Séance en hémicycle du 11 octobre 2012 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l’auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Le groupe du RDSE auquel j’appartiens est très attentif au développement des énergies renouvelables. Notre position, déjà exprimée à plusieurs reprises dans cette enceinte, est connue : l’indépendance énergétique de la France est un objectif incontournable qui doit reposer sur la recherche et le développement des deux filières d’excellence que sont le nucléaire et les énergies renouvelables.

À l’issue de la conférence environnementale qui s’est tenue voilà quelques semaines, le Gouvernement a présenté une feuille de route pour la transition écologique. Elle peut se résumer à cette phrase forte : « Les énergies renouvelables et les nouvelles technologies de l’énergie offrent l’opportunité d’une nouvelle révolution industrielle et sociétale. » Le groupe du RDSE souscrit entièrement à cette idée.

Nous connaissons, madame la ministre, le lourd héritage que vous avez à gérer en matière d’énergies renouvelables et l’état dramatique des filières photovoltaïque et éolienne, avec des fermetures d’usines et des suppressions d’emplois. Nous savons aussi que vous travaillez à l’élaboration d’une véritable politique de relance de ces filières.

Reste qu’il y a urgence à traiter des dossiers en attente et à prendre des décisions qui, dans cette phase de transition, vont permettre de sauver ce qui peut encore l’être. En effet, sur nos territoires, beaucoup d’entreprises nous font part de leurs grandes difficultés. Elles se heurtent à une politique tarifaire inadaptée, à des procédures administratives extrêmement lourdes et complexes, à des délais excessifs, ou encore à des retards dans l’exécution des récents appels d’offres, qui sont incompatibles avec leur survie économique. En un mot, ces entreprises n’ont aucune visibilité à court terme sur leur avenir.

Nos concitoyens, nos entrepreneurs qui ont pourtant pris le risque de se lancer dans ces nouvelles filières et les élus locaux qui ont fait le choix de les soutenir méritent mieux. Ils sont en droit d’attendre des mesures concrètes de sauvegarde de ces filières.

Madame la ministre, ma question est donc la suivante : que comptez-vous faire face à ces problèmes dans les semaines qui viennent – j’ose dire : « dans les jours qui viennent » – pour redresser cette situation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Debut de section - Permalien
Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Monsieur Vall, je vous remercie de votre question qui me permet de souligner combien il est urgent de prendre des mesures qui relèvent de ce que j’appelle le « patriotisme écologique », afin de répondre aux attentes de filières industrielles qui souffrent dans le domaine des énergies renouvelables.

Vous le savez, la France s’est engagée dans une politique de transition énergétique. Les engagements qu’a pris le Président de la République doivent aboutir en 2025 à une évolution de notre mix électrique. Cela doit passer par la montée en puissance des énergies renouvelables.

Très prochainement s’ouvrira le débat sur la transition énergétique, qui permettra de mettre en place un cadre stable et durable pour la durée du quinquennat, qui donnera aux entreprises la visibilité dont elles ont besoin pour orienter leurs investissements et leurs stratégies.

Cela dit, vous avez raison, il faut prendre des mesures d’urgence.

C’est pourquoi nous avons annoncé pour la filière solaire le lancement d’un nouvel appel d’offres pour les grandes installations, la continuation des appels d’offres pour les moyennes installations et l’augmentation du tarif de rachat pour le petit photovoltaïque. Ces mesures donneront lieu à des systèmes de bonification pour la création de valeur ajoutée sur le territoire national puisque notre but est de soutenir les entreprises qui créent des emplois en France. C’est un aspect très important des mesures de soutien à la filière solaire.

Nous discutons actuellement, vous le savez, de mesures de relance de l’énergie éolienne, car nous sommes très loin des objectifs du Grenelle de l’environnement. Nous sommes aujourd’hui seulement à 6 870 mégawattheures de puissance installée, et il est donc, là aussi, nécessaire d’agir. Il y a eu un effondrement des projets d’implantation d’éoliennes alors que l’énergie éolienne est assez compétitive.

La filière éolienne a fait l’objet d’amendements présentés par le Gouvernement lors de l’examen de la proposition de loi de M. François Brottes à l’Assemblée nationale. Des dispositions visant à une simplification administrative ont été adoptées ; elles prévoient la consultation systématique des élus locaux et des citoyens en cas de projets d’implantation d’éoliennes. Cette simplification des procédures administratives permettra que ces projets soient davantage soutenus.

Vous l’avez souligné à juste titre : l’énergie éolienne représente 11 000 emplois en France et 180 entreprises. Tous attendent aujourd’hui des mesures de soutien et des mesures d’urgence.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Ma question s’adresse autant à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche qu’à M. le ministre délégué chargé du budget.

Nous avons appris avec stupéfaction, par la presse, la décision du Gouvernement de ne pas inscrire, dans la loi de programmation budgétaire, le milliard d’euros prévu en dotation à la Société du Grand Paris, pour la réalisation du Grand Paris Express.

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Cette décision a causé immédiatement une très vive émotion parmi la population et l’ensemble des élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Si elle était maintenue, cette décision constituerait un très mauvais coup : d’abord, pour les millions d’usagers de la région capitale, confrontés tous les jours à de grandes difficultés pour se déplacer ; ensuite pour l’emploi et la croissance de la région capitale.

Si ce projet devait ne plus être financé ou même être retardé, ce serait un véritable choc pour l’économie francilienne. Dès lors, à quoi bon évoquer l’idée même d’une politique régionale ambitieuse d’aménagement, d’environnement, de logement, de développement économique !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Face à des enjeux aussi lourds, le conseil d’administration du syndicat des transports d’Île-de-France s’est exprimé hier de façon extrêmement claire et nette en adoptant à l’unanimité, toutes sensibilités politiques rassemblées, un vœu demandant l’inscription de ces crédits, d’ici à la fin de l’année, dans la loi de programmation budgétaire.

Debut de section - Permalien
Un sénateur de l’ Ump

Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Monsieur le ministre, comment parler de pacte de confiance entre l’État et les collectivités locales si un tel projet, qui a fait l’objet d’un accord unanime en janvier 2011 entre l’État, la région et tous les départements d’Île-de-France, était aujourd’hui remis en cause, alors que l’enquête publique sur le premier tronçon sud, qui va des Hauts-de-Seine à la Seine-Saint-Denis et qui traverse tout le Val-de-Marne, va débuter dans quelques semaines ?

Aussi ma question est-elle simple : allez-vous, dans la loi de programmation budgétaire, réinscrire le milliard d’euros manquant et confirmer vos engagements, aux côtés des collectivités territoriales franciliennes, en faveur de la réalisation du métro du Grand Paris Express, dans les délais annoncés ?

Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe écologiste et de l’UCR. Vifs applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Philippe Kaltenbach applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Mme Cécile Duflot, qui m’a demandé de vous transmettre les réponses claires, comme elles le sont d’ailleurs de façon constante

Riressur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Vous le savez, le Grand Paris est un engagement répété du Président de la République. C’est donc aussi celui du Gouvernement.

Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Le schéma d’ensemble unit l’État et la région d’Île-de-France. Il ne changera pas.

Ah ! sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Le tracé des lignes sera confirmé et la localisation des gares sera maintenue. Laisser planer le doute n’y changera rien

Oh ! sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Pour ce qui est de la réalisation financière, le plan de financement sera décidé, et il reflétera une politique de priorisation.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Ce qui est vrai pour le SNIT, le schéma national des infrastructures de transport, dont j’ai la charge, est vrai aussi pour le Grand Paris, à propos duquel un certain nombre de promesses ont été faites.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Il nous revient maintenant d’assumer les responsabilités qui découlent des engagements pris par d’autres.

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Nous nous y attellerons avec rigueur et méthode. Nous verrons point par point, ligne par ligne, gare par gare, les conditions financières qui nous permettront de mener à bien ce projet, qui n’est pas simplement un projet de transport. C’est un projet d’aménagement, d’équilibre du territoire, qui permettra d’apporter des réponses au quotidien des Franciliens.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Vous le savez, le respect de cet engagement sur la qualité des transports, sur l’aménagement du territoire, sur les réponses aux attentes des Franciliens est une préoccupation constante du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Je ne fais que réaffirmer ce que Cécile Duflot a dit et répété.

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

(Mêmes mouvements sur les mêmes travées.), ce qui explique votre agitation, mais je ne fais que répéter ce qu’elle a déjà dit ; je me fais son porte-parole pour dire que, comme s’y est engagé l’ensemble du Gouvernement, lorsqu’il sera nécessaire d’inscrire le fameux milliard permettant la poursuite de ce projet, nous le ferons.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Mesdames, messieurs les sénateurs qui siégez à droite dans cet hémicycle, peut-être êtes-vous trop privés de la parole de Mme Duflot §

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Cette inscription est aujourd’hui envisagée pour 2015, s’il est nécessaire d’intervenir avant, nous le ferons ; le Gouvernement assumera ses responsabilités et répondra à vos attentes.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. le président. La parole est à Mme Marie-Annick Duchêne.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Annick Duchêne

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale.

La multiplication des incidents dans les établissements scolaires, l’évolution préoccupante de ce phénomène et d’actes qui relèvent, pour moi, plus du code pénal que du simple fait divers constituent de vraies questions de société.

Dans un contexte de banalisation de la violence et de rejet de toute forme d’autorité, prévenir et lutter contre cette violence en milieu scolaire est une des conditions essentielles de la refondation de l’école.

Ce n’est que dans une ambiance apaisée que tous les acteurs pourront travailler en concertation, dans le respect des compétences dévolues à chacun, et dans un climat de confiance mutuelle.

La refondation de l’école, monsieur le ministre, nécessitera, vous le savez, beaucoup plus que la réforme des rythmes scolaires.

Dans le rapport de concertation, je n’ai quasiment rien trouvé – excepté quelques éléments à la page 45 – qui permette de croire que vous vous donnerez les moyens de relever ce défi essentiel, rien qui laisse entrevoir des pistes d’actions pour faire reculer la violence en milieu scolaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Annick Duchêne

Mme Marie-Annick Duchêne. Monsieur le ministre, où sont les propositions et les orientations du Gouvernement pour assurer la sécurisation des établissements, redonner du sens à la prévention, à l’éducation et aux sanctions scolaires pour réintroduire, enfin, la fonction d’autorité ?

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale

Madame la sénatrice, vous avez raison d’appeler l’attention de la représentation nationale et du Gouvernement sur des phénomènes qui nous affectent tous, sur ces blessures pour notre République, qui entravent la transmission que nous voulons opérer vers les plus jeunes.

Les adultes sont évidemment – car j’entends souvent les discours sur la jeunesse – les premiers responsables de cet état de fait. C’est ce qui a justifié que le Président de la République fasse de l’école et de la jeunesse sa priorité.

La jeunesse, c’est la France de demain, et nous voyons bien que, dans la transmission d’un certain nombre de valeurs telles que l’ordre et l’autorité, nous avons, ces dernières années, failli.

Vous déplorez – à tort, car je ne crois pas que cela soit un sujet de polémique, en tout cas je ne le souhaite pas – que la concertation n’ait pas abordé ce sujet. La concertation, à laquelle les sénateurs et les sénatrices participaient, était libre d’aborder tous les sujets qu’elle voulait. En tout cas, le Gouvernement aborde ce sujet avec beaucoup de résolution.

D’abord, vous le savez sans doute, nous avons créé, à la demande du Président de la République, un nouveau métier : assistant de prévention et de sécurité.

J’entendais l’un d’entre vous dire : « Encore une commission ! ». Non, ces 500 emplois nouveaux sont déjà en train d’exercer leurs responsabilités dans les collèges les plus en difficulté.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale

Jamais, y compris durant les dix années pendant lesquelles vous avez été aux responsabilités, les termes « violence scolaire » n’avaient figuré dans les intitulés des directions de l’éducation nationale. Or, voilà un mois, j’ai demandé la création – et cela a été fait – d’une délégation à la prévention et à la lutte contre les violences scolaires.

Cette délégation est chargée non seulement de mieux nous faire connaître ce phénomène, mais également de nous aider à nous outiller pour lutter contre ce type de violence et de former les professeurs à mieux y réagir, en relation avec les services de justice et de police. Jamais je n’ai remis en cause, vous l’aurez noté, les équipes mobiles de sécurité.

Le délégué qui a été nommé a été auditionné par l’Assemblée nationale, et j’invite le Sénat à faire de même. Il a clairement indiqué que, parmi les missions qui lui étaient confiées, il veillerait à améliorer le travail réalisé dans les établissements sensibles avec les équipes de sécurité.

Sachez également que, chaque fois qu’un enseignant a été agressé, j’ai invoqué l’article 40 du code de procédure pénale. C’est la première fois que cette procédure est utilisée ! Il est en effet inadmissible que des personnels de service public puissent éprouver la moindre crainte – cela vaut aussi pour les élèves, mais je parle dans le cadre de mes responsabilités – à transmettre, en notre nom à tous, la connaissance et les valeurs de la République.

Je souhaite que tous les Français se rassemblent autour de l’école et de cet impératif : le retour de l’autorité.

Ce dont nous avons besoin, c’est d’assurer la présence d’adultes dans les établissements, de recréer de la conscience, d’enseigner la morale laïque et de faire preuve d’exemplarité dans nos comportements.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Ma question s’adressait à M. le Premier ministre, mais, en son absence, je sais que M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche me répondra.

La mondialisation implique le développement d’une économie entrepreneuriale de la connaissance et se caractérise par la puissance de l’urbanisation. En conséquence, les grandes villes sont devenues le moteur essentiel de l’économie mondiale.

Les villes-monde, comme New York, Londres, Tokyo et Paris, avec les nouvelles entrantes – je pense notamment à Shanghai ou à São Paulo –, sont devenues la référence de cette mondialisation. Or Paris est une petite ville de 2 millions d’habitants enfermée dans son périphérique.

Protestations sur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Le Président Nicolas Sarkozy en avait pris acte dans son discours du 29 avril 2009. La loi du 3 juin 2010 sur la grande boucle des transports parisiens constituait le premier pas pour accompagner, pour conforter les pôles stratégiques d’Île-de-France et assurer le développement économique du pays et de l’Europe. Cela s’est fait avec le consensus des acteurs politiques, économiques et sociaux de la région, même si, à l’époque, nos collègues des groupes communiste et socialiste n’avaient pas voté cette loi.

Toutefois, en dehors d’une allusion du Président de la République le jour de son investiture à l’hôtel de ville de Paris, qui a parlé discrètement d’une métropole parisienne, nous avons été très surpris que, vendredi dernier, dans son discours supposé fondateur sur les collectivités territoriales, il n’ait pas dit un mot sur la nécessité de construire le Grand Paris.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Ajoutez à cela l’absence du premier milliard d’euros sur le Grand Paris dans la loi de programmation budgétaire, alors même que 311 millions d’euros de taxe spéciale ont déjà été prélevés sur les entreprises franciliennes pour financer ce projet, sans compter la part que les Franciliens paient sur leurs impôts locaux !

Vous comprendrez, monsieur le Premier ministre, ou plutôt vous, monsieur le ministre qui allez répondre à ma question – Mme la ministre de l’écologie étant elle aussi absente –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

… que les élus franciliens, dont beaucoup de vos amis politiques, notamment le président de la région lui-même, s’interrogent sur l’absence de réflexion et de vision sur ce dossier majeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

M. Yves Pozzo di Borgo. Ce gouvernement a-t-il une vision du Grand Paris ? Si oui, laquelle ? Deux minutes trente pour répondre, cela sera peut-être un peu court, mais nous avons besoin d’être rassurés.

Applaudissements sur les travées de l’UCR et de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, puisque vous avez besoin d’être rassuré, …

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

… je vais vous redire pour la énième fois combien le Gouvernement, dont notamment Mme Duflot, la ministre chargée de l’égalité des territoires, …

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

… est attentif à la concrétisation de la réalisation du Grand Paris.

Vous avez replacé Paris dans un contexte de compétitivité internationale, mais le Grand Paris tel que le Gouvernement souhaite le réaliser – et nous le ferons ! – est le Grand Paris des habitants. S’il doit bien évidemment être une source d’attractivité nationale, voire internationale, il doit pouvoir répondre aux besoins du quotidien.

Le Grand Paris qui est le nôtre, c’est celui de l’emploi, de l’attractivité économique, du logement, notamment social, …

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. … pour répondre à la volonté du Président de la République et du Premier ministre. C’est également le Grand Paris de l’égalité des territoires pour éviter que des zones de cette région ne soient enclavées.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. C’est le Grand Paris de l’efficacité, de la solidarité et de l’innovation.

Exclamations sur les travées de l’UMP

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Bref, c’est un Grand Paris que nous rendrons crédible, alors que vous nous avez surtout laissé un Grand Paris qui n’est qu’une succession de promesses et de projets. Nous, nous ne nous limitons pas à faire des projets, nous les concrétisons !

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

J’ai répondu il y a quelques instants sur le milliard d’euros que vous avez évoqué, mais vous l’avez dit vous-même, des crédits ont été levés : dès demain, …

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

… nous devrons répondre aux attentes des Franciliens, et je pense notamment au caractère anxiogène des transports.

Nous le ferons, parce que nous avons la volonté d’expertiser et d’analyser. La méthode utilisée pour le schéma national des infrastructures de transport et pour le Grand Paris est de rendre crédible ligne par ligne, réalisation par réalisation, l’ensemble des projets. Ces derniers n’avaient pour l’instant été qu’un amoncellement de promesses électorales faites dans une période qui s’y prêtait.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué. Ce qui n’était que des promesses électorales deviendra bientôt la concrétisation d’une volonté ambitieuse et solidaire.

Vifs applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Exclamations sur les travées de l’UMP et de l’UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Kalliopi Ango Ela

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

La presse s’est fait l’écho, il y a environ une semaine, du souhait du Gouvernement de revenir sur « les critères pénalisants » introduits par le précédent ministre de l’intérieur en matière de naturalisation. Je salue évidemment la détermination affichée de la nouvelle majorité d’affirmer une volonté forte d’intégration par l’accès à la nationalité française.

Les éléments relayés par la presse font notamment état de la suppression du QCM de connaissance générale. Cette épreuve, dans tous les sens du terme, est souvent perçue comme humiliante par nos concitoyens aspirant à la nationalité française.

Cependant, rien n’est dit sur l’obligation faite, depuis le 1er janvier 2012, pour tous les candidats à la nationalité française de présenter un document certifiant leur niveau de langue. Cette mesure prise par l’ancienne majorité leur impose de fournir un diplôme ou une attestation certifiant qu’ils ont acquis le niveau B1 oral en langue française. Cette dernière attestation est délivrée par un organisme labélisé FLI, c’est-à-dire français langue d’intégration, ou par un organisme agréé par le ministère de l’intérieur.

À l’étranger, cette attestation s’obtient auprès des alliances françaises ou des instituts français.

Au-delà du coût que représente cette démarche, celle-ci pose également des problèmes particuliers pour les conjoints de Français résidant à l’étranger, a fortiori dans des pays francophones. Il est ainsi aberrant d’être obligé de produire un document certifiant votre niveau de langue, lorsque l’on est originaire d’un État qui compte le français parmi ses langues nationales.

Je ne peux m’empêcher d’illustrer mes propos avec l’exemple du Cameroun, où je résidais depuis vingt-cinq ans avant de rejoindre les rangs du Sénat au mois de juillet dernier.

De la même manière, comment réagirions-nous, si un postulant français à la nationalité belge – un sujet d’actualité ! – se voyait imposer de fournir la preuve de son niveau de langue française ?

S’il est évident que maîtriser la langue d’un pays constitue indéniablement un vecteur d’intégration, cela ne doit pas se transformer en un parcours d’obstacles onéreux et humiliant.

Dès lors, monsieur le ministre, quel est le sort réservé aux certificats de niveau de langue ? Par ailleurs, les améliorations prévues quant au droit de la nationalité viseront-elles l’acquisition par déclaration, qui concerne les conjoints de Français, ou seront-elles cantonnées aux demandes de naturalisation et de réintégration ? Enfin, pourriez-vous également nous éclairer sur le calendrier envisagé ?

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC. – Mme Bariza Khiari applaudit également.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l’intérieur

Madame la sénatrice, ces deux dernières années, l’accès à la nationalité française a été entravé et empêché ; cette politique a produit les résultats que nous connaissons aujourd’hui et que rappelait l’autre jour le Premier ministre : une baisse du nombre de naturalisations de 40 % entre 2011 et mai 2012.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre

Ces obstacles, qui n’ont jamais fait l’objet d’un débat, ont touché notamment les étrangers installés depuis longtemps en France, parfaitement insérés dans la société et qui ont fait le choix de devenir Français.

Notre volonté est de changer cette donne et de refaire de l’accès à la nationalité un moteur de l’intégration. Pour cela, nous préparons une circulaire qui devrait être adressée aux préfets dans quelques jours pour revenir sur les critères les plus discriminants. J’en retiendrai quatre points.

Premièrement, la méthode du questionnaire à choix multiples portant sur la connaissance de l’histoire, de la culture et de la société françaises sera abandonnée.

Deuxièmement, s’agissant des tests, la connaissance du français est bien évidemment un facteur d’intégration tout à fait essentiel.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre

Le niveau exigé sera maintenu ; ce n’est pas ce niveau qui est discriminant, mais la façon dont il est évalué et la prise en compte des conditions spécifiques de certains demandeurs.

Troisièmement, nous allons cibler les critères à l’origine de la majeure partie des refus ; je pense en particulier à l’insertion professionnelle.

Quatrièmement, enfin, seront traités à part le cas des jeunes de moins de vingt-cinq ans ayant effectué tout ou partie de leur scolarité en France et celui des médecins étrangers.

Bref, je souhaite, madame la sénatrice, mener un travail ambitieux en matière de naturalisation. Il ne s’agit pas d’engager des polémiques ou d’ouvrir un débat absurde sur la nationalité – je me rappelle des mots à l’Assemblée nationale de Pierre Mazeaud, qui nous avait conseillé il y a deux ans de ne pas ouvrir ce débat néfaste –, mais de faire en sorte que ceux qui veulent être français le soient dans de bonnes conditions. Notre message, et nous devons en être fiers, c’est que la France est prête à accueillir de nouveaux Français.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Berson

Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Les conditions de vie des étudiants sont des facteurs clés de leur réussite à l’université. Or les étudiants connaissent aujourd’hui une véritable galère pour se loger, entre la pénurie de places en résidences universitaires et les chambres louées à des prix exorbitants. Le désengagement de l’État, depuis dix ans, dans la construction de résidences universitaires, le comportement, parfois abusif, de certains bailleurs privés et les agissements de certaines agences immobilières vendant des listes, souvent factices, d’appartements à louer expliquent cette situation insupportable vécue par un étudiant sur deux. Je dis bien « un étudiant sur deux » !

La France compte un peu plus de 2 millions d’étudiants, mais il n’y a que 165 000 places en cités universitaires, 150 000 en résidences privées, et 700 000 étudiants vivent chez leurs parents. Ce sont donc bien un million d’étudiants, c’est-à-dire un étudiant sur deux, qui cherchent à se loger.

Ces dernières années, les plans se sont succédé, mais la pénurie de logements étudiants a perduré.

Dans le plan Anciaux de 2004, le Gouvernement avait pris l’engagement de créer 5 000 logements étudiants par an et d’en réhabiliter 7 000 chaque année. Moins de 60 % de ces objectifs ont été atteints. Résultat : seuls 8 % des étudiants bénéficient d’un logement géré par le CROUS.

Sur les 13 000 logements annoncés dans le plan Campus, aucun n’a été réalisé !

Quant au « passeport logement », qui devait faciliter l’accès des étudiants au parc privé, il a donné lieu à la signature de sept contrats seulement.

Dès lors, les loyers, d’un montant s’échelonnant de 450 à 700 euros par mois pour un studio, pèsent de plus en plus lourd dans le budget des étudiants, pour représenter de 40 % à 45 % de leurs dépenses. Conséquence : 50 % des étudiants sont obligés d’avoir une activité salariée pendant leurs études.

Ces chiffres sont accablants pour les précédents gouvernements.

Madame le ministre, le Président de la République a fait de l’éducation et de la jeunesse la priorité de son action. Dès lors, comment le Gouvernement entend-il répondre à l’attente des étudiants qui veulent tout simplement se loger dignement à des prix raisonnables pour pouvoir étudier et réussir ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche

Mme Geneviève Fioraso, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, avant de répondre à votre question, permettez-moi de partager avec le Sénat notre plaisir d’avoir depuis mardi un prix Nobel de physique français en la personne du professeur Serge Haroche.

Applaudissements.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche

Cette excellence de la science doit beaucoup à la qualité de notre enseignement, primaire, secondaire et supérieur, ainsi qu’à celle de notre recherche.

La réussite des étudiants – de tous les étudiants ! – est la priorité de ce gouvernement.

Or, vous l’avez dit, toutes les études démontrent l’impact des conditions de vie sur l’échec en premier cycle. Elles démontrent aussi que la démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur est en panne, avec moins de 9 % de jeunes issus de milieux modestes en mastère.

Le logement, vous l’avez relevé à juste titre, pèse pour beaucoup dans la dégradation des conditions de vie des étudiants, lesquels doivent par conséquent exercer une activité professionnelle – je devrais plutôt dire des « petits boulots » –, ce qui obère évidemment leurs chances de réussite, notamment dans le premier cycle universitaire.

Comme cela nous a été dit ce matin à Thierry Repentin et moi-même à l’université de Cergy-Pontoise, où certains d’entre vous étaient d’ailleurs présents, mesdames, messieurs les sénateurs, le montant des loyers en région parisienne atteint jusqu’à 70 % du budget mensuel d’un étudiant. Comment réussir ses études dans ces conditions ?

À Lyon, Lille, Aix-en-Provence, Bordeaux, entre autres agglomérations sous tension, ce montant atteint de 40 % à 50 % du budget mensuel.

Les difficultés à trouver un logement pénalisent en particulier les jeunes issus de milieux modestes et ceux qui viennent de l’étranger.

Et alors ? sur plusieurs travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Monsieur Berson, vous avez cité le plan Anciaux, qui a échoué dans ses objectifs, ou le plan Campus, autre échec patent. Quatre ans après le lancement de cette opération, aucun chantier n’a été lancé, aucune demande de permis de construire n’a été déposée, …

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Mme Geneviève Fioraso, ministre. … alors que les treize projets annoncés en 2007 prévoyaient la création de 13 000 logements !

Et alors ? sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Mme Geneviève Fioraso, ministre. J’en viens à la réalité du terrain.

Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition sénatoriale, soyez patients !

On le voit, cette réalité est bien loin des effets d’annonce incessants du gouvernement précédent, des milliards survendus médiatiquement, recyclés mais jamais dépensés.

Pour rattraper ce retard, qui pénalise la réussite étudiante, le Président de la République s’est engagé sur un objectif clair : la création de 40 000 logements en cinq ans.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Dès lors, avec ma collègue ministre du logement, nous mettons les bouchées doubles en utilisant la mobilisation du foncier public mis à disposition des collectivités locales. Nous voulons réserver, chaque année, 6 000 des 150 000 logements sociaux qui seront construits à des logements étudiants.

Nous changeons radicalement de méthode, en associant les collectivités territoriales – cela devrait vous intéresser mesdames, messieurs les sénateurs –, ce qui n’avait jamais été fait au cours du précédent quinquennat !

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Le projet de loi de finances prévoit de multiplier par cinq nos aides au logement. Des opérations recensant 24 000 logements ont déjà été identifiées.

Marques d’impatience sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Mme Geneviève Fioraso, ministre. À côté du logement collectif et social, nous nous intéressons également au logement privé. Pour cela, nous allons améliorer la situation par l’encadrement des loyers.

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Nous allons aussi instaurer un passeport locatif étudiant, lequel remplacera avantageusement le dispositif de mon prédécesseur qui a fait fiasco.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Huées sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Mme Geneviève Fioraso, ministre. Alors que sept accords seulement avaient été signés en un an et demi, sachez que, dans les régions Aquitaine et Midi-Pyrénées, 6 000 contrats ont été conclus sur la base d’initiatives régionales intelligentes et raisonnables.

Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre

Mme Geneviève Fioraso, ministre. Pour terminer, je le répète, la vie et la réussite du parcours des étudiants bénéficieront d’un budget en hausse. Cet effort illustre notre priorité nationale en faveur de la jeunesse, de l’enseignement et de l’éducation.

Vifs applaudissementssur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Mme Fabienne Keller. Ma question s’adresse à la fois à M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget, et à M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Mouvements divers.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Je souhaite évoquer ici l’avenir du onzième contrat triennal pour Strasbourg, ville européenne, pour la période 2012-2014.

Exclamations sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Mes chers collègues, ce contrat tient à la mission particulière de Strasbourg, qui accueille des institutions européennes pour le compte de la France, …

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

… et concerne les obligations liées à ce statut.

L’objectif est de poursuivre une stratégie commune entre l’État et les collectivités pour conforter et renforcer la place et le rôle de Strasbourg.

Un autre objectif, plus concret, consiste à soutenir des projets pour la ville, en particulier les liaisons aériennes vers les capitales européennes, ainsi que le rayonnement culturel et la vocation de l’université de Strasbourg, laquelle a d’ailleurs bien profité du plan Campus dans sa mission de rayonnement international.

Tous les acteurs politiques et économiques locaux s’accordent à dire que le contrat triennal est essentiel pour la ville.

Le précédent gouvernement avait travaillé sur le dossier et donné un élan décisif à ce contrat, mais l’échéance électorale nationale n’avait pas permis sa conclusion.

Déjà reportée à plusieurs reprises depuis le mois de mai dernier, la signature de ce contrat tarde. Cela crée un climat d’incertitude et fragilise l’avenir des projets et la place européenne de Strasbourg.

Cette incertitude est d’autant plus pénalisante qu’Air France-KLM – dont, je le rappelle, l’État est actionnaire – prévoit de supprimer la ligne aérienne entre Roissy et Strasbourg, ce qui constitue une très mauvaise annonce.

Debut de section - Permalien
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste

Et le TGV ?

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Strasbourg, capitale européenne, a besoin d’un soutien clair et d’une présence du Gouvernement. À cet égard, la conclusion rapide du contrat triennal serait un signal positif.

Messieurs les ministres, si je puis me permettre, il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour.

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Pouvez-vous nous préciser le calendrier prévu pour la signature du contrat triennal 2012-2014 et nous communiquer des éléments chiffrés sur le montant de l’enveloppe que vous envisagez de mobiliser ?

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Madame la sénatrice, je vous remercie pour votre question, qui renvoie au rôle particulier que joue Strasbourg comme capitale européenne et aux moyens dont elle a besoin pour assumer sa vocation.

Vous avez eu raison de rappeler que la dimension européenne de Strasbourg a toujours conduit l’État à accompagner cette ville dans le développement de ses liaisons de transport, notamment aériennes, et de ses infrastructures universitaires et de recherche, ainsi que dans un certain nombre de grands événements qui contribuent au rayonnement international de la ville où vous êtes élue et que vous représentez au Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Elle ne la représente que sur les travées de droite !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. J’y insiste, vous avez tout à fait raison d’être inquiète puisque, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités

Exclamations sur les travées de l’UMP et de l’UCR.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

… puisqu’il arrivait à expiration au mois de décembre 2011 et que vous avez quitté le pouvoir en mai dernier.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Je le répète, le contrat aurait déjà dû être signé au moment où nous sommes arrivés aux responsabilités. Or tel n’était pas le cas !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Il faut dire que les arbitrages n’avaient pas été rendus pour permettre cette signature dans les meilleurs délais. C’est la raison pour laquelle nous avons pris le dossier à bras-le-corps dès notre arrivée aux responsabilités.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Par conséquent, je vais pouvoir vous donner des éléments précis – ceux-là même que j’avais communiqués quand j’ai inauguré la Foire européenne de Strasbourg – qui vous permettront d’être, enfin, totalement rassurée.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Premièrement, les arbitrages sont rendus et l’ensemble des collectivités territoriales seront reçues dans les jours qui viennent pour que puissent être affinées avec elles les conditions dans lesquelles on procède à la rédaction définitive de ce contrat, de telle sorte qu’il puisse être signé dans les meilleurs délais. Ces arbitrages ont été rendus à la fin du mois de septembre. Par conséquent, comme je m’y étais engagé, ils sont prêts à être traduits dans le contrat.

Deuxièmement, je veux vous confirmer ici que l’ensemble des obligations de service public qui permettent la desserte aérienne de Strasbourg et qui contribuent à son rayonnement européen seront bien financées dans le cadre du prochain contrat triennal, et que l’ensemble de ces liaisons aériennes pourront être financées dans de bonnes conditions au terme des appels d’offres lancés.

Troisièmement, s’agissant de la ligne aérienne reliant Strasbourg à Roissy que vous avez évoquée, vous savez que nous avions pris l’engagement de recevoir l’ensemble des collectivités territoriales finançant cette desserte ; cela a été fait il y a trois semaines à Paris.

Cette rencontre a permis au président d’Air France de nous faire part des grosses difficultés que l’entreprise connaît depuis très longtemps et, malgré tout, d’indiquer qu’il poursuivrait la discussion avec le Gouvernement et les élus locaux pour trouver une solution qui, nous l’espérons, permettra de maintenir un bon niveau de desserte aérienne de Strasbourg, contribuant ainsi au rayonnement européen de cette ville à laquelle nous sommes très attachés.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Madame la ministre, vous avez réuni il y a un mois la première conférence environnementale du quinquennat. À cette occasion, il a été annoncé que le futur conseil de la transition écologique s’ouvrirait à la représentation nationale, en accueillant un collège de parlementaires.

Je tenais à vous exprimer la satisfaction avec laquelle notre assemblée et particulièrement sa commission du développement durable ont accueilli cette annonce.

En ouverture et en clôture de la conférence environnementale, le Président de la République comme le Premier ministre ont chacun prononcé un discours que l’on peut qualifier de « fondateur ».

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

En affirmant que la crise écologique est non pas une crise de plus, mais un élément de la crise globale, qui se décline sur le terrain économique, social et sanitaire, et en assignant à la France la tâche de porter un nouveau modèle de développement, le Président de la République a donné pour mission au Gouvernement d’organiser la mutation d’une économie à bout de souffle.

Le premier chantier est celui de la transition énergétique. S’agissant de la diversification du mix énergétique comme de la baisse de la consommation que réclame la sobriété, il va falloir convaincre les usagers comme les acteurs économiques. Et non des moindres, puisque le président d’EDF a déclaré avant-hier à l’Assemblée nationale que l’augmentation démographique aboutirait, par un accroissement mécanique de la consommation, à rendre quasiment vains tous les efforts que nous pourrions faire en matière de sobriété énergétique.

Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer selon quel calendrier, quelle méthode et avec quels outils vous entendez engager le débat sur la transition énergétique et, accessoirement, comment vous comptez susciter l’adhésion de notre principale entreprise énergétique, dont, rappelons-le – et rappelons-lui ! –, l’État détient 85 % du capital ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Debut de section - Permalien
Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Madame la sénatrice, vous avez raison de dire que, lors de la conférence environnementale, le Président de la République comme le Premier ministre ont prononcé un discours « fondateur », autour d’une grande ambition : faire de la France la nation de l’excellence environnementale.

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Dans ce cadre, la conférence environnementale n’est qu’un point de départ. La mise en œuvre de la feuille de route pour la transition écologique, sur laquelle le Gouvernement s’est engagé et qui constitue son programme de travail, donne lieu à un travail intensif de mes services. Le 26 octobre prochain, je réunirai l’ensemble des partenaires qui ont participé à la conférence environnementale pour leur présenter le calendrier précis de la mise en œuvre de ces engagements. Par conséquent, les choses avancent.

S’agissant des modalités de l’organisation du débat national sur la transition énergétique, je réunirai en début de semaine prochaine les organisations non gouvernementales et les représentants des entreprises pour répondre à leurs questions et leur rappeler ce qui a été inscrit dans la feuille de route, notamment le calendrier du débat puisque ce dernier s’engagera très rapidement, à savoir à partir du mois de novembre prochain.

La transition énergétique est une politique qui repose sur deux piliers.

Le premier, c’est la sobriété et l’efficacité énergétiques. Autrement dit, il s’agit d’instaurer la grande politique publique d’économies d’énergie qui fait défaut aujourd’hui.

Je rappelle que, sur le plan européen, la France s’est engagée à réaliser 20 % d’économies d’énergie à l’horizon de 2020. Cette politique est prioritaire, parce qu’elle est bonne pour l’environnement, pour le pouvoir d’achat, comme pour notre économie. Par exemple, lorsque l’on engage un programme massif de rénovation thermique des logements anciens ou lorsque l’on veut mettre en place un mécanisme de bonus-malus en matière de gaz et d’électricité, c’est-à-dire une tarification progressive de l’énergie, c’est un signal donné aux consommateurs.

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Le deuxième pilier, c’est le développement des énergies renouvelables, je l’ai évoqué tout à l’heure, tout en garantissant la sécurité d’approvisionnement et la maîtrise du coût de l’énergie.

Tous les scénarios seront discutés dans le cadre du débat sur la transition énergétique. C’est un débat fédérateur qui devra mobiliser les citoyens, les élus locaux, les entreprises, les opérateurs d’énergie, les organisations non gouvernementales. Je n’ai aucun doute sur le fait que l’opérateur historique, qui est, comme vous l’avez rappelé, une entreprise publique, même si elle a été transformée, hélas ! en société anonyme en 2004, s’engagera dans la transition énergétique ; EDF possède d’ailleurs une filiale Énergies nouvelles.

À l’issue du débat national, le Gouvernement présentera un projet de loi de programmation de la transition énergétique, et c’est la représentation nationale qui décidera souverainement !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Ma question s’adresse à M. le ministre des affaires étrangères ou au ministre qui pourra s’exprimer en son nom.

Le 3 février 2008, profitant de la confusion qui régnait à N’Djamena, un détachement militaire a arrêté et fait disparaître Ibni Oumar Mahamat Saleh, l’un des opposants les plus déterminés au régime d’Idriss Déby. En août de la même année, une commission d’enquête internationale mettait en cause les plus hautes autorités de l’État dans cette disparition, qui n’a toujours pas été éclaircie, et exigeait une enquête judiciaire.

Depuis quatre ans, le gouvernement tchadien multiplie les manœuvres dilatoires. Depuis quatre ans, avec mon collègue Jean-Pierre Sueur, nous multiplions les initiatives pour que la vérité soit faite sur cette affaire.

J’ai bien compris que le contexte n’est pas véritablement favorable, dans la mesure où la France travaille avec le Tchad sur le dossier du Mali. Cependant, l’alliance n’est pas la complaisance et la responsabilité que nous avons au Tchad nous crée des devoirs, dont celui d’agir, dans le respect des valeurs qui sont les nôtres, en principe, notamment le respect des droits de l’homme.

Au moment où va s’ouvrir le sommet de la francophonie, ce peut être l’occasion pour la France et ses représentants d’affirmer une volonté politique différente de celle qui a prévalu jusqu’à présent et qui s’inspire de l’attachement que nous portons à la démocratie.

Aussi, ne nous dites pas, madame la ministre, comme l’ont fait avant vous M. Kouchner, Mme Alliot-Marie et M. Juppé, que le gouvernement tchadien poursuit ses efforts ; ce n’est pas vrai ! Dites-nous plutôt comment le gouvernement français entend amener le régime de M. Idriss Déby à respecter les engagements qu’il a pris.

Depuis le printemps, les opposants tchadiens, la famille du disparu et ceux, comme nous-mêmes, qui sont mobilisés sur ce dossier ont l’espoir qu’un nouveau gouvernement aura une approche plus forte, plus claire, plus déterminée. Cet espoir, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, ne le décevez pas !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l’étranger

Monsieur le sénateur, veuillez excuser l’absence de M. Laurent Fabius, qui est actuellement retenu par un entretien avec son homologue canadien.

Comme vous l’avez rappelé, le 3 février 2008, l’opposant tchadien Ibni Oumar Mahamat Saleh était arrêté à son domicile par des militaires tchadiens au moment même où de violents combats avaient lieu dans la capitale entre l’armée tchadienne et des mouvements rebelles venus du Soudan. Si l’armée tchadienne a finalement repoussé cette attaque, celle-ci a laissé derrière elle des centaines de morts, des victimes de viols et des destructions matérielles. Des violations des droits de l’homme ont été commises. Des personnalités politiques ont été arrêtées arbitrairement ou menacées. Seul Ibni Oumar Saleh n’est pas réapparu à ce jour.

Une commission d’enquête internationale a d’abord travaillé afin de faire toute la lumière sur ces faits. Des recommandations ont été émises dans un rapport publié le 3 septembre 2008 et un comité de suivi chargé de veiller à l’application de ces recommandations a été créé. L’une d’elles concernait le traitement judiciaire de toutes les violations que j’ai rappelées.

Depuis quatre ans, la France n’a pas cessé d’intervenir auprès des autorités tchadiennes, avec la communauté internationale, notamment l’Union européenne et l’Organisation internationale de la francophonie, pour que la lumière soit faite sur la disparition d’Ibni Oumar Saleh et qu’un procès en bonne et due forme soit rapidement tenu. En cela, nous avons agi dans le sens indiqué par la résolution que l’Assemblée nationale française a votée le 25 mars 2010 sur votre initiative, monsieur Gorce.

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée

Notre position est claire et ferme : après avoir soutenu les travaux de la commission d’enquête internationale, nous encourageons la justice tchadienne à s’exercer. À ce jour, il faut constater que l’enquête judiciaire tchadienne n’avance que lentement…

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée

… et que les réponses qui nous sont fournies sont insuffisantes. Nous continuons donc à inviter les responsables tchadiens à ne pas négliger cette affaire qui porte atteinte à l’image de leur pays. Celle-ci a été évoquée à de multiples reprises ces derniers mois avec les plus hautes autorités tchadiennes.

Nous mettons notre dialogue politique avec le Tchad au service de la promotion des droits de l’homme, de la bonne gouvernance et de la démocratie. Ces progrès sont lents et le contexte difficile, le Tchad ne connaissant une stabilité intérieure continue que depuis 2010, mais nous devons poursuivre nos échanges avec les autorités tchadiennes en ce sens.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Le 25 septembre dernier, la Cour de cassation a rendu un arrêt qui va faire date. Elle a non seulement confirmé la responsabilité des pollueurs dans l’affaire de l’Erika, mais elle a également reconnu l’existence d’une notion juridique nouvelle : le préjudice écologique.

C’est une victoire pour la Vendée, mon département, ainsi que pour toutes les parties civiles prenantes à l’affaire et pour tous les amoureux de la nature. C’est aussi, après treize années de combat, un immense soulagement, parce que rien n’était gagné d’avance. J’en veux pour preuve que l’avocat général avait requis, si j’ose dire, l’annulation pure et simple de toute la procédure ! Nous sommes passés tout près, après la catastrophe écologique, du naufrage juridique. Il s’en est fallu de peu…

Le pire a été évité. Il faut désormais que nous puissions construire le meilleur pour l’avenir, en tirant, pour le futur, les leçons du passé, précisément en inscrivant cette nouvelle notion dans le droit positif.

Pour la première fois, les juges ont reconnu l’existence du préjudice écologique, c’est-à-dire d’un préjudice autonome, distinct du préjudice moral ou du préjudice matériel. C’est fabuleux ! Il faut maintenant inscrire cette jurisprudence dans la loi, reconnaître le préjudice écologique et l’insérer dans le code civil ; c’est fondamental.

J’ai, avec une cinquantaine de collègues, déposé une proposition de loi en ce sens au printemps dernier. C’est la dernière clef de voute de cet édifice sur lequel nous pouvons tous nous retrouver, me semble-t-il, quelles que soient nos sensibilités politiques.

Cet édifice juridique a été construit à la fois par la jurisprudence, par la loi constitutionnelle relative à la Charte de l’environnement, par la décision du Conseil constitutionnel du 8 avril 2011, mais aussi par la loi relative à la responsabilité environnementale. Toutefois, mes chers collègues, et je parle devant la statue de Portalis, notre code civil comporte une fragilité puisqu’il ne reconnaît un dommage que pour autant qu’il ait un caractère personnel. Or l’environnement n’est pas un bien personnel, c’est un bien collectif.

C’est la raison pour laquelle, selon la belle formule de Victor Hugo, il faut, madame la ministre, faire rentrer le droit dans la loi. Ma question est simple : le Gouvernement est-il prêt à cette petite révolution juridique ?

Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Debut de section - Permalien
Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Monsieur le sénateur, l’arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation dans l’affaire de l’Erika, le 25 septembre dernier, a confirmé la responsabilité pénale de l’ensemble des acteurs de la chaîne de transport des hydrocarbures et, sur le plan civil, a reconnu la notion de préjudice écologique.

Je voudrais tout d’abord rendre hommage au combat qu’ont mené pendant onze ans les régions, les départements, les communes des 400 kilomètres de côtes françaises touchées par cette pollution et qui voient leur bataille juridique couronnée de succès.

Cette décision constitue un pas en avant considérable pour la protection de l’environnement et l’application du principe pollueur-payeur, avec la reconnaissance non seulement de la responsabilité pénale, mais aussi de la responsabilité civile, quel que soit le lieu où le sinistre s’est produit.

Cette décision fera jurisprudence. Nous souhaitons qu’elle fasse pleinement son entrée dans le droit français. Comme vous le savez, s’agissant du code civil, Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, a d’ores et déjà engagé une réforme de grande ampleur de notre droit de la responsabilité. C’est donc sous sa conduite que ces réflexions se poursuivront.

Je sais, monsieur le sénateur, l’intérêt que vous portez vous-même à cette inscription. Nous avons pris connaissance de votre proposition de loi, mais aussi du colloque que vous organisez à la fin du mois d’octobre avec un certain nombre de juristes du droit de l’environnement. Je suis certaine que cette initiative sera utile pour apporter des précisions sur certains points : qui peut ester en justice au nom de la nature ? Comment doit se faire la réparation ?

Vous avez raison de dire que le 25 septembre a été un grand jour. Il nous appartient maintenant d’en tirer toutes les conséquences.

Je voulais aussi vous indiquer que, avec Frédéric Cuvillier, nous sommes favorables à ce que la France prenne, lors de la prochaine assemblée générale des Nations unies, une initiative afin de proposer un protocole additionnel à la convention de Montego Bay pour construire un outil de protection juridique international de la haute mer qui corresponde aux mêmes exigences.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Jean-Claude Carle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Par courrier en date du 10 octobre 2012, M. le Premier ministre a fait part de sa décision de placer, en application de l’article L.O. 297 du code électoral, Mme Claire-Lise Campion, sénatrice de l’Essonne, en mission temporaire auprès de Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.

Cette mission portera sur l’accessibilité des personnes handicapées aux bâtiments recevant du public, à la voirie et aux transports publics.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi, en application du deuxième alinéa de l’article 61 de la Constitution, le 10 octobre, d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution, par plus de soixante sénateurs, de la loi relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social ; le 11 octobre, d’une demande d’examen de la conformité à la Constitution, par plus de soixante députés, de la loi portant création des emplois d’avenir.

Le texte des saisines du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. le président. Mes chers collègues, monsieur le ministre, il m’est particulièrement agréable de saluer la présence, dans notre tribune d’honneur, d’une délégation de parlementaires croates, conduite par M. Nenad Stazić, vice-président du Sabor, le Parlement de la République de Croatie.

Mmes et MM. les sénateurs ainsi que M. le ministre se lèvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je souhaite rendre hommage à cette occasion, au nom du Sénat, à M. Boris Šprem, président du Parlement croate, décédé le 30 septembre. Son engagement au sein du Parlement et son action au service des citoyens croates lui avaient valu l’estime de tous.

Nos amis croates sont venus au Sénat pour participer à un colloque, qui s’est déroulé ce matin salle Clemenceau, sur les relations franco-croates à la veille de l’entrée de la Croatie dans l’Union européenne, le 1er juillet prochain.

Notre groupe d’amitié France-Croatie, animé par notre collègue Michèle André, mais aussi les commissions des affaires étrangères et de la défense et des affaires européennes ont apporté leur soutien à la Croatie tout au long du processus d’adhésion. Le Sénat sera appelé à délibérer prochainement de la ratification du traité d’adhésion.

Soyez les bienvenus au Sénat, chers collègues croates !

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (projet n° 21, texte de la commission n° 23, rapport n° 22).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Dans la discussion de la motion tendant au renvoi à la commission, qui a été présentée par M. Thierry Foucaud, la parole est à M. Philippe Kaltenbach, contre la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

M. Philippe Kaltenbach. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la motion tendant au renvoi à la commission présentée par notre collègue Thierry Foucaud ayant été défendue avant la suspension de séance, j’ai eu le temps de peaufiner mes arguments !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Le Sénat s’apprête à achever une séquence européenne d’une intensité et d’une ampleur inédites. Beaucoup d’arguments ont été échangés. Nous débattons en effet depuis plus de dix heures.

Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, et le ministre chargé des affaires européennes, Bernard Cazeneuve, ont défendu les engagements pris par la France et la stratégie européenne que notre pays compte développer ces prochains mois.

Les socialistes ont mis en avant la réorientation de la politique européenne de la France. À ce propos, permettez-moi de citer un homme politique et écrivain dont il a déjà été abondamment question aujourd’hui, Victor Hugo.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Oui, mais il s’agit d’une très belle citation, vous allez voir : « Ce que la France conseille, l’Europe le médite, et ce que la France commence, l’Europe le continue. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Nous avons souhaité soutenir cette nouvelle dynamique et les projets portés par la France, qui visent avant tout à favoriser le retour à la croissance et le renforcement des solidarités européennes.

Chacun a pu s’exprimer au cours de ce débat. Le groupe communiste républicain et citoyen et d’autres ont longuement exposé leurs arguments et expliqué pour quelles raisons, selon eux, il fallait rejeter ce traité. Certains l’ont fait avec éloquence, tous avec conviction. Sur tous les aspects, les questions soulevées ont fait l’objet de réponses argumentées de la part du Gouvernement et de nombreux orateurs.

Aussi, après tous ces débats, je considère que la motion tendant au renvoi à la commission paraît complètement incongrue, et ce pour plusieurs raisons.

Premièrement, ce traité a fait l’objet d’une décision du Conseil constitutionnel qui sécurise totalement son adoption : aucune inconstitutionnalité n’a été constatée. Il n’y pas de nouveaux transferts de souveraineté. Une simple loi organique permet la transposition de ce traité en droit interne.

Deuxièmement, ce traité ne prévoit pas d’engagements plus contraignants que ceux que la France a déjà souscrits à l’échelon européen ou que le gouvernement actuel a choisi de prendre.

Troisièmement, avec ce traité, la France conserve ses marges de manœuvre budgétaires et le Parlement ses prérogatives. La trajectoire budgétaire et les moyens d’atteindre les objectifs fixés restent du ressort national.

Quatrièmement, le projet de loi organique destiné à permettre la transposition de ce texte constitue une traduction claire du traité budgétaire, en fonction du strict nécessaire.

Cinquièmement, et surtout, n’oublions pas que, avec ce traité, nous ne faisons que respecter des dispositions du pacte de stabilité et de croissance, que le texte ne fait que reprendre.

L’objectif à moyen terme, l’OMT, de l’article 3 n’est pas nouveau : il a été introduit dans le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance en 1997.

La définition des circonstances exceptionnelles est celle du pacte de stabilité et de croissance modifié l’an dernier.

Le mécanisme de correction n’est qu’une codification de la pratique de la procédure pour déficit public excessif.

Enfin, l’objectif de réduction de la dette publique était déjà fixé par le six- pack.

La Commission demande seulement que les États s’engagent à appliquer le principe du vote à la majorité qualifiée inversée pour décider d’une éventuelle sanction. Ce principe a lui aussi été défini dans le six- pack.

On le voit, rien ne justifie un renvoi de ce projet de loi en commission. Tous ces points étaient déjà connus. Ils ont déjà fait l’objet d’un large débat, encore ici ces derniers jours.

Permettez-moi de profiter de l’occasion qui m’est offerte pour souligner un point. Ce traité n’ôte rien à la liberté du Parlement de s’impliquer plus encore dans le processus de la construction européenne. Bien au contraire !

Les derniers traités européens, en particulier le traité de Lisbonne, ont renforcé les pouvoirs des parlements nationaux et du Parlement européen. Loin de négliger ces droits, contrairement à ce que j’ai pu entendre, le TSCG nous permet même d’avancer. Nous devons continuer dans cette voie.

Le traité comporte une disposition dont nous devons nous saisir. Il s’agit de l’article 13. C’est à nous désormais qu’il appartient d’ouvrir et de porter le débat sur le renforcement du contrôle démocratique de la gouvernance budgétaire et financière de l’Union européenne. C’est aux parlements nationaux qu’il revient de s’organiser, en étroite collaboration avec le Parlement européen. C’est de notre ressort, c’est de notre responsabilité.

Pour conclure, je ne vois pas en quoi le renvoi en commission permettrait d’apporter un élément supplémentaire ou déterminant au débat.

Ce traité, chers collègues, n’est pas une fin en soi. Il nous permettra de franchir une étape supplémentaire afin de conduire enfin des politiques nouvelles et de mettre fin aux politiques d’austérité menées jusqu’ici.

Par ailleurs, le pacte pour la croissance et l’emploi n’est pas un simple codicille, comme cela a été dit sur certaines travées. Il a pour objet fondamental de relancer la croissance, sans laquelle la réduction des déficits ne mènerait qu’à l’austérité. Je pense que nous ne pouvons qu’être d’accord sur la volonté d’un retour à la croissance.

Nous devons aujourd’hui avancer, c’est de notre responsabilité. L’adoption du TSCG n’est qu’une étape. Le plan de croissance appelle d’autres initiatives, qui permettront de soutenir l’ambition de la France en matière de croissance. À cet égard, je pense à la négociation des perspectives budgétaires pour 2014-2020 avec la volonté de disposer d’un budget doté de ressources propres.

Cela devra également se traduire par la mise en place du principe du « juste échange » et de dispositions permettant de garantir que notre industrie sera protégée contre le « moins-disant social » ou le « moins-disant fiscal ».

La supervision bancaire permettra aussi de mettre enfin de l’ordre dans la finance. Elle devra être complétée par un dispositif de résolution des crises bancaires et de garantie des dépôts.

Enfin, l’instauration d’une taxe sur les transactions financières sera une avancée considérable. Onze pays de la zone euro, dont l’Allemagne et la France, ont affiché mardi dernier leur volonté de créer cette taxe, via une coopération renforcée. Nous l’attendions tous taxe depuis très longtemps.

Évitons de regarder dans le rétroviseur. Beaucoup l’ont dit lors de nos débats : l’Europe est notre avenir. C’est pourquoi je reprends la formule de Woody Allen : « L’avenir est la seule chose qui m’intéresse, car je compte bien y passer les prochaines années. »

En conséquence, le groupe socialiste s’oppose au renvoi à la commission du projet de loi autorisant la ratification du traité, car il souhaite que ce texte soit adopté aujourd’hui même.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Comme vous le savez, mes chers collègues, aux termes du 5 de l’article 44 du règlement du Sénat, l’adoption d’une motion tendant au renvoi à la commission a pour effet de suspendre le débat jusqu’à la présentation d’un nouveau rapport, lequel doit être présenté au cours de la même séance.

Entre mardi soir, date à laquelle mon rapport a été adopté à une large majorité par la commission des finances, et aujourd’hui, ma position n’a pas suffisamment évolué pour que je souhaite présenter un nouveau rapport. Au contraire, elle a même été renforcée par les arguments développés par M. le ministre depuis le début de ce débat.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cela étant, je ferai deux observations.

Les auteurs de la motion auraient souhaité que d’autres commissions examinent le projet de loi. Or chaque commission est libre de rédiger ou non un rapport pour avis, et il ne m’appartient pas de me prononcer sur le sujet. Je crois d’ailleurs que la commission des affaires sociales rendra un rapport pour avis sur le projet de loi organique, ce qui est tout à fait son droit.

Les auteurs de la motion considèrent également que le traité porte atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales. Or le Conseil constitutionnel n’en a pas jugé ainsi. Il a en effet déclaré le traité conforme à la Constitution. Pour ma part, dès lors que ni le traité ni la loi organique ne fixent de contraintes aux collectivités territoriales, j’estime que le principe de libre administration des collectivités territoriales est respecté.

En définitive, le traité ne change rien à notre capacité à nous, parlementaires, de vérifier le bon usage de l’argent public.

Dès lors que ce traité a pour objet de faire en sorte que les États de la zone euro, auxquels d’autres ont accepté de se joindre, respectent individuellement les mêmes règles budgétaires, l’absence de participation de la Grande-Bretagne au dispositif est, à nos yeux, sans conséquence. D’ailleurs, je rappelle qu’il s’agit d’un traité intergouvernemental et non d’un traité communautaire.

Voici quelques précisions qu’il me paraissait utile d’apporter à la suite des arguments développés.

En tout état de cause, au nom de la commission, je demande le rejet de cette motion.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, chargé des affaires européennes

Le Gouvernement a le même avis que la commission des finances, pour les raisons qui viennent d’être évoquées par M. le rapporteur, ainsi que pour des raisons qui tiennent au fond du débat. Ces dernières ayant déjà fait l’objet de nombreuses discussions entre nous, je ne m’y attarderai pas.

Par conséquent, le Gouvernement demande au Sénat de rejeter la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je mets aux voix la motion n° 3, tendant au renvoi à la commission.

La motion n’est pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

En conséquence, nous passons à la discussion de l’article unique.

Est autorisée la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire entre le Royaume de Belgique, la République de Bulgarie, le Royaume de Danemark, la République fédérale d’Allemagne, la République d’Estonie, l’Irlande, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, la République italienne, la République de Chypre, la République de Lettonie, la République de Lituanie, le Grand-Duché de Luxembourg, la Hongrie, Malte, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République de Pologne, la République portugaise, la Roumanie, la République de Slovénie, la République slovaque, la République de Finlande et le Royaume de Suède, signé à Bruxelles, le 2 mars 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

En cet instant du débat, je voudrais insister de nouveau, comme ont pu le faire hier certains de nos collègues, sur le fait que ce pacte budgétaire est une étape fondamentale sur la route qui doit nous mener vers plus de fédéralisme en Europe.

Depuis des années, les sénateurs centristes réclament une initiative politique en ce sens. J’avais déjà eu l’occasion de le dire à deux reprises, en octobre et en juillet derniers, lors de nos discussions préalables aux sessions du Conseil européen, ainsi qu’au sein de la commission des affaires européennes.

Depuis longtemps, nous demandons la création d’un véritable gouvernement économique et budgétaire européen et l’élaboration d’un traité fédéral de la zone euro nous permettant d’engager la mise en place de mécanismes de convergence tant sociale que fiscale, en un mot pour aller vers plus d’intégration européenne.

Je profite de la parole qui m’est donnée pour saluer le travail réalisé par notre collègue Jean Arthuis, que la commission des affaires européennes a d’ailleurs auditionné, et qui a remis en mars dernier au Premier ministre François Fillon un rapport riche de propositions visant à réformer la gouvernance de la zone euro. Le traité dont nous discutons à l’heure actuelle répond en partie à nos attentes. Pour autant, il n’est qu’une étape. D’autres combats restent à mener.

Hier, Michel Mercier a exposé l’enjeu politique de la question européenne. Depuis le référendum du 29 mai 2005, le lien de confiance établi entre les citoyens français et les institutions européennes a été rompu. Un front du non traverse aujourd’hui tous les blocs politiques, à l’exception des centristes, je dois encore le souligner, qui ont toujours lié leur destin politique à celui de l’Europe.

Ce lien rompu doit être renoué coûte que coûte. La clé de ce problème réside dans ce que l’on appelle le déficit démocratique de l’Union européenne. Certes, mais il faut dire aussi que nous avons toujours beau jeu à renvoyer nos propres errements à Bruxelles. En effet, il est toujours plus facile de chercher à détourner la colère de nos concitoyens vers les institutions continentales.

Nous ne pouvons donc que nous réjouir de la ratification de ce traité. En effet, l’article 13 de ce dernier précise les conditions d’association des parlements nationaux au travail de surveillance qui sera réalisé par la Commission européenne et par la Cour de justice de l’Union européenne. Ce traité renforce ainsi les stipulations du protocole annexé au traité de Lisbonne en matière de garanties d’association de nos assemblées parlementaires.

Il est donc faux de dire que la France aliène sa souveraineté. Je ne reviendrai pas sur la décision du Conseil constitutionnel car, en réalité, c’est à une transformation du contrôle parlementaire que nous assistons.

Plus que jamais, la commission des affaires européennes démontre sa nécessité et l’importance croissante qu’elle aura dans notre travail quotidien.

Le contrôle parlementaire de demain ne sera plus strictement franco-français. Il devra s’efforcer de dépasser les frontières pour interroger les relations entre les institutions de l’Union et les citoyens européens. Je lance ainsi un appel à plus de vigilance et d’attention de notre part sur les affaires européennes.

Nous ne pouvons pas déléguer la gestion de la sortie de crise au seul Gouvernement ou aux seules institutions de l’Union. Le Sénat doit poursuivre et encore accentuer son travail. Il doit se faire force de proposition en la matière. La Constitution, je le rappelle, nous donne les moyens de diffuser nos prises de position et de mobiliser nos homologues européens autour de projets, de propositions et de combats communs.

C’est notre rôle de parlementaires qui va en ressortir renforcé. Une fois ce traité ratifié, il nous appartiendra plus que jamais de nous faire les avocats de la cause européenne auprès de nos concitoyens. Il sera de notre responsabilité de travailler à la nécessaire réconciliation entre les Français et l’Europe.

Mes chers collègues, je tenais à insister sur le fait que l’Europe ne se fera pas sans nous, et que son avenir se joue aussi bien ici, aujourd’hui, que dans nos territoires, demain.

Applaudissements sur les travées de l’UCR, ainsi que sur quelques travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’INSEE a confirmé une croissance nulle au deuxième trimestre 2012. Le FMI considère que les prévisions pour 2013 élaborées par le Gouvernement sont trop optimistes. Le cap pris par le Gouvernement en soutenant ce traité fait craindre un ralentissement d’activité et une baisse des rentrées fiscales.

Dans ce contexte conjoncturel, le risque est que la faute en soit rejetée sur l’Europe et qu’un sentiment anti-européen renaisse. Que restera-t-il, dans ce cas, du désir d’Europe ?

Or, en réalité, ce texte détermine les contours de la solidarité financière entre les États. Il provoque évidemment de nouveaux remous, ce que je peux comprendre. Les Français vont avoir du mal à accepter que les candidats qui les ont fait rêver d’une Europe de la croissance leur demandent, quatre mois après avoir gagné les élections, de se résigner à la rigueur.

Cela dit, voilà trente ans que nous puisons par facilité dans la dette publique. Aujourd’hui, la fin de la récréation a sonné. Je ne pense pas que le mot « austérité » soit le plus approprié. Le défi que nous devons relever est de faire preuve d’intelligence budgétaire et de responsabilité.

Je suis convaincu que nous pouvons, en dépensant autrement et en dépensant mieux, trouver des mesures utiles au développement économique. Cela passe par un changement de comportement et par une appréciation peut-être différente de notre environnement.

Notre addiction à la dépense publique ne contribue pas à créer de la valeur ajoutée utile à la croissance des économies industrielles. La preuve en est la crise sans précédent dans laquelle nous nous trouvons. Si la dépense publique était source de croissance, nous n’aurions pas à déplorer plus de 10 % de taux de chômage, 75 milliards d’euros de déficit commercial et 91 % de dette publique.

En réalité, ce traité nous met face à nos propres responsabilités. Il n’y a pas d’autres solutions que d’effectuer des réductions claires de nos dépenses publiques.

Au deuxième trimestre 2012, la dette publique a continué à se dégrader, augmentant de 43 milliards d’euros par rapport à la fin du mois de mars. Elle atteint ainsi 91 % du PIB, soit un bond de 1, 7 point par rapport aux comptes du gouvernement précédent.

En 2013, d’après le projet de loi de finances, la dette publique de la France atteindra le niveau record de 91, 3 % du PIB. Le traité offre, il est vrai, des échappatoires, puisque le déficit structurel est calculé en tenant compte de l’impact sur la conjoncture. Cette mesure trouve sa logique dans le fait qu’une baisse de recettes mécanique rendrait inatteignable l’objectif budgétaire. Le traité ne fixe pas non plus de date butoir pour le retour à l’équilibre.

Les pays européens sont interdépendants, comme le démontre la situation de la Grèce, qui affecte l’ensemble de l’économie européenne. Or la solidarité ne peut évidemment fonctionner qu’avec un engagement fort de discipline budgétaire.

Ainsi le traité budgétaire européen, signé en mars 2012 par Nicolas Sarkozy, et qui avait donné lieu à un vif débat public, fait-il aujourd’hui l’objet d’un consensus.

Au-delà de ce contexte, nous estimons indispensable, nous centristes, qu’une gouvernance économique européenne pour la zone euro soit mise en place et dispose de réelles prérogatives. La crise actuelle illustre de façon dramatique combien une politique monétaire unique, menée sans politique économique et budgétaire commune, n’est plus possible. Nous avons besoin d’un véritable fédéralisme économique et budgétaire européen, qui passe par l’adoption d’un traité fédéral de la zone euro, entre les 17 États qui partagent une monnaie unique.

L’Europe doit marcher sur ses deux jambes, à la fois monétaire et économique, sinon nos efforts resteront vains. Nous devons doter l’Europe de moyens lui permettant de mener une politique efficace, afin de renouer une relation de confiance avec nos concitoyens.

Les centristes sont profondément européens, comme l’a rappelé Catherine Morin-Desailly. Nous avons toujours demandé plus d’intégration et plus de fédéralisme au sein de l’Union. C’est pourquoi nous nous prononçons en faveur de l’adoption de ce traité.

Applaudissements sur les travées de l’UCR, ainsi que sur quelques travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l’article.

M. Jean-Pierre Chevènement applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Pour reprendre la formule de Joseph Stiglitz, qui n’est pas vraiment un économiste débutant, je dirai que les responsables politiques et financiers européens se sont contentés jusqu’à présent de « déplacer les fauteuils sur le pont du Titanic ». Ils continuent.

Les majorités politiques peuvent changer, la récession s’installer, le chômage exploser, les extrêmes droites prospérer partout en Europe, les pilotes du Titanic européen gardent le cap.

Après une loi constitutionnelle budgétaire en juillet 2011, la modification du traité de Lisbonne permettant la pérennisation d’un mécanisme dit de « stabilité financière » et la ratification du traité Merkel-Sarkozy qui le crée, en février 2012, nous sommes donc invités, cet après-midi, à autoriser la ratification du TSCG, en souscrivant aux conditions allemandes, avant de transformer, demain, les contraintes budgétaires qu’il implique en loi constitutionnelle.

Une fois ses fauteuils redisposés, le Titanic cessera-t-il pour autant de se diriger vers son iceberg ? Évidemment non !

Contrairement à ce que souffle la pensée unique, l’origine de la crise de l’euro n’est pas à trouver dans la prodigalité des gouvernements, même pas celui de la Grèce. La taille de cette économie, 8 % seulement du PIB de la zone euro, l’en rend bien incapable. À la veille de la crise, l’Espagne et l’Irlande présentaient des budgets excédentaires et un niveau d’endettement qui faisaient l’admiration des « experts ». Entre la création de l’euro et 2007, la dette des pays du GIPSI – Grèce, Irlande, Portugal, Espagne, Italie – en pourcentage du PIB a régulièrement baissé.

L’origine de la crise, Jean-Pierre Chevènement l’a évoqué ce matin, se trouve dans le déséquilibre des comptes entre l’Allemagne et la plupart des autres pays européens, particulièrement ceux du Sud. Elle est dans leur boom économique, boom dopé par l’immobilier et l’afflux de capitaux allemands et français. Des taux d’intérêts supérieurs à ceux pratiqués en Allemagne et en France, sans risque de dévaluation puisque l’on restait dans la zone euro, et des perspectives de développement jugées considérables par les « experts » : quelle aubaine !

Résultat : hausse des salaires et des revenus dans ces pays, baisse de leur compétitivité. Quasi inexistant à la création de l’euro, le déficit de leurs comptes avec l’Allemagne est ainsi devenu, de manière symétrique, le pendant exact de l’excédent allemand. Il faudra bien admettre un jour que les déficits intra-européens sont les excédents allemands et que toutes les balances intra-européennes ne peuvent être excédentaires en même temps. La prédication sur la compétitivité est donc parfaitement creuse.

La crise financière importée des États-Unis n’a finalement été que le déclencheur d’une catastrophe financière latente, qui a surpris des dirigeants européens quasiment désarmés pour y faire face. Désarmés parce que, pour sauver les banques, les États s’étaient considérablement endettés – voilà où sont passés les excédents ! Désarmés parce que les traités interdisaient à la BCE de financer directement des États réduits au statut d’entreprises ordinaires.

Si l’on veut sortir de la crise, c’est par là qu’il faut commencer. Plutôt que de bricoler un sous-FMI européen, ne disposant même pas des capacités d’une grande banque commerciale, il faut créer une vraie banque centrale européenne, une BCE capable de monétiser la dette souveraine et de relancer la machine économique. Or c’est le contraire que l’on s’obstine à faire, années après années.

Même emballé dans le papier de soie d’un plan de relance fait pour la galerie – il ne représentera que 0, 5 % du PIB européen sur trois ans et ce taux était déjà dans les tiroirs – le traité Merkel-Sarkozy reste un traité Merkel-Sarkozy. Une erreur reste une erreur, et l’organisation de la récession en Europe, une faute.

Ce n’est certainement pas suffisant pour que je change d’avis et vote aujourd’hui en faveur de ce à quoi je me suis toujours opposé hier. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Avant de mettre aux voix l’article unique qui constitue l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Leila Aïchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le Pacte budgétaire européen, officiellement appelé traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, ou TSCG, est un mécanisme certes très imparfait, mais nous devons avant tout le considérer pour ce qu’il est : un instrument essentiellement politique en vue d’une réelle intégration économique et financière pour notre continent.

La fondation d’une Europe toujours plus unie a de tout temps été au cœur de l’engagement écologique. Tout renoncement de notre pays dans une période aussi critique pourrait apparaître comme un funeste signal adressé à la construction européenne par un de ses piliers les plus éminents.

Le sujet est bien trop essentiel pour s’en tenir à de simples postures politiciennes dont la courte vue et l’inconséquence seront, j’en suis certaine, sévèrement jugées par l’Histoire.

La facilité, c’est de dire « non » avec des formules creuses. Mes chères collègues, selon une telle logique, les pères fondateurs de l’Europe n’auraient jamais voté la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier !

Le courage et la difficulté, c’est de dire « oui » au traité, et de prendre à bras-le-corps les défis financiers, socio-économiques, environnementaux et sanitaires pour leur apporter des solutions durables et responsables.

Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Si nous voulons l’Europe, il faut voter ce traité, malgré toutes ses insuffisances, qui sont réelles, je n’en disconviens pas.

Certains pourront me rétorquer que voter le TSCG, c’est accepter l’imposition de la rigueur, voire, pire, de l’austérité à notre peuple.

Mais, mes chers collègues, nous sommes déjà dans la rigueur et l’austérité, et ce depuis bien longtemps !

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Notre pays doit, pour se financer, emprunter plusieurs milliards d’euros chaque jour sur les marchés financiers.

Et, même si nous empruntons pour l’instant à des taux négatifs, la volatilité des marchés est telle que la situation peut très vite se retourner et placer la France dans une position insoutenable.

Dois-je vous rappeler que la dette française est détenue à 64 % par des investisseurs étrangers ou ne vivant pas en France, qu’elle s’élève à plus de 1 700 milliards d’euros et qu’elle représente plus de 90 % du PIB ? §

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Et alors ? Est-ce une raison pour ratifier ce traité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Est-ce sain ? Est-ce viable à long terme ? Que laisserons-nous aux générations futures ? Un désastre financier en plus d’une planète détériorée !

Sans traité, la situation actuelle n’est pas tenable. En effet, ne pas voter le TSCG n’arrêtera pas les politiques de rigueur à l’œuvre en Grèce ou en Espagne.

Quelle est, en définitive, la solution de rechange ?

Sortir de l’euro ? Cela déchaînerait une véritable course à la dévaluation des monnaies nationales, entraînant hyperinflation et ruine pour tous les peuples européens, et pour la France en premier. La période d’entre-deux-guerres nous l’a bien montré, …

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

… et les conséquences tragiques qui en ont résulté aussi.

Je salue, à cette occasion, le courage et la hauteur de vue de Dany Cohn-Bendit et de Nicolas Hulot, qui se sont exprimés en faveur du traité. §

C’est pour cela que nous avons voulu l’Europe, et c’est pour cela que je défends aujourd’hui, mes chers collègues, le vote en faveur de la ratification. En période de crise aiguë, qu’il s’agisse d’écologie ou de politique européenne, il ne faut pas céder au repli sur soi, à la démagogie et au populisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Les Français, dans leur très grande majorité, ne s’y trompent pas.

Il faut aussi rappeler que l’article 3 du traité permettra de déroger à la règle d’or dans des circonstances exceptionnelles qui appelleraient un investissement public.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Je vous rappelle que les 3 % de Maastricht ne permettent pas cette concession.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

En outre, le TSCG doit constituer l’étape décisive vers une plus grande intégration par une « européanisation » des débats budgétaires, car tous les États devront rendre des comptes, aussi bien la Grèce que l’Allemagne.

Enfin, il faut signaler que les 120 milliards d’euros débloqués par le Conseil européen, au titre du Pacte de croissance, …

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

… dont la création doit beaucoup au Président de la République et aux partis de gauche en Europe, en particulier le SPD, sont l’effort de relance le plus important décidé par l’Union Européenne depuis sa création !

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Les 55 milliards de fonds structurels non utilisés, ainsi que l’émission de project bonds, obligations publiques destinées à financer des investissements dans les infrastructures de communication, de transport ou d’énergie, représentent potentiellement un progrès décisif quant à l’impulsion d’une transition écologique durable.

Créons nos nouveaux champions industriels européens ! Ayons enfin du courage ! Un EADS des tramways, un Airbus des énergies renouvelables, …

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

… qui nous sortiront à n’en pas douter du « tout nucléaire » !

Pour moi, écologiste, l’engagement gouvernemental de privilégier l’investissement dans des projets en faveur d’une plus grande efficacité énergétique et des énergies renouvelables, créateurs d’emplois verts et de développement pour les PME innovantes est une étape décisive vers une société plus juste, plus écologique, plus sociale, bref plus humaine !

Vous l’avez compris, mes chers collègues, je continue à défendre cette Europe que nous aimons, que la gauche va construire, à la différence de la droite, qui l’a enterrée pendant cinq ans ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Je n’ai pas changé d’avis depuis le Mécanisme européen de stabilité, le MES ; j’affirme ma liberté d’expression.

Par conviction et par souci de cohérence, j’ai voté le MES. Je vote en faveur du TSCG, je voterai la loi organique et je voterai le budget.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste. – Quelques sénateurs de l’UMP et de l’UCR applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Au terme de ce débat, je tiens à exprimer toute ma satisfaction : la qualité des interventions a été remarquable.

J’en profite pour vanter les mérites du bicamérisme, à l’adresse de celles et de ceux qui auraient encore des doutes. Nous avons, me semble-t-il, donné une image très digne de la Haute Assemblée. Les échanges de ce matin entre notre collègue Jean-Pierre Chevènement et Jean-Pierre Sueur, le président de la commission des lois, illustrent avec force l’utilité d’une assemblée comme la nôtre !

Je tiens également à saluer M. le ministre délégué chargé des affaires européennes, qui a défendu les positions du Gouvernement avec conviction, talent et même franchise, par exemple lorsqu’il a évoqué les évolutions des uns et des autres sur les questions européennes. Il a su porter la parole gouvernementale avec une certaine efficacité ; comme vous venez de l’entendre, il a parfois emporté la conviction, y compris au sein de mon propre groupe ! Et ce n’est guère étonnant de la part d’un militant aussi engagé et subtil.

Au sein du groupe écologiste, nous assumons notre diversité. Elle existe d’ailleurs dans d’autres groupes de gauche, par exemple chez les socialistes ou chez nos amis radicaux et républicains, les sénateurs communistes et membres du Front de gauche formant un bloc peut-être plus compact.

Nous partageons les mêmes interrogations, bien que nous n’y apportions pas toujours les mêmes réponses. Pour notre part, nous restons sur la position qui était la nôtre en février et en mars, lors de la signature du traité. D’ailleurs, puisque Daniel Cohn-Bendit, qui a le sens de la formule, a été évoqué, je rappelle qu’il a été le premier à parler de « traité Merkozy ».

Le traité Merkozy a été signé dans le contexte particulier que nous connaissons. Il porte, je l’ai dit, les stigmates d’une philosophie, le libéralisme, et d’une méthode, la technocratie et l’intergouvernementalité.

Avec de tels péchés originels, il sera sans doute difficile de modifier profondément la donne dans les mois et les années à venir. Et c’est sur ce point que porte notre interrogation.

C’est pourquoi, même si nos débats ont été très intéressants, je voterai « non », tout comme un certain nombre de membres de mon groupe, tandis que d’autres exprimeront leur refus de s’associer à la ratification du traité en s’abstenant.

Tel est l’état de notre réflexion, dans laquelle il ne faut pas voir de positionnement tactique. C’est d’ailleurs ce que j’ai indiqué avec force aux membres du Gouvernement, au Premier ministre et au Président de la République.

Nous avons fait part de notre perplexité, et même de notre inquiétude. Dès la fin des élections, la construction européenne a repris le cours qui est le sien depuis vingt-cinq ans : une démarche technocratique – je l’ai indiqué – et, en l’occurrence, antidémocratique ! Jadis, l’hypocrisie bourgeoise aidant, on faisant au moins semblant de consulter un peu les parlements nationaux… Là, il n’y a même pas eu de consultation.

Je comprends que la déferlante libérale à l’œuvre depuis vingt ans puisse convenir à certains de nos collègues. D’ailleurs, et je m’adresse entre autres à M. Marini, ceux qui s’apprêtent à voter le projet de loi après avoir soutenu Nicolas Sarkozy lors de la signature du traité ont le mérite de la constance.

Le libéralisme, c’est moins d’intervention de la puissance publique dans la vie sociale, économique et démocratique de nos concitoyens. Compétitivité internationale, efficacité plus ou moins grande… ce sont toujours les mêmes termes qui reviennent ! Pour quels résultats ? Régression des services publics, diminution des impôts… c’est le même cycle depuis vingt ans.

L’état d’esprit dans lequel je vais me prononcer animera peut-être la majorité présidentielle et gouvernementale. J’ai voté « oui » à Maastricht. Vingt ans plus tard, lorsque je fais le bilan, je le regrette. Car où en sommes-nous après le débat sur les critères de convergence ? Après les traités d’Amsterdam et de Nice ? Après le traité constitutionnel européen, ou TCE ? Après le traité de Lisbonne ? La situation est extrêmement préoccupante pour les peuples d’Europe, qui sont loin de tout cela. Quid des services publics, de la solidarité, du développement économique ?

Quid aussi de l’écologie ? Car quelles seront les marges de manœuvre qui sont nécessaires pour la mutation écologique ? Je vous renvoie à nos débats sur la banque publique d’investissement, notamment s’agissant de l’aspect budgétaire, ou sur la nécessité d’aider nos PME-PMI pour accomplir cette mutation.

De grands pays, comme la Chine, l’Allemagne, le Danemark, la Corée du sud ou les États-Unis, ont fait des efforts en ce sens. Pas nous.

Je suis donc très inquiet.

Je me réjouis d’ailleurs que l’on n’inscrive pas la règle d’or dans la Constitution. Pour le coup, cela nous aurait peut-être amenés, nous écologistes, à adopter des positions plus radicales dans notre stratégie politique. En effet, dans une telle hypothèse, la future loi organique et la loi de finances n’auraient plus servi à grand-chose !

J’ai entendu le Président de la République nous demander de lui accorder notre confiance. Ça tombe bien ; comme j’ai voté pour lui au mois de mai dernier, même si je ne porte pas le même jugement sur le TSCG, je suis prêt à lui accorder ma confiance pour les deux années à venir. Je lui fais confiance pour l’ensemble du quinquennat, bien sûr, mais c’est lui qui a évoqué l’échéance des deux années à venir, parlant même d’inversion de la courbe du chômage l’année prochaine. §Certes, avec un taux de croissance de 0, 8 %, cela me paraît compliqué…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Je voterai « non », et nous continuerons le débat lors de l’examen du projet de loi organique et dans les années à venir, pour changer les choses.

Monsieur le ministre délégué, vous avez su utiliser des arguments puissants. J’espère que vous en ferez autant lorsqu’il s’agira de convaincre nos partenaires européens. Puisse la nouvelle donne sociale, démocratique et écologique que vous prônez devenir réalité pour nos concitoyens, en lieu et place de ce que nous vivons depuis vingt ans. Nos amis de l’UMP pourront alors se dire qu’ils ont eu raison de soutenir la signature de ce traité au mois de mars et sa ratification aujourd'hui !

Tel est le message que je vous adresse du fond du cœur. Je suis inquiet, mais je me place résolument dans une perspective d’avenir !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur quelques travées du groupe écologiste. – Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Jean-Pierre Chevènement applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, malgré la volonté du Président de la République, François Hollande, de renégocier un traité conçu par Nicolas Sarkozy et Mme Merkel, …

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Hue

… force est de constater, et je le regrette, que cette renégociation s’est révélée infructueuse, voire impossible, et ce en raison notamment du rapport de force aujourd’hui particulièrement défavorable à la gauche en Europe.

S’il n’a pas été possible de modifier le texte du traité, la volonté affichée de François Hollande de changer les règles en Europe a toutefois permis quelques avancées, qui, si maigres soient-elles, doivent être soulignées.

Le Pacte pour la croissance et l’emploi s’inscrit effectivement dans l’engagement présidentiel. Il faut cependant reconnaître que les sommes dédiées ne semblent pas en mesure de permettre une relance de l’économie et de la croissance.

Je note également les avancées sur la taxe sur les transactions financières, si longtemps rejetée par la droite. La supervision bancaire est un pas intéressant, qu’il faut poursuivre. Je veux surtout souligner une première évolution des esprits avec la décision de la BCE de racheter les titres de dette publique en quantité illimitée, même si l’on peut s’interroger sur le caractère vraiment « illimité »…

Il s’agit là incontestablement d’un changement par rapport au dogme qui avait cours jusqu’alors, même si le rôle de la Banque centrale européenne n’est en effet pas fondamentalement remis en cause.

Préférant financer les banques avant de financer les États, refusant d’user du pouvoir de création monétaire, la BCE est régie selon une vision allemande extrêmement prégnante qui résulte du traité de Maastricht.

Car, mes chers collègues, ne l’oublions pas, le carcan qui nous ruine aujourd’hui est davantage celui de Maastricht, pour lequel j’avais à l’époque appelé à voter « non », quand d’autres, aujourd’hui parmi les opposants les plus hostiles et les plus acharnés, approuvaient avec lyrisme ce traité, alors décrit comme un « compromis de gauche ».

Mais revenons au TSCG.

Malgré les contreparties obtenues par le Gouvernement pour atténuer les effets de ce traité sur notre économie et nos finances publiques, il faut bien reconnaître que le compte n’y est pas.

Ce traité constitue un prolongement du Mécanisme européen de stabilité que je n’ai pas approuvé. Selon ces deux textes, il ne peut y avoir de solidarité sans austérité. Je m’inscris en faux contre cette optique.

Parce que l’idée européenne est bien vivante et plus que jamais d’actualité, c’est par le concret qu’il est nécessaire de réorienter l’Europe d’aujourd’hui.

Parce que je suis convaincu que l’austérité n’encouragera que l’austérité, ce texte non seulement ne me paraît pas opportun, mais de plus il continue de garantir la logique des marchés financiers, d’étioler la souveraineté du Parlement et de mutiler les dépenses publiques.

Je plaide pour une Europe de la solidarité, reposant sur la satisfaction des besoins sociaux et populaires, à commencer par l’emploi. Je plaide pour une Europe favorisant les entreprises qui créent et investissent pour l’avenir, au contraire des spéculateurs et de ceux qui fuient à l’étranger pour échapper à la justice fiscale.

C’est parce que je veux une réorientation de l’Europe que je ne voterai pas ce traité.

Pour autant, je n’entends pas m’inscrire dans une logique d’opposition et rejoindre ceux dont l’objectif politicien est certainement moins le choix d’une autre Europe que la volonté de marquer leur opposition au Président de la République et au Gouvernement.

Mon abstention veut offrir toutes ses chances à une autre Europe. C’est une abstention constructive, en forme d’adresse des progressistes de mon mouvement au Président de la République et au Gouvernement en faveur d’une démarche forte et volontaire : celle d’une réorientation significative à gauche des politiques européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais être bref car je ne voudrais pas allonger un débat au cours duquel chacun a pu s’exprimer et portant sur la ratification d’un traité qui participe à l’amélioration de l’intégration européenne.

Certains se sont exprimés avec conviction et pragmatisme. D’autres, enfermés dans une posture, ont fait un calcul politicien quelquefois misérable. L’Europe relève d’une architecture originale, en perpétuel devenir, et ce traité s’intègre dans cette évolution. Je ne citerai pas Victor Hugo, mais je rappellerai les mots d’Edgar Morin : « l’Europe se dissout quand on la pense claire et rationnelle alors qu’il faut la concevoir dans sa pleine et complexe réalité ».

L’avenir de la France est étroitement lié à l’avenir de l’Europe. Ne pas voter ce traité, c’est casser l’Europe, c’est casser l’euro, c’est casser la France.

Le groupe UMP votera ce traité dans un esprit de continuité, comme l’a souligné cette nuit le président de la commission des finances, Philippe Marini.

Je préviens malgré tout le Gouvernement : le groupe UMP sera très attentif, voire très constructif, au regard des réformes structurelles que la Commission nous invite à mettre en œuvre. Nous serons très sévères si le Gouvernement préfère l’esquive et la tactique au courage politique.

Comme je l’ai souligné hier soir, le Président de la République devra faire un choix : il paraît que ce n’est pas l’exercice qu’il préfère…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Soit il revêtira les habits de Gerhard Schröder en décidant de faire participer les entreprises françaises à la nécessaire compétitivité à laquelle la mondialisation les invite, et il rentrera dans l’histoire. Soit il préférera endosser les habits de René Coty. Ils sont peut-être un peu plus confortables, mais l’histoire sera alors très sévère.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

Le Président de la République ne doit pas perdre de vue que l’opposition d’aujourd’hui est constituée d’hommes et de femmes responsables, qui sauront élever le débat et appuyer les réformes, car il y va de l’intérêt et de l’avenir de la France, il y va de l’intérêt et de l’avenir de l’Europe ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UCR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

– il ressort qu’une très grande majorité de cet hémicycle votera le traité.

Voilà un fait constitutif important. C’est une orientation politique essentielle, nous l’avons tous souligné. Le fait que ce texte recueille une majorité aussi large est un point encourageant.

Cela ne signifie pas que nous n’écoutons pas les avis différents ni les opinions contraires aux nôtres. Elles sont respectables.

Si nous avons obtenu un tel consensus, c’est que la politique budgétaire menée est le complément naturel – ce qui n’était pas tellement évident puisqu’il aura fallu près de vingt ans pour la mettre en place – de la création de l’euro. La politique monétaire devait s’accompagner d’une politique budgétaire. Il nous manquait ce deuxième pied pour marcher.

Par ailleurs, nous sommes tous d’accord sur la nécessité de réduire les déficits ; nous devons rechercher des marges de manœuvre budgétaires. Avec 2 000 milliards d’euros de déficit, nous sommes étranglés.

Ensuite, sans dramatiser, nous avons tous constaté qu’il n’y avait aucune solution de remplacement crédible. Certains parlent de plan B. Soyons sincères, il n’y en a pas, sauf à sortir de l’euro !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Or personne ne prône vraiment cette solution !

Enfin, pour nous, ce traité constitue une avancée sur l’Europe solidaire. Ce n’est pas un slogan, un mot vide. Les contours d’une vraie solidarité se dessinent, qui sera celle du MES, de l’union bancaire, avec une future garantie commune des dépôts et un mécanisme commun de réponse aux défaillances des banques. Et je ne parle pas d’une mutualisation éventuelle de la dette. Nous avançons donc dans la voie de cette Europe solidaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Réjouissez-vous, mes chers collègues, c’est plutôt encourageant pour vous…

Ensuite, M. Bas nous a reproché de ne pas avoir de vision d’avenir pour l’Europe. Cette critique est injuste. Nous avons débattu hier quatre ou cinq heures sur notre vision de l’Europe au cours des cinq ou six prochaines années. Peut-être n’avons-nous pas la même vision que M. Bas ? Néanmoins, le débat a été de qualité.

Je finirai à mon tour par une citation

Exclamations amusées.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

En tant que représentant des Français établis hors de France, je citerai un étranger, …

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

… à savoir Raskolnikov, qui a assassiné, dans le roman Crime et châtiment, une vieille prêteuse sur gage : « Qu’est-ce qui est le plus inquiétant sur l’échelle du temps ? Un avenir qui s’approche vraiment ou un passé qui s’éloigne toujours plus ? »

Eh bien nous, nous répondons à cet avenir qui s’approche toujours plus. Voilà pourquoi le groupe socialiste votera en faveur du traité ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Au terme de l’examen de ce projet de loi, j’avoue que je n’ai pas changé d’avis – cela n’étonnera personne – sur les appréciations que j’ai pu porter précédemment, et ce malgré les discussions que nous avons eues pendant quelques heures.

Je voudrais revenir tout d’abord sur la façon dont ont été organisés les débats sur ce texte, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, même si, au Sénat, il faut le reconnaître, malgré quelques dérapages, les interventions ont été de qualité, qu’elles émanent des sénateurs ou du Gouvernement. Toutefois, tout cela laisse la désagréable impression que vous souhaitez maintenant en finir au plus vite et tourner rapidement la page.

Je reste convaincue que ratifier ce traité serait néfaste et dangereux pour notre pays. Je dirais même que la façon dont le Premier ministre, hier après-midi, l’a resitué dans son contexte et en a souligné les enjeux nous a malheureusement confortés dans notre opinion première.

Les sénateurs du groupe CRC ont assez démontré, au cours de leurs interventions, que, loin de résoudre la crise économique et financière en Europe, la ratification de cet accord ne ferait qu’en amplifier les effets dans tous les pays de l’Union européenne.

À la suite de Jean-Marc Ayrault, vous nous avez appelés, monsieur le ministre, à nous prononcer ce matin en toute connaissance de cause.

Et pourtant, lorsque vous continuez d’affirmer qu’il n’y aura aucun nouveau transfert de souveraineté du Parlement pour le vote du budget, vous jouez sur les mots ! Par le biais de mécanismes de contrôle et de surveillance, ce transfert sera bel et bien étendu à des instances non élues.

C’est l’une des raisons principales pour lesquelles nous pensions qu’il était nécessaire de consulter les Français par voie de référendum. Fondamentalement, on ne peut nier qu’avec la mise en place de ces mécanismes de surveillance et de contrôle du processus budgétaire, leurs représentants seront dessaisis d’une grande partie de leur liberté de décision en cette matière.

La mise sous tutelle permanente de nos finances publiques limitera, de fait, le droit d’initiative du Parlement et de ses commissions, ainsi que le droit d’amendement et de propositions.

Vous reconnaissez maintenant que la lettre du traité n’a pas changé et vous affirmez que l’esprit avec lequel il sera mis en œuvre changera sous l’effet du « paquet européen » obtenu grâce au Président de la République.

C’est une déclaration bien optimiste au vu, par exemple, des derniers développements de la situation en Grèce et en Espagne, où la mise en œuvre implacable de plans d’austérité toujours plus drastiques ne satisfait aucunement les marchés financiers et suscite la colère croissante des peuples grec et espagnol.

Je doute fort que les Espagnols et les Grecs, comme les Français d’ailleurs, soient convaincus qu’il faille vraiment en passer par là pour réorienter l’Europe sur la voie du progrès économique et social ainsi que de la transition écologique.

Enfin, je suis sceptique quant au changement d’état d’esprit de certains de nos partenaires en raison, paraît-il, des avancées obtenues par le chef de l’État. À cet égard il, me semble que l’échec de la fusion entre EADS et British Aerospace, du fait de l’opposition de l’Allemagne, montre qu’on en est encore loin !

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Cela augure mal de l’avenir et des décisions que vous souhaiteriez voir prendre lors du prochain Conseil européen des 18 et 19 octobre pour jeter les bases d’une gouvernance économique européenne, ce que j’appelle, pour ma part, fédéralisme autoritaire…

Monsieur le ministre, mes chers collègues, les élus communistes républicains et citoyens se battent avec des milliers et des milliers de citoyens, avec des dizaines et des dizaines d’organisations et d'associations pour une Communauté européenne solidaire, sociale, démocratique et écologique : on est donc bien loin des caricatures verbales faites ce matin et encore tout à l'heure de notre position ! Du reste, étrangère à toute paranoïa, je ne me suis sentie nullement insultée par ces propos, qui ne méritent que mon dédain !

Oui, n'en déplaise à certains, nous voulons une Europe où primerait enfin l’être humain, non les critères de l'argent roi et de la finance folle.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Mme Éliane Assassi. Et c'est parce que ce traité ne nous semble pas prendre ce chemin que nous vous confirmons notre vote contre.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Mme Marie-Noëlle Lienemann et M. Jean-Pierre Chevènement applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Alfonsi

C’est à titre personnel que je souhaitais initialement expliquer mon vote, mais, étant entouré de trois collègues de mon groupe qui ne partagent pas les mêmes convictions que moi, j'ai le sentiment qu’il m’incombe aussi de préciser que la majorité des membres de ce groupe votera le présent projet de loi de ratification.

Nous avons entendu trop de références littéraires pour que j'y succombe à mon tour ! §Aussi, je prendrai une référence iconographique : la photographie de Maurice Faure signant le traité de Rome, à côté de Konrad Adenauer, lequel avait souhaité sa présence dans la capitale italienne eu égard à la contribution qu’il avait apportée à l’élaboration de ce document.

J’en viens à quelques considérations personnelles.

Bien entendu, en dépit des affinités idéologiques que j'ai avec Jean-Pierre Chevènement, je ne partage pas l’ensemble de son argumentation. Au-delà des chiffres, deux principes fondamentaux ont toujours guidé mon action.

En premier lieu, on accède au pouvoir par certains moyens, mais on gouverne par d'autres moyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Alfonsi

C'est une évidence et il ne faut pas voir dans mon propos la marque d’un quelconque cynisme, mais, paradoxalement, la manifestation d'une sincérité permanente.

En second lieu, il faut prendre en compte ce qu’il est convenu d’appeler le principe de réalité. Nous pouvons tourner très longtemps en rond, annoncer que, bientôt, nous allons « refonder ». Mais j’observe qu’on « refonde » tout le temps ! Théoriquement, une refondation porte, par définition, sur un objet unique ; or, en l’occurrence, elle porte sur quarante objets différents, ce qui rend toute entreprise de reconstruction particulièrement difficile.

Au fond, le seul argument qui vaille, c’est celui de la dette. Il y a le feu à la maison et nous courons le danger de subir une hausse des taux d'intérêt, ce qui nous contraindrait à payer, dans trois, quatre ou cinq mois, quelques milliards d'euros supplémentaires. Que pourrions-nous alors faire ? Pourrions-nous « refonder » en quelques mois ? Évidemment non ! Dès lors, le problème se pose en termes simples : la politique n’étant que le choix entre deux inconvénients, je choisis le moindre, et je voterai le texte.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe du RDSE respecte toujours les convictions et les positions de chacun de ses membres.

De fait, au sein de notre groupe, pas plus que dans d’autres groupes de la Haute Assemblée, ou de l’Assemblée nationale, ce projet de loi autorisant la ratification du TSCG ne fait l’unanimité. Il reste que la majorité de ses membres votera pour la ratification ; c’est en leur nom que je m’exprime en cet instant.

Nous voulons que l’Europe avance, qu’elle progresse vers plus de démocratie et de solidarité. Pour nous, ce traité ne peut pas être séparé du contexte européen qui prévaut depuis quelques mois. En effet, les 28 et 29 juin dernier, sous l’impulsion du nouveau Président de la République, l’Europe s’est engagée dans une nouvelle voie : celle de la croissance et de la solidarité.

Nous pouvons donc, en toute confiance, autoriser la ratification de ce traité. D’ailleurs, il est heureux qu’une très large majorité des membres de notre Haute Assemblée, élus de la majorité comme de l’opposition, approuvent ce texte et, par là même, la réorientation de l’Europe.

Ne nous y trompons pas : c’est sur l’avenir de l’Europe que nous avons à nous prononcer aujourd’hui. Or, sur une question aussi centrale, nous devrions, me semble-t-il, dépasser nos divergences et former une véritable union nationale.

Nous considérons que l’avenir de la France est dans l’Europe et que l’intérêt de nos concitoyens doit prévaloir sur les calculs électoralistes de certains, qui choisissent de faire de Bruxelles un bouc émissaire permanent – et bien commode !

Avec la ratification de ce traité, il y va de notre crédibilité vis-à-vis de nos partenaires européens, et même au-delà des frontières de l’Union. En tout cas, si nous ne ratifiions pas ce traité, comment, la voix de la France pourrait-elle continuer à être entendue et prise au sérieux à l’échelon européen ?

En réalité, l’Europe est déjà passée à l’étape suivante, et en ne ratifiant pas ce traité, c’est toute la construction, toute la réorientation de l’Europe que nous mettrions en péril, ce qui serait bien sûr très préjudiciable à notre pays.

L’objectif de ce traité n’est pas contestable en soi ; il correspond d’ailleurs à un engagement déjà présent dans notre Constitution, celui d’équilibrer les comptes publics. Il s’agit d’affirmer notre volonté de redresser nos finances publiques, comme le Gouvernement s’y est déjà engagé.

En outre, ainsi que cela a été souligné au cours de nos discussions, la règle contenue dans ce traité qui limite le déficit structurel à 0, 5 % est plus souple et plus pertinente économiquement que la règle des 3 %, en solde effectif, contenue dans le Pacte de stabilité et de croissance.

C’est donc en commençant par ratifier le TSCG que nous pourrons dépasser la logique unilatérale de la discipline budgétaire. Si la discipline est utile, elle doit surtout avoir pour contrepartie la solidarité. Une solidarité accrue en Europe, c’est ce que nous appelons de nos vœux.

Mes chers collègues, cessons de regarder vers le passé et projetons-nous dans l’avenir, voyons les avancées qui sont en train de s’accomplir et poursuivons la construction d’une Europe plus solidaire et plus démocratique. Cela passera notamment par une harmonisation des normes sociales et fiscales, comme nous le soutenons depuis des années.

Compte tenu du rééquilibrage de la construction européenne déjà opéré depuis juin dernier, et qu’il ne faudrait surtout pas remettre en question, la majorité des membres du RDSE et des sénateurs radicaux de gauche votera ce projet de loi de ratification.

Étant élu du département du Lot, qui ne fournissait, disait-on jadis, que des pierres et des ministres, je me souviens que Maurice Faure, originaire de ce département, qui fut un jeune, sémillant et brillant secrétaire d’État aux affaires étrangères, avait à ce titre négocié en 1956 et 1957 le traité de Rome, et cela, m’a-t-il confié, contre l’avis de tout l’appareil du Quai d’Orsay. C’est lui qui a signé ce traité parce que Christian Pineau, alors ministre des affaires étrangères, a considéré qu’il devait recueillir les fruits de son labeur.

Je me situe dans cette lignée. Maurice Faure a été président du conseil général du Lot, député, sénateur, ministre. Pensant à lui, qui, malgré ses quatre-vingt-dix ans, est toujours en forme, je n’en suis qu’encore plus heureux de voter pour l’Europe.

Cette Europe à laquelle je suis attaché n’est pas l’Europe technocratique, qui interdit, par exemple, la vente du fromage au lait cru, ni l’Europe du rosé artificiel, ni l’Europe au sein de laquelle un technocrate bruxellois s’étonne que, à Séville, on fasse la sieste pendant l’été, sous prétexte qu’il faut harmoniser les règles entre les pays membres de l’Union.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Cette Europe à laquelle je suis attaché, c’est l’Europe du progrès, une Europe humaniste, une Europe qui doit s’occuper des grands équipements et infrastructures, sans régir la vie quotidienne de chacun. C’est ce sens-là que je donnerai à mon vote.

À l’Europe, je demande de nous mener sur la voie du progrès et, surtout, de nous faire un peu rêver ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà vingt ans, au moment de l’union monétaire, les Européens les plus convaincus étaient persuadés que cet événement précéderait une union politique, devenue indispensable. Or cela ne s’est pas produit et nous en subissons encore les conséquences, car nous devons gérer la crise résultant de cette déficience. Auparavant, l’Europe avait toujours fonctionné en reposant sur des équilibres successifs.

Lors de ce débat, qui doit aboutir à la validation d’un traité ayant pour objet de corriger les traités antérieurs, chacun a exprimé ses convictions. Nous avons constaté, monsieur le ministre, à quel point vous étiez compétent. Vous êtes tenace, courageux et possédez une capacité de répartie : autant de qualités qui sont absolument nécessaires pour défendre notre volonté de réorienter l’Europe avec nos vingt-six – bientôt vingt-sept – partenaires européens.

Au-delà de la crise de l’euro, plusieurs négociations sont en cours, notamment sur la prochaine période budgétaire, l’obligation de convergence fiscale, qui a été évoquée à plusieurs reprises, et l’union bancaire, indispensable en contrepartie de ce traité. Pour cela, monsieur le ministre, vos qualités seront précieuses.

Par ce vote que vous nous demandez au nom du Gouvernement, nous vous donnons en quelque sorte une mission, et nous serons à vos côtés pour la remplir. Nous souhaitons démontrer que le traité, les institutions européennes, les États membres seront utiles à l’ensemble des citoyens européens au cours des prochaines années. Vous savez combien nous avons ressenti le doute qui est apparu à ce sujet lors des campagnes électorales.

Le combat sera difficile, mais il faudra le mener avec l’ensemble de nos partenaires européens. Nous nous battrons avec vous, et commençons aujourd'hui en votant ce projet de loi de ratification. Ce traité marque le début d’une nouvelle aventure. Elle sera longue et périlleuse, mais elle mérite toute notre persévérance. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe CRC, l’autre, de l'UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici le résultat du scrutin n° 3 :

Le Sénat a définitivement adopté. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 15 octobre 2012 :

De quatorze heures trente à dix-huit heures trente :

1. Proposition de résolution relative aux ressortissants de nationalités roumaine et bulgare, présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution par Mme Aline Archimbaud et les membres du groupe écologiste (590, 2011-2012).

2. Proposition de loi relative à la création de la Haute Autorité de l’expertise scientifique et de l’alerte en matière de santé et d’environnement, présentée par Mme Marie-Christine Blandin et les membres du groupe écologiste (747, 2011-2012) ;

Rapport de M. Ronan Dantec, fait au nom de la commission du développement durable (24, 2012-2013) ;

Rapport pour avis de Mme Aline Archimbaud, fait au nom de la commission des affaires sociales (32, 2012-2013).

De dix-huit heures trente à dix-neuf heures trente et de vingt et une heures trente à minuit trente :

3. Proposition de loi visant à faciliter le transfert des biens sectionaux aux communes, présentée par M. Jacques Mézard et des membres du groupe RDSE (564, 2011-2012) ;

Rapport de M. Pierre-Yves Collombat, fait au nom de la commission des lois (13, 2012 2013) ;

Texte de la commission (n° 14, 2012-2013).

4. Proposition de loi tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires, présentée par M. Jacques Mézard et des membres du groupe RDSE (n° 576, 2011-2012)

Rapport de M. Gilbert Barbier, fait au nom de la commission des affaires sociales (10, 2011-2012)

Texte de la commission (n° 11, 2012-2013)

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à dix-sept heures trente-cinq.