J'apprécie votre vision européenne. Il est scandaleux de constater qu'il faut dix-huit mois pour homologuer une locomotive en Europe. Et cela coûte cher ! L'Europe du rail en est au stade de la préhistoire, à la différence de l'aviation, qui produit des Airbus. Il est urgent que les instances européennes règlent cette question.
L'ouverture à la concurrence ? J'y suis, moi, favorable ! Non pour des raisons idéologiques, mais chiffres à l'appui. En Allemagne, l'ouverture a débouché sur une réduction de la dépense publique de 20 % sur les trains régionaux, sans diminution de la qualité de service. Pourquoi faire payer 20 % plus cher aux contribuables français ? Je soutiens une concurrence maîtrisée, régulée, au bénéfice des usagers. Comment envisagez-vous l'ouverture à la concurrence, qui est une orientation de fond ?
Deuxième point : la gouvernance ferroviaire. En 1997, notre pays en a inventé une version ubuesque, kafkaïenne unique au monde... Mais cela ne peut plus durer. Aussi bien la Cour des comptes que l'IGF, les associations d'usagers ou l'autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF) réclament une séparation claire des responsabilités. Le mode d'organisation n'est pas prioritaire face à la question de la compétitivité. A minima, il faudrait unifier la direction de la circulation ferroviaire, en charge de la régulation du trafic et des horaires, et SNCF Infra, en charge de la maintenance des infrastructures. La holding ne doit pas être fondée sur un système de vases communicants qui rende l'entreprise opaque aux yeux du contribuable.
Mais, surtout, le coeur du sujet, c'est la compétitivité. Pour sauver le système ferroviaire, car tel est bien l'enjeu, il faut mettre l'accent sur la productivité et la performance. Certes, tout le monde préfère le train au bus, et déplore le remplacement de l'un par l'autre, mais cet arbitrage doit obéir aux coûts comparés, sinon il pèse sur le contribuable ! Comment augmenter la compétitivité du système ?
Notre industrie ferroviaire est la troisième au monde, avec des champions de taille mondiale : on peut en être fier ! Il faut la soutenir car elle manque de visibilité à moyen terme, alors que cette industrie emploie des dizaines milliers de salariés et qu'elle exporte dans le monde entier. Quel sera son plan de charge dans plusieurs années? Quel sera le matériel de demain ? Comment voyez-vous ce soutien ? Vous avez évoqué les trois milliards d'euros prévus dans les trains Intercités, mais il y a aussi les LGV : les quelques rames supplémentaires ne suffisent pas. Comment voyez-vous les choses ?