Au terme de ce débat, je tiens à exprimer toute ma satisfaction : la qualité des interventions a été remarquable.
J’en profite pour vanter les mérites du bicamérisme, à l’adresse de celles et de ceux qui auraient encore des doutes. Nous avons, me semble-t-il, donné une image très digne de la Haute Assemblée. Les échanges de ce matin entre notre collègue Jean-Pierre Chevènement et Jean-Pierre Sueur, le président de la commission des lois, illustrent avec force l’utilité d’une assemblée comme la nôtre !
Je tiens également à saluer M. le ministre délégué chargé des affaires européennes, qui a défendu les positions du Gouvernement avec conviction, talent et même franchise, par exemple lorsqu’il a évoqué les évolutions des uns et des autres sur les questions européennes. Il a su porter la parole gouvernementale avec une certaine efficacité ; comme vous venez de l’entendre, il a parfois emporté la conviction, y compris au sein de mon propre groupe ! Et ce n’est guère étonnant de la part d’un militant aussi engagé et subtil.
Au sein du groupe écologiste, nous assumons notre diversité. Elle existe d’ailleurs dans d’autres groupes de gauche, par exemple chez les socialistes ou chez nos amis radicaux et républicains, les sénateurs communistes et membres du Front de gauche formant un bloc peut-être plus compact.
Nous partageons les mêmes interrogations, bien que nous n’y apportions pas toujours les mêmes réponses. Pour notre part, nous restons sur la position qui était la nôtre en février et en mars, lors de la signature du traité. D’ailleurs, puisque Daniel Cohn-Bendit, qui a le sens de la formule, a été évoqué, je rappelle qu’il a été le premier à parler de « traité Merkozy ».
Le traité Merkozy a été signé dans le contexte particulier que nous connaissons. Il porte, je l’ai dit, les stigmates d’une philosophie, le libéralisme, et d’une méthode, la technocratie et l’intergouvernementalité.
Avec de tels péchés originels, il sera sans doute difficile de modifier profondément la donne dans les mois et les années à venir. Et c’est sur ce point que porte notre interrogation.
C’est pourquoi, même si nos débats ont été très intéressants, je voterai « non », tout comme un certain nombre de membres de mon groupe, tandis que d’autres exprimeront leur refus de s’associer à la ratification du traité en s’abstenant.
Tel est l’état de notre réflexion, dans laquelle il ne faut pas voir de positionnement tactique. C’est d’ailleurs ce que j’ai indiqué avec force aux membres du Gouvernement, au Premier ministre et au Président de la République.
Nous avons fait part de notre perplexité, et même de notre inquiétude. Dès la fin des élections, la construction européenne a repris le cours qui est le sien depuis vingt-cinq ans : une démarche technocratique – je l’ai indiqué – et, en l’occurrence, antidémocratique ! Jadis, l’hypocrisie bourgeoise aidant, on faisant au moins semblant de consulter un peu les parlements nationaux… Là, il n’y a même pas eu de consultation.
Je comprends que la déferlante libérale à l’œuvre depuis vingt ans puisse convenir à certains de nos collègues. D’ailleurs, et je m’adresse entre autres à M. Marini, ceux qui s’apprêtent à voter le projet de loi après avoir soutenu Nicolas Sarkozy lors de la signature du traité ont le mérite de la constance.
Le libéralisme, c’est moins d’intervention de la puissance publique dans la vie sociale, économique et démocratique de nos concitoyens. Compétitivité internationale, efficacité plus ou moins grande… ce sont toujours les mêmes termes qui reviennent ! Pour quels résultats ? Régression des services publics, diminution des impôts… c’est le même cycle depuis vingt ans.
L’état d’esprit dans lequel je vais me prononcer animera peut-être la majorité présidentielle et gouvernementale. J’ai voté « oui » à Maastricht. Vingt ans plus tard, lorsque je fais le bilan, je le regrette. Car où en sommes-nous après le débat sur les critères de convergence ? Après les traités d’Amsterdam et de Nice ? Après le traité constitutionnel européen, ou TCE ? Après le traité de Lisbonne ? La situation est extrêmement préoccupante pour les peuples d’Europe, qui sont loin de tout cela. Quid des services publics, de la solidarité, du développement économique ?
Quid aussi de l’écologie ? Car quelles seront les marges de manœuvre qui sont nécessaires pour la mutation écologique ? Je vous renvoie à nos débats sur la banque publique d’investissement, notamment s’agissant de l’aspect budgétaire, ou sur la nécessité d’aider nos PME-PMI pour accomplir cette mutation.
De grands pays, comme la Chine, l’Allemagne, le Danemark, la Corée du sud ou les États-Unis, ont fait des efforts en ce sens. Pas nous.
Je suis donc très inquiet.
Je me réjouis d’ailleurs que l’on n’inscrive pas la règle d’or dans la Constitution. Pour le coup, cela nous aurait peut-être amenés, nous écologistes, à adopter des positions plus radicales dans notre stratégie politique. En effet, dans une telle hypothèse, la future loi organique et la loi de finances n’auraient plus servi à grand-chose !
J’ai entendu le Président de la République nous demander de lui accorder notre confiance. Ça tombe bien ; comme j’ai voté pour lui au mois de mai dernier, même si je ne porte pas le même jugement sur le TSCG, je suis prêt à lui accorder ma confiance pour les deux années à venir. Je lui fais confiance pour l’ensemble du quinquennat, bien sûr, mais c’est lui qui a évoqué l’échéance des deux années à venir, parlant même d’inversion de la courbe du chômage l’année prochaine. §Certes, avec un taux de croissance de 0, 8 %, cela me paraît compliqué…