Intervention de Jean-Claude Carle

Réunion du 25 octobre 2012 à 9h00
Absentéisme scolaire — Question préalable

Photo de Jean-Claude CarleJean-Claude Carle :

Il faut mesurer à la fois l’efficacité du dispositif et la réactivité de tous les acteurs ; je pense notamment aux caisses d’allocations familiales, pour lesquelles le problème se pose depuis très longtemps.

Sur le plan pratique, la question de l’absentéisme scolaire est trop importante pour nous priver d’un outil qui semble fonctionner. En effet, il faut combattre l’absentéisme scolaire par tous les moyens.

Vous avez raison de souligner la diversité des situations pouvant conduire les jeunes à déserter l’école, mais il faut toujours voir, dans l’absentéisme, un signal d’alarme.

Les jeunes qui s’excluent de l’école sont en danger, car la déscolarisation les prive de devenir professionnel et, hélas ! les rapproche dangereusement de la marginalisation. J’ai pu le constater, en 2002, en tant que rapporteur de la commission d’enquête sénatoriale sur la délinquance des mineurs.

L’absentéisme et le décrochage scolaire peuvent faire basculer vers la violence. Si tous les jeunes en échec scolaire ne sont pas – Dieu merci ! – des délinquants, une immense majorité de ces derniers n’a pas réussi à l’école.

Nous devons donc être conscients que, si on laisse le jeune choisir entre l’école et la rue, la rue l’emportera toujours !

Par conséquent, lorsque des absences répétées sont signalées, il faut agir rapidement, car ces dernières peuvent précéder des actes graves. Je me souviens d’une tentative de suicide et d’une tentative de meurtre qui s’étaient produites à Vaulx-en-Velin : dans les deux cas, le manque de prise en considération des absences avait empêché une prise en charge précoce.

Notre obligation est de donner les moyens de réagir à ceux qui peuvent détecter l’absentéisme. À cet égard, la loi Ciotti confie un rôle à la fois à l’école et aux parents.

Mes chers collègues de la majorité sénatoriale, vous avez beaucoup reproché au texte sa fonction punitive à l’égard des parents. Vous semblez nier que ces derniers aient une responsabilité considérable dans l’assiduité de leurs enfants ! Ne sont-ils pas les premiers éducateurs ? Il s’agit non pas de leur faire un procès, mais de recourir à eux pour que le jeune retrouve le chemin de l’école. La sanction, qui vise à les responsabiliser et non à les stigmatiser, est l’ultime étape d’un processus engagé pour dialoguer avec eux et trouver des solutions.

Dans sa dernière étude, intitulée « Aider les parents à être parents », le Conseil d’analyse stratégique, que vous citez à la fin de votre rapport, monsieur le rapporteur, évoque le développement de dispositifs ayant recours à la sanction ou à l’incitation financière. Il conclut que le succès de ces dispositifs est proportionnel à « l’intensité et [à] la qualité des services d’accompagnement » et à « l’utilisation avec justesse et parcimonie des sanctions ».

Or, avec la loi Ciotti, nous sommes exactement dans ce cadre. La sanction n’intervient que dans l’hypothèse où les parents se désengagent complètement de leurs devoirs. En effet, le dispositif de la loi est gradué et réversible.

Il fait se succéder plusieurs étapes, avec, tout d’abord, le signalement par le chef d’établissement de la situation d’absentéisme, puis un avertissement par l’inspecteur d’académie, puis la suspension des allocations familiales et, en dernier ressort seulement, la suppression des allocations familiales.

Les prestations familiales sont restituées si l’élève est à nouveau assidu. La suppression des allocations n’intervient que si la situation d’absentéisme perdure. Nous sommes alors dans le cas de figure, heureusement minoritaire, de parents irresponsables, sourds aux avertissements.

Est-il anormal de faire savoir à ces derniers qu’ils ont des devoirs et que la société n’entend pas accepter leur désertion dans l’éducation de leurs enfants ? Le risque de suspension des allocations est l’électrochoc qui va permettre leur réaction. À chaque étape, la famille est entendue et des solutions sont recherchées. Si, malgré tout, les parents refusent le dialogue, nous ne craignons pas de dire qu’il faut sanctionner ces comportements – je le répète, très peu fréquents.

Il est urgent de responsabiliser les parents démissionnaires grâce à des mesures fermes et assumées. Revenir en arrière en annonçant l’annulation de toute sanction serait un très mauvais message envoyé aux familles.

Le plus souvent, ces dernières se sentent désarmées : les parents ne savent pas comment réagir face à l’enfant qui sort des clous. À cet égard, je regrette que vous passiez sous silence ce qui est pourtant l’objectif principal de la loi Ciotti : aller à la rencontre des parents

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