Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux d'être là aujourd'hui pour vous présenter le budget de la mission aide publique au développement. Mais avant de vous présenter les grandes lignes de la mission, je voulais m'excuser du retard pris dans la transmission des documents budgétaires, les questions parlementaires et le rapport bisannuel au Parlement. Nous avons dans ce domaine une marge de progression certaine.
Je me réjouis de pouvoir présenter la mission dans son ensemble car, en tant que ministre délégué chargé du développement, je me suis battu pour défendre l'ensemble de la mission, qui repose effectivement sur deux programmes budgétaires dépendants l'un du quai d'Orsay, l'autre du ministère des finances. Raisonner de façon globale en terme de missions et non pas de programmes budgétaires, est un des éléments de réponses aux critiques de la Cour des comptes sur le pilotage de notre politique.
Concernant la mesure des résultats et la transparence, la préparation des documents budgétaires, bien que finalisée tardivement, a commencé très en amont et il n'a pas été possible dès cette année de progresser dans la mesure de l'efficacité de l'aide. Ces questions seront largement traitées lors des assises du développement et de la solidarité internationale et j'invite les parlementaires à s'associer pleinement à ce processus. Nos services travaillent en parallèle à résoudre les difficultés techniques que présente un tel exercice.
Pour en revenir à la mission budgétaire, la mission budgétaire « Aide publique au développement » est stabilisée en valeur sur la période 2013-2015 par rapport à la dépense réalisée en 2012 (légèrement au-dessus de 3,05 milliards d'euros). La diminution observée par rapport à la LFI 2012 de 200 millions correspond essentiellement à des économies de constatation. La Commission européenne n'a pas décaissé 213,3 millions d'euros sur la dotation française pour 2012 au Fonds européen de développement (FED). Le Gouvernement assume en effet le choix, dans le contexte du redressement des comptes publics, de ne pas avoir redéployé ces crédits vers des dépenses nouvelles. Non seulement nous avons stabilisé le budget, mais nous allons abonder les crédits avec 160 millions d'euros en provenance de la TTF (taxe sur les transactions financières).
Ce budget contient en effet une inflexion politique. Il reprend les 4 engagements pris par le Président de la République durant sa campagne.
Malgré le contexte budgétaire difficile, le Gouvernement, et moi-même avec Laurent Fabius avons obtenu d'affecter 10 % du produit de la taxe française sur les transactions financières au développement, contrairement au Gouvernement précédent qui avait affecté l'ensemble du produit de la taxe au budget. Ces fonds viennent s'ajouter, de manière additionnelle, au budget de l'aide publique au développement. C'est un signal très fort du maintien de l'ambition française en matière de solidarité internationale. Cette décision va au-delà de l'engagement de campagne du Président de la République qui ne portait que sur la taxe européenne.
L'affectation de 10 % du produit de la TTF française permettra de financer des actions, en priorité dans les domaines de la lutte contre le changement climatique et l'environnement, et de la santé, notamment en Afrique. Concrètement, la France prendra des engagements de financements sur la période 2013-2015 correspondant à au moins 10 % du produit de la TTF (1,6 milliard d'euros par an), soit près d'un demi-milliard d'euros, dont une partie sera affectée au Fonds Vert. Les premiers déboursements seront effectués dès 2013 (60 millions d'euros) et monteront en charge progressivement. Au niveau européen, 11 pays ont décidé de participer à une coopération renforcée. La Commission européenne doit présenter un texte remanié d'ici la fin de l'année. Conformément aux engagements pris à Rio par le Président de la République, la France continuera de porter le principe de l'affectation au développement d'une part significative du produit de la future taxe européenne sur les transactions financières.
L'autre engagement du Président de la République qui sera tenu en 2013, c'est le doublement de l'aide aux ONG. Cet engagement portait sur un doublement sur le quinquennat. Nous avons fléché ce doublement sur le quinquennat avec une trajectoire de 45 millions d'augmentation, soit 9 millions par an, et donc 9 millions en 2013 pour commencer. Ce doublement de la part de l'aide passant par les ONG implique de formaliser les relations entre l'Agence française de développement, qui sera le véhicule par lequel transitera cette augmentation, et les ONG concernées. Les règles doivent être clarifiées. Pour la première fois, au premier trimestre 2013, l'AFD mettra en oeuvre un cadre, actuellement en cours de rédaction, de règles de partenariat entre l'Agence et les ONG. Si les crédits qui transitent par les ONG augmentent, c'est pour répondre à la nécessité de développer des projets plus petits, qui ne sont pas de grosses infrastructures fonctionnant par prêts. Ces projets viennent donc en complément de ce que sait faire traditionnellement l'Agence française de développement, ce qui suppose d'établir de manière totalement transparente la politique dans laquelle ils s'inscrivent, d'où la clarification des règles.
Un autre engagement de campagne du Président de la République était de stabiliser la part des dons-projets, le coeur de l'aide en quelque sorte. Nous l'avons fait dans ce premier budget et prévoyons de le faire sur le triennal. Nous avons donc calibré le budget de façon à respecter le troisième engagement qui avait été pris par le Président.
Le Président de la République avait pris un quatrième engagement durant sa campagne celui d'organiser, avant la fin de la première année de son mandat, des assises de la solidarité internationale. Ces assises se sont ouvertes hier. Dans le cadre de ces assises, nous discuterons notamment de nos choix et de nos arbitrages en matière de transparence et d'efficacité. Certes, une grande partie des critiques du rapport de la Cour des comptes, malheureusement justifiées, s'adresse au Gouvernement antérieur sans que nous ayons à en assumer le coût politique, il n'en reste pas moins que nous devons nous appuyer sur ces critiques pour changer les pratiques. Pour cela, nous avons besoin de votre volontarisme, de votre énergie, de votre regard critique. Je compte vraiment sur vous pour faire entendre votre voix et faire des propositions concrètes et argumentées. La loi proposition d'une loi d'orientation, portez-la pendant les assises, tout comme les autres sujets que vous avez évoqués en matière d'efficacité et de transparence. Les assises sont précisément faites pour déboucher sur des modifications concrètes en matière de gestion et de pilotage de notre aide.