Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, mon propos portera sur les moyens des universités, l’environnement partagé par les chercheurs, les enseignants, les étudiants et l’ensemble des personnels qui font vivre ces établissements.
Aujourd'hui, un tiers au moins du patrimoine immobilier universitaire est jugé vétuste. Chacun d’entre nous peut s’en rendre compte lors de ses visites sur les sites universitaires de son département. Ce constat est malheureusement si vrai que le Président de la République en est convenu le 29 novembre 2007, en annonçant le plan Campus.
Pourtant, madame la ministre, trois ans après, sur le terrain, il y a loin de l’autosatisfaction que vous affichez aux réalités.
Cette année encore, vous nous présentez une évolution impressionnante des crédits de la mission, mais, en y regardant de plus près, on découvre des techniques de présentation des chiffres qui expliquent que, entre les annonces et la réalité, les moyens « s’évaporent », sans compter les changements de périmètre des lignes budgétaires et le transfert progressif du paiement des retraites vers les opérateurs de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Une première technique consiste à annoncer, sur une année, des crédits qui ne sont pas dépensés cette année-là mais seront à nouveau inscrits l’année suivante. Une autre est de comptabiliser dans les autorisations d’engagement les montants des financements privés, correspondant à des partenariats public-privé, alors que ceux-ci ne sont pas encore conclus. Par ailleurs, ces partenariats ne sont pas sans poser des problèmes de principe, sur lesquels je reviendrai.
S’agissant du recyclage des crédits, il est envisagé pour 2011 d’affecter 270 millions d’euros à des chantiers dont les universités seront maîtres d’ouvrage. Il convient cependant de noter que, en 2009 et en 2010, vous nous annonciez, madame la ministre, 157 millions d'euros et 164 millions d'euros respectivement, qui n’ont finalement pas été présentés aux universités ni dépensés dans le cadre de l’opération Campus.
Or, pour 2011, ce n’est pas le faible degré d’avancement des projets du plan Campus qui permet d’envisager que ces 270 millions d'euros seront mobilisés pour des opérations d’envergure, même si vous expliquez que cela permettra « d’accélérer le début des travaux ». Peut-être en ira-t-il ainsi, mais 2011 ne verra pas forcément la consommation des crédits…
Nous sommes par ailleurs bien loin du montant de 5 milliards d’euros correspondant à l’effort consenti par l’État pour l’opération Campus et qui est censé servir de repère à nos concitoyens puisque, communication oblige, le Gouvernement le répète inlassablement année après année. En réalité, cette somme représente un capital, obtenu pour partie par le désengagement de l’État, qui a réduit sa participation dans le groupe EDF à hauteur de 3, 7 milliards d'euros et fait appel au grand emprunt pour 1, 3 milliard d'euros de plus. La somme de 270 millions d'euros correspond au produit de l’intérêt de ces 5 milliards d'euros, qui dorment tout en faisant du bruit médiatique… Mais n’est-ce pas là l’essentiel ?
L’effort affiché pour 2011 inclut également les partenariats public-privé pour 238 millions d’euros, après 110 millions d'euros en 2009 et 420 millions d'euros en 2010, soit un total de 760 millions d'euros affichés mais, pour le moment, purement virtuels. Le principe étant la prise en charge par le partenaire privé de la totalité de la dépense initiale pendant trois à quatre ans, la personne publique ne commence à s’acquitter d’un loyer qu’à partir de la livraison. À ce titre, en 2011, l’effort de l’État relatif aux remboursements des emprunts liés aux partenariats public-privé n’apparaît que pour 14, 33 millions d’euros. L’essentiel viendra après les élections de 2012…
Je rappelle que le groupe socialiste est très réservé sur ce mode de financement, qui aboutit à privatiser le patrimoine des universités au profit d’investisseurs privés, lesquels n’ont ni les mêmes droits, ni les mêmes devoirs, ni les mêmes préoccupations surtout que le secteur public en matière d’aménagement universitaire du territoire Je pense en particulier aux antennes des universités en milieu rural, dont Jean-Luc Fichet parlera tout à l’heure.
En conclusion, les universités savent que, dans le contexte général de la politique conduite par le Gouvernement, elles doivent envisager l’avenir avec la plus grande prudence. De l’État, elles attendent pourtant des engagements pluriannuels pour accompagner leurs initiatives. Mais, ne se faisant guère d’illusions, les universités restent beaucoup plus mesurées que le Gouvernement quant à la réalité du caractère exceptionnel de l’effort qui serait consenti dans la loi de finances de 2011. J’ajoute qu’elles sont encore plus contrariées quand cet effort prend la forme d’annonces de bourses qui sont en réalité des exonérations de droits ne coûtant rien à l’État, mais ne leur rapportant rien.