Intervention de Daniel Reiner

Réunion du 10 octobre 2012 à 21h30
Traité sur la stabilité la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Daniel ReinerDaniel Reiner, vice-président de la commission des affaires étrangères :

Je suis convaincu que c’est notamment par le renforcement du contrôle démocratique de l’Union que nous lui redonnerons toute sa légitimité.

Je m’inscris en faux contre l’idée selon laquelle notre souveraineté budgétaire nationale serait atteinte par ce traité. Le Conseil constitutionnel l’a clairement établi dans sa décision : le texte, en particulier le fameux mécanisme de correction automatique de l’article 3, ne procède pas, en lui-même, à des « transferts de compétences en matière de politique économique ou budgétaire » supplémentaires par rapport à nos engagements européens antérieurs. Il reviendra au Parlement d’organiser ce mécanisme de correction dans le projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

Ne nous y trompons pas : c’est la dette qui menace notre souveraineté, pas le traité ! Pour autant, il me paraît urgent de permettre un meilleur contrôle démocratique de la gouvernance de l’eurozone.

Qui peut dire aujourd’hui précisément quelle est la place des parlements nationaux dans cette gouvernance ? Or quel est l’enjeu ? Il n’est pas technique, il est éminemment politique : il ne s’agit pas moins que d’engager, à l’échelle européenne, une autre politique économique, une politique d’investissement, de croissance et d’emploi, pour permettre à l’Europe de sortir de la crise. Ces choix de société doivent être publiquement débattus et démocratiquement assumés. Ils ne peuvent être confisqués par un cénacle d’experts.

Dès lors, permettez-moi d’insister sur un point dont on ne mesure pas assez l’importance : il s’agit de l’article 13 du traité, lequel prévoit qu’une conférence interparlementaire sera mise en place, réunissant des représentants des commissions compétentes du Parlement européen et des parlements nationaux. Cet article offre une occasion nouvelle à ces derniers d’accéder à un espace qui leur était, jusqu’alors, quasi interdit, celui des discussions et réflexions préalables à l’élaboration des politiques économiques et budgétaires.

Le Sénat, d’ailleurs, avait défini, dès le mois de mars 2012, dans une résolution déposée par le président Sutour, la forme que pourrait prendre ce dialogue. Nous avions souhaité une composition large de la conférence interparlementaire, un pouvoir réellement délibérant et une insertion effective dans la chaîne décisionnelle budgétaire européenne. L’Assemblée nationale a adopté, quant à elle, une résolution très proche, sur l’initiative de nos collègues députés Christophe Caresche et Élisabeth Guigou. Les propositions sont sur la table et il faut aller de l’avant. Des amendements au projet de loi organique ont d’ailleurs été déposés en ce sens à l’Assemblée nationale.

Cette construction empirique est-elle parfaite ? Sans doute pas, mais, finalement, l’intégration économique, puis monétaire, appelle, presque naturellement, de proche en proche, l’intégration budgétaire et politique.

Au fond, l’alternative est simple : ne pas ratifier le traité, c’est enliser durablement l’Europe dans le blocage politique et couper tout élan ; le ratifier, c’est donner au Président de la République la possibilité de poursuivre le travail entamé pour réorienter l’Europe en faveur de la croissance et de l’emploi.

Or il reste beaucoup à faire : quels instruments de solidarité doit-on mettre en place ? Quel degré de mutualisation des dettes peut-on accepter ? Quelle harmonisation fiscale, quelle convergence sociale et environnementale sont-elles à envisager ? Toutes ces questions ont déjà été évoquées cet après-midi lors du débat sur les perspectives européennes.

Quelle politique de l’énergie devons-nous promouvoir ? Quelle politique industrielle faut-il engager ? Quels grands projets sont-ils à imaginer, demain, pour soutenir la croissance en Europe et quels successeurs peut-on trouver à Airbus et Ariane ? Naturellement, le moment est venu pour la France d’avancer ses propres idées, car l’Allemagne ne peut être seule à proposer des solutions. En tout cas, je suis certain, et j’exprime ici également la position de la commission des affaires étrangères, que la France est plus grande et plus forte dans l’Europe !

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