Intervention de David Assouline

Réunion du 1er décembre 2010 à 22h30
Loi de finances pour 2011 — Recherche et enseignement supérieur

Photo de David AssoulineDavid Assouline :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs spéciaux, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, je concentrerai mon propos à la vie étudiante.

Nous savons tous à quel point les conditions de vie des étudiants sont l’une des causes essentielles de l’échec qui gangrène notre système universitaire, lors du premier cycle en particulier.

En 2007, une étude avait déjà révélé que les dépenses des étudiants s’étaient accrues de 23 % en cinq ans. Alors que cette tendance se poursuit, les aides n’ont augmenté que de 6 %. Autant dire que les étudiants sont les premiers concernés par la baisse du pouvoir d’achat : neuf étudiants sur dix ont en effet vu leur pouvoir d’achat diminuer fortement.

Un étudiant sur deux est obligé de se salarier pour financer ses études. Chaque année, ils sont 20 % à abandonner leur cursus faute de financement. On ne peut pas, d’un côté, afficher sa volonté de permettre à un plus grand nombre de lycéens d’avoir le baccalauréat et, de l’autre côté, ne pas se donner les moyens d’aider les jeunes qui en ont le plus besoin, souvent issus des milieux les plus en difficulté, à suivre des études supérieures !

Au-delà de ce que j’appellerai des « bricolages », qui témoignent, certes, d’une bonne volonté, vous n’avez jamais pris de décision à la hauteur de l’enjeu pour améliorer de façon nette et visible les conditions de vie des étudiants.

Cette année, les crédits de l’action 01, Pilotage et animation, du programme 231, Vie étudiante, qui concerne les aides directes, augmentent enfin. Vous prévoyez 574 000 boursiers en 2011. Le chiffre est, certes, en augmentation, mais il faut savoir que la majorité de ces nouveaux boursiers seront ce que l’on appelle des boursiers « échelon zéro ». Ces boursiers ne perçoivent pas de bourse, ils sont simplement exonérés du paiement des droits d’inscription. C’est déjà très appréciable, j’en conviens. Mais je constate aussi qu’il s’agit d’un beau tour de passe-passe de votre part, puisque l’État ne compense pas ce manque à gagner !

Vous gonflez donc les chiffres à peu de frais, tandis que l’aide pour les boursiers les plus pauvres plafonne, perdue dans cette augmentation générale. Là où il faudrait « mettre le paquet », on n’avance pas ! Cet artifice est à l’aune de l’ensemble du budget du ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur, qui souffre d’un manque patent de sincérité !

Pour autant, tout n’est pas négatif. Il est vrai que vous souhaitez enfin concrétiser votre promesse d’accorder un dixième mois de bourse pour répondre à l’allongement du calendrier universitaire : il était temps ! L’année dernière, cette promesse était restée lettre morte. Seulement, mesquinerie oblige, le financement de ce dixième mois s’étale sur deux ans. (Vous passez donc sous silence le fait que, cette année, les boursiers toucheront leur bourse à taux plein pendant neuf mois plus un demi-mois.

Mais pour moi, il y a pire ! Les aides à la mobilité s’établissent à 23, 7 millions d’euros contre 31, 89 millions d’euros l’année passée. Or, pour mettre vos actes en accord avec ce que vous annoncez, parfois de façon éclatante, il aurait fallu augmenter sensiblement ces crédits. Au-delà de la baisse des crédits, je m’insurge contre ce décalage.

On le sait, les séjours et études à l’étranger sont un atout majeur dans la construction d’un profil professionnel. Dans le monde d’aujourd’hui, dans l’Europe que nous construisons, la mobilité est un atout essentiel pour nos jeunes, pour la place de la France et pour notre compétitivité. Négliger cet atout est un aveu quant à votre manière de concevoir l’investissement pour l’avenir, qui est une nécessité absolue et en aucun cas une dépense inutile !

Que dire du logement ? Alors que la spéculation reprend de plus belle et que le montant des loyers devient inabordable pour tous les Français, et pour les jeunes en particulier, les étudiants sont de plus en plus nombreux à chercher à se loger.

On recense aujourd’hui 150 000 chambres pour 2 millions d’étudiants, dont 550 000 boursiers. Nous n’avons donc même pas de quoi loger le tiers des boursiers de notre pays ! Comment s’étonner que certains étudiants, en dépit des aides qu’ils perçoivent, éprouvent des difficultés à suivre leurs études dans de bonnes conditions ?

Les constructions de logements promises sont régulièrement revues à la baisse, y compris par rapport à vos propres engagements. Vous avez annoncé 40 000 logements pour 2014, mais, selon les chiffres dont je dispose, le budget prévisionnel n’autorise que 3 500 nouveaux logements pour les cinq années à venir et 8 400 réhabilitations.

La jeunesse est notre avenir. Si l’on veut avoir une jeunesse éduquée, hautement qualifiée, il faut lui donner les moyens de vivre dignement pendant son temps d’études et de formation. Voilà une dépense utile et nécessaire, car c’est de l’investissement !

Madame la ministre, votre projet de budget pour la recherche et l’enseignement supérieur ne prend pas ce cap. C’est une raison supplémentaire qui conduira le groupe socialiste à ne pas le voter.

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