J’aurai, dans un premier temps, des remarques à formuler sur la forme.
En effet, je souhaite rappeler que les dispositions que l’article 1er vise à faire perdurer ont été initialement prévues à titre temporaire. Selon nous, elles ne peuvent être indéfiniment prorogées sans que le Parlement s’interroge sur leur réelle pertinence.
Par ailleurs, compte tenu du caractère liberticide des articles 3, 6 et 9 de la loi du 23 janvier 2006, qui concernent les contrôles d’identité dans les trains internationaux, la communication des données de connexion ou d’identification électroniques et l’accès à certains fichiers, il aurait été intéressant que l’avis rendu le 13 septembre dernier par la CNIL, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, au sujet de ce projet de loi soit rendu public afin d’alimenter le débat, et donc que la commission le demande.
J’en viens au fond. L’article 3 de la loi de 2006 élargit le champ d’application des contrôles d’identité « Schengen » qui peuvent être effectués dans les trains assurant des liaisons internationales.
Selon nous, cette disposition ne relève en aucune manière de la lutte contre le terrorisme : les contrôles d’identité n’ont jamais joué un rôle en la matière ; en réalité, ils ont pour seul objectif la lutte contre l’immigration clandestine. Or cet amalgame entre terrorisme et immigration n’est pas tolérable.
L’article 1er du projet de loi proroge également jusqu’au 31 décembre 2015 l’accès aux fichiers administratifs par les services de police et de gendarmerie.
Pour mémoire, je rappelle que, depuis la loi du 23 janvier 2006, des agents sont individuellement habilités à accéder à six grands fichiers administratifs nationaux et aux données à caractère personnel collectées en vertu de la lutte contre le terrorisme. Sont concernés : le fichier national des immatriculations ; le système national de gestion des permis de conduire ; le système de gestion des cartes nationales d’identité ; le système de gestion des passeports ; le fichier relatif aux dossiers des ressortissants étrangers en France ; enfin, les données à caractère personnel qui portent sur les étrangers franchissant les frontières sans remplir les conditions requises d’entrée sur le territoire et les données à caractère personnel biométriques relevées à l’occasion d’une demande ou d’une délivrance de visa.
De fait, c’est une grande partie de la population séjournant ou résidant en France qui figure dans les fichiers ainsi ouverts aux agents de la police administrative.
Enfin, se trouve prorogée la disposition permettant la réquisition de certaines données relatives à des communications électroniques. La loi du 23 janvier 2006 mentionne en effet que les personnes qui offrent une connexion en ligne par l’intermédiaire d’un réseau sont soumises aux mêmes obligations que celles qui sont déjà applicables aux opérateurs de communications électroniques, à savoir la conservation des données de connexion, notamment l’identité du titulaire d’une ligne, la liste des communications d’un abonné et la géolocalisation.
La communication d’informations résultant des données techniques ainsi conservées est à la disposition non plus seulement de l’autorité judiciaire, mais aussi d’agents de police et de gendarmerie, sous le contrôle de la Commission nationale de contrôle des interruptions de sécurité et d’une personnalité désignée par cette instance. Ces mesures dérogent évidemment aux principes fondamentaux de la protection des libertés individuelles.
Comme l’avait souligné la CNCDH, la Commission nationale consultative des droits de l’homme, on assiste « une fois encore, au développement des pouvoirs de police administrative dans la mise en place de ce système de surveillance d’une activité privée des citoyens dans des lieux d’expression publics que sont les cybercafés, le tout au détriment des prérogatives auparavant laissées à la seule autorité judiciaire gardienne des libertés. C’est […] cette dérive qui est inquiétante. »
Monsieur le président, cette intervention sur l’article vaut également défense de l'amendement n° 17.