Intervention de Delphine Batho

Réunion du 15 octobre 2012 à 14h30
Haute autorité de l'expertise scientifique — Discussion d'une proposition de loi

Delphine Batho, ministre :

Comme je l’ai dit mercredi dernier devant l’Assemblée nationale, des études épidémiologiques font apparaître, depuis le début des années 2000, des corrélations entre l’exposition aux champs magnétiques de très basses fréquences et certaines pathologies comme la leucémie chez l’enfant. Bien qu’aucune étude n’ait permis de mettre en évidence un mécanisme scientifique de causalité, le principe de précaution doit s’appliquer.

Un protocole conclu entre l’État et Réseau de transport d’électricité, RTE, prévoit déjà des actions pour les bâtiments installés dans une bande de 100 mètres autour des lignes à haute tension. Mais nous avons demandé à l’ANSES d’actualiser son expertise au sujet des conséquences de ces expositions sur la santé humaine et animale, afin de proposer de nouvelles règles.

De la même façon, les débats sur la proposition de loi relative au bisphénol A ont été l’occasion de rappeler, en s’appuyant notamment sur les résultats des travaux de l’ANSES et de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, que plusieurs études remettent en cause la pertinence de l’approche toxicologique classique : on ne peut raisonner seulement par rapport à des doses quand on sait que les perturbateurs endocriniens, par exemple, peuvent avoir des effets à faibles, voire à très faibles doses.

Nous devons aussi être très attentifs au fait que des molécules différentes peuvent, lorsqu’elles sont associées, exercer sur l’organisme un « effet cocktail » ; des recherches ont d’ailleurs été lancées sur ce phénomène pour ce qui est des pesticides.

Les risques émergents ne se manifestent souvent que par des signaux diffus, isolés ou faibles, ce qui les rend difficiles à identifier.

Les controverses qu’ils soulèvent peuvent aussi être liées à des difficultés réelles et objectives rencontrées pour mesurer des effets sur la santé ou à l’insuffisance des dispositifs susceptibles de repérer d’éventuels risques.

L’étude du professeur Séralini publiée il y a quelques semaines sur les OGM illustre le poids de l’expertise dans les décisions publiques.

Les polémiques sur la durée des tests toxicologiques pratiqués sur les rats, le poids de l’évaluation des risques dans les décisions d’autorisation de mise sur le marché et, plus récemment, les suspicions de conflits d’intérêts au sein de l’Autorité européenne de sécurité des aliments – suspicions suffisamment sérieuses pour que le Médiateur européen juge une plainte recevable – démontrent l’importance de pouvoir disposer d’une capacité d’expertise fiable, indépendante, transparente et contradictoire. (

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