Je partage, cela étant, l’insatisfaction ressentie par beaucoup devant le mécanisme proposé par l’Assemblée nationale, notamment à l'article 1er. Je n’insisterai pas davantage sur ce point, par respect pour nos collègues députés.
Ceux qui soutiennent cette motion ont toutefois oublié que les textes transmis au Sénat ne sont pas « à prendre ou à laisser ». Certains trouveraient sans doute plus simple que nous nous contentions soit d’adopter les textes sans modification, soit de nous abstenir purement et simplement de les discuter.
Ce n’est pas là ma conception du travail parlementaire. Ce n’est pas le rôle qu’a assigné au Sénat la Constitution, notamment son article 45, dont je rappelle les termes : « Tout projet ou proposition de loi est examiné successivement dans les deux assemblées du Parlement en vue de l’adoption d’un texte identique. »
Curieux examen que celui qui conduit à déclarer que nous n’allons pas discuter du texte sur le fond !
Je connais les qualités de cette proposition de loi, ainsi que quelques-unes de ses imperfections. J’ai rencontré plus de quatre-vingts personnes, au cours de trente-trois auditions, qui ont été ouvertes à tous les membres de la commission des affaires économiques. Je remercie ceux qui, par leur présence, ont montré qu’ils cherchaient à être le mieux informés possible sur ce texte.
J’ai également échangé avec nos collègues de l’Assemblée nationale et les différents cabinets ministériels concernés. J’étais donc prêt à fournir tous les éléments nécessaires à la Haute Assemblée pour qu’elle puisse se déterminer en toute connaissance de cause et faire entendre sa voix sur une réforme qui concerne l’ensemble de nos concitoyens.
J’étais donc prêt, mes chers collègues, à vous présenter, à l’article 1er, un mécanisme de remplacement. Cela n’a pas été possible en commission, à la suite de l’adoption de la motion de procédure. Cela ne le sera pas non plus en séance publique si cette motion est de nouveau votée ce soir.
De surcroît, nous ne pouvons ignorer que l’adoption d’une motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité ne bloque la discussion que si elle intervient dans l’assemblée où le texte a été déposé. Si elle est adoptée dans la seconde assemblée saisie, en l’occurrence le Sénat, le processus n’est en rien interrompu. En fait, si le Sénat adoptait cette motion, nous laisserions simplement aux députés ou à la commission mixte paritaire le soin de discuter de nouveau du texte de l’Assemblée nationale : c’est comme si nous adoptions son texte sans le modifier ; est-ce là l'objectif recherché ?
Les auteurs de la motion rappellent les termes de l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, selon lequel « tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, » à la formation de la loi.
Or, en votant la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité, nous réserverions en pratique la discussion à une moitié seulement de la représentation nationale, puisque seuls les députés participeraient à l’élaboration de la loi.
Quels sont donc les arguments énoncés par les auteurs de la motion ?
Ils invoquent, dans leur exposé des motifs, rien de moins que l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, …