Intervention de Jean Boyer

Réunion du 9 octobre 2012 à 21h30
Création des emplois d'avenir — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean BoyerJean Boyer :

Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, reconnaissons, sans le moindre esprit polémique, que la commission mixte paritaire a très peu fait évoluer le projet de loi. Elle a adopté une seule modification, certes notable : l’ouverture du dispositif, dans les territoires prioritaires, aux « jeunes ayant engagé des études supérieures ». C’était une parité indispensable.

La nouvelle définition est potentiellement plus large, en tout cas un peu plus floue, que celle qui résultait des travaux de notre assemblée ; en effet, nous n’avions prévu d’ouvrir le dispositif qu’aux jeunes ayant « des niveaux de qualification supérieurs au baccalauréat ». Mais jusqu’à quel niveau d’études supérieures les jeunes des territoires prioritaires pourront-ils bénéficier d’un emploi d’avenir ? Monsieur le ministre, éclairez-nous, ce soir ou dans les jours à venir, et rassurez-nous.

S’il s’agit effectivement d’un élargissement du dispositif à des jeunes plus qualifiés, je dois dire que nous y sommes défavorables. En effet, les emplois d’avenir sont un dispositif spécifique destiné à un public spécifique ; vous le savez très bien, puisque c’est la conception que vous-même avez exposée !

Il ne faut pas rééditer l’erreur commise avec les emplois-jeunes. Concrètement, parce qu’ils avaient été trop largement ouverts, ils ont surtout bénéficié à des jeunes qualifiés. Nous devons être objectifs et tirer les enseignements de cette expérience, même si elle n’a pas été mise en œuvre par une majorité que nous soutenions. Les emplois d’avenir doivent être concentrés sur les jeunes les plus éloignés de l’emploi, c’est-à-dire les jeunes non qualifiés ou très peu qualifiés.

Une difficulté a été soulevée au cours de la commission mixte paritaire qui est susceptible de poser problème aux employeurs, en particulier aux collectivités territoriales, je veux parler de la priorité d’embauche.

Concrètement, cette priorité ne pourra s’entendre que comme une obligation d’embauche. N’y a-t-il pas là le risque d’un nid à contentieux ? Que se passera-t-il en effet en cas de concurrence, pour occuper un même emploi, entre une personne disposant de toutes les qualifications requises et l’ancien titulaire d’un emploi d’avenir, surtout si ce dernier n’a pas totalement donné satisfaction ?

Plus largement, la position de mon groupe sur ce projet de loi est connue. Nous souscrivons naturellement au constat de base qui l’inspire : la question de l’emploi est une priorité nationale absolue, particulièrement celle de l’emploi des jeunes. Mais le présent projet de loi n’apporte à ce problème qu’une solution très partielle et, à nos yeux, pas toujours bien adaptée.

Je sais qu’il est facile de parler et plus difficile de construire… Reste qu’il s’agit apparemment moins de mener une politique de l’emploi – je le dis sans esprit de polémique – qu’une politique sociale de l’emploi. Dispositif spécifique pour un public spécifique, les emplois d’avenir ne concerneront au mieux que 3 % de la population des demandeurs d’emploi.

Certes, il y aura les contrats de génération. À première vue, nous n’y sommes absolument pas opposés. Nous les jugerons objectivement, le moment venu, en fonction de leurs modalités concrètes de mise en œuvre, sur lesquelles les partenaires sociaux sont en train de plancher.

Quoi qu’il en soit, ce dispositif ne pourra pas, lui non plus, concerner un grand nombre de chômeurs. Que fera-t-on donc pour les autres, qui attendent une véritable politique de l’emploi, une politique novatrice ?

Les emplois d’avenir n’apportent rien de nouveau ; il s’agit d’une formule classique d’emplois aidés, pratiquée aussi – reconnaissons-le – par les précédents gouvernements. C’est une méthode bien éprouvée qui n’a jamais fait de miracles. D’ailleurs, nous le savons, les solutions miracles n’existent pas.

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