Intervention de François Marc

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 7 novembre 2012 : 2ème réunion
Loi de finances pour 2013 — Tome i du rapport général - examen des principaux éléments de l'équilibre

Photo de François MarcFrançois Marc, rapporteur général :

Comme l'année dernière, la discussion budgétaire s'ouvre au Sénat alors que des éléments nouveaux et significatifs ont fait leur apparition dans le débat public. L'an passé, la présentation des grands équilibres du projet de loi de finances, le 2 novembre, était intervenue après l'annonce par le Président de la République, le 27 octobre, d'un effort supplémentaire compris entre 6 et 8 milliards d'euros, dont les modalités avaient ensuite été précisées le 7 novembre. Cette année, la discussion en commission d'un projet de loi de finances et en séance d'une loi de programmation intervient à la suite de l'annonce par le Gouvernement d'une importante réforme des prélèvements obligatoires, devant être mise en oeuvre dès l'année prochaine. Toutefois, en l'état actuel de mes connaissances, les mesures annoncées ne devraient pas avoir, cette année, d'incidence significative sur le solde budgétaire de l'exercice 2013, ni sur le partage de l'effort entre recettes et dépenses pour cette même année.

S'agissant tout d'abord du contexte économique et de la programmation des finances publiques, je serai bref, dans la mesure où nous avons déjà largement évoqué ces questions au sein de notre commission des finances.

Le projet de loi de finances pour 2013 repose sur une hypothèse de croissance de 0,8 %. Si l'on peut débattre de cette prévision, l'écart avec le consensus des conjoncturistes est comparable à celui des années passées. Par ailleurs, je rappelle que nous avons modifié au Sénat la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques pour prévoir que, lorsque le Haut Conseil des finances publiques se prononcera sur l'hypothèse de croissance, il se positionne en fonction des prévisions des conjoncturistes, afin de rendre encore plus difficile le recourt à des hypothèses trop optimistes.

La répartition de l'effort entre les recettes et les dépenses dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour la période 2012-2017 prévoit un retour progressif à un solde structurel nul, en raison notamment d'une réduction du déficit structurel de 2 points de PIB en 2013.

L'effort structurel correspondant, de 1,9 point de PIB, est de 38 milliards d'euros si l'on considère qu'un point de PIB représente 20 milliards d'euros. Le montant des mesures sur les recettes et les dépenses s'établit, quant à lui, à 37 milliards d'euros en 2013 selon le Gouvernement. Ces mesures proviennent, à hauteur de 32,5 milliards d'euros, du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 (répartis entre 10 milliards d'euros d'économies sur les dépenses de l'Etat, 2,5 milliards d'euros d'économies sur les dépenses d'assurance maladie, 10 milliards d'euros de prélèvements sur les entreprises et 10 milliards d'euros de prélèvements sur les ménages), et de 4,4 milliards d'euros d'effets en 2013 des mesures de la loi de finances rectificative de l'été 2012.

J'en viens maintenant à la présentation des grands équilibres du projet de loi de finances pour 2013, suivant une analyse classique des dépenses, puis des recettes et enfin du déficit et de son financement.

Les recettes du budget général enregistrent une progression de plus de 10 %, soit 28,9 milliards d'euros pour s'établir à 299,3 milliards d'euros, à périmètre constant, en 2013. Cette progression s'explique par l'évolution spontanée des recettes fiscales (en hausse de 8,4 milliards d'euros), par l'effet des mesures antérieures à 2013 (lesquelles majorent les recettes de 6,9 milliards d'euros) et enfin par les mesures nouvelles du projet de loi de finances pour 2013, dont l'impact à hauteur de 13,6 milliards d'euros représente près de la moitié de la hausse des recettes.

La présentation détaillée des mesures nouvelles du projet de loi de finances pour 2013 montre que celles-ci proviennent principalement de la réforme de la fiscalité du patrimoine et de l'impôt sur les sociétés. Pour tenir compte de l'ensemble des dispositions fiscales et sociales sur lesquelles se fonde l'équilibre du budget, il faut par ailleurs tenir compte des recettes supplémentaires attendues de la lutte contre la fraude (soit 1 milliard d'euros), du durcissement et de la prorogation du malus automobile (dont l'impact s'élève à + 0,2 milliard d'euros) et des mesures nouvelles figurant au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, soit 4,7 milliards d'euros. Au total, le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoient 19,6 milliards d'euros de recettes supplémentaires.

Il en résulte une amélioration du taux de couverture des dépenses du budget de l'Etat par ses recettes, lequel atteindrait 79,5 % en 2013. Après avoir chuté à seulement 53,3 % en 2010, ce taux retrouverait son niveau de 2008, et serait assez proche de celui des années antérieures, alors qu'il était compris entre 84 % et 85 % jusqu'en 2007.

En ce qui concerne les concours de l'Etat aux collectivités territoriales, ceux-ci sont stabilisés en 2013, alors qu'ils avaient diminué de 200 millions d'euros en 2012. Un effort sera toutefois demandé pour les années 2014 et 2015. Le projet de budget 2013 est fondé sur le strict respect de l'objectif de gel en valeur, pour l'ensemble des transferts financiers de l'Etat aux collectivités territoriales. Par ailleurs, les différents engagements pris sont respectés, puisque le périmètre de l'enveloppe normée exclut le fonds de compensation de la TVA, la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle et la dotation de garantie de reversement des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle. L'année 2013 constitue donc bien une période transitoire qui doit être mise à profit pour établir un nouveau pacte entre l'Etat et les collectivités territoriales.

Le projet de loi de finances pour 2013 augmente de 238 millions d'euros les masses financières de la péréquation verticale, cette hausse s'effectuant parmi l'ensemble des concours de l'Etat, soit entre les diverses composantes de la dotation globale de fonctionnement, soit au sein de l'enveloppe normée par une baisse des variables d'ajustement. La péréquation horizontale est également confortée. Sur ce point, les modifications des règles de fonctionnement du Fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) sont bienvenues, en introduisant notamment un critère de charges dans les prélèvements.

Les dépenses du budget général respectent tant la norme « zéro volume », laquelle prévoit une progression au plus égale au rythme de l'inflation, que la norme « zéro valeur » qui exclut les dépenses de pensions et la charge de la dette, sur lesquelles le Gouvernement n'a qu'une marge de manoeuvre limitée. Il faut saluer l'extension du périmètre de la norme de dépenses au plafond des impositions et ressources affectées aux opérateurs de l'Etat et à divers autres organismes. L'assiette du plafonnement des taxes affectées est par ailleurs élargie dans le présent projet de loi de finances, puisqu'elle porte sur des taxes dont le produit est de 4,4 milliards d'euros, contre 3 milliards dans la loi de finances initiale pour 2012.

L'effort d'économies sur les dépenses est évalué à 10 milliards d'euros. Il se répartit entre une économie par rapport à l'évolution spontanée des dépenses de 9 milliards d'euros, et 1 milliard d'euros supplémentaires pour financer les priorités du Gouvernement. Cet effort à hauteur de 10 milliards d'euros permet de respecter la norme « zéro valeur ». Ces économies se répartissent entre les crédits de fonctionnement des ministères, y compris leurs dépenses salariales (2,8 milliards d'euros), les crédits d'intervention (2 milliards d'euros), le report de programmes d'équipement du ministère de la défense (2,2 milliards d'euros), les investissements civils (1,2 milliard d'euros) et la stabilisation en valeur des concours de l'Etat aux collectivités territoriales (1,8 milliard d'euros).

Le schéma d'emplois 2013 fait apparaître les priorités du Gouvernement. Les créations d'emplois dans l'éducation nationale, la justice et la sécurité sont gagées par des suppressions de postes dans les autres ministères. Le schéma d'emplois 2013 est toutefois légèrement négatif (- 2 416 postes), le Gouvernement ayant indiqué que l'objectif de stabilisation des emplois visait l'ensemble du quinquennat. Par ailleurs, il faut tenir compte des 4 278 créations de postes décidées dans la seconde loi de finances rectificative pour 2012. Au total, les effectifs de l'Etat doivent s'élever à 1 915 313 emplois équivalent temps plein travaillé en 2013. La masse salariale de l'Etat est également stabilisée : elle s'établit à 81,1 milliards d'euros dans le projet de loi de finances, en hausse de seulement 0,2 milliard d'euros par rapport à 2012.

La charge des intérêts de la dette s'élève à 46,9 milliards d'euros, en augmentation de 0,2 milliard d'euros par rapport à l'estimation révisée pour 2012, et en baisse de 1,9 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2012. La baisse de la charge de la dette s'explique par des conditions très favorables de taux d'émission : entre mi-septembre 2011 et mi-septembre 2012, les taux moyens d'émission ont baissé respectivement de 0,81 % à 0,11 % pour les titres à court terme, et de 2,80 % à 1,99 % pour les titres à moyen et long termes. Dans un contexte toutefois de remontée attendue des taux d'intérêt, la charge de la dette négociable devrait à nouveau augmenter en 2014 et en 2015 pour atteindre, à cette date, 59,9 milliards d'euros.

J'en viens à présent au déficit budgétaire et à son financement.

L'amélioration du solde budgétaire, de 83,6 milliards à 61,6 milliards d'euros, est l'une des plus fortes jamais enregistrées. Certes, un rétablissement spectaculaire avait été constaté entre 2010 et 2011 à hauteur de 50 milliards d'euros, mais il tenait à des facteurs exceptionnels : les investissements d'avenir, la non-reconduction des dépenses liées au plan Campus, le plan de relance et le contrecoup de la réforme de la taxe professionnelle.

Le solde général s'améliore ainsi de 22 milliards d'euros par rapport à 2012. Les facteurs de dégradation résident principalement dans la dynamique spontanée des dépenses et des événements exceptionnels, tels que l'augmentation du capital de la Banque européenne d'investissement et les dépenses de contentieux. Les facteurs d'amélioration portent sur les dépenses, à hauteur de 10 milliards d'euros d'économies, et surtout sur les recettes, qui progressent spontanément et enregistrent l'effet des mesures antérieures à 2013 et des mesures nouvelles du projet de loi de finances.

En 2013, le solde primaire, c'est-à-dire le solde budgétaire hors charge des intérêts de la dette, devrait atteindre - 14,7 milliards d'euros, en amélioration de 22,2 milliards d'euros par rapport au révisé 2012 (- 36,9 milliards d'euros), soit une réduction de 60 % du déficit primaire. Sauf pour l'année 2011 où les dépenses exceptionnelles ne permettent pas des comparaisons d'une année sur l'autre, il s'agit de la plus forte réduction du déficit primaire depuis 2000, ce qui illustre l'ampleur de l'effort à consentir pour ramener le déficit sous le seuil des 3 % du PIB en 2013. En 2014, selon la trajectoire prévue par la loi de programmation des finances publiques, le solde primaire devrait redevenir positif (+ 0,8 milliard d'euros), puis s'élever à + 17 milliards d'euros en 2015.

Le besoin de financement de l'Etat atteindra 171,1 milliards d'euros en 2013, soit une diminution de 6,4 % par rapport au révisé 2012. En 2013, l'Etat empruntera pour un tiers afin de financer son nouveau déficit et pour deux tiers afin de refinancer les déficits passés. L'encours de la dette de l'Etat passerait de 1 387 milliards d'euros à 1 452,4 milliards d'euros (+ 4,7 %). Rappelons que l'encours total en valeur actualisée était de 921 milliards d'euros fin 2007. Il aura donc connu une augmentation de 51 % au cours de la période 2007-2012 correspondant à la précédente législature. La part de l'endettement à court terme continue ainsi à refluer. Après avoir atteint un pic fin 2009 (ils représentaient alors 18,6 % de l'encours total), les bons du Trésor à taux fixe (167,1 milliards d'euros) devraient représenter 11,5 % du stock de dette à fin 2013. Cette évolution diminue l'exposition de la France à un retournement des taux courts.

Pour couvrir le besoin de financement de l'Etat en 2013, les ressources proviennent principalement des émissions nouvelles de dettes à moyen et long termes nettes des rachats, soit 170 milliards d'euros. Il est prévu une variation en baisse des dépôts des correspondants (à hauteur de - 3,6 milliards d'euros), en raison des décaissements anticipés au titre des investissements d'avenir. L'encours des bons du Trésor à taux fixe se réduirait légèrement sur l'année (de - 0,7 milliard d'euros), illustrant la diminution de la part de la dette à court terme dans le total de l'encours.

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