Séance en hémicycle du 16 octobre 2012 à 9h30

Sommaire

La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Michel Teston, auteur de la question n° 99, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Madame la ministre, j’appelle votre attention sur les inquiétudes exprimées par les collectivités territoriales disposant de structures d’accueil « petite enfance ».

Jusqu’à présent, les caisses d’allocations familiales faisaient preuve d’une certaine tolérance à l’égard de l’obligation de fourniture, par les établissements et structures d’accueil de jeunes enfants, des soins d’hygiène – couches, produits de toilette, etc. – et des repas, lesquels étaient en conséquence souvent pris en charge par les familles.

Or, par la lettre-circulaire LC 2011-105 du 29 juin 2011 relative à la prestation de service unique, la Caisse nationale des allocations familiales a rappelé cette obligation, précisant que les établissements et structures d’accueil de jeunes enfants devraient impérativement s’y conformer à partir du 1er janvier 2013.

En dépit de la participation financière des caisses d’allocations familiales, les collectivités territoriales redoutent que les structures d’accueil « petite enfance » ne rencontrent en 2013 d’importantes difficultés budgétaires pouvant avoir des conséquences sur les tarifs demandés aux familles ou sur les budgets généraux des collectivités.

Aussi, madame la ministre, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur ce dossier.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille

Monsieur le sénateur, vous attirez mon attention sur la lettre-circulaire du 29 juin 2011 relative à la prestation de service unique qui prévoit que les établissements d’accueil du jeune enfant, pour bénéficier de la prestation de service unique, doivent appliquer le barème des participations fixé par la Caisse nationale des allocations familiales et couvrir la prise en charge de l’enfant pendant son temps de présence dans la structure, y compris les repas principaux et les soins d’hygiène.

La prestation de service unique correspond à une prise en charge par la branche famille de 66 % du prix de revient horaire d’un établissement d’accueil du jeune enfant. Cette lettre-circulaire ne modifie pas les règles d’attribution de la prestation de service unique mais se borne à rappeler les conditions qu’une crèche doit réunir pour qu’elle lui soit attribuée.

Ces conditions répondent à quatre exigences : une exigence de sécurité et de qualité pour les enfants ; une exigence de mixité sociale ; une exigence de bonne gestion de l’argent public ; enfin, une exigence d’équité.

La lettre circulaire ne fait donc que rappeler que la participation demandée à la famille doit couvrir la prise en charge intégrale de l’enfant pendant son temps de présence dans la crèche, laquelle doit fournir les repas et les couches. C’est une mesure d’équité, de mixité sociale et de bonne gestion, gage du respect du principe d’égalité territoriale et sociale.

En effet, le barème étant le même partout, il ne peut y avoir de lieu où les prestations seraient à géométrie variable. On sait que c’est en direction des publics modestes que ce serait le plus dommageable.

Je comprends bien, dans le même temps, votre souci de ne pas mettre en difficulté certaines structures d’accueil de jeunes enfants, et je partage cette préoccupation. Le Gouvernement, qui fait de l’accueil des jeunes enfants une priorité de la politique familiale, lance, à l’échelon des régions, une concertation pour une meilleure adéquation entre l’offre et la demande.

Je tiens à le répéter, lorsque les établissements d’accueil du jeune enfant sont financés à 66 % par la branche famille, ils doivent se conformer aux exigences qui leur sont posées.

Certaines structures ne sont pas parvenues à s’adapter aux règles qui ont été rappelées en juin 2011. J’ai demandé à la Caisse nationale des allocations familiales de réaliser une enquête afin de connaître le nombre de ces structures, de comprendre leurs difficultés et de cerner les territoires les plus touchés.

Je crois par ailleurs savoir que l’Association des maires de France mène également une enquête de son côté. C’est de cette façon, en concertation avec la Caisse nationale des allocations familiales, que nous pourrons être garants de l’égalité territoriale et sociale et nous assurer que la diversité ne devienne pas disparité.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Madame la ministre, votre manière d’aborder la question des obligations liées à la prestation de service unique me paraît tout à fait logique. Je partage votre attachement aux principes de mixité et d’égalité, qui doivent à mon sens se traduire par un tarif identique acquitté par toutes les familles pour l’accueil de leur enfant.

J’ai bien noté aussi votre souci de ne pas créer de difficultés aux collectivités territoriales.

Je me félicite de l’idée que vous avez mise en avant d’une enquête menée auprès des communes concernées afin de connaître exactement la réalité des difficultés éventuellement rencontrées.

Enfin, j’adhère tout à fait à votre idée d’une consultation visant à mieux cerner l’ensemble des besoins en matière d’accueil de la petite enfance.

En conséquence, je suis satisfait de votre réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, auteur de la question n° 18, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Monsieur le ministre, nous sommes tous attachés à ce que la circulation des personnes et des biens se fasse dans les meilleures conditions, mais certains axes routiers nous concernent plus particulièrement. En l’occurrence, je veux évoquer un axe aussi connu au Sénat qu’à l'Assemblée nationale : la route nationale 12.

Je me suis occupé d’un certain nombre de tronçons routiers lorsque j’exerçais les fonctions de député. Représentant au Sénat depuis un an le département de l’Orne, je suis aujourd'hui particulièrement attaché à la résolution d’un dossier dont on parle depuis des dizaines d’années.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

En clair, l’axe entre Alençon et la Bretagne comporte un vrai point noir : la traversée de Saint-Denis-sur-Sarthon. J’avais d'ailleurs interrogé votre prédécesseur à cet égard à l’occasion de l’une de mes premières interventions au Sénat, soulignant alors que je mènerais ce combat avec l’ensemble des élus concernés. Au moins pouvons-nous être tous unis sur ce sujet pour défendre l’intérêt de notre département.

La traversée de la localité de Saint-Denis-sur-Sarthon, dont le nom commence maintenant à être connu ici, est particulièrement difficile et dangereuse. Il suffit de se rendre sur place – monsieur le ministre, je sais que vous êtes attaché au contact avec le terrain, et nous vous attendons donc avec impatience – pour observer concrètement la façon dont les choses peuvent se passer. En fait, elles se passent mal : la circulation des poids lourds est particulièrement importante, car Saint-Denis-sur-Sarthon est sur l’un des axes menant de Paris à la région Bretagne-Nord, et tant les automobilistes empruntant cette voie que les personnes habitant cette localité ne sont pas en sécurité. Nous avons d’ailleurs eu à déplorer des accidents graves, dont plusieurs mortels, comme ce fut encore récemment le cas.

Il faut être pragmatique, réaliste et s’attacher à la concrétisation des annonces faites par votre prédécesseur. Ce dernier avait confirmé que la route nationale 12 était l’une des priorités nationales inscrites au schéma national d’infrastructures de transport, le SNIT.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

C’était un premier point important. Monsieur le ministre, les élus, qu’ils soient de droite ou de gauche, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

… se sont tous battus pour l’inscription de certains axes à ce schéma national.

Ensuite – et l’approche de votre prédécesseur était à cet égard tout à fait pragmatique –, il faut, à l’intérieur d’un schéma, déterminer ce qui est prioritaire au titre de la sécurité et de l’enclavement. Nous savons bien que, compte tenu des moyens dont nous disposons, tout ne peut être fait. Mais, comme votre prédécesseur l’avait précisément souligné, il faut déterminer ce qui doit être réalisé en priorité.

Un certain nombre de perspectives sont envisagées à la suite des études qui ont été menées. Mais, des études, nous en avons eu pendant des années ! Il faut maintenant s’engager sur une réalisation, monsieur le ministre. Un grand nombre d’élus et d’habitants de ce secteur du département de l’Orne attendent donc avec beaucoup d’intérêt les réponses que vous allez m’apporter.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur Lenoir, vous m’interrogez sur les perspectives d’aménagement de la route nationale 12 qui relie Paris à Brest par le sud de la Normandie. Vous évoquez plus particulièrement l’avancée des études visant à définir une stratégie d’aménagement sur la section Alençon-Fougères, en rappelant, à juste titre d’ailleurs, les enjeux en termes de sécurité que représente le projet de déviation de Saint-Denis-sur-Sarthon.

Comme vous l’avez indiqué, les mobilisations sont nombreuses sur le territoire. Vous-même et votre collègue Mme Goulet, que je salue et qui m’a également interpellé, ainsi que M. Pueyo, maire d’Alençon et député de l’Orne, n’avez pas manqué de souligner combien cet enjeu était majeur pour le territoire.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Aussi faites-vous aujourd’hui référence à des engagements qui ont été pris, en citant le SNIT. Je ne sais pas si c’est un gage d’efficacité tel que vous l’attendez. Ce que je peux vous dire, c’est que le parti retenu pour l’aménagement de la route nationale 12, sur la totalité de son tracé, est à terme celui d’une route à deux fois deux voies.

Néanmoins, le contexte budgétaire contraint, comme vous l’avez souligné, conduit à privilégier le traitement des zones de congestion, particulièrement celles qui posent un problème de sécurité.

La section située à l’ouest d’Alençon, entre Alençon et Fougères, a fait l’objet de diagnostics en 2010 et en 2011 afin que soient définies des priorités sur les travaux à réaliser, sous réserve d’une inscription au programme de modernisation des itinéraires routiers, le PDMI. Je vérifierai que cette section figure dans le SNIT – ce schéma prévoit quand même l’inscription de 245 milliards d’euros –, que les modalités de financement, le programme, l’échéancier, les conditions, ainsi que le parti retenu sont précisés.

Une commission chargée de trier et de hiérarchiser les projets du SNIT va être installée dans les tout prochains jours. Je vous invite à la saisir, pour donner un écho à vos préoccupations relatives à cet enjeu. Pour autant, je ne suis pas persuadé que ce soit dans le cadre du SNIT que l'on puisse faire avancer les choses. En effet, aujourd'hui, vous l’avez souligné, il s’agit d’une démarche de concertation avec les collectivités territoriales.

L'État est tout à fait conscient de la nécessité de réaliser la déviation de Saint-Denis-sur-Sarthon. Mais le projet, qui a été déclaré d'utilité publique, soulève d'énormes problèmes en termes d’environnement et de préservation de la biodiversité, notamment parce qu’est prévue la traversée de zones humides remarquables.

Par ailleurs, se pose la question du coût extrêmement élevé du projet. Même s’il ne saurait être question de regarder les questions de sécurité au travers du prisme budgétaire, il n'en demeure pas moins que cet élément peut perturber la réalisation du projet.

Il est important que de nouvelles variantes, plus réalistes, permettent de réduire les questions de nuisance et d’insécurité.

Vous m'invitez à venir sur place, mais permettez-moi de vous dire que, pour des raisons privées, je passe fréquemment sur cette route ! Je connais donc particulièrement bien la difficulté, qui n'est pas récente, de la zone de Saint-Denis-sur-Sarthon, près de Lalacelle, d’autant que la situation est compliquée par la circulation de très nombreux poids-lourds et l’existence d’un relais poids-lourds bien connu.

Au final, les questions de sécurité que vous avez évoquées s’inscrivent dans un contexte très contraint. Nous aurons toutefois à cœur de chercher, avec l'ensemble des acteurs locaux, des solutions efficaces.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je suis heureux de constater que vous connaissez bien le lieu : vous en parlez donc en connaissance de cause !

Je me permettrai d'insister sur un point. Pour avoir connu la mise à deux fois deux voies d'autres tronçons de cette route nationale, je sais que des études préalables doivent être réalisées. Or des études, comme vous le souligniez dans votre propos, nous n’en manquons pas !

À la suite des décisions prises l'année dernière, nous avons reçu au printemps 2012 un épais document détaillant les opérations susceptibles d'être menées sur la route nationale 12. Mais un problème vient du fait que l'étude, réalisée par les services de l'État dans la région Pays-de-Loire, s'arrêtait aux portes du département de l'Orne : toute la zone à l'est de Pré-en-Pail, notamment vers Saint-Denis-sur-Sarthon et Alençon, était grisée, ce qui laissait penser que l'étude n'y avait pas été menée.

J’ai donc saisi le préfet de région au printemps dernier pour lui signaler le problème. Il a effectivement constaté que l'étude sur la partie de l'Orne n'avait pas été commandée. Or, tant qu'il n'y a pas d'étude, on ne peut pas envisager l'inscription de ce programme.

À la suite de mon intervention, le préfet de région a alerté le ministère des transports. J'ai eu l'immense satisfaction d'apprendre que, le 11 septembre dernier, une commande avait été passée par le ministère pour réaliser cette étude, qui n’avait pour l’instant été menée que sur la partie bretonne de la route nationale 12.

Nous attendons maintenant que le travail soit fait. On peut s'intéresser à Saint-Denis-sur-Sarthon et à la route nationale 12, mais encore faut-il vérifier que nous disposons bien de l'ensemble du plan. Sinon, lorsqu’il s’agira de trouver des financements, on aura beau jeu de nous répondre qu’aucune d'étude n’a été réalisée.

Certes, l'enquête publique a bien été menée, et elle a même été prolongée, mais aujourd'hui il faut tout recommencer puisque les délais ont été dépassés. C’est donc bien un nouveau projet qui, d'un point de vue technique, environnemental, administratif et financier, doit pouvoir recueillir l'approbation de l'ensemble des parties prenantes.

Monsieur le ministre, je me mettrai en rapport avec vous très prochainement au sujet du calendrier de cette opération.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Michel Doublet, auteur de la question n° 110, transmise à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

Monsieur le ministre, mes collègues Claude Belot, Daniel Laurent et moi-même souhaitons relayer auprès de vous les observations de la coordination des élus des communes de Charente-Maritime concernées par le projet de la LGV Sud Europe Atlantique et le souhait émis d’une réouverture des discussions et des négociations sur ce dossier, ainsi que sur le projet de LGV Bretagne-Pays de la Loire.

Le collectif d’élus LGV 17 regroupe cinq communes de mon département. Depuis l’annonce du projet, les maires œuvrent avec leurs collègues des autres départements pour obtenir des mesures compensatoires. Nous avons toujours été à leurs côtés pour porter leurs préoccupations auprès des pouvoirs publics et des ministres de tutelle.

En effet, si une nouvelle ligne ferroviaire à grande vitesse représente une opportunité pour certaines parties des territoires concernés, il n’en demeure pas moins que les communes que j’ai évoquées, qui sont souvent rurales, subiront de nombreuses nuisances. Il est donc tout à fait légitime qu’elles puissent bénéficier d’une redevance communale annuelle et pérenne.

Si les élus ont salué les avancées quant au fonds de solidarité territoriale mises en œuvre par le précédent gouvernement – et je tiens à souligner l’action de Dominique Bussereau à cet égard –, des sujets importants n’ont pu cependant être résolus. Disant cela, je pense notamment aux points suivants : l’attribution aux communes traversées d’une redevance annuelle pérenne, à l’instar de ce qui est en vigueur pour les lignes à haute tension, les autoroutes et les éoliennes ; la fiscalité appliquée au concessionnaire ferroviaire et aux recettes induites pour les communes ; la prise en charge par les concessionnaires et par RFF, au-delà de la concession de la totalité des charges liées à l’entretien des ouvrages d’art et des voiries d’accès supportant les voiries communales, hors bande de roulement ; l’indemnité libératrice de 8 % du montant des travaux lors de la remise des nouvelles voies à la collectivité ; enfin, le strict respect par le concessionnaire des normes européennes en matière de traitement des nuisances sonores de la LGV Sud Europe Atlantique.

Je souhaite compléter mon propos en abordant la problématique de la domanialité et de l’entretien des ponts-routes passant au dessus des voies ferrées.

En effet, les communes doivent faire face à l’obligation d’entretenir ces ponts-routes, dont la domanialité leur a été transférée par la loi n° 97-135 portant création de l’établissement public « Réseau ferré de France ». Plusieurs collectivités ont saisi les tribunaux administratifs pour contester cette domanialité, mais toutes ont été déboutées à ce jour.

Les ponts-routes sont des ouvrages constitutifs de voies publiques dont ils relient les parties séparées de façon à assurer la continuité du passage. La collectivité propriétaire de l’ouvrage d’art est la même que celle de l’infrastructure qu’il supporte. Les communes rurales se retrouvent ainsi responsables de la sécurité et de l’entretien des ouvrages d’art sans disposer des moyens financiers pour assurer cette obligation.

Il conviendrait de trouver une solution pour régler cette question et pour répartir plus équitablement les charges financières qu’implique l’entretien des ouvrages d’art rétablissant les voies de communication coupées par des infrastructures de transport.

En conséquence, monsieur le ministre, il me serait très agréable que vous nous fassiez part des réponses pouvant être apportées aux élus sur chacun des points évoqués.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, vous attirez mon attention sur l’impact des infrastructures de transport sur les communes traversées et sur la nécessité d’accroître les mesures compensatoires.

J’entends vos préoccupations et celle des cinq communes de la Charente-Maritime regroupées dans le collectif d’élus LGV 17.

Cependant, je dois rappeler que les projets de ligne à grande vitesse constituent, particulièrement par les temps qui courent, des opportunités pour les collectivités territoriales traversées, même si elles sont éloignées des agglomérations dans lesquelles sont implantées les gares bénéficiant directement des lignes nouvelles. En effet, la réalisation de ces projets s’accompagnera d’une augmentation des recettes fiscales par l’intermédiaire des taxes locales. Elle permet également de créer des emplois par dizaines de milliers, grâce aux chantiers qui occupent pendant plusieurs années les entreprises situées sur ces territoires. Les projets, que ce soit la LGV Sud Europe Atlantique ou la LGV Bretagne-Pays de la Loire, loin d’être abandonnés, sont toujours soutenus, permettant ainsi de créer des emplois et d’être un facteur de croissance pour les territoires concernés.

À ce jour, le dispositif d’une redevance communale annuelle pérenne n'a pas été prévu, notamment parce qu’il constituerait une forme d’impôt supplémentaire et qu’il serait contraire à notre volonté de développement du transport ferroviaire.

En effet, on peut considérer que cette redevance constituerait une forme d'impôt supplémentaire puisque toute charge supplémentaire qui viendrait alourdir le financement d'infrastructures amènerait nécessairement l’opérateur à se tourner d’abord vers l'État, puis vers les collectivités, quand ces dernières ont consenti à cofinancer ces grands chantiers. Ce serait directement répercuté sur la demande de concours publics, et donc sur leur montant.

Pour la réalisation des lignes LGV, il existe un fonds de solidarité territoriale qui permet d'ores et déjà de répondre à un certain nombre de préoccupations des communes traversées. Ce fonds spécifique apporte une compensation en fonction du coût prévisionnel de chaque projet. Ont ainsi été prévues une enveloppe de l'ordre de 30 millions d'euros pour la LGV Tours-Bordeaux et une de 14 millions d'euros pour la LGV Bretagne-Pays de la Loire. Ce fonds, qui permet de financer l'insertion environnementale des territoires traversés, est effectif depuis maintenant plusieurs mois pour ces deux LGV.

Par ailleurs, vous faites état d'un certain nombre d'interrogations relatives au financement des ouvrages. Vous l'avez vous-même indiqué, il y a autorité de la chose jugée puisque la jurisprudence s’est prononcée. Le propriétaire de la voie supportée par un ouvrage – et il s’agit bien d’une règle de droit générale, et non d’un cas d’espèce – est chargé de l'entretenir, sauf convention contraire.

Pour autant, Réseau ferré de France a souhaité proposer systématiquement aux collectivités, de façon directe ou indirecte si la ligne est réalisée en partenariat public-privé, d’établir une convention pour un versement libératoire couvrant les charges financières de surveillance, d’entretien, de réparation et de renouvellement des ouvrages concernés, qui ne seraient donc pas directement à la charge des élus. Tout en gardant la propriété de la voie, les communes rurales n’auront alors pas à subir de contrepartie financière, ou en tout cas de charges supplémentaires, cette contrepartie étant versée par voie conventionnelle par RFF.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Doublet

Monsieur le ministre, j’ai bien entendu votre réponse. Je vérifierai la mise en œuvre des mesures que vous annoncez : cela représente tout de même des sommes relativement importantes pour ces petites communes, qui ont peu de moyens. Et si vos propos ne sont pas suivis d’effet, j’aurai le plaisir de venir à nouveau vous interroger !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Philippe Paul, auteur de la question n° 113, adressée à M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

Monsieur le ministre, les infrastructures de transports sont les vecteurs de l’aménagement du territoire. Le Grenelle de l’environnement a permis de définir des orientations traduites dans un nouvel outil regroupant les grands projets structurants en termes d’infrastructures de transports : le schéma national des infrastructures de transports.

Ce schéma doit, ou devait, « permettre au système de transport de l’État d’évoluer de manière à intégrer pleinement les enjeux de la mobilité durable ». Une consultation ouverte a permis à chacun de déposer des commentaires sur l’avant-projet du SNIT, assurant ainsi son appropriation par tous les acteurs.

Le rôle structurant de telles infrastructures de transports est indéniable.

Pour des territoires éloignés tels que le Finistère, il est vital de pouvoir afficher une « proximité » avec l’ensemble des centres de décision. Ainsi, la mise à 3 heures de Paris en train de villes comme Brest ou Quimper, dans le prolongement de la LGV Bretagne-Pays de la Loire, est une nécessité indiscutable : elle se traduit concrètement par des minutes gagnées sur une journée de travail et, peut-être plus encore, elle permet d’améliorer l’image d’une ville afin de lui permettre de rattraper un retard concurrentiel sur d’autres territoires.

On parle de ces « 3 heures » – pour ne pas dire qu’on les promet – depuis des lustres. Actuellement, il faut exactement 4 heures et 11 minutes pour aller de Quimper à Paris, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

… et 4 heures et 3 minutes depuis Brest dans le meilleur des cas, c'est-à-dire seulement avec quelques trains. Je pourrais vous dire, pour simplifier, qu’il faut plus de 4 heures pour relier ces villes à Paris. Mais, dans notre situation, chaque minute compte.

Un débat public devrait intervenir à la mi-2013 pour des travaux d’amélioration des lignes à partir de Rennes vers Brest et Quimper. Dans les scénarios les plus optimistes, le gain de temps serait de 20 minutes pour Brest et de 25 minutes pour Quimper. Nous serions donc toujours, dans le meilleur des cas, à 3 heures et 46 minutes de Paris pour Quimper, et à 3 heures et 43 minutes, soit 3 minutes de moins, pour Brest...

Si l’objet de ces travaux est de rééquilibrer les temps de trajet pour venir dans le nord et dans le sud du Finistère, bravo et tant mieux ! Mais, monsieur le ministre, s’il s’agit de mettre ces deux destinations à moins de trois heures de Paris, il reste encore un long chemin à parcourir…

De même, la mise à deux fois deux voies de la route nationale 164, axe central en Bretagne, doit permettre en tout premier lieu de sécuriser les trajets longitudinaux bretons, tout en assurant une économie de temps substantielle aux usagers d’une grande partie du Finistère et, bien sûr, de toute la Bretagne. Ces travaux sont annoncés depuis au moins trente ans, et ils doivent encore être terminés.

Certes, je n’évoque là que quelques portions de routes ; mais, alors que les villes intermédiaires ne bénéficient plus des avantages de la poursuite des améliorations vers l’Ouest, nous, Finistériens, avons besoin que la solidarité nationale joue à plein.

À ce sujet, il me faut souligner une réalité qui passe souvent inaperçue. Les temps d’accès qui nous occupent revêtent une importance capitale pour les habitants des villes de Brest et de Quimper. Mais qu’en est-il pour le douarneniste que je suis ou pour les personnes qui se rendent au Conquet ou à Plogoff ? Et je ne vous parle pas des habitants des îles de Sein, d’Ouessant ou encore de Molène !

Dans ces conditions, comment ne pas être inquiet à l’évocation des concepts de « rapport coût-avantages » et de « complémentarité des projets avec les réseaux existants », qui ont été soulevés pour obtenir la hiérarchisation, par une nouvelle commission, des projets du SNIT, dont certains seraient différés, voire, comme j’ai cru le comprendre récemment, abandonnés par le Gouvernement ?

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer sur la composition de la future commission, ainsi que sur les critères concrets, autres que comptables, mentionnés dans sa feuille de route ?

Pouvez-vous également nous rassurer sur la notion de « complémentarité avec les réseaux existants », laquelle ne doit pas conduire à ajouter des infrastructures aux territoires les mieux dotés, laissant les moins dotés à leur triste sort ?

Surtout, pouvez-vous nous rassurer sur les projets d’aménagement majeurs pour la Bretagne que sont, d’une part, les travaux concernant la partie comprise entre Rennes, d’un côté, et Brest et Quimper, de l’autre – ce serait, j’y insiste, pour mettre le Finistère à trois heures de Paris en train – et, d’autre part, la fin des tronçons manquants de la mise à deux fois deux voies de la route nationale 164 ?

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, vous êtes très inquiet et vous demandez donc une série d’assurances au Gouvernement qui vient d’arriver aux responsabilités. Votre constat peut sonner comme un aveu d’échec de la politique qui a été menée ces dernières années – et vous remontez parfois même jusqu’à trente ans ! C’est dire combien votre espoir en l’action du Gouvernement est fort.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Vous avez raison de vous adresser au ministre qui vient d’entrer en fonctions pour lui faire mesurer combien les manquements ont été nombreux jusqu’à présent et combien sa responsabilité est grande pour faire face à ce SNIT, que vous n’allez peut-être pas jusqu’à porter aux nues – soyons raisonnables !–, mais que vous présentez quand même comme un exemple de bonne méthodologie gouvernementale.

Or, en termes de soutenabilité budgétaire, ce document, sorti à l’approche de l’élection présidentielle, amoncelle des éléments qui, pour la plupart, sont non pas des engagements ou même des projets, mais des traits sur des cartes, ne comporte ni calendrier, ni participation financière, ni planning, pour un montant de 245 milliards d’euros. Telle est la réalité !

Pour ma part, je fais confiance à la représentation nationale et, pour entendre la voix des territoires que vous portez ici, j’ai souhaité que puisse être mise en place une commission mixte, composée à la fois de parlementaires – députés et sénateurs – et de techniciens.

Bien évidemment, cette commission aura pour mission de mesurer la réalité de ces projets et d’en assurer l’effectivité.

Depuis mon entrée en fonctions, je ne cesse de recevoir des parlementaires et des élus locaux – dont beaucoup de votre famille politique – qui viennent me supplier de rendre au moins envisageables un jour les promesses inconsidérées qui ont été faites par vos propres amis.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Pour ma part, je dispose d’un budget de 2 milliards d’euros : celui de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, dont vous avez d'ailleurs essayé de limiter la possibilité de financement. En effet, vous nous avez légué une situation, s’agissant notamment des conditions d’institution de la taxe poids lourds, qui rend quasiment impossible le financement de cette agence !

Bref, nous remettons de l’ordre dans tout ce qui a été fait.

Oui, la commission aura à évaluer, mais sur la base de critères, et non pas selon une carte des infrastructures en forme de carte électorale, comme cela a pu exister en d’autres temps ! En effet, telle n’est pas la façon dont nous envisageons nos responsabilités.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué

Nous envisageons de véritables schémas d’infrastructures qui soient utiles à la nation, avec une mobilisation de l’argent public au profit de l’efficacité économique, de l’aménagement du territoire et, là encore, au profit de véritables projets répondant aux enjeux ainsi qu’à l’engagement du Président de la République, aujourd'hui mis en œuvre par le Premier ministre.

Bien évidemment, je m’engage à ce que ces projets représentent aussi une plus-value pour les territoires et soient de nature à gommer la fracture territoriale, qui n’a été que trop renforcée.

Vous avez cité un certain nombre de projets. Je ne vais pas me substituer à la commission : il appartiendra à cette dernière de pouvoir à la fois en dresser la liste et en analyser la réalité ainsi que l’efficacité.

Par ailleurs, vous le savez, je ne suis pas de ces ministres qui, non seulement accumulent les promesses sans les tenir, mais mettent aussi à la charge des collectivités plus de 60 milliards d’euros ! C’est ce qui était prévu dans le SNIT, et ce alors même que ni l’État ni les collectivités locales, nous le savons, ne sont en mesure de soutenir de pareils efforts budgétaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, même si elle me laisse largement sur ma faim ! Je n’ai en effet obtenu ni les réponses que je souhaitais ni des informations sur le calendrier ou des garanties sur l’objectif des fameuses trois heures de train que nous espérons voir atteint.

À l’instar de mon collègue Jean-Claude Lenoir, j’ai le plaisir de vous inviter dans ma région – la Bretagne –, en particulier dans le Finistère. Je ne doute pas que vous connaissiez la Bretagne, mais je compte sur vous pour venir voir concrètement sur le terrain combien les deux projets que j’ai évoqués tout à l'heure – le projet routier et le projet ferroviaire – sont vraiment indispensables à son désenclavement, et en particulier au désenclavement du Finistère. Il y va de l’avenir de nos territoires et, surtout, de l’avenir de l’économie de la Bretagne.

Monsieur le ministre, je compte sur vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question n° 106, adressée à M. le ministre des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Madame la ministre déléguée, j’avais posé cette question au mois d’août dernier mais je l’ai maintenue parce qu’elle conserve une certaine actualité : elle porte sur les élections en Géorgie.

Vous le savez, je suis – un peu ! – spécialiste de la zone. En l’espèce, nous avions des craintes sur le déroulement de ces élections, d’autant que le processus démocratique amorcé par le Président Saakachvili a connu de véritables avancées, saluées à la fois par le Conseil de l’Europe et par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l’OSCE.

Il est vrai que le mouvement « Rêve géorgien », présidé par l’actuel Premier ministre Ivanichvili, se distinguait de ce processus par un certain nombre de points. Nous aimerions nous aussi avoir dans notre pays un candidat qui, sur ses fonds propres, finance des routes et des hôpitaux, fait venir des médecins étrangers, règle les dettes de ses électeurs ! En Géorgie, un tel comportement a créé un climat un peu particulier.

Néanmoins, le 1er octobre dernier, le Président Saakachvili a reconnu la défaite de son parti aux élections parlementaires.

Maintenant que les élections ont eu lieu et que le Président Saakachvili a reconnu sa défaite, ma question est la suivante : dans le contexte politique des conflits gelés, notamment en Abkhazie et en Ossétie du Sud, quelle sera la position de la France pour assurer que la transition démocratique de la Géorgie – c’est, dans le Caucase, un pays central pris entre des voisins turbulents –, transition qui s’est extrêmement bien passée ces dernières années avec le Président Saakachvili, sera maintenue avec le nouveau Premier ministre Ivanichvili, lequel a déjà fait montre d’une certaine précipitation, notamment en demandant la démission du président en charge jusqu’à l’année prochaine ?

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger

Madame la sénatrice, nous venons d’assister à un événement majeur en Géorgie, à travers le processus démocratique réussi des élections législatives du 1er octobre dernier, que vous venez de mentionner.

Ce scrutin s’est déroulé à l’issue d’une campagne marquée par un climat d’extrême tension entre les parties en lice, principalement le Mouvement national unifié du Président Saakachvili et la coalition « Rêve géorgien ».

En revanche, le scrutin s’est tenu dans le calme et dans le respect des règles démocratiques. Le rapport préliminaire d’observation de l’OSCE souligne ainsi que les élections ont été globalement « libres et concurrentielles, malgré quelques difficultés ».

La coalition « Rêve géorgien » a largement remporté le scrutin. Dès le lendemain et sans attendre la proclamation officielle des résultats – cela l’honore –, le Président Saakachvili a reconnu la défaite de son parti.

Pour la première fois depuis le recouvrement de son indépendance en 1991, la Géorgie connaît une alternance démocratique. Les indications données par le chef de la nouvelle majorité laissent penser que la transition devrait être harmonieuse.

M. Ivanichvili a annoncé qu’il se rendra aux États-Unis après l’élection présidentielle américaine. Du reste, le futur chef du gouvernement étant ressortissant français, nous pouvons espérer qu’il tiendra à se rendre en France à court terme, dans le cadre de ses nouvelles fonctions : il sera évidemment le bienvenu.

Bien sûr, s’agissant de la politique que cette coalition compte mener, nous attendons de prendre connaissance des orientations qu’adoptera le nouveau parlement dans les semaines à venir. Nous appelons la nouvelle majorité à poursuivre les réformes que requiert le rapprochement proposé par l’Union européenne à la Géorgie, dans le cadre du partenariat oriental.

Enfin, je note, pour m’en féliciter, que les exercices militaires russes « Caucase 2012 » se sont déroulés sans aucun incident. Les inquiétudes géorgiennes se sont révélées sans fondement.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Madame la ministre, par ma question, je voulais simplement attirer l’attention du Gouvernement sur la situation en Géorgie.

Avec tous les problèmes qui se posent actuellement sur notre planète, du Mali aux printemps qui finissent en automnes arabes, voire en hivers islamiques, votre ministère a beaucoup de sujets de préoccupations.

Néanmoins, il importe que l’on puisse disposer d’une vision globale du Caucase, si prompt à s’enflammer. Cette zone est extrêmement importante non seulement pour la stabilité de la région – les conséquences peuvent être lourdes –, mais aussi pour l’approvisionnement énergétique : vous connaissez comme moi les nombreux pipelines qui la traversent, à l’instar de celui de Bakou-Tbilissi-Ceyhan.

Aujourd'hui, cette zone n’est pas prioritaire parce qu’elle n’est pas en flammes, mais elle n’attend qu’une braise pour s’enflammer.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à Mme Leila Aïchi, auteur de la question n° 133, adressée à M. le ministre des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Madame la ministre, le 27 juillet 2012, les négociations en vue de l’adoption d’un traité sur le commerce des armes ont échoué. L’opposition de dernière minute d’une minorité d’États, réclamant des prolongations, aura eu raison de la conférence de négociations, ouverte le 2 juillet dernier à New York.

La France a été à l’avant-garde de ce combat et je sais, madame la ministre, que la diplomatie française n’a pas ménagé ses efforts pour que la convention soit enfin adoptée.

Hélas ! l’insuccès du processus souligne l’état préoccupant de la maîtrise des armements à l’heure actuelle. Cette situation est d’autant plus inquiétante que grandit la tentation de régler certaines tensions régionales au caractère complexe par une simple affirmation de la force.

Or de telles solutions ne sont pas viables dans la durée. Il faut insister sur l’importance des instruments légaux et encourager ardemment les démarches multilatérales.

Madame la ministre, je suis certaine que vous partagez cette conception des relations internationales. C’est pourquoi ma question porte sur les efforts de la France en matière de maîtrise des armements, notamment sur quatre points qui me semblent les plus urgents.

Premièrement, le traité d’interdiction complète des essais nucléaires – ou TICEN –, adopté en 1996, interdit tout essai nucléaire ou tout autre type d’explosion nucléaire, que ce soit à des fins pacifiques ou militaires, dans quelque environnement que ce soit. Or ce texte n’est toujours pas en vigueur car il faut que les quarante-quatre États mentionnés dans l’annexe 2 du traité le ratifient ; or, à la date du 7 décembre 2011, seuls trente-six d’entre eux l’avaient fait. La Chine, les États-Unis, l’Égypte, l’Iran et Israël, bien que signataires, n’ont pas ratifié le texte. La Corée du Nord, l’Inde et le Pakistan n’ont pas signé le traité. La France doit absolument aider à la relance du processus de signatures et de ratifications.

Deuxièmement, il faut que soient véritablement lancées les négociations d’un nouveau traité de désarmement nucléaire prohibant la production de matières fissiles pour les armes nucléaires, ce traité cut off étant en gestation depuis plus de quinze ans.

Troisièmement, il faut que soient établies des zones exemptes d’armes nucléaires, notamment au Moyen-Orient et en Arctique.

Quatrièmement, enfin, la non-prolifération des vecteurs, notamment des missiles, doit faire l’objet d’un vrai traité, couvrant la plus large gamme possible d’équipements – missiles balistiques, missiles de croisière, etc. –, bien évidemment afin d’éviter la fracture technologique entre le Nord et le Sud.

Madame la ministre, comment la France envisage-t-elle de contribuer à faire progresser les positions de ses partenaires sur ces quatre points ?

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l’étranger

Madame la sénatrice, le Gouvernement a le sentiment que la négociation du traité sur le commerce des armes touche à son but. La France est mobilisée pour reprendre la négociation au début de 2013 et soutiendra la résolution que votera l’Assemblée générale des Nations unies en octobre. Celle-ci devrait convoquer très rapidement une conférence pour finaliser et pour adopter le traité élaboré en juillet dernier.

S’agissant des efforts de la France en vue de l’entrée en vigueur rapide du traité sur l’interdiction complète des essais nucléaires, ou TICE, je vous confirme qu’il s’agit de l’une de nos priorités en matière de désarmement. Depuis que nous avons ratifié ce texte, voilà quatorze ans, nous nous sommes engagés résolument en faveur de son universalisation. En outre, malgré le blocage du processus de ratification, la France contribue de manière active et concrète au développement du système de surveillance international prévu par le traité. La mise en place d’un régime de vérification robuste est en effet indispensable pour assurer la crédibilité du système et convaincre de nouveaux États d’adhérer au TICE.

Pour compléter le dispositif international en matière de désarmement nucléaire, nous travaillons sans relâche à l’ouverture de la négociation d’un traité d’interdiction de la production de matières fissiles pour les armes nucléaires à la conférence du désarmement. L’idée en est simple : il s’agit d’interdire l’accès à la matière première des armes. Nous n’avons pas attendu la conclusion de ces négociations, ni même leur lancement, pour nous engager de façon concrète : en effet, la France a cessé toute production de matières fissiles pour ses armes nucléaires et a démantelé, en toute transparence et de façon irréversible, ses installations de production. En concertation avec nos partenaires, nous ne ménageons pas nos efforts pour convaincre les autres États participants à la conférence du désarmement de rejoindre le consensus pour lancer la négociation d’un tel traité.

Au sujet de l’établissement de zones exemptes d’armes nucléaires et de leurs vecteurs, je vous rappelle que la France, qui est déjà partie à différents protocoles, soutient de longue date ce type d’initiative. L’approche régionale constitue en effet l’une des voies importantes de promotion du désarmement et de la non-prolifération. Nous soutenons le projet de création d’une telle zone au Moyen-Orient et participons aux efforts de préparation d’une conférence réunissant tous les États de la région. Quant à l’Arctique, la création éventuelle d’une zone exempte d’armes nucléaires ne pourra résulter que d’une décision unanime des États de la région. Ce projet soulève des questions complexes touchant au respect des droits et libertés de navigation et de transit reconnus à tous les États par la convention de l’ONU sur le droit de la mer.

Vous avez raison de souligner, enfin, l’importance de la lutte contre la prolifération des vecteurs, dans un contexte où nous devons faire face au développement rapide de certains programmes balistiques et spatiaux. La France est à l’origine de l’adoption, en 2002, du code de conduite de La Haye contre la prolifération des missiles balistiques, un instrument non contraignant mais politiquement engageant qui établit des mesures de confiance et de transparence en matière de lutte contre la prolifération balistique.

Madame la sénatrice, je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de redire l’importance que la France attache à la maîtrise des armements et au désarmement, notamment nucléaire. Toutes les puissances nucléaires doivent faire preuve d’un niveau d’engagement équivalent au nôtre et doivent prendre, comme nous l’avons fait, des initiatives concrètes.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Madame la ministre, je vous remercie de l’intérêt que vous avez porté à la question que je vous ai soumise. Nous comptons sur vous afin que la France mette tous les moyens en œuvre pour accélérer la ratification et l’entrée en vigueur de ces différents traités : telle est en effet, selon moi, la réponse que notre pays doit apporter dans le contexte international tendu que nous connaissons aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. André Ferrand, auteur de la question n° 78, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances, chargé du budget.

Debut de section - PermalienPhoto de André Ferrand

Madame la ministre, vous le savez aussi bien que moi, la France s’enorgueillit de disposer d’un réseau d’enseignement à l’étranger très performant. Ce réseau connaît un développement exceptionnel au service tant de notre présence économique, c’est-à-dire de nos entreprises, que de notre influence, en formant des élèves étrangers.

Les établissements de ce réseau, en général très dynamiques, ont compris qu’il leur fallait s’autofinancer autant que possible, car ils savent que l’argent public est rare. Ils assument donc, dans la mesure de leurs possibilités, leurs frais de personnel.

Cependant, pour que leur enseignement reste de qualité, il faut que ces établissements disposent de personnels qualifiés, donc d’enseignants titulaires de l’éducation nationale. Or, de façon incompréhensible, le ministère du budget plafonne les affectations d’enseignants titulaires de l’éducation nationale dans le réseau d’établissements français à l’étranger, alors que ce réseau est prêt à assumer en totalité le coût de la rémunération de ces enseignants.

Madame la ministre, telle est la raison pour laquelle j’ai été amené à adresser cette question à votre collègue ministre délégué au budget : pourquoi limite-t-il le développement de notre réseau d’enseignement français à l’étranger – alors que le coût de ce développement est nul pour le contribuable – en plafonnant le nombre de titulaires de l’éducation nationale détachés dans les établissements de ce réseau ?

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l’étranger

Monsieur le sénateur André Ferrand, je tiens à vous remercier pour cette question qui montre votre attachement à notre réseau d’enseignement à l’étranger. Vous l’aviez adressée à M. le ministre délégué chargé du budget, mais vous ne m’en voudrez pas de vous répondre à sa place ; en effet, comme vous le savez, j’attache la plus grande importance à la scolarisation en français des enfants de nos compatriotes à l’étranger.

Cette question fondamentale, primordiale et même stratégique pour l’influence de notre pays et le développement des communautés expatriées me tient particulièrement à cœur. Le ministre des affaires étrangères m’a d’ailleurs remis une lettre de mission concernant les enjeux du développement de notre politique scolaire à l’étranger dont la double fonction – scolarisation des enfants français et mission d’influence – doit être maintenue.

La question du plafond des emplois que vous soulevez concerne non seulement le ministère des affaires étrangères et le ministère du budget, mais également le ministère de l’éducation nationale. Recevant les parlementaires représentant les Français de l’étranger le 27 août, M. le Premier ministre a demandé à ces trois ministères d’étudier ensemble ce sujet, ce que nous faisons, respectant en cela la priorité donnée à la jeunesse et à l’éducation par le Président de la République.

Le gouvernement précédent avait diminué le nombre d’emplois autorisés pour l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE. Cette mesure s’est traduite par une baisse nette de 59 emplois sous plafond entre 2010 et 2012, qui s’ajoutait à la transformation de 130 emplois d’expatriés en postes de résidents en 2009-2010. Cette décision, prise en application de la révision générale des politiques publiques, alors que les effectifs des enfants scolarisés augmentaient déjà fortement, avec une croissance annuelle de l’ordre de 4 000 à 5 000 élèves par an pendant les cinq dernières années, a eu pour conséquence une baisse du taux d’encadrement des élèves. Nous sommes tous d’accord pour reconnaître que cette évolution n’est pas soutenable financièrement. Alors que faisons-nous ?

Tout d’abord, le projet de loi de finances pour 2013 prévoit une augmentation de la subvention de l’AEFE de 5, 5 millions d’euros. Par ailleurs, les emplois sous plafond sont stabilisés à 6 353 équivalents temps plein, ou ETP, pour la période allant de 2013 à 2015. Ensuite, l’Agence a l’autorisation d’augmenter le nombre des emplois pris en charge à 100 % par les établissements, que l’on appelle emplois « hors plafond ». Ces effectifs pourront augmenter de 95 ETP en 2013, dont 20 postes d’enseignants résidents, puis de 100 ETP supplémentaires en 2014 et en 2015, dont 20 postes d’enseignants résidents chaque année.

Les effectifs « hors plafond » vont donc être portés respectivement à 4 561 ETP en 2013, à 4 661 ETP en 2014 et à 4 761 ETP en 2015. Ces emplois permettront à l’Agence de commencer à déployer les moyens humains complémentaires, indispensables à l’accompagnement de la croissance du réseau.

Debut de section - PermalienPhoto de André Ferrand

Madame la ministre, je tiens à vous remercier de votre réponse et à saluer votre engagement personnel bien connu en faveur de l’enseignement français à l’étranger.

Vous avez évoqué les décisions prises par le gouvernement précédent en termes de plafond d’emplois, mais il faut rappeler que, dans le contexte de l’époque, ces emplois représentaient un coût pour le contribuable : le déplafonnement n’était pas « gratuit », si j’ose dire. Ce contexte a complètement changé aujourd’hui : les établissements demandent l’affectation d’enseignants titulaires de l’éducation nationale qui ne coûteront pas un sou à l’État, puisque leur rémunération est totalement prise en charge, les parents d’élèves y participant à l’étranger.

Madame la ministre, vous nous avez annoncé que le budget pour 2013 prévoyait une augmentation des postes « hors plafond ». C’est bien ! Mais pourquoi maintenir ce plafonnement des emplois, puisque les établissements prennent des initiatives pour faire rayonner la langue et la culture françaises à l’étranger, sans que cela ait le moindre coût pour le budget ?

Je sais que nous sommes d’accord sur le fond, puisque nous menons ensemble ce combat, madame la ministre, mais je souhaiterais que votre collègue chargé du budget admette cette idée et fasse un pas dans notre direction !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mes chers collègues, avant d’aborder la question orale suivante, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix heures vingt-cinq, est reprise à dix heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Michel Bécot, auteur de la question n° 65, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bécot

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le devenir du projet d’investissement porté par le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres.

Au 1er janvier 1996, les trois hôpitaux de Bressuire, de Parthenay et de Thouars fusionnent administrativement. Après de nombreuses années d’études et l’adoption du projet d’établissement en 2007, le regroupement sur un site unique des activités de médecine, de chirurgie, d’obstétrique et d’un plateau médico-technique est acté en un lieu d’implantation en position centrale pour l’ensemble du Nord Deux-Sèvres.

Ce projet de restructuration du centre hospitalier Nord Deux-Sèvres doit permettre une meilleure prise en charge des patients, une garantie de sécurité et de qualité de soins ainsi qu’une meilleure efficience de fonctionnement.

Finalisé fin 2009, début 2010, ce projet, dont l’inscription au plan Hôpital 2012 a été reportée à maintes reprises, a obtenu un avis favorable de l’agence régionale d’hospitalisation – ARH – puis de l’agence régionale de santé – ARS – de Poitou-Charentes.

Les terrains nécessaires à la construction du nouveau site hospitalier sur la commune de Faye-l’Abbesse ont été acquis en juillet 2010. En mars 2012, un accord de principe pour le financement de la construction de ce nouvel hôpital, au titre du plan d’aide à l’investissement Hôpital 2012, a été acté par votre prédécesseur. L’ARS de Poitou-Charentes a été invitée à calibrer au mieux le dimensionnement de cet investissement.

À ce jour, tous les acteurs de cette opération sont en attente, que ce soit le constructeur dont le projet a été retenu en mai 2012, les équipes hospitalières, les partenaires externes de santé et la population du Nord Deux-Sèvres.

Aussi, madame la ministre, je vous demande de bien vouloir m’informer de l’évolution de ce dossier et m’indiquer dans quels délais les travaux pourront commencer.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur le devenir du projet d’investissement porté par le centre hospitalier Nord Deux-Sèvres.

Je sais l’attachement, légitime, de l’ensemble des élus locaux à la réalisation de ce projet et je tiens d’ailleurs à saluer le très important travail qu’ils ont pu réaliser ensemble.

Comme vous l’avez vous-même rappelé, l’agence régionale de santé de Poitou-Charentes a retravaillé les paramètres de ce projet, tant en termes financiers qu’en termes de dimensionnement de l’investissement.

À ce jour, le projet se fonde notamment sur une mutualisation importante de trois plateaux techniques. Il se fixe en outre comme ambition le développement de la médecine ambulatoire et le renforcement des partenariats avec les structures médico-sociales. Il vise enfin à améliorer l’offre de soins sur un territoire qui est incontestablement marqué par un sous-recours aux soins en médecine, mais également à améliorer la qualité, la sécurité et l’efficience des soins. Il s’appuie sur une ambition forte et présente à ce titre les signes d’une démarche qui favorise la cohérence de l’offre territoriale de soins.

Les raisons ayant amené l’agence régionale de santé à retravailler le projet qui était présenté sont essentiellement d’ordre financier. Cette redéfinition se fonde sur un certain nombre d’éléments techniques.

Je veux évoquer l’augmentation de l’activité, des économies de près de 3, 5 millions d’euros, des cessions de terrains à hauteur de 3 millions d’euros, ainsi qu’une aide de l’État en capital de 45 millions d’euros et une aide à la contractualisation annuelle de 1, 5 million d’euros pendant vingt ans.

Néanmoins, la situation financière de cet établissement, qui est aujourd’hui placé sous contrat de retour à l’équilibre, reste dégradée du fait d’un déficit structurel datant de 2005 et qui n’a pas été résorbé depuis. La durée de cinquante ans prévue pour les amortissements en construction pourrait fragiliser la pérennité de l’établissement, alors même que sa nouvelle configuration présente d’incontestables atouts.

Comme vous le savez, nos ressources nationales en termes d’investissement sont limitées. Un réexamen global des projets est donc engagé, comme je l’ai déjà indiqué à plusieurs reprises, un certain nombre de projets ayant été annoncés sans que les financements nécessaires soient prévus. Il s’agit à la fois de soutenir les projets et de faire une revue de l’ensemble de ceux qui sont présentés. Le projet que vous évoquez fait partie de ceux qui sont actuellement examinés au niveau national dans le cadre de cette procédure.

Je tiens cependant à souligner que le Gouvernement, en fixant l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, à 2, 7 % pour l’année prochaine, marque sa volonté non seulement de faire de la santé et de l’hôpital public une priorité, mais également de mobiliser des ressources nouvelles pour soutenir l’investissement et retenir des projets territorialement utiles.

C’est dans cette perspective, avec les éléments que je vous indiquais, que nous sommes en train de travailler de façon extrêmement ouverte et positive avec l’agence régionale de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bécot

Madame la ministre, j’ai entendu vos arguments. N’oublions pas que ce projet, évalué à 100 millions d’euros, rapportera grosso modo 20 millions d’euros de TVA. Certes, je le sais bien, les sommes issues de la récupération de TVA vont au budget général de l’État et pas forcément à la santé. Néanmoins, je considère que l’on pourrait lancer le projet dès aujourd'hui au lieu de le retarder, puisqu’il ne coûtera rien à l’État avant 2019.

Quoi qu’il en soit, il y a urgence, madame la ministre, et il est sans doute possible de trouver des solutions.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jean-Pierre Chauveau, auteur de la question n° 80, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chauveau

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, les effets pervers du développement des pratiques d’emplois médicaux temporaires sont régulièrement décriés.

Comme le soulignait, dès 2003, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, l’usage par les centres hospitaliers d’emplois médicaux temporaires peut conduire à de graves dérives.

Il ne s’agit pas de confondre ces emplois avec les postes occupés par des praticiens contractuels, mais il faut souligner les abus du statut de ceux qui, dans le monde hospitalier, sont surnommés « les mercenaires ».

En raison des déficits en personnels médicaux, certains professionnels s’inscrivent dans de véritables agences d’intérim – en réalité, des sociétés de placement – pour effectuer des remplacements ponctuels et obtenir de très importantes rémunérations.

Alors que nos hôpitaux publics sont soumis à de très fortes contraintes budgétaires, il est paradoxal de constater l’existence de telles pratiques. Certes, cette situation trouve son origine dans la démographie des professions médicales et dans les aménagements du temps de travail – ARTT, temps de repos, équivalence du temps de travail et du temps de garde, etc. –, il n’en demeure pas moins que ces irrégularités existent et qu’elles dépassent les limites acceptables.

Dernièrement, un exemple a été porté à ma connaissance : certains professionnels travaillent à temps partiel ou à temps plein dans des hôpitaux et viennent, en plus, effectuer des heures pendant leurs congés ou leurs RTT ! Pour être plus précis, certains médecins n’acceptent pas de faire des heures supplémentaires dans un cadre salarial normal – 400 euros par mois –, mais interviennent sur leur lieu de travail par l’intermédiaire de sociétés de placement – 800 euros la journée –, au détriment du budget de l’établissement.

Cet exemple concerne un centre hospitalier qui m’est cher, mais qui accuse actuellement un fort déficit - près de 28 millions d’euros - et auquel les « mercenaires » coûtent près d’un demi-million d’euros par an ! Je pense ici au centre hospitalier intercommunal Alençon-Mamers, qui attend très prochainement une décision financière afin de consolider sa situation budgétaire.

Plus généralement, comme on le souligne dans le rapport précité, « il est banal de constater que les missions de courte durée ne favorisent pas la construction d’un travail d’équipe » et que « placés devant la nécessité de pourvoir le poste vacant, le directeur et le chef de service peuvent être conduits à des solutions n’offrant pas toutes les garanties de qualité. Dans certains cas, l’établissement recrute un médecin qui satisfait aux conditions d’exercice prévues par les textes, mais dont la notoriété professionnelle n’aurait pas conduit l’établissement, s’il en avait le choix, à retenir sa candidature. »

Alors que la grande majorité des hôpitaux français doivent faire face à une situation financière très difficile, le problème des mercenaires constitue une piste, un gisement pour réaliser des économies sans déséquilibrer le fonctionnement des établissements, car, force est de le reconnaître, le problème de l’absence de titulaires n’est pas le même dans les petites villes de l’ouest ou du centre de la France et dans les grandes métropoles du Sud-Est.

Dans ces conditions, je souhaiterais connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre pour contrôler ces pratiques, sanctionner les abus et mettre un terme à ces dérives inquiétantes.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le sénateur, vous avez souhaité attirer mon attention et celle du Gouvernement sur certaines pratiques au sein des établissements publics de santé où il est fait appel à des praticiens qui viennent effectuer des remplacements ponctuels fortement rémunérés, au mépris parfois de la réglementation applicable.

Globalement, les dépenses de personnels médicaux intérimaires ont représenté 0, 71 % en 2009 et 0, 72 % en 2010 du total des dépenses de personnels médicaux. On ne peut pas parler de réelle progression, mais il est vrai que ces dépenses représentent un montant significatif.

Ce chiffre global ne doit pas masquer la réalité : les difficultés se concentrent sur certains établissements, qui rencontrent de graves problèmes de recrutement.

C’est pourquoi je souhaite travailler sur l’attractivité des carrières hospitalières et la fidélisation des personnels médicaux.

J’ai ainsi lancé, lors de la concertation sur l’élaboration d’un pacte de confiance pour l’hôpital public, un ensemble de travaux sur l’amélioration de la qualité de l’exercice médical à l’hôpital public, avec notamment pour objectif de réduire le plus possible le recours aux emplois médicaux temporaires.

Je suis consciente que ces dérives ne vont pas disparaître à très court terme et qu’il ne sera pas facile de les limiter. C’est la raison pour laquelle je rappelle que le recours à ces emplois est encadré et que les règles en la matière doivent être respectées.

Le décret du 29 septembre 2010 portant dispositions relatives aux praticiens contractuels, aux assistants, aux praticiens attachés et aux médecins, pharmaciens et chirurgiens-dentistes recrutés dans les établissements publics de santé, pris en application de l’article 5 de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, a permis l’encadrement du recours par les établissements publics de santé aux praticiens recrutés pour une courte durée, c’est-à-dire pour une durée inférieure à trois mois.

Cet encadrement est réalisé par une double mesure : d’une part, la fixation d’une proportion à respecter entre le volume des praticiens temporaires et celui des praticiens titulaires ou recrutés pour une durée supérieure à trois mois dans une même activité et une même structure ; d’autre part, l’obligation pour les établissements de transmettre au directeur général de l’agence régionale de santé un état semestriel des recrutements temporaires. Le directeur général de l’ARS peut ainsi réaliser un contrôle a posteriori du volume d’emploi de personnels temporaires et, le cas échéant, remettre en cause l’autorisation d’activité lorsque la continuité des soins paraît compromise par un important recours aux emplois médicaux de courte durée.

Les verrous existent donc. L’intervention a posteriori, dans le cadre de contrôles identifiés, de la part de l’Agence régionale de santé, permet de mieux réguler le recours à ces emplois temporaires, en attendant que des mesures plus structurelles nous permettent de répondre à la question de fond que pose le recours, parfois systématique, à ces emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chauveau

Madame la ministre, les petits hôpitaux tels que les nôtres – je pense au centre hospitalier intercommunal créé avec la ville d’Alençon – ont énormément de difficultés à recruter des médecins. Souvent, ce n’est qu’à la dernière minute que l’on arrive à pallier une absence.

Il arrive même que des médecins exerçant à l’hôpital centre d’Alençon se permettent de passer par une agence d’intérim lorsqu’ils interviennent à Mamers. Cela me semble tout à fait anormal.

J’espère donc que les travaux que vous avez lancés permettront, indépendamment des relations que nous avons avec l’ARS, de régler ce problème, qui nous pose d’importantes difficultés financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Bruno Retailleau, auteur de la question n° 81, adressée à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, ma question porte sur la situation pénitentiaire dans le département de la Vendée. La situation y est déplorable, comme vous le savez sans doute, madame la ministre.

Le département compte deux établissements pénitentiaires ; l’un est situé à La Roche-sur-Yon, le chef-lieu, l’autre à Fontenay-le-Comte, dans le sud de la Vendée. Il s’agit de deux petites unités à taille humaine. Interrogés, les personnels pénitentiaires soulignent à quel point la taille de l’établissement est importante.

Lorsqu’on visite ces deux établissements, ce que j’ai fait, on se rend compte très rapidement de leur extrême vétusté, mais aussi et surtout de l’ampleur de la surpopulation carcérale. Ainsi, ce que l’on appelle de façon un peu inélégante le « taux de surencombrement » est supérieur à 240 % à La Roche-sur-Yon et supérieur à 200 % à Fontenay-le-Comte. De telles conditions d’incarcération, vous en conviendrez, madame la ministre, vous qui êtes très attachée à la dignité des détenus, sont précisément indignes, et inacceptables.

L’administration est contrainte d’installer le soir, dans les cellules, un matelas supplémentaire à même le sol afin de pouvoir faire vivre – ou survivre, serait-on plutôt tenté de dire – trois ou quatre détenus dans quelques mètres carrés. Dans quelques mètres carrés, madame la ministre !

Mais si de telles conditions ne sont pas admissibles pour les détenus, elles ne le sont pas plus pour le personnel pénitentiaire, qui souffre lui aussi de la surpopulation carcérale.

Depuis quelques années, nous travaillons beaucoup sur cette question. À l’issue de réunions auxquelles mon collègue Jean-Claude Merceron et moi-même avons participé, Michel Mercier, votre prédécesseur, avait pris l’engagement écrit, par courrier en date du 15 décembre dernier, de faire procéder à la modernisation de ces deux petites unités, que nous souhaitons garder, car elles sont à échelle humaine.

Je rappelle que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté lutte contre l’industrialisation des conditions de détention des détenus, dont il dit dans chacun de ses rapports qu’elle est déplorable.

Par ailleurs, l’ancien garde des sceaux s’était engagé à créer un centre de détention pour courtes peines à Fontenay-le-Comte. C’était important pour ce bassin qui, vous le savez très bien, est fortement touché par la crise économique. L’annonce du maintien du site de Fontenay-le-Comte et du développement d’un service public important avait constitué une réelle bonne nouvelle.

Or, lors de la présentation de votre budget, au mois de septembre, madame la ministre, vous avez indiqué que votre objectif était de créer 63 000 places de prison supplémentaires, et non plus 80 000, comme cela était prévu dans la loi de programmation votée en mars. Nous craignons donc que le projet dont votre prédécesseur nous avait confirmé la mise en œuvre n’en soit affecté.

Ma question est simple, madame la ministre : maintenez-vous l’engagement pris par votre prédécesseur, c'est-à-dire finalement par l’État ?

Je peux vous assurer que si l’on annonçait demain soit que l’un des deux établissements ferme, soit que le centre de détention pour courtes peines ne se fera pas à Fontenay-le-Comte, ce serait une véritable catastrophe pour la population.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur le sénateur, j’apprécie le contenu et la qualité de votre question. Je sais que vous vous préoccupez de la situation pénitentiaire en Vendée depuis que vous êtes aux responsabilités, comme je sais que votre intérêt pour la question des prisons va au-delà de votre propre département.

Vous avez rappelé les taux de suroccupation des deux établissements existants, celui de La Roche-sur-Yon et celui de Fontenay-le-Comte, qui sont respectivement – les chiffres sont terribles – de 240 % et 200 %.

Pour ma part, j’ai visité des établissements de plusieurs types, notamment des maisons d’arrêt mais pas uniquement, et je sais ce que signifient les taux d’occupation. J’envoie d’ailleurs mon cabinet et mon administration effectuer de telles visites sur le terrain, afin que chacun prenne bien la mesure du problème et se rende compte que nous traitons non pas simplement des dossiers, mais bien des réalités humaines et professionnelles d’autant plus difficiles qu’elles sont vécues au quotidien.

Je vous rappelle qu’un certain nombre de travaux de rénovation ont déjà été effectués dans ces deux établissements.

Ainsi, à La Roche-sur-Yon, le quartier des arrivants a été aménagé. Des travaux de chaufferie ont été effectués. La TNT a été mise en place et l’unité de consultation et de soins ambulatoires a été restructurée et agrandie. Au total, les crédits consacrés à ces travaux s’élèvent à près de 400 000 euros.

Les prisons dont nous parlons sont, en effet, à taille humaine. Afin que chacun prenne bien la mesure de ce que représente un taux d’occupation de 240 %, je rappelle que, alors que l’établissement de La Roche-sur-Yon dispose de quarante places, réparties en une trentaine de cellules, il accueille quatre-vingt-dix détenus. C’est effectivement très lourd.

La maison d’arrêt de Fontenay-le-Comte a également fait l’objet de travaux. Ont été ainsi financés la mise en place de caillebotis, des travaux de mise en conformité électrique, la mise en place de la TNT, l’installation de la détection incendie – c’est dire l’état de vétusté de ces établissements – et la rénovation de l’atelier de formation. Au total, près de 405 000 euros ont été consacrés à ces travaux.

Cet établissement, qui compte trente-neuf places, réparties en vingt-huit cellules, accueille quatre-vingt quatre détenus.

J’en viens maintenant aux engagements de mon prédécesseur. Vous évoquez une lettre du mois de décembre, monsieur le sénateur. Celle dont je dispose date du 16 janvier, mais le contenu est probablement le même. C’est peut-être juste une question de tampon dateur !

Dans cette lettre, Michel Mercier vous confirmait que des travaux de modernisation seraient entrepris dans les établissements de La-Roche-sur-Yon et de Fontenay-le-Comte. En revanche, il n’y mentionne pas du tout l’implantation d’un établissement pénitentiaire de 300 places en Vendée.

Certes, mon prédécesseur évoque la construction d’un établissement pour courtes peines dans la ville de Fontenay-le-Comte, mais, et j’en suis désolée, monsieur le sénateur, aucune budgétisation n’a été prévue, aucune étude n’a été effectuée le concernant. J’ai d’ailleurs demandé à l’administration pénitentiaire de s’en charger.

Au-delà, vous savez bien que pas un euro n’a été budgétisé pour les 23 000 places de prison qui devaient être construites pour atteindre l’objectif de 80 000 places fixé dans la loi pénitentiaire d’avril 2012.

En revanche, j’ai obtenu une augmentation du budget prévu pour les travaux de réhabilitation et de rénovation des établissements. Ce budget passe ainsi de 55 millions d’euros à 66 millions d’euros. Nous aurons donc les moyens de procéder à la rénovation des établissements vétustes afin que détenus et personnels pénitentiaires puissent, dans la dignité, les uns y être pris en charge, les autres y travailler avec efficacité.

Ces établissements feront l’objet des travaux de rénovation complémentaires nécessaires. Pour le reste, on ne peut pas considérer que prévoir la construction de 23 000 places supplémentaires sans mettre un euro en face constitue un engagement de l’État. Pour ma part, j’ai une conception plus noble de la parole de l’État !

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Le courrier dont je dispose date bien du 15 décembre, mais peu importe. C’est sûrement une affaire de tampon dateur, comme vous l’indiquez.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

De votre réponse, je tire deux conclusions.

J’en déduis d’abord que des travaux de modernisation seront bien effectués à La Roche-sur-Yon et à Fontenay-le-Comte. C’est une bonne chose.

J’en déduis ensuite, et cela ne me convient pas, que l’unité pour courtes peines – il ne s’agissait pas d’un établissement de 300 places – ne verra pas le jour.

Madame la ministre, vous ne pouvez pas dire qu’une loi de programmation doit budgétiser, vous connaissez trop bien le principe de l’annualité budgétaire. Une loi de programmation sur cinq ans doit prévoir des crédits, mais les crédits sont inscrits dans le projet de loi de finances année après année.

Le directeur de l’administration pénitentiaire m’avait envoyé un courrier, le 22 mars dernier, dans lequel il m’indiquait étudier l’implantation d’un établissement pour courtes peines. Je sais que vous vous intéressez à l’insertion et à la réinsertion des détenus, madame la ministre ; vous savez donc que ces établissements sont des vecteurs extraordinaires de réinsertion.

Fontenay-le-Comte est l’un des bassins les plus concernés par la crise dans notre région, où plusieurs usines ont fermé.

La création d’un centre pour courtes peines était une bonne nouvelle. Certes, elle nous avait été annoncée par le précédent gouvernement, mais peu importe. Vous représentez l’État, madame la garde des sceaux. L’intérêt général n’est ni de droite ni de gauche. La création d’un tel centre dans un secteur frappé par le chômage est une mesure d’intérêt général ; ce n’est pas une affaire politique. Le député-maire socialiste de Fontenay-le-Comte est totalement d’accord avec nous, vous pouvez l’interroger, tout simplement parce que c’est une affaire de bon sens.

Je vous en supplie, ne décevez pas la population !

Je vous demande donc, madame la garde des sceaux, de bien vouloir remettre l’ouvrage sur le métier et d’accepter d’étudier l’implantation d’un centre de détention pour courtes peines de 150 places. Cela serait bon pour l’insertion des détenus comme pour l’emploi local.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jean-Étienne Antoinette, auteur de la question n° 108, adressée à M. le ministre de la défense.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Étienne Antoinette

Les mois de juillet et août 2012 ont vu de multiples agressions et d’actes de piraterie perpétrés sur nos marins par des pêcheurs venus du Surinam, du Venezuela ou du Brésil, créant ainsi un émoi considérable parmi nos concitoyens.

Comme pour les ressources minières dans les terres, le pillage des ressources halieutiques des eaux territoriales et intérieures est un phénomène – hélas ! – connu en Guyane.

De même que la tragédie de Dorlin, les actes de piraterie contre les pêcheurs guyanais par des marins venus des pays voisins constituent le franchissement d’une étape inadmissible dans la gradation des violences pour l’accès aux richesses de la Guyane.

La marine nationale et la gendarmerie maritime ont su réagir en intensifiant la lutte contre la pêche illégale, arraisonnant plus de 35 navires étrangers, rejetant 20 tonnes de poissons à l’eau et détruisant 43 kilomètres de filets dans la zone économique exclusive française au large de la Guyane, le tout en moins de deux mois.

Cependant, cette action récente n’est pas représentative du potentiel d’intervention dont la Guyane pourrait bénéficier : les P400 de la marine nationale ne participent que très peu à la lutte contre la pêche illégale, car le coût de leur engagement en mer réduit à moins de 80 jours par an leur temps en opération. En outre, ils sont chargés davantage de la sécurité des tirs du lanceur spatial que du contrôle des pêches.

Ensuite, l’action de la gendarmerie a évolué depuis trois mois. Pour pallier le manque de matériel et être plus présentes en mer, les vedettes de la gendarmerie maritime ne déroutent plus les navires étrangers. Elles les raccompagnent seulement à la frontière après avoir détruit leurs filets et leurs cargaisons.

Les navires de plus gros tonnage, réalisant une pêche industrielle, résistent et ne sont toujours pas inquiétés. Les règles d’engagement sont telles que les gendarmes refusent de se porter au contact. Même lors d’importantes opérations conjointes avec la marine nationale, les hommes du GIGN peuvent se trouver en situation extrêmement délicate.

À moins de « muscler » notre capacité de réponse et de la porter jusque dans le camp des délinquants, le pillage des ressources halieutiques de Guyane, à l’instar des ressources minières, ne prendra jamais fin.

Parallèlement, on assiste à l’extension impressionnante de la zone maritime Antilles. Elle reste sous l’autorité des forces armées des Antilles, mais dans leur format actuel, qui est maintenu. La zone maritime Guyane, quant à elle, se recentre sur sa zone économique exclusive.

À l’heure de la rédaction du Livre blanc sur la défense, il apparaît ainsi que l’efficacité de la présence des forces maritimes dans les outre-mer doit être une priorité.

Se pose alors la question des moyens pour assurer les missions de défense sur le territoire maritime de la France dans cette région.

Les navires dont nous avons salué l’engagement des équipages ont trente ans d’âge. Dans la zone, deux P400 ont été désarmés, et, s’il en reste encore en Guyane, la force des Antilles s’est vu amputer d’un bâtiment de transport léger, ou Batral, lui aussi âgé de plus de trente ans.

Aujourd’hui, on parle d’un navire chaland, permettant de récupérer les filets laissés en mer, et dont le financement, interministériel serait assuré par les ministères de la défense et des outre-mer, ainsi que par le secrétariat général de la mer. Qu’en est-il réellement ? Quand ce navire sera-t-il disponible ?

Les missions de l’armée en Guyane, du contrôle de la zone du centre spatial jusqu’aux luttes contre les pêches illégales et l’orpaillage clandestin, requièrent des systèmes d’information sophistiqués. Est-il possible qu’un drone de reconnaissance soit affecté aux forces armées en Guyane ?

La question des moyens, vous le voyez, est au cœur de la problématique.

Hier et aujourd’hui se confondent, puisque nous faisons face à un seul et même problème : la souveraineté nationale et la défense du territoire.

Comment comptez-vous conserver les ambitions de la France en Guyane, protéger ses intérêts et assurer l’avenir de sa population ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur le sénateur, votre question s’adresse à M. le ministre de la défense qui, retenu, m’a demandé de vous présenter ses excuses personnelles et de vous communiquer les éléments de réponse qu’il a fait préparer. Si vous avez des observations à faire sur la base de ces derniers, je me ferai un devoir de les transmettre à mon collègue.

Monsieur le sénateur, nous sommes tous les deux bien placés pour savoir l’importance des 11 millions de kilomètres carrés que représente l’espace maritime des outre-mer. Ils permettent à la France de se situer au deuxième rang des puissances maritimes mondiales. Ils offrent surtout de formidables potentialités en matière de pêche, d’hydrocarbure offshore ou d’énergie marine renouvelable.

Il est important que l’État exerce sa souveraineté sur ce patrimoine considérable, et qu’il soit en mesure d’assurer de bonnes conditions pour l’exercice des activités économiques dans cet espace.

Vous avez eu raison d’évoquer les moyens qui sont mis à disposition pour ce faire. Vous l’avez dit, ils ont été réduits ces dernières années, notamment dans le cadre du Livre blanc de 2008.

Fréquemment interpellé par les élus sur ce sujet – vous compris, monsieur le sénateur – l’État s’est néanmoins rendu compte qu’il était important de reconsidérer ces décisions.

C’est ainsi que, à l’été 2011, une réunion interministérielle a abouti à l’affectation de nouveaux moyens.

Vous le savez probablement, vous qui suivez ces questions de près, il a été décidé d’affecter trois bâtiments de type « supply » aux Antilles, à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française, ainsi que deux patrouilleurs légers à faible tirant d’eau à la Guyane.

Ces divers moyens seront disponibles dans les toutes prochaines années, entre 2013 et 2014 pour les bâtiments de type supply, et entre 2014 et 2015 pour les deux patrouilleurs.

S’agissant de la Guyane, le dispositif actuel sera maintenu, puisque les deux patrouilleurs commandés remplaceront les P400 existants à l’horizon 2016-2017. Notez également que la coordination des moyens maritimes est élargie à la zone Antilles-Guyane, même si, vous comme moi, nous aurions préféré que la base soit en Guyane, étant donné l’importance de son territoire terrestre et marin.

M. Jean-Étienne Antoinette sourit.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Vous avez eu raison de mentionner les moyens dont dispose la marine pour faire face à la pêche illégale en Guyane. Sachez qu’elle va renforcer les équipages des patrouilleurs, de façon à permettre une plus grande permanence dans la police des pêches. L’acquisition d’une barge remonte-filets par les administrations concernées a été décidée en réunion interministérielle, afin de s’attaquer à la logistique et aux outils mêmes de cette activité de pillage de nos richesses.

Vous l’avez dit avec beaucoup de mesure, monsieur le sénateur, mais nous savons à quel point la pêche illégale met en péril la sécurité et l’activité des agents économiques.

Voilà pour l’état des lieux. Le ministre de la défense me charge de vous informer que le délégué général à l’outre-mer participe aux réunions de travail de la commission du Livre blanc. Vous pouvez donc, éventuellement, faire remonter vos observations et vos propositions par son intermédiaire.

M. le ministre me charge également de vous indiquer que sa réflexion s’appuiera sur trois principes : l’adaptation, la polyvalence et l’autonomie.

L’adaptation, d’abord, parce que chaque département ou territoire en outre-mer a ses caractéristiques propres. Vous me pardonnerez d’insister sur un fait qui, en soi, nous ravit, monsieur le sénateur : le territoire terrestre de la Guyane représente plus de 91 000 kilomètres carrés et son territoire marin près de 300 000 kilomètres carrés, depuis que le plateau continental a été étendu sur décision de l’Organisation des Nations unies. L’adaptation aux territoires est donc nécessaire, car ils ne présentent pas tous les mêmes caractéristiques géographiques, bathymétriques, météorologiques ni ne partagent les mêmes activités économiques.

La polyvalence, ensuite, parce que l’on ne peut pas se contenter d’une seule famille de plateformes, compte tenu de la diversité des missions à exécuter.

L’autonomie, enfin, considérée sous ses divers aspects – maintenabilité, endurance – s’explique par la distance à couvrir.

C’est sur la base de ces trois principes que le ministre de la défense s’engage à tirer les conséquences du futur livre blanc. Il tenait à vous en faire part et à vous rappeler que, naturellement, toutes vos propositions seront les bienvenues, monsieur le sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Étienne Antoinette

J’ai pris bonne note de ces éléments de réponse préparés par M. le ministre de la défense.

Nous le savons, à l’insécurité sur l’océan s’ajoute une autre insécurité, sur le territoire, à l’intérieur du pays, notamment dans les zones d’orpaillage, mais aussi, de plus en plus, en zone urbaine.

Madame la ministre, là où les gouvernements successifs ont échoué, le nôtre n’a pas le droit de décevoir !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Nous y veillerons !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Hilarion Vendegou, auteur de la question n° 93, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Hilarion Vendegou

Sur l’ensemble du territoire et quel que soit le gouvernement, l’enseignement est l’objet de toutes les attentions. En Nouvelle-Calédonie, vous le savez, nous sommes tous très attachés à nos écoles, à nos collèges et à nos lycées. Le niveau d’éducation des générations futures nous importe au plus haut point.

Aussi, vous comprendrez notre inquiétude, madame la garde des sceaux, quant à l’accompagnement financier que l’État consentira à fournir dans ce domaine précis, dans le cadre du transfert des compétences prévu par les accords de Nouméa.

Les titulaires du CAPES et les agrégés viendront-ils toujours en Nouvelle-Calédonie ? Nous avons besoin de leurs compétences et nous recherchons leur niveau de qualification. Aussi, pourriez-vous nous dire, madame la garde des sceaux, ce que le Gouvernement envisage de faire en la matière ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur le sénateur, votre question s’adresse à M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Retenu, M. le ministre m’a demandé de vous transmettre sa réponse.

Il me prie de vous rappeler que 77 000 postes ont été supprimés au cours des cinq dernières années dans l’éducation nationale. Pour la seule rentrée 2012, 14 000 suppressions avaient été programmées. Le gouvernement actuel, prenant la mesure de l’importance de l’enseignement et de la nécessité de la présence des enseignants dans les établissements scolaires, notamment dans les territoires où la vitalité démographique est réelle, a rapidement pris des dispositions.

Il a ainsi organisé une concertation qui, lancée au début du mois de juillet 2012, a abouti à la confection d’un rapport, remis le 9 octobre dernier au Premier ministre et au Président de la République. Le Gouvernement a tenu à consulter l’ensemble de la communauté éducative.

Pour ce qui concerne plus particulièrement la Nouvelle-Calédonie, le Gouvernement a tenu à être au rendez-vous de la rentrée 2012, dans le cadre, vous l’avez rappelé, du transfert de nouvelles compétences prévu par les accords de Nouméa. Les compétences en matière d’enseignement du premier degré public ayant déjà été transférées, sont venues s’y ajouter les compétences concernant l’enseignement secondaire public et privé, l’enseignement primaire privé et la santé scolaire.

Un plan d’urgence a donc été établi pour la Nouvelle-Calédonie. Pour les matières les plus déficitaires – lettres, mathématiques, anglais ou EPS – des dispositions spéciales ont été prises.

Sur l’ensemble du territoire national, 1 000 postes ont été créés pour l’école primaire, et la Nouvelle-Calédonie en prend sa part.

Des mesures importantes ont été prises pour les collèges et les lycées. En effet, 280 enseignants supplémentaires ont été recrutés dans le second degré, ainsi que 2 000 assistants d’éducation.

Les mesures correctives prises dès cette rentrée scolaire pour la Nouvelle-Calédonie ont consisté, par décision du ministre de l’éducation nationale, à faire en sorte que puissent être affectés sur place les lauréats qui résidaient dans la collectivité durant l’année de concours et justifiaient d’attaches réelles ou d’une situation familiale particulière nécessitant leur maintien en Nouvelle-Calédonie. Cette mesure a concerné, pour la rentrée scolaire 2012, 51 fonctionnaires stagiaires primo-entrants.

Le vice-rectorat a admis, en septembre dernier, 242 enseignants titulaires, dont la plupart sont des certifiés et des agrégés. Cela répond en partie à votre question sur les enseignants titulaires du CAPES. Les enseignants affectés en Nouvelle-Calédonie sont donc parfaitement qualifiés, puisque des certifiés et des agrégés ont été admis à participer au mouvement intra-territorial.

Les titulaires du CAPES sont au nombre de 576 et les agrégés au nombre de 109. Ces deux corps représentent 45 % du total des enseignants affectés en Nouvelle-Calédonie. Je ne suis pas certaine que tous les territoires puissent afficher un tel taux de professeurs certifiés et agrégés.

Enfin, le flux d’entrées-sorties prévisionnel sur le territoire calédonien devrait afficher un solde positif de 46 enseignants, grâce notamment à la mesure d’affectation des fonctionnaires stagiaires que j’ai évoquée tout à l’heure.

Comme vous le voyez, il y a incontestablement une rupture avec les pratiques antérieures. Nous mettons un terme à la saignée des effectifs d’enseignants. Nous agissons dans la concertation, en mobilisant pour les consulter l’ensemble des acteurs de la communauté éducative, parents d’élèves compris. M. le ministre de l'éducation nationale est également très attentif à la place qui est accordée aux élus dans cette démarche et dans la coordination des actions de l’État et des territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Hilarion Vendegou

Je vous remercie de votre réponse, madame la garde des sceaux. Je vous ai écoutée avec d’autant plus d’attention que j’étais moi-même à l’origine enseignant, plus précisément instituteur.

Vous le comprendrez, je suivrai donc avec beaucoup de vigilance l’évolution de ce dossier, qui me tient véritablement à cœur.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 132, adressée à Mme la ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Madame la ministre, l’attribution des subventions du Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, est aujourd’hui attendue par de très nombreuses collectivités territoriales pour réaliser leurs projets d’aménagement. D’ailleurs, beaucoup de promesses leur ont été faites en la matière...

Le FISAC est principalement destiné à financer les opérations de création, maintien, modernisation, adaptation ou transmission des entreprises du commerce, de l’artisanat et des services, afin de préserver ou de développer un tissu d’entreprises de proximité. Il est donc devenu un outil essentiel aux communes pour soutenir leurs actions de développement économique et de revitalisation de leur territoire.

Malheureusement, certaines demandes de subventions qui ont été déposées avant les dernières élections attendent toujours leur réponse.

Il en est ainsi pour Aurillac, ville chère à mon cœur, qui attend toujours une réponse à la demande de subvention de 293 465 euros formulée en 2011 pour mettre en œuvre la première tranche du projet global de redynamisation du centre-ville et de l’opération programmée de l’habitat de renouvellement urbain du centre ancien, que la municipalité pilote en partenariat avec l’Agence nationale de l’habitat.

C’est un projet structurant et essentiel pour notre ville, dans la mesure où il vise à la fois à favoriser le retour des habitants, à stimuler la diversité du centre-ville, à redynamiser l’activité économique et à valoriser le patrimoine historique et architectural.

Le 15 décembre 2011, sous une majorité précédente, nous avions eu la visite de M. Frédéric Lefebvre, alors secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation, qui s’était engagé à prescrire un examen de ce dossier. Un article paru dans la presse locale en février ou en mars indiquait même qu’une subvention de 140 000 euros était débloquée au titre du FISAC ; mais c’était une communication du député sortant, candidat à sa réélection…

À ce jour, aucune suite officielle n’a été donnée.

Dans ces conditions, madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer dans quel délai ces crédits pourront être débloqués ? Plus largement, quelle politique le Gouvernement entend-il mettre en œuvre pour fixer le cadre d’attribution et d’utilisation de ces crédits ?

J’imagine d’ailleurs que cette question a dû vous être posée dans de nombreuses communes. Élus locaux et parlementaires, nous sommes directement au contact des besoins, notamment grâce au cumul des mandats, si utile à l’expression de la démocratie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

C’est la démonstration que nous soulevons les vrais problèmes ; nous attendons donc les vraies solutions.

Debut de section - Permalien
Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme

Monsieur le sénateur, je vous remercie de me poser cette question, qui me donne l’occasion d’apporter un certain nombre de précisions et de clarifications.

Lors de ma prise de fonctions et de mon arrivée à Bercy, j’ai pris connaissance de la situation difficile, et c’est un euphémisme, dans laquelle se trouve le FISAC.

Le gouvernement précédent a réduit drastiquement les crédits alloués à ce fonds. Le FISAC a été la ligne la plus diminuée des crédits aux PME dans la loi de finances initiale pour 2012. Pourtant, les besoins de financement sont de plus en plus importants, notamment pour des projets comme celui que vous évoquez.

Une réforme des critères d’attribution du Fonds a été décidée à la hâte, sans concertation, par mon prédécesseur, alors que les besoins étaient réels et que les promesses implicites se multipliaient sur le terrain. Je constate que vous en avez fait la triste expérience à Aurillac.

Quelle est la situation aujourd'hui ? Nous avons une enveloppe restante de 13 millions d’euros pour 700 dossiers instruits, qui représentent 35 millions d’euros, auxquels il faut ajouter 1 600 dossiers en cours d’instruction et 80 nouveaux dossiers déposés chaque mois !

Les élus locaux m’interpellent sur la situation du FISAC à chacun de mes déplacements. D’ailleurs, c’est assez légitime s’agissant de projets structurants ; je pense notamment à certains projets d’aménagement très utiles aux commerçants et aux artisans.

Lors de ma visite à Aurillac, la semaine dernière, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec vous, monsieur le sénateur, ainsi qu’avec les élus de la ville. J’ai pu constater la qualité du dossier qui m’était présenté, même si certains aménagements n’entrent plus dans les nouveaux critères. Telle est la situation à laquelle nous devons faire face, et je sais votre attachement à la ville et à ce projet.

Dans ce contexte, le Gouvernement prendra évidemment ses responsabilités. Nous serons amenés à rendre des arbitrages sur les 700 dossiers instruits. Nous ne nous défausserons pas. Comme les financements ne sont pas à la hauteur des besoins, nous serons conduits à revoir à la baisse un certain nombre de subventions.

Tout cela n’est évidemment pas satisfaisant. Le Gouvernement remettra donc le dispositif à plat. Je suis en train de procéder à une évaluation complète du FISAC, afin de mieux cibler les critères d’intervention pour viser en priorité les territoires fragiles. Je pense en particulier aux zones rurales, aux besoins de redynamisation des centres-villes et aux commerces de proximité.

Et nous agirons dans la justice. Car, vous le savez, la feuille de route du Gouvernement, c’est l’équité, l’efficacité et la justice.

Le FISAC est un outil utile au développement économique. Nous devons le maintenir, mais nous devons revoir ses critères d’éligibilité, pour qu’il soit plus efficace au service des artisans et des commerçants. Je compte évidemment le faire avec le soutien des élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, qui met en lumière la réalité de la situation dont vous avez hérité : les 700 dossiers instruits nécessiteraient 35 millions d’euros, alors qu’il ne reste que 13 millions d’euros !

Voilà le bilan de la méthode qui a été utilisée par votre prédécesseur, en particulier pendant la période qui précédait les échéances électorales…Ce n’est pas bien de procéder ainsi ; un tel mode de gestion des dossiers crée à l’évidence des insatisfactions profondes dans nos territoires.

Madame la ministre, les mesures que vous envisagez de prendre sont, je le crois, des mesures de justice et d’égalité territoriale. Vous avez, me semble-t-il, raison de vouloir cibler en priorité les territoires fragiles, où nous avons effectivement besoin des concours de l’État.

Je sais que vous agirez dans la justice. Et c’est évidemment la bonne manière de résoudre ce qui est devenu un problème délicat pour de très nombreuses communes sur le territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Alain Néri, auteur de la question n° 98, adressée à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les problèmes quotidiens que rencontrent les élus des collectivités locales dans l’application des normes, notamment avec les commissions de contrôle et de sécurité.

De nombreux élus constatent avec regret et inquiétude l’accumulation des contraintes législatives et réglementaires, qui rend la gestion des collectivités locales de plus en plus lourde et compliquée. Face à une véritable frénésie normative, ils sont même parfois désespérés, voire exaspérés par des règles tatillonnes, excessives et peu réalistes qui freinent la réalisation des investissements, perturbent la bonne gestion des collectivités territoriales et imposent souvent de fait une tutelle inacceptable des administrations, en contradiction avec la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions.

Quelles que soient les normes imposées, les principales difficultés sont de trois ordres : le coût, la complexité technique et le délai de mise en œuvre. Cela se vérifie au moment des travaux mais aussi lors des diagnostics et études préalables, ainsi que des contrôles techniques et de sécurité.

Les élus reprochent également à juste titre une trop grande profusion de textes et leur évolution constante, qui est source d’insécurité juridique. En outre, l’application qui en est faite soit est trop rigoureuse, soit varie en fonction des autorités chargées d’interpréter les textes ; cela se vérifie notamment pour les normes de sécurité.

Les élus souhaitent que le système normatif évolue réellement dans le sens d’une meilleure adaptation des textes aux situations locales, soit lors de la définition des normes, soit lors de leur application, en laissant une certaine souplesse en fonction de la taille de la collectivité, de son caractère urbain ou rural ou encore de ses capacités financières. Ils réclament également une évaluation plus précise des conséquences financières de ces normes et un allongement des délais de mise en application, ainsi qu’une plus grande stabilité des textes.

Il y a urgence. Je souhaite donc connaître les suites que le Gouvernement entend donner à ces légitimes demandes.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, je vous remercie de soulever cette question, qui, comme vous le savez, est aujourd'hui au cœur des préoccupations des élus.

Depuis la mise en place de la réflexion sur la démocratie territoriale, en particulier dans le cadre des états généraux initiés au Sénat par le président Jean-Pierre Bel, la question des normes revient dans le débat de manière récurrente. En effet, l’inflation normative – d’aucuns parlent même d’« incontinence normative » – atteint des proportions telles qu’il devient aujourd'hui indispensable d’envisager la mise en place d’un dispositif permettant de réduire tant le stock que le flux de ces normes.

Lors des récents états généraux de la démocratie territoriale, le 5 octobre dernier, M. le Président de la République a évoqué un certain nombre de pistes.

Vous le savez également, différents groupes de travail se sont réunis. Par exemple, votre ancien collègue Alain Lambert a remis un rapport comportant un certain nombre de réflexions au titre de la Commission consultative d’évaluation des normes.

Quelle est la situation actuelle ? Il y a aujourd'hui plus de 400 000 normes, pour un coût annuel de plus de 2 milliards d’euros. Nous devons donc impérativement trouver des moyens pour alléger ces difficultés.

L’Assemblée nationale a examiné la semaine dernière une proposition de loi présentée par le député Pierre Morel-À-L’Huissier pour réduire le nombre de normes, en particulier en milieu rural. Nous avons été amenés à formuler plusieurs observations de nature constitutionnelle sur le texte proposé qui, parce qu’il s’adressait seulement à une partie de la population et concernait uniquement certaines normes, ne répondait pas aux attentes réelles des élus.

Nous devons travailler sur un dispositif qui s’appliquera de manière générale tout en permettant des adaptations locales.

Le Président de la République a donc annoncé des dispositions contraignantes. Il nous a indiqué des pistes de travail, et ces pistes seront suivies.

D’ailleurs, M. le président du Sénat, Jean-Pierre Bel, à l’issue des états généraux de la démocratie territoriale, a demandé au Sénat de s’atteler à un nouveau travail, l’objectif étant, d’une part, de réduire le stock existant, d’autre part, de pénaliser tout dispositif tendant à augmenter le nombre de normes nouvelles, et donc à créer des dépenses qui ne sont pas supportables pour les collectivités locales.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que le Gouvernement s’associera complètement à cette démarche, car, tout comme les parlementaires, il doit être particulièrement vigilant aux dépenses imposées de manière excessive aux collectivités territoriales.

Il important que le nombre des normes soit ramené à des proportions convenables et acceptables par les uns et pas les autres. Le Gouvernement y veillera.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Madame la ministre déléguée, je vous remercie de votre réponse, qui me rassure, comme elle rassurera également, j’en suis certain, un grand nombre d’élus locaux.

Les chiffres que vous venez de citer – 400 000 normes, 2 milliards d’euros par an – sont édifiants. C’est un défi au bon sens, ce bon sens dont les élus locaux dévoués doivent, eux, faire preuve souvent, pour ne pas dire toujours, afin de gérer au mieux leur commune, leur département et leur région, avec les moyens dont ils disposent. Et ces élus sont désespérés qu’on leur impose des normes souvent peu réalistes et excessives. Vous avez parlé d’incontinence, madame la ministre déléguée ; j’ai parlé de frénésie. Les mots sont différents, mais ils décrivent le même phénomène.

Je participerai aux réflexions que le Gouvernement et le Parlement engageront. Néanmoins, j’attire d’ores et déjà votre attention sur un point : aujourd’hui, quand nous envisageons un investissement, le coût des études dépasse souvent le montant des travaux. C’est un vrai problème. Revenons un peu au bon sens, et disons halte à un certain lobbying totalement insupportable et inacceptable.

Madame la ministre déléguée, nous serons à vos côtés pour faire avancer ce dossier dans l’intérêt de nos communes, de nos départements et de nos régions.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 129, adressée à Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, ma question est similaire à la précédente puisqu’elle porte sur le financement des investissements publics locaux et sur les incidences de l’excès normatif sur les collectivités territoriales.

Je constate que la question qui sera posée tout à l’heure par Alain Fouché tourne également autour du même thème. Nous ne nous étions pas concertés, mais cette convergence prouve que le sujet est d’une très grande importance et qu’il reflète le quotidien des élus de terrain que nous sommes.

À la suite des états généraux de la démocratie territoriale, qui se sont tenus à Paris, mais que nous, élus locaux, avons également organisés sur nos territoires respectifs - en l’occurrence, c’est ce que nous avons fait avec Claude Belot et Michel Doublet en Charente-Maritime -, les élus présents ont fait part de leurs inquiétudes et ont soulevé de nombreuses questions.

Alors que les maires ont des projets d’investissement, ils ne peuvent les mener à bien faute de financements. Quand on sait que plus de 75 % des investissements publics sont réalisés par les collectivités territoriales, on peut s’inquiéter du sort des entreprises et des emplois. Ces inquiétudes sont renforcées par le gel des concours de l’État aux collectivités territoriales pour 2013 et par l’annonce d’un effort budgétaire de 2, 25 milliards d’euros pour les deux ans à venir.

Les élus locaux que nous sommes ne sont pas hostiles à l’idée de participer à l’effort budgétaire de maîtrise des déficits, mais ils souhaitent que le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales soit respecté et veulent conserver leur capacité d’investissement.

Face aux difficultés rencontrées par les collectivités pour accéder au crédit et face au renchérissement du coût de ce dernier, la capacité d’investir des collectivités est en nette diminution, ce qui a des répercussions sur l’emploi local, ainsi que sur le tissu économique et social de nos territoires.

Certes, les réponses apportées par les pouvoirs publics, avec le déblocage exceptionnel de 5 milliards d’euros sur fonds d’épargne dédié au financement des collectivités territoriales pour faire face aux besoins de crédits de moyen et de long terme, sont des avancées notables, tout comme l’offre de crédit à court terme proposée par La Banque postale. Néanmoins, ces solutions restent insuffisantes pour répondre aux attentes des élus locaux.

L’agence de financement devrait donc permettre aux collectivités d’emprunter à moindre coût et de manière plus sécurisée, dans un esprit de solidarité et de cohésion territoriale, comme viennent de le rappeler les associations d’élus locaux.

Madame la ministre déléguée, le Gouvernement envisage-t-il le dépôt d’un projet de loi portant création de l’agence de financement des investissements publics locaux ?

Nous attendons des réponses.

Quant à l’excès normatif, qui obère les initiatives au risque de décourager les élus, la problématique a été mise en avant par les élus ruraux lors des états généraux de la démocratie territoriale.

En effet, nous en convenons tous, l’inflation normative est un frein à la compétitivité. Elle touche non seulement les collectivités, mais également de très nombreux secteurs de l’économie française.

La mise en pratique des normes est une source de dépenses supplémentaires en fonctionnement et en investissement, d’autant qu’elle s’accompagne d’une large instabilité. Vous avez cité une dépense annuelle de 2 milliards d’euros, ce n’est pas rien !

Les territoires ruraux sont particulièrement sensibles à l’inflation normative et affectés par elle ; ils doivent mettre en œuvre des normes qui se heurtent souvent à des impossibilités techniques ou dont les conséquences sont excessives au regard des objectifs visés et de leurs capacités financières.

Je ferai, par ailleurs, référence aux excellents rapports de nos collègues Claude Belot, sur la « maladie de la norme », et Éric Doligé, sur la simplification des normes applicables aux collectivités. Ce dernier rapport a fait l’objet d’une proposition de loi renvoyée en commission et qui est inscrite à l’ordre du jour du Sénat, dans l’espace réservé au groupe UMP, le 24 octobre prochain, ce dont je me félicite. J’espère qu’elle ne subira pas le même sort que la proposition de loi portant création des principes d’adaptabilité et de subsidiarité en vue d’une mise en œuvre différenciée des normes en milieu rural, de notre collègue député Pierre Morel-À-L’Huissier.

Je note que le Président de la République a repris à son compte les propositions de notre collègue en matière d’allégement des normes, sans préciser toutefois quelles séries de normes il envisageait éventuellement de supprimer, mais laissant entendre que les normes sanitaires et environnementales ne seraient pas concernées.

Encore une fois, au risque d’insister, madame la ministre déléguée, les élus de terrain souhaitent que nous mettions fin à cet excès normatif. Ils veulent également être accompagnés pour mener à bien leurs projets structurants, indispensables pour le dynamisme de nos territoires.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, avec votre accord, je répondrai d’abord à la deuxième partie de votre question, pour prolonger ma réponse à la question précédente.

Effectivement, les normes ont un poids financier considérable et elles imposent des contraintes quasi insupportables aux collectivités territoriales, qui sont, cela a été dit et répété, de plus en plus démunies de moyens techniques, financiers et humains.

Le Président de la République a demandé que l’on cherche des solutions qui respectent la Constitution. À ce titre, j’attire votre attention sur le fait que la proposition de loi de M. Morel-À-L’Huissier n’a pas été retenue au regard de son caractère anticonstitutionnel.

La proposition de loi de M. Doligé sera examinée en toute impartialité et fera l’objet d’une attention particulière, étant entendu que les solutions qu’elle prévoit entrent exactement dans le cadre proposé par le Président de la République.

Permettez-moi maintenant d’intervenir plus longuement sur les problèmes d’investissement que vous avez évoqués.

Il va de soi que nous serons attentifs aux problèmes qui concernent les collectivités territoriales, car ces dernières sont gage de redressement pour notre pays. En effet, elles participent, par leurs investissements, à la croissance et à l’emploi. Au cours des dernières années, la part des collectivités dans l’investissement public s’élevait à près de 74 %. Depuis 2011, voire 2010, ce pourcentage est revenu autour de 70 % ou de 71 %, d’où l’attention très particulière portée par le Gouvernement à ces situations.

Monsieur le sénateur, vous avez relevé les efforts qui ont été immédiatement consentis l’été dernier, dès que les difficultés de Dexia ont été connues. La Banque postale a contribué pour 2 milliards d’euros et la Caisse des dépôts et consignations pour 3 milliards d’euros. Nous en sommes conscients, il s’agit là d’une réponse ponctuelle.

Aujourd’hui, le Gouvernement travaille à des dispositions pérennes pour répondre aux besoins de court terme ou de moyen et long terme des collectivités territoriales, qui sont des acteurs essentiels de l’investissement pour notre territoire.

Vous avez souhaité savoir, monsieur le sénateur, ce qu’il en était de l’agence de financement des collectivités territoriales. Aujourd’hui, le Gouvernement étudie la question en cherchant les meilleures solutions. Le besoin de financement de nos collectivités s’élève probablement à 18 milliards d’euros par an. Différentes possibilités sont offertes : agence de financement des collectivités territoriales, Banque postale, Caisse des dépôts et consignations, secteur privé.

L’idée est de permettre aux collectivités territoriales de continuer à investir et d’être les moteurs de notre développement économique. Soyez assurés que nous y veillerons avec la plus grande attention et que nous vous apporterons dans les meilleurs délais la réponse à la question que vous avez posée.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre déléguée.

Nous attendons une très grande réactivité du Gouvernement en faveur de la diminution des normes et du maintien de la capacité d’investissement des collectivités. Car, qui dit investissements, dit emplois !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Alain Fouché, auteur de la question n° 76, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Madame la ministre déléguée, ma question concerne également les collectivités locales et leurs difficultés pour accéder à la ressource bancaire, preuve qu’il s’agit d’un problème important.

Ce point a été évoqué lors des assises des territoires ruraux que j’ai organisées dans mon département avec Jean-Pierre Raffarin.

La situation devient particulièrement préoccupante. Il est parfois impossible pour les collectivités d’obtenir la totalité des crédits demandés, ce qui met en péril les opérations d’investissement envisagées. Lorsque les collectivités y parviennent, c’est souvent avec le concours de plusieurs établissements bancaires et au prix d’une qualité dégradée en raison de marges prohibitives pratiquées par les banques, comme vous avez dû vous en rendre compte, madame la ministre déléguée.

L’agence de financement des investissements locaux souhaitée par le Gouvernement n’est pas encore opérationnelle et les enveloppes de crédits de court terme et de long terme, annoncées par La Banque postale, ne suffiront pas à couvrir les besoins de financement pour les années 2012-2013. C’est ce qu’a indiqué le président du directoire de La Banque postale, Philippe Wahl, il y a quelques mois, lors d’une réunion que nous avons organisée, Jean-Pierre Raffarin et moi-même, à Poitiers avec les maires de mon département.

Cette situation va se tendre encore davantage, puisque la banque Dexia a annoncé très récemment qu’elle serait dans l’incapacité d’honorer les reversements des encours remboursés sur les contrats de long terme renouvelables.

Vous l’avez évoqué, madame la ministre déléguée, 70 % de l’investissement public en France est réalisé par les régions, les départements, les communes, les communautés de communes, voire les pays. De ce fait, faute de mesures adaptées et immédiates, cette situation aura des effets négatifs sur la croissance et sur l’emploi, car les artisans et les entreprises seront touchés.

Madame la ministre déléguée, vous venez de fournir un certain nombre d’éléments à mon collègue Daniel Laurent, mais peut-être nous donnerez-vous des précisions supplémentaires. Ainsi, je vous remercie de bien vouloir m’indiquer dans quel délai cette agence verra le jour – vous avez annoncé que ce serait très rapide –, quelle en sera la nature et quel sera son niveau de participation auprès des collectivités locales, dans la situation à laquelle elles doivent faire face.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, vous voudrez bien excuser le ministre de l'économie et des finances, qui assiste actuellement avec le ministre délégué chargé du budget à une réunion interministérielle sur le projet de loi de finances pour 2013. Il m’a chargée de vous communiquer la réponse à la question que vous lui posez. Vous me permettrez cependant d’y apporter des précisions supplémentaires, qui compléteront les indications que je viens de donner à M. Daniel Laurent.

Le Gouvernement sait que les collectivités sont aujourd’hui inquiètes. Le Président de la République a indiqué aux élus locaux, lors des états généraux de la démocratie territoriale, qu’il veillerait, avec le Gouvernement, à ce qu’il n’y ait aucune rupture dans le financement des investissements ni dans la trésorerie des collectivités locales.

Pour l’année 2012, le ministre délégué chargé du budget a, le 14 septembre dernier, adressé, avec Marylise Lebranchu, Manuel Valls et moi-même, une circulaire aux préfets leur demandant d’établir un bilan des difficultés d’accès au crédit que peuvent rencontrer les collectivités.

Ce bilan souligne que les besoins des collectivités devraient globalement être satisfaits cette année, grâce à l’offre des banques privées et aux mesures exceptionnelles prises par l’État. Il permettra également d’identifier les collectivités qui connaissent encore des difficultés à boucler leurs financements et pour lesquelles les dispositifs mis en place doivent apporter une réponse ; cette liste est en cours d'élaboration. Dans quelques jours, j'espère, nous disposerons d’un état des collectivités qui rencontrent le plus de difficultés.

Un certain nombre de mesures ont d'ores et déjà été prises pour répondre à cette situation exceptionnelle. Ainsi a été décidé le déblocage d'une enveloppe de près de 3 milliards d'euros sur les fonds d'épargne de la Caisse des dépôts et consignations. Au total, ce sont plus de 5 milliards d'euros qui ont été débloqués à titre exceptionnel cette année, pour permettre le financement à moyen et à long terme des collectivités locales.

De plus, afin que toutes les collectivités puissent y avoir recours, la décision a été prise de baisser significativement les taux applicables à ces enveloppes exceptionnelles, car ils pouvaient être considérés comme excessifs. Il s’agit là d’une mesure relativement récente, mais essentielle. Depuis le mois de mai, les taux ont ainsi diminué de près d'un tiers ; ils ont été réduits encore tout récemment.

Par ailleurs, monsieur le sénateur, comme vous le signaliez, La Banque postale a mis en place une nouvelle offre de crédit à court terme qu'elle a portée de 2 milliards d'euros à 4 milliards d'euros pour faire face à des besoins urgents de trésorerie. À partir du mois de novembre prochain, elle proposera également des crédits à moyen et à long terme en direction des collectivités locales pour un montant compris entre 1 milliard d'euros et 2 milliards d'euros en 2012.

Les collectivités de petite taille se heurtent à une difficulté particulière : leurs besoins ne sont pas excessifs et portent parfois sur de petites sommes, 200 000 euros, 100 000 euros, 80 000 euros, voire 50 000 euros ! La Banque postale s'est engagée sur de tels montants, voire sur des montants moindres dès le début de l'année prochaine.

L’ensemble de ces interventions permettent d’envisager une détente de la situation et donnent de l’air aux collectivités.

Pierre Moscovici a par ailleurs fait le point avec les principales banques et a pu constater qu’à ce stade de l’année elles respectaient leur engagement de maintenir, voire d’accroître leur offre de crédit en 2012 par rapport à 2011.

Le Gouvernement fait donc en sorte que des solutions pérennes soient trouvées pour le financement des collectivités locales. Comme je le disais, La Banque postale devrait notamment compléter à terme sa gamme en partenariat avec la Caisse des dépôts et consignations pour contribuer durablement au financement du secteur public local. Ce nouvel outil prendra le relais de Dexia à l’issue des négociations avec la Commission européenne.

Vous m'avez interrogée sur les délais. Tout doit être fait pour que, dès le début de l'année prochaine, La Banque postale puisse accorder des prêts de faible montant aux collectivités souhaitant réaliser des investissements certes modestes, mais qui contribuent, vous l’avez rappelé, à notre économie et donc à l'emploi.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, tout est mis en œuvre entre les différentes administrations pour participer autant que possible au redressement de la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Madame la ministre déléguée, je vous remercie de cette réponse très claire. Je constate la forte volonté du Gouvernement d'aller très vite dans ce domaine. Il est vrai que, du fait de ce problème d’accessibilité à la ressource bancaire, la croissance est freinée. Je souhaite donc, comme vous, que cette agence soit mise en place le plus rapidement possible pour répondre aux besoins de nos collectivités. Enfin, je prends note des précisions que vous avez apportées concernant La Banque postale.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Georges Labazée, auteur de la question n° 33, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Labazée

Elle porte sur l’organisation des transports scolaires dans et par nos départements et vise à avancer des éléments de débat pour une meilleure concertation entre les deux autorités compétentes en la matière : le conseil général et l’inspection académique.

L’organisation du système éducatif du second degré – ici, les collèges -, est une compétence conjointe entre le département et l’inspection académique. Bien plus, il s’agit, disons-le, d’une autorité bicéphale : autorité hiérarchique pour l’inspection académique, autorité d’organisation pour le conseil général. On peut même parler parfois d’autorité palliative...

Cela fait de nombreuses années que le problème est évoqué, mais les différents incidents qui ont eu lieu dans mon département lors de la dernière rentrée scolaire révèlent qu’il est urgent d’inscrire dans le champ de la concertation le respect du périmètre des compétences de chacune de ces autorités. En d’autres termes, il faut clarifier leurs compétences et, surtout, mesurer ce que les décisions prises impliquent concrètement.

Je m’explique.

Les décisions prises unilatéralement par l’une des parties entraînent fatalement des obligations pour l’autre partie. C'est surtout vrai en matière d’organisation des transports scolaires.

La loi oblige en effet le conseil général à mettre en place la sectorisation ; la carte scolaire permet alors de poser les bases d’une organisation globale, ce qui est nécessaire. Cependant, des dérogations existent. Le problème, c’est qu’elles reposent uniquement sur les décisions du directeur académique des services de l’éducation nationale, le DASEN.

Rentrons un peu dans le détail.

La désectorisation peut faire suite à une demande expresse de la famille. Dans ce cas, le département n’est pas responsable de la mise en place du transport de l’élève.

En revanche, lorsque la décision du DASEN est prise soit par manque de place dans les structures pédagogiques, soit parce qu’une spécialité souhaitée n’est pas enseignée dans le collège de secteur, elle crée des droits pour l’élève en matière de transports. C’est là que le bât blesse... À la suite de cette décision du DASEN, le conseil général se retrouve contraint de devoir organiser le transport de l’élève dans l’urgence, et ce souvent, trop souvent, pour un coût parfois supérieur à 6 500 euros par élève en zone de montagne, ce qui est prohibitif.

À cette difficulté, il faut ajouter, par exemple dans mon département, le problème du transport des élèves des classes en immersion, que ce soit les ikastolak pour l'enseignement de la langue basque ou les calandretas pour l'enseignement des langues d'oc.

Madame la ministre déléguée, dans les cas où cela se trouve à la fois possible et pertinent, ne serait-il pas préférable de redéfinir les ouvertures de classes ou les augmentations des seuils pour accueillir le ou les élèves plutôt que de désectoriser ?

Oui, cela nécessiterait d’ajuster la dotation globale horaire, mais que de contraintes supprimées pour les familles ainsi aussi que pour la collectivité, qui ne serait alors plus obligée de s’adapter dans l’urgence, parfois au détriment des élèves !

Un autre problème tient à l’absence de sectorisation des collèges privés. Dans mon département, 25 % de la population fréquente les établissements privés, et je respecte cette décision.

En l’absence de loi, certains conseils généraux ont pris des dispositions contraignantes, via un règlement intérieur, pour éviter que les enfants ne soient laissés pour compte. Le conseil général s’est ainsi astreint à organiser et à assurer gratuitement le transport des élèves dans les collèges privés lorsqu’ils sont à proximité du lieu d’habitation de l’élève. Il peut alors s’agir de mettre en place une desserte unique, lorsque les collèges publics et privés sont à proximité, par une prolongation ou un détournement du circuit, ou de créer une ligne.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Veuillez en venir à votre conclusion, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Labazée

Madame la ministre déléguée, il serait juste de mettre en place, sur l'ensemble du territoire, une carte scolaire pour les collèges privés, avec pour règle fondatrice la proximité entre le collège et l'habitation. Attention ! Il ne s’agit pas de porter atteinte au libre choix des familles qui prennent la décision de sortir leur enfant de l’école publique pour l’inscrire dans un établissement privé, mais il faut faire en sorte que la gratuité bénéficie à tous les élèves, jusqu'au collège de proximité.

Toute décision unilatérale peut se révéler préjudiciable, car elle crée des obligations dans des temps très contraints. Je lance par conséquent un appel pour que les recteurs et les inspecteurs académiques soient mieux informés des conséquences de leurs décisions.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Labazée

Ma question est la suivante : ne pourrait-on trouver une harmonieuse articulation entre les services académiques et les services des transports scolaires des conseils généraux ?

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence du ministre de l'éducation nationale. Selon moi, le texte qu’il a fait préparer à votre attention ne répond pas tout à fait à la question que vous lui avez posée. C’est pourquoi, si vous le permettez, je la lui transmettrai de nouveau de façon qu'il puisse vous apporter toutes les précisions que vous demandez. Néanmoins, je vous ferai part des éléments de réponse techniques qu’il a tenu à vous donner.

Monsieur le sénateur, vous savez combien le ministre de l'éducation nationale est attentif au dialogue avec l'ensemble des partenaires, qu'ils appartiennent au monde éducatif ou au monde des élus ; à ce titre, il a reçu l'ensemble des associations d'élus locaux. C'est d'ailleurs parce qu'il a entrepris ce travail qu’il ne peut être ici ce matin : la refondation de notre école est au cœur de ses préoccupations.

Pour en venir maintenant plus spécifiquement à votre question, vous vous préoccupez fort légitimement des conséquences sur l’organisation du transport scolaire des dérogations à la carte scolaire.

Le département est compétent pour déterminer la localisation des collèges, leur capacité d’accueil et leur secteur de recrutement. Le directeur académique des services de l’éducation nationale est, quant à lui, compétent pour affecter les élèves dans les collèges publics et accorder, le cas échéant, des dérogations à la carte scolaire définie par le département.

Le département est également compétent pour assurer l’organisation du transport scolaire : choix des points d’arrêt à desservir, choix de l’itinéraire, des horaires, etc. Voilà ce que nous essayons de faire aussi bien que possible, lorsque nous sommes dans nos conseils généraux.

Dans ce cadre, le conseil général est consulté par les services académiques avant toute décision susceptible d’entraîner une modification substantielle des besoins en matière de transport scolaire. De son côté, la direction académique des services de l’éducation nationale doit prendre en compte les répercussions d’une décision de dérogation à la carte scolaire sur le service du transport scolaire. Ces dérogations demeurent, globalement, marginales.

L’organisation et le fonctionnement des transports sont évoqués dans le cadre du conseil départemental de l’éducation nationale, qui est l’instance au sein de laquelle s’échange l’information et se noue une concertation étroite entre l’État et le département sur ces sujets.

Le ministre de l’éducation nationale est très attaché à ce dialogue, qui est nécessaire au fonctionnement du service public de l’éducation nationale.

Au-delà de ces rappels, M. le ministre tient à préciser que la jurisprudence administrative tient compte des contraintes des collectivités territoriales ; cela me paraît tout à fait fondamental. Ainsi, le juge administratif estime que les départements ne sont pas tenus d’assurer la prise en charge financière du transport scolaire des élèves inscrits dans un établissement qui n’est pas situé dans leur secteur selon les mêmes modalités que s’ils étaient inscrits dans l’établissement de leur secteur. Les départements peuvent donc mettre en œuvre des règles d’organisation ou de prise en charge financière du transport scolaire qui soient différentes, et ce sans déroger au principe d’égalité des usagers devant le service public.

Le Conseil d’État a également jugé qu’un conseil général ne méconnaissait pas le principe d’égalité des usagers devant le service public en organisant des circuits de transport scolaire auxquels les élèves scolarisés dans un établissement du secteur de leur domicile accèdent gratuitement, et un régime d’indemnisation forfaitaire en faveur des élèves qui fréquentent un établissement situé en dehors de ce secteur.

En revanche, le juge administratif a estimé qu’étaient contraires au principe d’égalité entre les usagers du service public les dispositions qui prévoient que les élèves qui fréquentent un établissement scolaire public par dérogation à la carte scolaire ne bénéficient d’aucune prise en charge de leurs frais de transport, alors que les élèves qui fréquentent un établissement privé et ne sont donc pas assujettis au respect de la carte scolaire, se voient accorder la gratuité du transport scolaire pour une distance équivalente à celle comprise entre leur domicile et l’établissement public de rattachement.

Depuis le premier acte de la décentralisation, les collectivités territoriales sont devenues des acteurs essentiels de la mise en œuvre des politiques éducatives. L’État veut y associer l’ensemble des élus.

Si vous le voulez bien, monsieur le sénateur, je transmettrai au ministre de l’éducation nationale la teneur exacte de votre question, notamment pour ce qui concerne les classes d’immersion ou le cas spécifique de l’enseignement privé, afin qu’il puisse vous répondre par un courrier écrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Labazée

Je souhaiterais compléter ma question, car je n’ai pas abordé le problème de la restauration scolaire le mercredi midi. Le conseil d'administration de l’établissement peut décider d’ouvrir, ou non, la cantine ou le restaurant scolaire ce jour-là. Le cas échéant, les horaires des transports sont totalement décalés. La décision du conseil d'administration s’impose au conseil général, mais c’est une autre source de difficultés.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 100, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Boyer

Madame la ministre déléguée, nous autres, habitants des territoires ruraux, nous nous interrogeons sur la répartition de la TIPP, devenue TICPE, et notamment sur les différences constatées entre les zones rurales et les zones urbaines.

Je n’ignore pas que la taxe intérieure sur les produits pétroliers a été officiellement remplacée par la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, mais le sigle TIPP reste encore celui qui est le plus usité.

La définition d’un cadre réglementaire prévoyant une vraie compensation doit permettre de tenir pleinement compte des conditions de travail liées à l’altitude, à l’espace, aux moyens de déplacement, à l’organisation de la vie sociale et humaine, aux conditions climatiques et à la topographie d’un territoire. Nous savons que cette taxe constitue une ressource appréciable tant pour l’État que pour les collectivités locales.

Madame la ministre, pourriez-vous m’indiquer la règle de répartition entre les bénéficiaires du produit de cette taxe ? Quelles sont les raisons des différences – certaines peuvent paraître importantes – qui sont constatées entre les régions ?

Par ailleurs, il semblerait que les conditions d’accès au carburant aient été modifiées pour les agriculteurs, les entrepreneurs de travaux forestiers et les collectivités territoriales. J’avais déjà interrogé le précédent ministre de l'économie et des finances à ce sujet.

Les taxes constituent l’un des éléments les plus importants du prix du litre : 61 % pour l’essence et 53 % pour le gazole. La fiscalité pétrolière est la quatrième ressource budgétaire de l’État : la TIPP a rapporté 24, 7 milliards d’euros à l’État en 2009. Depuis la loi de finances pour 2006, les régions ont la possibilité de moduler dans une faible mesure – environ 1 % du prix du carburant à la pompe – le taux de la TIPP. C’est le fioul lourd qui bénéficie de la fiscalité la plus avantageuse, mais jusqu’à quand et pour qui ?

Je tiens à le rappeler dans cet hémicycle, et en particulier devant vous, madame la ministre déléguée, qui connaissez bien le Massif central – je vous l’ai dit publiquement hier soir –, la situation du monde rural doit être mieux prise en compte. Il faut donner aux territoires les moyens de maintenir une forme d’équité entre les citoyens en matière d’énergie, en fonction de son prix de revient mais aussi de l’écart de consommation entre les zones rurales et les secteurs plus accessibles et moins enclavés.

Il est important de savoir comment le nouveau gouvernement entend répondre à cette situation de plus en plus préoccupante, qui est de nature à accroître encore davantage ce que l’on peut appeler la fracture territoriale.

Madame la ministre déléguée, le monde rural est une chaîne et, comme pour toute chaîne, ses maillons sont complémentaires. Le désenclavement et l’égalité de traitement entre les différents territoires, entre les différents maillons, sont des enjeux incontournables pour l’avenir des zones rurales.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, votre question concerne un territoire auquel, vous le savez, je suis très attachée. Ce n’est cependant pas ma réponse, mais celle du ministre de l'économie et des finances, retenu par une réunion interministérielle, que je vais maintenant porter à votre connaissance.

La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, s’inscrit dans le cadre général fixé par la directive communautaire n° 2003-96. Conformément à cette directive, la taxe liée à la consommation est un montant assis sur un volume. Le montant de la TICPE est fixé par type de carburant, dans le code des douanes.

Divers prélèvements sont opérés sur la recette totale – 24, 8 milliards d'euros en 2011 – au profit des collectivités territoriales. Pour les départements, le versement, qui représentait près de 6, 3 milliards d'euros en 2011, est effectué au titre du financement des dépenses sociales. Pour les régions, le versement comporte deux parts : la première, qui s’élevait à 3, 79 milliards d'euros en 2011, est destinée à compléter leur dotation de fonctionnement, avec une possibilité de modulation laissée à l’initiative des conseils régionaux ; la seconde part, dite « Grenelle de l’environnement », qui atteignait 380 millions d'euros en 2011, contribue au financement d’infrastructures de transport. Son montant dépend de la modulation de la TICPE par les conseils régionaux, dans les limites fixées par la loi.

Ces chiffres répondent, me semble-t-il, à votre question sur la répartition du produit de la TICPE entre les différents échelons territoriaux.

Le ministre de l'économie et des finances tient à rappeler que, depuis 1er janvier 2012, toutes les régions sauf la région Poitou-Charentes et la Corse utilisent au maximum leur pouvoir de modulation de la TICPE. Par conséquent, le montant total de cette taxe est le même dans toutes les régions, à l’exception des deux que je viens de citer. Le mécanisme de régionalisation de la TICPE n’est donc pas la première cause des différences de prix à la pompe constatées entre les régions. Les prix étant fixés librement par les distributeurs, ces disparités de prix dépendent davantage de la logistique d’approvisionnement de chaque distributeur et des prix auxquels chacun acquiert sa marchandise, et ces prix sont très volatils sur le marché mondial.

En ce qui concerne les carburants à fiscalité réduite dont bénéficient les agriculteurs et les entrepreneurs de travaux forestiers, mais également les entreprises de travaux publics, le taux de la taxe a effectivement été relevé par la loi de finances pour 2012. Cependant, la fiscalité applicable aux carburants destinés à ces secteurs d’activité demeure très avantageuse, avec un taux inférieur de plus de 80 % au taux normal. Ainsi, le gazole non routier est taxé à 7, 20 euros l’hectolitre, contre 42, 84 euros l’hectolitre pour le gazole routier…

Vous avez enfin évoqué le cas du fioul lourd, en vous inquiétant de la pérennité de son régime fiscal préférentiel. Ce produit est aujourd’hui utilisé de façon assez marginale, presque uniquement par les navires et les centrales thermiques, et, dans ces cas, les textes communautaires imposent de l’exonérer de taxe intérieure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Boyer

Il est important que les Français connaissent les retombées positives de la TICPE. Aujourd'hui comme hier – et il en sera peut-être de même demain –, nos concitoyens se plaignent que l’État taxe beaucoup les carburants. Cependant, lorsque l’on fait preuve de transparence, comme vous à l’instant, madame la ministre déléguée, la quasi-totalité d’entre eux comprennent que cet argent est employé utilement. Je le savais déjà, mais votre réponse me permettra de l’expliquer encore mieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

La parole est à M. Michel Le Scouarnec, auteur de la question n° 126, adressée à M. le ministre du redressement productif.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Monsieur le président, madame la ministre déléguée, jamais peut-être la notion de responsabilité n’aura été aussi tangible qu’en cette période d’annonces à répétition de réductions d’activités, de fermetures de sites et de licenciements massifs. Responsabilité, car la première des urgences est de défendre les salariés pour les protéger le plus possible de la casse et des conséquences du comportement des actionnaires, qui exigent souvent des entreprises une valorisation maximale de leurs actions.

Dans le contexte actuel de crise de la production, le temps nous est compté pour empêcher la disparition de milliers d’emplois, disparition qui aurait des conséquences dramatiques pour les familles, les comptes sociaux et les territoires.

Le département du Morbihan est loin d’être épargné. Le cas du groupe Doux en est l’exemple le plus médiatisé, avec environ 1 000 salariés licenciés sur les cinq sites du département, et plus de 300 aviculteurs au chômage sur les 800 qui travaillaient avec le groupe. En outre, plusieurs entreprises sont directement affectées par cette situation ; je pense notamment à Union Kergonan Languidic, à Lanester. L’État est également concerné. Citons par exemple les chantiers STX de Lanester, fleuron de la construction navale dont le carnet de commandes est aujourd’hui désespérément vide. Plus de 120 salariés et 200 sous-traitants et intérimaires risquent de perdre leur emploi.

Le département du Morbihan est actuellement absent des marchés de la construction et de la réparation navale civile. Il abrite pourtant des sites d’excellence, disposant de toutes les infrastructures nécessaires. La filière navale est une industrie porteuse d’emplois qualifiés générant chacun trois à quatre emplois induits.

Des solutions sont possibles : on pourrait envisager une plus grande implication des services de l’État, qui est actionnaire des chantiers via le Fonds stratégique d’investissement, le FSI, ou encore la création d’une grande filière de déconstruction navale. Lorsque le cargo TK Bremen s’est échoué sur une plage d’Erdeven, peu avant Noël dernier – vous en avez sans doute entendu parler –, on a fait appel à une entreprise étrangère.

Il existe également des besoins dans la filière « pêche » et dans la filière nautique. Peut-être pourrions-nous créer quelque chose de nouveau, porteur d’espoir, à partir de ces différents besoins.

Afin de garantir la sécurisation de l’emploi local, il ne faut pas négliger non plus l’attractivité économique des territoires : donnons-leur les moyens de devenir des centres d’innovation, attractifs pour les entreprises et pour les salariés.

Il est également impératif de renforcer les droits des salariés et de favoriser le développement d’une véritable démocratie sociale, qui ferait des salariés des acteurs de l’essor économique et non plus des variables d’ajustement d’une économie au service du seul profit.

Alors que le Gouvernement a lancé une grande conférence sociale devant permettre le dialogue et la recherche d’autres solutions, je souhaiterais connaître les mesures concrètes, efficaces et pérennes que vous envisagez de prendre pour protéger les entreprises, les emplois et les salariés présents dans le Morbihan.

De plus, la situation actuelle impose une action rapide pour redéfinir une véritable politique industrielle. Quelles mesures comptez-vous prendre en la matière, en concertation avec les élus locaux du Morbihan ?

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, « combat pour le redressement de la France », « combat pour la compétitivité », « combat pour la croissance », « combat pour l’emploi », tels sont les mots qui reviennent dans la bouche de M. le Président de la République lors de chaque conseil des ministres, des termes forts qui trouvent un écho tout particulier dans la question que vous venez de poser s’agissant d’entreprises de votre département.

Mon collègue ministre du redressement productif, dans l’impossibilité de vous répondre lui-même, m’a chargée de vous lire la réponse qu’il a fait préparer à votre intention.

Je vous apporterai des précisions sur les deux entreprises que vous avez citées : Doux et STX.

Comme vous le savez, pour ce qui concerne le pôle « frais » du groupe Doux, un plan de cession a été arrêté par le tribunal de commerce de Quimper le 10 septembre dernier. Trois entités sont concernées et 255 emplois seront maintenus. Cela n’est malheureusement pas suffisant.

Un dispositif d’accompagnement des salariés licenciés économiques sur les sites visés a été mis en place sous l’impulsion du préfet dans le Morbihan, en lien avec la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi de Bretagne, la DIRECCTE, et Pôle emploi. Il sera axé autour du contrat de sécurisation professionnelle et comportera un volet « formation » important, des aides au reclassement et à la mobilité, ainsi que des mesures sociales pilotées par le département qui compléteront les mesures mises en œuvre par l’entreprise, par l’État et par Pôle emploi.

Par ailleurs, une enveloppe de 1 million d'euros sera disponible au titre du Fonds national de revitalisation des territoires pour aider à la création d’emplois.

Dans le cadre de la convention de revitalisation signée entre Vivendi et l’État sur le pays de Ploërmel, une aide pourra être apportée aux entreprises réemployant des licenciés de l’entreprise Doux. Une centaine d’emplois seront concernés.

L’affaire Doux a révélé des dysfonctionnements graves de la justice commerciale et a fait naître une certaine suspicion sinon sur l’impartialité du moins sur l’efficacité de la juridiction. C’est pourquoi les services du ministère du redressement productif travaillent actuellement avec ceux de la garde des sceaux, Mme Christiane Taubira, pour perfectionner les règles de fonctionnement de la justice commerciale.

J’en viens aux chantiers navals STX. Il faut rappeler que l’industrie navale présente un intérêt industriel et stratégique incontestable pour la France. Comme vous le soulignez, monsieur le sénateur, cette industrie est également porteuse d’emplois et représente, à ce titre, un enjeu local important pour les bassins d’emploi concernés. L’État, notamment en tant qu’actionnaire indirect au travers du FSI, exerce sa vigilance sur les difficultés actuellement rencontrées par l’industrie navale, en particulier par STX Lorient. Il est très attentif au redressement de l’entreprise, à sa pérennité et au développement de l’activité du site de Lorient.

De manière plus générale, des mesures concrètes ont déjà été prises pour protéger les entreprises, les emplois et les salariés, dans le Morbihan tout comme dans l’ensemble des départements. Face à l’avalanche des plans sociaux, un dispositif ad hoc a été mis en place pour compléter la mission du comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI.

Jusqu’alors, seules les entreprises de plus de 400 salariés pouvaient s’adresser à un service de l’État. Depuis, les PME de moins de 400 salariés peuvent faire appel au soutien des commissaires au redressement productif et au cabinet du ministre. Les commissaires au redressement productif en région, qui assurent la veille permanente et l’intervention la plus en amont possible des difficultés, mobilisent les services de l’État et participent aux négociations.

Le CIRI, les Médiations du crédit et des relations inter-entreprises industrielles et de la sous-traitance, Oséo, le FSI et les fonds spécialisés sont autant d’outils à la disposition du ministère pour aider les entreprises qui en ont besoin. La cellule « restructuration » du cabinet du ministre du redressement productif suit les dossiers les plus sensibles et assure la coordination des acteurs.

Enfin, il faut rappeler que, le 5 novembre prochain, Louis Gallois remettra au Premier ministre un rapport sur la compétitivité. Ses conclusions devraient permettre d’ébaucher les réformes grâce auxquelles notre pays pourra rééquilibrer sa balance commerciale et augmenter la part de l’industrie dans la richesse produite.

À la suite de ce rapport, le Gouvernement prendra ses responsabilités.

Les enjeux sont nombreux : à la compétitivité-coût, il faut ajouter la stratégie filière par filière, que le ministre souhaite renforcer dans le cadre de la Conférence nationale de l’industrie, ou encore le financement de nos entreprises, problématique à laquelle doit répondre la banque publique d’investissement. Ces différentes mesures auront des retombées positives pour l’emploi industriel en France, dans l’ensemble des territoires, donc aussi dans le Morbihan.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Madame la ministre déléguée, j’ai bien pris note de vos annonces en matière de reclassement et de mesures sociales.

Quant à l’appel au « combat », que vous avez à votre tour repris, il est bien agréable à entendre, mais il ne restera qu’un mot s’il n’est pas associé à la réussite. Car n’oubliez pas la détresse de nos concitoyens, la détresse de ceux d’en bas, que je fais remonter aujourd’hui jusqu’ici. À ce jour, ceux-là ont-ils obtenu des garanties, ont-ils des raisons d’espérer ? Je ne saurais le dire…

Il est urgent d’agir à l’égard des salariés des chantiers STX de Lorient, car, une fois les emplois perdus, il est très difficile de les recréer. Il convient de maintenir les emplois existants en attendant, éventuellement, de faire mieux.

Pour les salariés, se posent les questions de la revalorisation des salaires, des qualifications et de la formation initiale, continue ou professionnelle. Sur ce dernier point, il y a urgence, eu égard à la situation actuelle. On ne peut pas laisser des centaines de milliers de personnes sur le bord de la route, désespérées.

Derrière cette crise de nos industries et ses effets dévastateurs se profilent des évolutions structurelles qu’il faut impérativement anticiper, même si nous ne sommes pas maîtres en la matière, les actionnaires semblant décider de tout. Je souhaite que l’on recrée les conditions de l’espoir, car c’est attendu, madame la ministre déléguée.

Tous ces licenciements, toutes ces fermetures d’entreprises entérinent le règne de la loi des plus forts et la toute puissance des actionnaires, amplifiant les concurrences et les inégalités, construisant une société de plus en plus inhumaine. Pas de lendemain qui chante en vue, pour l’instant. Le mot « combat » devrait produire des effets en l’espèce.

La situation de l’emploi dans le Morbihan et, plus généralement, dans notre pays demanderait un développement solidaire et protecteur des salariés dont l’État serait le garant. Selon moi, il convient de créer, maintenant, un système de sécurité emploi-formation. Ce serait un vrai changement !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République des Philippines tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu (procédure accélérée) (projet n° 788, texte de la commission n° 30, rapport n° 29).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger

Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, est soumis aujourd'hui à votre approbation l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République des Philippines tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu, signé à Manille le 25 novembre 2011.

Cet avenant vise à mettre en place un cadre juridique général permettant un échange de renseignements effectif et sans restriction ; il prévoit en outre la levée d'un éventuel secret bancaire. L'article de la convention fiscale franco-philippine du 9 janvier 1976 relatif à l'échange de renseignements, modifié par cet avenant, sera ainsi conforme aux standards internationaux en matière de transparence et d'échange d'informations fiscales, notamment au modèle de convention élaboré par l'OCDE.

Je tiens à vous assurer, mesdames, messieurs les sénateurs, que toutes les précautions nécessaires ont été prises par la France afin que cet avenant puisse être suivi d'effet. Les négociations, amorcées par la partie française, sont intervenues après que les autorités philippines eurent modifié de manière significative et effective les dispositions législatives nationales en matière fiscale. Depuis 2009, il n'existe plus de restrictions à l'échange d'informations de nature bancaire, conformément aux exigences posées par les standards internationaux. Aussi l'OCDE a-t-elle inscrit, dès septembre 2010, les Philippines sur sa « liste blanche » des États et territoires ayant mis en place les normes internationales en matière fiscale.

Je souhaiterais insister sur un point, mesdames, messieurs les sénateurs : la signature et l'approbation de cet avenant ne sont pas une fin en soi, mais s'inscrivent dans le cadre de la mise en place d'un véritable dispositif de lutte contre les pratiques fiscales dommageables. C'est en effet au moyen de cet avenant que la France consolidera les règles d'échange de renseignements avec ce partenaire et confortera les Philippines dans ses engagements en faveur de plus de transparence fiscale.

La France, comme vous le savez, est très engagée dans la lutte menée par la communauté internationale contre les États et territoires non coopératifs en matière fiscale.

Sur le plan bilatéral, la France est l'un des pays les plus dynamiques, avec la mise en place d'un large réseau conventionnel : depuis mars 2009, la France a signé deux conventions fiscales, onze avenants et vingt-huit accords d'échange de renseignements.

Sur le plan multilatéral, la communauté internationale s'est organisée au sein du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales, enceinte qui s'est fixée pour mission d'évaluer le degré de transparence fiscale, non seulement de chacun de ses membres – 109 États et territoires –, mais également de tout autre territoire qui présenterait des risques dans ce domaine.

À cet effet, le Forum mondial a mis en place un mécanisme d'évaluation par les pairs, présidé par M. François d'Aubert, délégué général à la lutte contre les paradis fiscaux.

Ces évaluations se déroulent en deux phases, et les Philippines ont été concernées par cet exercice. En 2011, le rapport de phase 1, qui porte sur le cadre légal de la coopération administrative, a été publié. Ce document note les progrès qui ont été accomplis tant dans la législation philippine interne que dans la conclusion d'accords d'échange de renseignements avec d'autres pays.

Dès lors, les Philippines feront l'objet d'une évaluation qui portera sur les conditions réelles de la mise en œuvre de l'échange d'informations, qui est programmé pour se dérouler au premier semestre de 2013 ; il s'agira là de la phase 2. Cet avenant vient par conséquent enrichir l'analyse, par le Gouvernement et les instances multilatérales, de l'effectivité de l'échange de renseignements.

Sur le plan national, enfin, la France s'est dotée, comme vous le savez, de sa propre liste des États et territoires non coopératifs. Les territoires figurant sur cette liste sont soumis à des sanctions fiscales lourdes, telles que le refus, pour les sociétés françaises, de se voir accorder le bénéfice du régime mère-fille pour leurs filiales situées dans ces territoires.

Les Philippines, qui figurent actuellement sur cette liste, pourront en sortir si l'avenant entre en vigueur avant le 31 décembre prochain. Pour autant, s'il apparaissait que l'évaluation par le Forum mondial était défavorable en phase 2 ou que l'assistance administrative prévue par l'avenant ne se déroulait pas de manière satisfaisante, la réinscription des Philippines sur la liste française deviendrait à l'ordre du jour.

En conclusion, je voudrais souligner la nouvelle avancée dans la lutte contre l'évasion et la fraude fiscales que constitue la conclusion de cet avenant.

Ce texte, mesdames, messieurs les sénateurs, permettra de confirmer les engagements pris par le Gouvernement philippin sur la scène internationale en matière de transparence fiscale.

Il permettra aussi de prendre acte des dispositifs législatifs récemment adoptés par les autorités philippines et de mettre en conformité les règles d'échange de renseignements avec les standards internationaux les plus récents.

Naturellement, soyez assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, que l'application de cet avenant, étayant la politique fiscale menée par la France, sera suivie avec le plus grand intérêt par les services de l'État.

Telles sont, monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'avenant à la convention fiscale franco-philippine qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation. §

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, qui peut jouer les oracles ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Certains de nos collègues émettront sans doute des réserves quant à l'approbation de l'avenant franco-philippin.

Cependant, la meilleure façon de prédire l'avenir de la coopération fiscale franco-philippine, c'est encore de le créer, en prévoyant les conditions nécessaires à la mise en œuvre de celle-ci. Tel est l'objet du présent projet de loi.

En effet, une chose est certaine : si nous n'approuvions pas l'avenant à la convention fiscale franco-philippine, la coopération entre les deux pays demeurerait lettre morte, car cela reviendrait à permettre aux Philippines de ne pas pratiquer l'échange de renseignements, en invoquant le secret bancaire.

Tel est l'enjeu de ce texte. Les Philippines n'ont aujourd'hui aucune obligation de répondre à une demande française de communication de renseignements détenus par un établissement financier.

Les stipulations de la convention fiscale de 1995 sont obsolètes. Le secrétariat de la commission des finances a interrogé le bureau du contrôle fiscal de la direction de la législation fiscale du ministère de l'économie et des finances, qui a confirmé que, en l'état actuel des choses, aucune coopération fiscale n'était possible. Seule la modification de la convention permettra d'imposer aux autorités philippines de transmettre de telles informations.

C'est pourquoi l'avenant actualise la convention en y intégrant les dernières normes de l'OCDE de 2005 en matière de transparence, c'est-à-dire la levée du secret bancaire et l'obligation de coopérer, même en l'absence d'intérêt fiscal domestique.

Cette approbation est donc nécessaire. Sera-t-elle suffisante ? Je comprends les réserves qu'Éric Bocquet a émises lors de l'examen du texte en commission : l'approbation de l'avenant intervient dans un difficile contexte de crise, alors que l'évasion fiscale a été dénoncée par la commission d'enquête sénatoriale dont il a été le rapporteur.

C'est pourquoi, face au constat dressé par cette commission, j'ai examiné le cadre financier et juridique philippin.

Disposant d'une supervision prudentielle jugée satisfaisante par les agences de notation, le système bancaire est toutefois caractérisé par la présence des conglomérats, souvent contrôlés par les « grandes familles » sino-philippines ou hispano-philippines. Le poids des oligarchies n'est donc pas négligeable.

Néanmoins, aucune banque française n'a de licence aux Philippines, ni n'est actionnaire de banques philippines. Sur les quatre unités bancaires offshore installées dans le pays, deux sont françaises : BNP Paribas et Crédit Agricole. Ce chiffre est à apprécier au regard des vingt-quatre établissements bancaires français présents aux Îles Caïmans et des douze banques françaises implantées aux Bermudes.

Quant aux entreprises françaises présentes aux Philippines, sur les 180 recensées, on ne compte qu'une trentaine de sociétés importantes, dont Total, Essilor, L'Oréal. Au final, c'est assez modeste.

S'agissant des aspects juridiques, je me suis référée aux travaux du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales. Cette instance a considéré, en juin 2011, que les Philippines disposaient du cadre normatif nécessaire pour coopérer. Elle a, certes, proposé des voies d'amélioration. Deux d'entre elles ne concernent pas la coopération avec la France, puisqu'elles traitent de la mise à jour du réseau conventionnel. Le présent avenant répond donc aux recommandations du Forum mondial.

Quant aux deux autres recommandations, relatives aux mandataires ainsi qu'aux sociétés immatriculées à l'étranger, le Forum mondial a confirmé auprès de notre secrétariat que, en pratique, la législation en vigueur les concernant ne constitue pas un obstacle à l'échange d'informations.

En résumé, il existe donc deux éléments sur dix pouvant être améliorés, et aucune carence grave n'a été observée.

Or vous avez tous en mémoire, mes chers collègues, l'examen devant le Sénat du projet de loi tendant à approuver la ratification de la convention franco-panaméenne, rapporté par notre ancienne collègue Nicole Bricq, qui s'était achevé par un rejet du texte.

Le Forum mondial avait alors constaté cinq carences graves en matière de disponibilité de l'information panaméenne et d'accès à celle-ci, sur les dix critères de référence.

Le Panama ne disposait donc pas du cadre normatif nécessaire à la coopération fiscale. Tel n'est pas le cas des Philippines.

Parmi les progrès constatés – j'y insiste, car c'est certainement l'avancée la plus importante –, les Philippines ont adopté, en 2009, des dispositions législatives dérogeant au secret bancaire dans le domaine de l'assistance internationale.

La rédaction de l'avenant est également plus stricte que celle du modèle OCDE. Elle prévoit que les Philippines doivent « prendre les mesures nécessaires afin de garantir la disponibilité des renseignements ».

Rappelons aussi qu'aucune contrepartie à la mise à jour de la convention n'a été accordée par la France.

La signature de l'avenant est intervenue sept mois après son paraphe, afin de vérifier la mise en œuvre réglementaire de la dérogation législative au secret bancaire. Les textes d'application ont été étudiés par le secrétariat de la commission des finances et sont annexés au rapport.

Enfin, toujours au titre des éléments en faveur de l'approbation, il convient de souligner la volonté politique exprimée par le Président Benigno Aquino de procéder à une « chasse contre l'évasion fiscale ».

Si l'approbation de l'avenant apparaît donc comme nécessaire, elle n'est cependant pas neutre, et emportera un certain nombre de conséquences. La transparence fiscale s'en trouvera, certes, renforcée. Toutefois, les Philippines seront retirées de la liste française des États et territoires non coopératifs établie en 2010, alors que ce pays figurait sur la « liste grise » de l'OCDE, qu'il a quittée depuis.

Nous devons donc faire preuve d'une vigilance particulière. Il ne s'agit pas ici d'accorder un blanc-seing.

Nous savons à quel point les aspects politiques et culturels, notamment liés à l'influence des oligarchies, peuvent peser sur la coopération fiscale. Ceux-ci ne doivent pas être sous-estimés. Nous verrons, en 2013, dans quelle mesure ce pays pourra les surmonter.

Les Philippines seront à nouveau évaluées au cours du premier semestre 2013 par le Forum mondial, afin d'apprécier concrètement l'état d'avancement de la coopération, et pas uniquement son environnement juridique. L'absence de coopération, si elle devait être constatée, serait sanctionnée par la réintégration sur la liste française.

En conclusion, mes chers collègues, sous réserve des observations précédentes, la commission des finances vous propose d'adopter le présent projet de loi visant à approuver l'avenant à la convention fiscale conclue avec les Philippines en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous devons aujourd'hui approuver un avenant à la convention fiscale entre la France et les Philippines, car cette convention, signée en 1976 et amendée une première fois en 1995, n'est plus conforme aux standards internationaux en matière d'échange de renseignements. L'avenant sur lequel nous avons à nous prononcer vise donc à remédier à cette situation, qui constitue une entrave tant à la coopération entre les deux pays qu'à la lutte contre l'évasion fiscale.

Certes, on peut s'interroger sur le calendrier choisi pour la ratification de cet instrument qui a été signé, je le rappelle, en novembre 2011 par le précédent gouvernement.

Pourquoi donc devons-nous nous intéresser aujourd'hui aux Philippines ? Peut-être n'est-ce pas sans rapport avec la visite imminente de notre Premier ministre dans cet archipel comptant près de 95 millions d'habitants ? Si cette visite permet d'achever le processus de ratification et d'avancer vers plus de transparence en matière fiscale, alors elle sera très positive.

Où en sommes-nous aujourd'hui ? Faut-il le rappeler, bien que le G20, lors de son sommet de Londres d'avril 2009, ait « déclaré la guerre » aux paradis fiscaux, ce combat est encore loin d'être gagné, comme le montrent très bien les conclusions de la commission d'enquête sénatoriale sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales.

L'OCDE reconnaît que, sur plus de 700 accords d'échange d'informations fiscales conclus depuis 2009, seul un sur trois est entré en vigueur, un sur cinq seulement étant conforme aux standards internationaux.

Outre les clauses des conventions elles-mêmes, un second obstacle à l'échange d'informations peut résider dans l'incapacité normative et administrative du pays concerné à fournir les renseignements demandés.

En décembre 2011, le Sénat, appelé à se prononcer sur la ratification de la convention fiscale avec Panama, s'y était opposé en raison de la faiblesse avérée du système juridique et fiscal de cet État. En effet, selon le Sénat, qui avait exprimé sur cette question un avis différent de celui de l'Assemblée nationale, Panama n'était pas en mesure de garantir un échange d'informations efficace et transparent, comme le montraient les observations du Forum mondial.

Les Philippines, au contraire, ont mis en œuvre des réformes permettant d'espérer une coopération et un échange de renseignements fiscaux effectifs et efficaces. Ainsi, ce pays a supprimé, depuis 2010, les restrictions d'accès aux informations bancaires. Je rappelle que c'était sa législation particulièrement restrictive sur le secret bancaire qui lui avait valu d'être inscrit en 2009, par l'OCDE, sur la « liste noire » des juridictions non coopératives.

Aujourd'hui, ses progrès lui ont permis de sortir des différentes listes établies par cette organisation. Les Philippines ont également passé avec succès la première phase de la revue par les pairs du Forum mondial, ce qui signifie qu'elles disposent d'un cadre juridique suffisant pour échanger des informations. Cependant, des obstacles juridiques à l'échange de renseignements subsistent, et c'est seulement à l'issue de la seconde phase de cet examen par les pairs, qui devrait débuter en 2013, que l'effectivité de la coopération et la capacité du pays à se conformer à ses engagements en matière de transparence seront vérifiées.

L'avenant à la convention fiscale avec les Philippines sur lequel nous sommes amenés aujourd'hui à nous prononcer est conforme aux standards les plus récents de l'OCDE. Il devrait donc constituer une avancée importante en matière de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, comme l'affirme l'étude d'impact.

Je note que le Gouvernement français, lors de la négociation de cet avenant, avait pris des précautions supplémentaires, en complétant l'article relatif à l'échange d'informations par une clause prévoyant que chaque État contractant doit prendre les mesures nécessaires afin de garantir la disponibilité des renseignements et la capacité de son administration fiscale à accéder à ceux-ci et à les transmettre.

Il faudra cependant rester très vigilants sur l'application effective d'un tel accord et réintégrer immédiatement les Philippines sur la liste française des États et territoires non coopératifs en cas de non-respect des clauses de cet avenant.

Soyons d'autant plus vigilants que, comme l'a très bien rappelé notre collègue Michèle André dans son rapport, « le contexte géopolitique constitue un facteur déterminant dans la mise en œuvre effective de la coopération fiscale ». Or, vous avez également précisé, madame la rapporteure, que le « contexte politico-social » des Philippines « semble, à bien des égards, complexe et fragile ». C'est bien le moins que l'on puisse dire, malgré des avancées récentes en matière de lutte anticorruption et la signature, le 7 octobre dernier, d'un accord de paix entre le Gouvernement philippin et les rebelles sécessionnistes musulmans de la région de Mindanao, mettant fin à plus de quarante ans de conflit.

Madame la ministre, mes chers collègues, malgré les réserves que je viens d'exprimer, le RDSE, convaincu de la vigilance du Gouvernement quant au respect des obligations conventionnelles et à l'effectivité de l'échange de renseignements fiscaux, approuvera la ratification de cet avenant à la convention avec la République des Philippines, qui constitue un pas de plus dans la lutte contre l'évasion et la fraude fiscales, lutte que nous soutenons.

Debut de section - PermalienPhoto de Kalliopi Ango Ela

Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, du fait de l'évasion fiscale, entre 40 milliards et 50 milliards d'euros de recettes échapperaient au Trésor français chaque année. Il est donc nécessaire que nous soyons tous mobilisés pour combattre ce qui se révèle être un véritable fléau.

Le groupe écologiste a d'ailleurs pris part aux travaux de la commission d'enquête sénatoriale sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, y étant fort bien représenté par notre très chère collègue Corinne Bouchoux !

Le rapport de cette commission d'enquête permet de disposer, depuis le mois de juillet, d'une étude de qualité facilitant l'appréhension de l'ampleur du phénomène de l'évasion fiscale. Elle aborde notamment les différents montages qu'il recouvre, qu'il s'agisse de la fraude fiscale ou des divers schémas d'optimisation fiscale abusive. Le débat mené à ce sujet dans notre hémicycle, le 3 octobre dernier, a, en particulier, mis l'accent sur la nécessité de renforcer l'information des pouvoirs publics. C'est dans ce cadre que s'inscrit le projet de loi qui nous est aujourd'hui soumis.

En effet, comme l'a rappelé Mme la rapporteure, la conclusion d'un accord d'échange de renseignements ou la mise en conformité d'une convention fiscale avec les normes de l'OCDE participe pleinement de la politique de promotion de la transparence fiscale.

Le présent projet de loi vise à soumettre à notre approbation la ratification d'un avenant à la convention franco-philippine conclue à Kingston le 9 janvier 1976. Cette convention tend à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu. L'avenant, signé à la demande de la France le 25 novembre 2011, a pour objet d'actualiser ladite convention, afin d'y intégrer les dernières exigences du modèle de convention fiscale de l'OCDE, telles que la levée du secret bancaire sans restriction, disposition ajoutée en 2005.

En l'état actuel des choses, aucune coopération fiscale n'est possible avec l'État philippin. Cet avenant est donc nécessaire pour que les autorités philippines soient contraintes d'échanger des renseignements.

Cependant, les sénatrices et sénateurs écologistes sont évidemment très attentifs aux conséquences de la ratification de cet avenant. S'il a pour objet de renforcer la transparence fiscale, il ne doit en aucun cas avoir pour conséquence d'accorder un blanc-seing à l'État philippin, comme l'a d'ailleurs rappelé Mme la rapporteure.

La ratification de cet avenant entraînera en effet le retrait des Philippines de la liste française des États et territoires non coopératifs, établie pour faire suite aux engagements en faveur de la transparence fiscale pris lors du sommet du G20 du 2 avril 2009.

Or la présence d'un État ou d'un territoire sur cette liste conduit à l'application automatique de sanctions fiscales. Il est donc parfaitement légitime de se poser la question du bien-fondé de la ratification de cet avenant. Si la prudence est de mise, les réponses apportées nous semblent, cependant, plaider en faveur de cette ratification.

En effet, d'une part, le 27 juillet 2009, les Philippines ont opéré des modifications de leur législation interne en matière d'échange de renseignements fiscaux. Il en résulte que le secret bancaire ne continue à s'appliquer que pour des situations purement intérieures. Il est donc désormais levé concernant l'assistance administrative internationale dans le domaine fiscal.

D'autre part, le Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales a estimé, en 2011, que l'ensemble du cadre normatif philippin et l'accès aux informations étaient conformes aux standards de l'OCDE, en ce qui concerne la disponibilité des renseignements bancaires.

Enfin et surtout, comme l'a souligné Mme la rapporteure, l'approbation d'une clause conventionnelle permettant l'échange de renseignements n'exclut pas un contrôle accru des modalités de sa mise en œuvre, dans le cadre tant international que national.

Deux garanties supplémentaires incitent donc le groupe écologiste à voter en faveur de l'adoption de ce projet de loi : la réévaluation par le Forum mondial, au début de 2013, de la réalité de la coopération avec l'État philippin ; la garantie que cette question fera également l'objet d'un suivi par les autorités françaises, lequel conduira, en cas de manquement, à une réintégration des Philippines dans la liste française des États et territoires non coopératifs. Dès lors, dans l'hypothèse où, en dépit de la ratification, les Philippines ne permettraient pas un échange effectif de renseignements, un retour au système actuel sera toujours possible.

Nous serons évidemment extrêmement attentifs à la mise en œuvre de cet avenant, et en appelons à la vigilance du Parlement à cet égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, on pourrait évidemment se demander pourquoi nous avons pu, une fois encore, solliciter l'inscription à l'ordre du jour de nos travaux en séance publique d'un débat portant sur un accord international en matière fiscale, d'autant que, s'agissant du présent avenant à la convention fiscale entre la France et les Philippines, certaines garanties quant à sa pertinence paraissent devoir être retenues aux termes du rapport qui vient de nous être présenté.

Mais cette discussion est, pour nous, l'occasion de revenir sur quelques-uns des sujets fondamentaux qui nous préoccupent depuis que nous avons pris l'habitude d'évoquer la coopération fiscale internationale, la lutte contre l'évasion et la fraude fiscales au travers de ces nombreux accords qui, depuis 2008, font l'objet de projets de loi de ratification.

Sur le plan économique, les Philippines demeurent un grand pays rural. Les activités agricoles, insuffisantes pour nourrir une population qui croît de 2 % par an encore aujourd'hui, occupent en effet quelque 40 % de la main-d'œuvre locale.

Les inégalités sociales sont criantes dans ce pays ayant connu une longue période de dictature sous le président Marcos. Au demeurant, la révolution de 1986, qui conduisit Ferdinand et Imelda Marcos à un exil doré sur l'archipel de Hawaii, n'a pas fondamentalement changé les choses.

En lieu et place du détournement des fonds publics perpétré par Marcos et les membres de sa famille, ses parents, alliés et amis, on assista en effet au retour en force des familles oligarchiques de la très haute bourgeoisie locale, qui eurent tôt fait de confisquer l'aspiration populaire au changement pour mieux asseoir leur pouvoir politique.

La Constitution de 1987, largement inspirée des règles nord-américaines, a créé un régime politique où les prérogatives réelles du Président de la République sont associées à un mode de désignation des parlementaires favorisant les positions de force assurées par la puissance économique.

Les différences entre les partis politiques représentés au Parlement ne sont pas fondamentales et participent de cette forme de confiscation du suffrage populaire opérée par ceux-là mêmes qui en ont les moyens.

Dans le classement des pays établi selon différents indices internationaux, les Philippines ne sont pas très bien placées.

En matière de droits politiques et de libertés civiles, le pays s'inscrit en effet dans une moyenne plutôt basse. Si la justice locale jouit d'une bonne réputation d'indépendance, la population subit encore beaucoup les exactions des forces de l'ordre, la pratique des exécutions extrajudiciaires et autres problèmes, liés d'ailleurs en partie à l'instabilité de régions du pays en rébellion contre le pouvoir central, notamment du côté de Mindanao. Depuis le début de l'année, cinquante-cinq militants de la cause environnementale ont été tués aux Philippines pour s'être opposés à des projets d'exploitation minière.

En outre, malgré certains efforts, le pays ne présente pas encore les conditions optimales pour que soit garanti le plein exercice de la liberté de la presse.

Sur le plan de la transparence financière, il semble bien qu'il y ait encore beaucoup à faire, et c'est là que le bât blesse au regard du sujet qui nous occupe aujourd'hui.

Selon Transparence International France, ONG dont nous avons recueilli le témoignage dans le cadre des travaux de la commission d'enquête sénatoriale sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, les Philippines se situent plutôt en queue de peloton de ce point de vue, avec une note qui les place au niveau de la Syrie et derrière des pays comme la République de Panama, avec laquelle le Sénat avait jugé utile, il y a peu, de prendre quelques précautions en matière de coopération fiscale.

Il ne faut jamais oublier qu'une convention fiscale intéresse autant le pays tiers concerné, en l'occurrence les Philippines, que les entreprises françaises qui pourraient être tentées d'y investir. Il convient donc de s'entourer de garanties permettant à ces dernières de le faire sans risquer, si l'on peut dire, de « coup de bambou » fiscal en retour.

Nous ne sommes cependant pas spécifiquement enclins à retirer, dès l'approbation de cet avenant, les Philippines de la liste des États et territoires non coopératifs que nous avons établie pour notre propre législation.

Il nous semble même souhaitable, dans le cas qui nous occupe, de décider que l'ensemble des pays ayant passé une nouvelle convention fiscale avec la France soient maintenus dans la liste d'origine et que seul l'apport de preuves manifestes et incontestables de qualité et de transparence des opérations d'investissement menées dans ces pays permette de considérer que la situation de telle ou telle entreprise, de tel ou tel investisseur, est conforme au droit. Ayons en tête, mes chers collègues, cette fameuse « culture de la faille », mise en évidence au cours des travaux de notre commission d'enquête.

Nous n'avons rien contre le développement de nos échanges avec les Philippines et de nos investissements dans ce pays, mais nous souhaitons le placer, en quelque sorte, sur liste d'attente, pour ce qui est du traitement fiscal des dossiers concernés en droit français. Si, dans les deux, trois ou cinq ans à venir, nous n'avons aucune raison de nous plaindre de la qualité de l'information fournie tant par l'administration fiscale philippine que par les entreprises françaises investissant là-bas, rien ne pourra justifier qu'un traitement particulier soit mis en œuvre.

Au bénéfice de ces observations, nous indiquons que, sans nous opposer à l'approbation de cet avenant, nous ne voterons pas, néanmoins, le présent projet de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de l'article unique.

Est autorisée l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République des Philippines tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu, signé à Manille, le 25 novembre 2011, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix l'article unique constituant l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants, M. le ministre de l'intérieur étant retenu à l'Assemblée nationale par des questions d'actualité au Gouvernement.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quinze heures cinq, est reprise à quinze heures quarante.