ni des services d'assistance portuaire. Cependant, pendant ces semaines de préparation, j'ai trouvé bien des points communs avec des préoccupations que l'on connaît bien en pays minier, et d'abord, l'emploi, ou plutôt la destruction d'emplois dans des pans entiers de notre économie, avec toutes les conséquences que cela emporte en termes de savoir-faire et de vitalité de nos territoires.
J'ai consulté les marins et leurs employeurs, les armateurs, petits et grands, les responsables administratifs du secteur maritime dans notre pays, aussi bien que des élus de tout bord. Tous refusent de voir l'emploi maritime continuer de reculer en France, comme il le fait depuis de trop nombreuses années. Charles Revet a coutume de le dire, nous disposons de la première zone maritime du monde, mais notre marine marchande est passée du peloton de tête à la 28ème place mondiale en trois décennies !
J'ai rencontré des marins en colère contre des conditions déloyales de concurrence, des salariés attachés à leur travail et qui ne supportent plus de subir, en France même, la concurrence d'autres marins qui, sur des bateaux européens, sont moins payés, moins couverts, et moins contrôlés. La violence de la mondialisation, avec son cortège de délocalisations est peut-être pire dans le transport maritime, parce que c'est dans nos ports même et le long de nos côtes que des armateurs font travailler des marins dans des conditions mondialisées, libéralisées, c'est-à-dire indignes. Comme l'harmonisation sociale n'existe pas, nos marins voient tous les jours, impuissants, des navires européens plus compétitifs, parce qu'ils emploient des gens de mer venus des pays pauvres et travaillant dans nos eaux territoriales à des conditions dont nous ne voulons pas. Cette violence nourrit la colère des marins que j'ai rencontrés. Ils ont des reproches à faire aux responsables politiques : on leur a beaucoup promis, rien n'est venu.
Oui, ce sujet revêt une dimension humaine et politique. Je veux croire qu'au-delà de nos différences, nous serons tous d'accord pour reconnaître combien la concurrence est peu loyale dans le travail maritime et pour refuser d'aligner nos conditions de travail sur celles des pays pauvres.
Les six articles de la proposition de loi poursuivent un même objectif : assurer une concurrence loyale entre les navires de nationalités différentes. Or, imposer l'immatriculation au pavillon français aux navires étrangers, ce serait aller à l'encontre des principes de la libre prestation de services et de la liberté d'établissement qui prévalent depuis une vingtaine d'année au sein de l'Union européenne.
Un règlement européen de 1986 a appliqué au transport maritime le principe de la libre prestation de services : à l'intérieur de l'Union, les ressortissants européens peuvent assurer une activité de transport maritime dans un autre pays que celui de leur résidence ; chaque Etat membre doit garantir une égalité de traitement. Ce règlement a exclu le cabotage national, c'est-à-dire le transport maritime entre deux ports d'un même Etat membre. Il y avait eu un blocage et le traité de l'Union applique au transport la règle de l'unanimité.
Un règlement spécifique, en décembre 1992, tout juste avant l'entrée en vigueur du marché unique, a appliqué au cabotage maritime le principe de la libre prestation de services, à l'exception des petits navires (moins de 650 tonnes) et du cabotage avec les îles, par exemple entre la Corse et le continent. Dans ce cas, « toutes les conditions relatives à l'équipage relèvent de la responsabilité de l'Etat dans lequel le navire effectue le transport », la France pour le trafic Marseille-Corse.