Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 16 octobre 2012 à 14h30
Lutte contre le terrorisme — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

Monsieur le ministre, vous avez employé les mots qui conviennent, dans un discours marquant une véritable volonté politique quand la République est menacée, comme elle l’est dans la période actuelle.

Les méthodes du terrorisme évoluent, pas son fondement, contraire à ce qui fait l’essence de l’humanité. Le terrorisme est de toutes les époques. Il renaît constamment de l’expression du fanatisme, monstre issu de tous les obscurantismes et croissant au gré des misères des peuples.

Chaque renaissance du terrorisme est vécue comme la survenance d’un mal nouveau. En réalité, les peuples ont peu de mémoire. Qui se souvient aujourd’hui des attentats anarchistes de la fin du xixe siècle ?Qui se souvient que la iiie République a perdu deux de ses Présidents, Sadi Carnot et Paul Doumer ? Il n’est de régime auquel le terrorisme ne s’est attaqué, et il en est ainsi depuis la période historique.

La violence est rarement légitime, et nombre de justes causes l’emportèrent sans y recourir – Gandhi en donna l’exemple –, mais elle est encore plus illégitime lorsqu’elle s’en prend à des régimes fondés sur la volonté du peuple et la démocratie.

Revendications territoriales, revendications sociales ou, plus fréquemment, fanatismes religieux, dans tous les cas, le terrorisme s’en prend au fondement même de nos sociétés démocratiques. Qu’il s’agisse d’actions de fondamentalistes religieux ou de l’ETA, ou encore d’assassinats en Corse – tel celui du préfet Érignac, l’actualité démontrant que ces actes ignobles ont toujours cours –, le processus est similaire.

Nous devons combattre ce fléau en n’oubliant pas que, au-delà des actes abjects visant des personnalités, ce sont plus souvent des citoyens anonymes qui tombent, victimes de cette barbarie.

Les moyens utilisés par les terroristes évoluent avec la société ; aujourd’hui, l’utilisation de nouveaux moyens de communication, de déplacement, a changé la donne. Nos sociétés doivent adopter des moyens de lutte adéquats. La menace, vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, ne vient pas seulement de l’extérieur, elle a aussi gangrené l’intérieur.

Quels sont les objectifs d’une politique antiterroriste dans un pays démocratique ?

Il s’agit de donner les moyens humains, matériels et législatifs aux services compétents et aux magistrats pour prévenir le terrorisme et le réprimer.

Il s’agit d’appliquer la loi de la République sans aucune faiblesse, en faisant usage de la force si nécessaire : aucune concession, aucun laxisme.

Il s’agit aussi, parce que la France est une belle démocratie, de respecter les principes fondamentaux de notre droit et les libertés fondamentales de nos concitoyens.

Cet équilibre peut et doit faire l’objet du plus large consensus, c’est l’intérêt national : vous nous y avez appelés, monsieur le ministre. Je ne suis pas choqué, à cet égard, que l’exposé des motifs du présent texte reprenne littéralement certains éléments du projet de loi déposé en avril dernier par Michel Mercier, alors garde des sceaux. Il est des constats dont la pertinence perdure quels que soient les changements de majorité.

Cela étant dit, le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui présente des différences notables avec le texte précédent.

Il vient en urgence, pour une raison évidente qui ne saurait échapper à personne : ce projet de loi inclut la question de la prorogation des dispositions temporaires instituées par la loi du 23 janvier 2006, dispositions expirant le 31 décembre 2012 et considérées comme indispensables par les services compétents, qu’elles soient prorogées ou pérennisées.

Il fallait que la procédure législative soit respectée, Mme Troendle y tenait à juste titre ; voilà qui est fait.

Le texte du gouvernement précédent n’incluait pas la question de la prorogation des dispositions de la loi de 2006, et si la droite était restée aux commandes de l’exécutif, il eût fallu de toute façon présenter un nouveau texte en urgence.

Autre différence notable, le texte précédent créait en droit pénal quatre nouvelles incriminations, ce qui pouvait d'ailleurs expliquer qu’il soit porté par le ministre de la justice, alors que le texte qui nous est soumis procède de M. le ministre de l’intérieur.

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