la transparence, la loi de mars 2009 a institué également la nomination et la révocation des présidents des sociétés de l'audiovisuel public, France Télévisions, Radio France et l'audiovisuel extérieur, par décret présidentiel.

Eh oui, mes chers collègues, priver la télévision publique de ses moyens financiers, la rendant ainsi dépendante, n'était pas suffisant ; cette nouvelle procédure de nomination et de révocation y ajoutait une dépendance politique. C'est dire, mes chers collègues, combien cette loi est toxique !

Rarement nous avions connu un tel entêtement de la part de l'exécutif.

Aujourd'hui, quel bilan pouvons-nous tirer ? Le rapport de nos collègues David Assouline et Jacques Legendre est édifiant, implacable, même si les conclusions de ce rapport « à deux voix » ne sont pas en phase sur tout. De notre clairvoyance passée nous n'avons nulle gloire à tirer, plutôt du découragement, car nous n'avons pas été entendus.

Trois ans après, que pouvons-nous dire de l'application de cette loi ?

En ce qui concerne la mesure emblématique de cette loi, la suppression de la publicité en première partie de soirée, son application n'a été que partielle, puisque son extension en fin de soirée – vous l'avez dit, monsieur Legendre –, prévue pour la fin de l'année 2011, ne s'est jamais concrétisée, faute de financement compensatoire suffisant et compte tenu des mauvaises prévisions de l'évolution du marché publicitaire.

La dictature de l'audimat a perduré. Le tunnel publicitaire avant 20 heures est devenu interminable ! Peut-être parce que les raisons de cette réforme n'ont jamais été clairement spécifiées. Peut-être parce que la définition d'une télévision publique de qualité n'a jamais été réfléchie et déclinée.

On se demande si le jeu en valait la chandelle.

En ce qui concerne l'audiovisuel extérieur, la publication très tardive de son cahier de charges est le symbole des errements qui ont marqué ce chantier, pour aboutir à surseoir à la fusion de RFI et France 24.

Mais le bouquet, mes chers collègues, madame la ministre, c'est le mode financement sorti du chapeau de prestidigitateur de MM. Sarkozy, Copé et leurs alliés. C'est peu dire que le financement est un fiasco !

Le produit des deux taxes instituées pour compenser la perte de recettes publicitaires n'a pas atteint le montant espéré. Cela coûte désormais 180 millions d'euros par an à l'État.

De plus, la taxe dite « télécoms », soit 250 millions d'euros, risque fort d'être annulée par la Cour de justice de l'Union européenne. Le jugement doit être rendu à la fin du premier semestre de l'année 2013. Si l'État est contraint de rembourser, c'est plus de 1 milliard d'euros qu'il devra rendre aux opérateurs de télécommunications !

Le financement prévu par le gouvernement Fillon n'assure pas la relève et fragilise la télévision publique. Cela augmente la dépendance à l'égard de l'État, qui est contraint de renflouer le budget de l'audiovisuel public.

À ce gâchis s'ajoute la bombe à retardement dont le Gouvernement vient d'hériter ; une de plus ! Madame la ministre, sachez que vous nous trouverez toujours à vos côtés quand il s'agira de garantir le financement et l'indépendance du service public audiovisuel !

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