Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, en période de crise économique, de recul de l’activité et de l’emploi, la relance de la recherche et de la formation par l’enseignement supérieur est fondamentale. C’est donc un budget très important pour l’avenir que nous examinons aujourd’hui.
L’enseignement supérieur et la recherche sont des moteurs essentiels de la croissance. Ils assurent l’élévation du niveau d’études des générations actuelles et futures. Ils permettent de développer de nouveaux métiers et de créer des emplois. Ils sont un outil indispensable pour dynamiser la coopération internationale en matière de savoir et d’innovation.
Il est essentiel que ces deux secteurs d’activité soient sanctuarisés, épargnés par les coupes sévères infligées à la plupart des autres missions du projet de loi de finances pour 2011.
Je me réjouis que cette mission échappe à la règle de la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux, voulue par la RGPP, même si je rêve toujours de la création de nouveaux postes.
Bien que les documents budgétaires, nouvelle version, soient peu lisibles, les crédits de la MIRES apparaissent cette année en augmentation. Les prévisions pour les prochaines années semblent aussi encourageantes. Mais une telle évolution est plus que nécessaire si nous voulons nous hisser à la hauteur de nos ambitions, ou même tout simplement revenir au niveau de 2002 : le budget de la recherche représentait alors 2, 23 % du PIB.
Madame la ministre, vous nous annoncez que l’effort en faveur de la recherche atteindra 2, 21 % du PIB en 2011, mais d’autres analystes sont moins optimistes. Quoi qu’il en soit, nous sommes loin derrière les États-Unis, dont l’effort consacré à la recherche oscille entre 2, 5 % et 3 % du PIB, ou encore du Japon, dont les crédits affectés à ce poste dépassent 3, 5 %. Plus inquiétant, nous restons bien en deçà de l’objectif que nous nous étions fixés : atteindre les 3 % du PIB. Les dépenses de recherche n’augmentant pas suffisamment, nous nous trouvons relégués à la quatorzième place du classement international établi par l’OCDE.
À cet égard, la réforme du crédit d’impôt recherche, en 2008, n’a pas tenu toutes ses promesses. Certes, la dépense devrait atteindre 5 milliards d'euros, alors qu’elle s’élevait seulement à 400 millions d’euros en 2003. Cette augmentation nous permet de respecter les objectifs européens, qui nous imposent, au-delà de la recherche publique, d’intensifier les efforts de recherche et développement des entreprises.
Bien que je sois favorable à ce dispositif, je m’inquiète des effets d’aubaine dont bénéficient les plus grandes entreprises et leurs filiales, alors même qu’elles n’augmentent pas suffisamment leurs dépenses de recherche. Le crédit d’impôt recherche doit soutenir un renouveau de la politique industrielle et d’innovation de la France.
J’observe, par ailleurs, qu’une stagnation, voire un recul, du nombre d’emplois dans la recherche est à craindre. Une gestion managériale, propre à l’entreprise, serait trop éloignée de ce qui convient à la recherche. Il faudrait d’ailleurs que le Parlement exerce un meilleur contrôle sur ce dispositif.
Aujourd’hui encore, de trop nombreux chercheurs quittent notre pays, et ceux qui restent en France s’inquiètent de l’insuffisante prise en compte de leurs préoccupations. Un renforcement de la concertation serait sans doute bénéfique.
Les études universitaires de haut niveau forment les « cerveaux » de demain, mais tous les jeunes docteurs fraîchement diplômés n’obtiennent pas pour autant, tant s’en faut, un poste de chercheur ou de maître de conférences. Nombre d’entre eux font leurs valises et partent, pour quelques années ou définitivement, vers des laboratoires européens, américains ou japonais. Cette fuite des cerveaux est d’autant plus alarmante qu’elle dure déjà depuis plusieurs années.
La recherche et l’innovation françaises doivent faire face, il est vrai, à une montée en puissance de la concurrence, traditionnelle ou issue des pays émergents. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il me semble essentiel d’encourager les programmes de recherche communs entre les États membres de l’Union européenne. Consolider l’Europe de la recherche doit être une priorité. La mutualisation des efforts nationaux est essentielle pour éviter la déperdition de moyens.
S’agissant des universités, en cette fin d’année 2010, cinquante et un établissements sur quatre-vingt-trois sont déjà autonomes, et vingt-quatre autres le deviendront au 1er janvier prochain : la France comptera alors soixante-quinze universités autonomes, soit 90 % de l’ensemble. C’est une bonne chose, et cela devrait contribuer à faire émerger de nouvelles niches d’excellence scientifique, à favoriser le recrutement de chercheurs de haut niveau et à valoriser l’engagement des personnels. Il serait intéressant de faire un premier bilan de l’application de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, car il semble que les universités soient encore, à ce jour, trop inégalement traitées.
Élue de la Haute-Garonne, je ne peux que me réjouir des crédits accordés à l’université de Toulouse dans le cadre du plan Campus, enfin signé au mois de juin dernier. Le montant de ce plan s’élève à 525 millions d’euros.
Néanmoins, je regrette que la recherche de l’excellence se fasse dans un trop petit nombre d’universités et dans une perspective parfois trop élitiste. Dans les autres établissements, qui représentent 90 % de la recherche universitaire et 95 % des étudiants, les moyens diminuent.
Il faut prendre en compte les besoins de la recherche et de l’enseignement supérieur partout sur le territoire national. C’est malheureusement un travers bien français que de privilégier les grandes structures, en oubliant le vivier qui nourrira la recherche de demain.
Le traitement réservé aux instituts universitaires de technologie, les IUT, me préoccupe. Les IUT sont la composante de l’université la plus à la pointe en termes de professionnalisation. Leur fort ancrage local, notamment, concourt à ce résultat. Pourtant, depuis plus d’un an, les présidents d’IUT ne cessent de nous alerter sur leur situation. S’ils bénéficiaient auparavant d’une dotation d’État, ils doivent désormais négocier leurs moyens avec chaque présidence d’université. Il semble que la circulaire explicitant la règle d’attribution de crédits à leur profit n’est pas toujours respectée. L’absence d’augmentation, voire la baisse, de leur budget est inquiétante. La diminution et la disparité des moyens alloués aux IUT peuvent, en effet, porter atteinte au caractère national des diplômes qu’ils délivrent.
Madame la ministre, monsieur le ministre, si les efforts budgétaires sont encourageants, le chemin est encore long. Il reste beaucoup à faire pour rattraper le retard que nous avons accumulé en matière de recherche et pour enfin insuffler à nouveau du dynamisme et de la modernité à l’enseignement supérieur français. C’est pourquoi je m’abstiendrai sur les crédits de cette mission.