Madame la présidente, madame, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, suite au récent remaniement ministériel, nous ne sommes plus face à un découpage du ministère avec le sport d’un côté et la santé de l’autre. L’autonomie du sport est à nouveau affirmée avec un ministère de plein exercice. Cette configuration ayant toujours eu notre faveur, nous nous en félicitons.
Malheureusement, je constate que cette émancipation est trompeuse, car elle masque un budget en pleine régression. Je me souviens pourtant du discours très ambitieux que votre prédécesseur, Mme Rama Yade, avait tenu le 6 septembre dernier à la Sorbonne sur les nouveaux défis du modèle sportif. Ce jour-là, elle affichait clairement sa volonté de faire progresser la cause du sport en France. Mais elle a quitté le Gouvernement sans avoir concrétisé la moindre avancée significative.
J’avais particulièrement regretté que le ministère cède aux exigences des sportifs les plus fortunés, en normalisant une pratique alors illégale, celle de la rémunération des agents sportifs par les clubs et non plus par leurs employeurs eux-mêmes. Les craintes que j’avais exprimées ici lors du débat ont trouvé une nouvelle justification a posteriori dans le comportement calamiteux des joueurs de l’équipe de France de football lors de la Coupe du Monde 2010.
Dans ce milieu, l’obsessionnel rapport à l’argent devient particulièrement malsain, et la loi du 9 juin 2010 encadrant la profession d’agent sportif ne constitue pas, en raison de ses insuffisances, un réel obstacle aux dérives pernicieuses du « sport business », lesquelles se déploient au détriment des vertus intrinsèques de ce phénomène de société.
Madame la ministre, je ne souhaite pas que l’avenir vous réserve un sort identique à celui de Mme Rama Yade, et donc qu’un fossé abyssal se creuse entre les objectifs exprimés et le bilan constaté. Je me permets de vous souhaiter bonne chance pour votre nouvelle mission !
Malheureusement, celle-ci sera très difficile à mener à bien avec les moyens financiers qui sont mis à la disposition de votre ministère. En effet, les crédits consacrés par l’État au sport en 2011 diminuent de 15 % par rapport à ceux qui ont été votés dans le budget pour 2010 et qui s’élevaient à 243, 7 millions d’euros ; ils chutent donc de plus de 27 millions cette année.
Pour pallier la nouvelle dégradation des crédits de l’État, le Centre national pour le développement du sport est une nouvelle fois appelé à la rescousse, avec ses crédits extrabudgétaires ; c’est le cas pour la construction ou la rénovation des stades accueillant l’Euro 2016.
Nous vivons un tournant historique car, pour la première fois, avec 247 millions d’euros, la dotation du Centre national pour le développement du sport est supérieure aux crédits ministériels stricto sensu. La situation est cocasse, car le président de cet organisme public, qui, officiellement, n’est pas comptable de la politique sportive de notre pays devant l’opinion publique, se retrouve à gérer une enveloppe financière supérieure au budget d’intervention du ministre !
La question de la gouvernance du sport est en jeu. Dans le cadre du partenariat entre l’État, les collectivités territoriales et le mouvement sportif, il importe de redonner à l’État toute sa place. Le sport est encore loin d’être la « grande cause nationale » annoncée par le Président de la République en 2007 !
L’action n° 2, Développement du sport de haut niveau, enregistre une chute de près de 20 %. C’est un mauvais signe pour une année préolympique, même si, par ailleurs, le plan de rénovation et de modernisation de l’Institut national des sports et de l’éducation physique se poursuit.
Si, cet été, tout le monde s’est réjoui sur les plateaux de télévision des succès français aux championnats d’Europe d’athlétisme et aux championnats d’Europe de natation, le ministère n’affiche pas, avec un tel budget, sa volonté de voir cette réussite se confirmer à l’occasion des jeux Olympiques de Londres en 2012.
Si l’État se désengage du financement du sport autre que le sport spectacle, qui doit intervenir en faveur du « sport pour tous » ? Une fois encore, on se tournera vers les collectivités territoriales, indispensables pour accompagner le bénévolat associatif. Mais nous savons pertinemment qu’elles n’ont plus actuellement les moyens de maintenir leurs interventions. Pourtant, ce sont les collectivités, essentiellement les communes, qui assurent plus de 70 % des financements publics du sport. Face à leur implication, les 10 millions d’euros consacrés au sport dans le plan de relance 2009 ne pèsent pas lourd...
Par ailleurs, comment ne pas regretter la stabilité du budget consacré à l’Agence française de lutte contre le dopage alors que ses missions évoluent ? En effet, l’adaptation du code du sport au code mondial antidopage nécessite des contrôles à l’entraînement plus nombreux et une réponse adaptée à la judiciarisation croissante des affaires liées à ces contrôles.
La démission tumultueuse de l’ancien président de cette agence, Pierre Bordry, était un signal d’alerte.
Il existe des solutions pour un budget du sport plus élevé. Il serait notamment judicieux d’augmenter les taux de prélèvement sur les jeux et les paris en ligne ; une hausse de 0, 5 point amènerait 45 millions d’euros supplémentaires.