Intervention de Kalliopi Ango Ela

Réunion du 16 octobre 2012 à 9h30
Avenant à une convention fiscale avec les philippines — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Kalliopi Ango ElaKalliopi Ango Ela :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, du fait de l'évasion fiscale, entre 40 milliards et 50 milliards d'euros de recettes échapperaient au Trésor français chaque année. Il est donc nécessaire que nous soyons tous mobilisés pour combattre ce qui se révèle être un véritable fléau.

Le groupe écologiste a d'ailleurs pris part aux travaux de la commission d'enquête sénatoriale sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, y étant fort bien représenté par notre très chère collègue Corinne Bouchoux !

Le rapport de cette commission d'enquête permet de disposer, depuis le mois de juillet, d'une étude de qualité facilitant l'appréhension de l'ampleur du phénomène de l'évasion fiscale. Elle aborde notamment les différents montages qu'il recouvre, qu'il s'agisse de la fraude fiscale ou des divers schémas d'optimisation fiscale abusive. Le débat mené à ce sujet dans notre hémicycle, le 3 octobre dernier, a, en particulier, mis l'accent sur la nécessité de renforcer l'information des pouvoirs publics. C'est dans ce cadre que s'inscrit le projet de loi qui nous est aujourd'hui soumis.

En effet, comme l'a rappelé Mme la rapporteure, la conclusion d'un accord d'échange de renseignements ou la mise en conformité d'une convention fiscale avec les normes de l'OCDE participe pleinement de la politique de promotion de la transparence fiscale.

Le présent projet de loi vise à soumettre à notre approbation la ratification d'un avenant à la convention franco-philippine conclue à Kingston le 9 janvier 1976. Cette convention tend à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu. L'avenant, signé à la demande de la France le 25 novembre 2011, a pour objet d'actualiser ladite convention, afin d'y intégrer les dernières exigences du modèle de convention fiscale de l'OCDE, telles que la levée du secret bancaire sans restriction, disposition ajoutée en 2005.

En l'état actuel des choses, aucune coopération fiscale n'est possible avec l'État philippin. Cet avenant est donc nécessaire pour que les autorités philippines soient contraintes d'échanger des renseignements.

Cependant, les sénatrices et sénateurs écologistes sont évidemment très attentifs aux conséquences de la ratification de cet avenant. S'il a pour objet de renforcer la transparence fiscale, il ne doit en aucun cas avoir pour conséquence d'accorder un blanc-seing à l'État philippin, comme l'a d'ailleurs rappelé Mme la rapporteure.

La ratification de cet avenant entraînera en effet le retrait des Philippines de la liste française des États et territoires non coopératifs, établie pour faire suite aux engagements en faveur de la transparence fiscale pris lors du sommet du G20 du 2 avril 2009.

Or la présence d'un État ou d'un territoire sur cette liste conduit à l'application automatique de sanctions fiscales. Il est donc parfaitement légitime de se poser la question du bien-fondé de la ratification de cet avenant. Si la prudence est de mise, les réponses apportées nous semblent, cependant, plaider en faveur de cette ratification.

En effet, d'une part, le 27 juillet 2009, les Philippines ont opéré des modifications de leur législation interne en matière d'échange de renseignements fiscaux. Il en résulte que le secret bancaire ne continue à s'appliquer que pour des situations purement intérieures. Il est donc désormais levé concernant l'assistance administrative internationale dans le domaine fiscal.

D'autre part, le Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales a estimé, en 2011, que l'ensemble du cadre normatif philippin et l'accès aux informations étaient conformes aux standards de l'OCDE, en ce qui concerne la disponibilité des renseignements bancaires.

Enfin et surtout, comme l'a souligné Mme la rapporteure, l'approbation d'une clause conventionnelle permettant l'échange de renseignements n'exclut pas un contrôle accru des modalités de sa mise en œuvre, dans le cadre tant international que national.

Deux garanties supplémentaires incitent donc le groupe écologiste à voter en faveur de l'adoption de ce projet de loi : la réévaluation par le Forum mondial, au début de 2013, de la réalité de la coopération avec l'État philippin ; la garantie que cette question fera également l'objet d'un suivi par les autorités françaises, lequel conduira, en cas de manquement, à une réintégration des Philippines dans la liste française des États et territoires non coopératifs. Dès lors, dans l'hypothèse où, en dépit de la ratification, les Philippines ne permettraient pas un échange effectif de renseignements, un retour au système actuel sera toujours possible.

Nous serons évidemment extrêmement attentifs à la mise en œuvre de cet avenant, et en appelons à la vigilance du Parlement à cet égard.

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