Je le répète, ce projet de loi organique est un texte de procédure et non de substance. Le contenu est défini ailleurs, le cas échéant dans les traités, les lois de programmation et les décisions qui sont prises par les assemblées quand elles débattent de dispositions de finances publiques dans toute leur diversité.
Seul le législateur financier – c’est-à-dire le Sénat et l’Assemblée nationale – pourra, sur proposition du Gouvernement, définir les voies et les moyens pour effectuer cette correction. Par conséquent, je le dis avec force, les prérogatives du Parlement en la matière ne sont pas altérées. §C’est notamment pour cette raison que le Conseil constitutionnel a jugé, le 9 août dernier, que la mise en œuvre du traité « ne port[ait] aucune atteinte aux conditions essentielles d’exercice de la souveraineté nationale ». C’est également pour cela que le Conseil a laissé au Gouvernement l’option entre inscrire ces mécanismes dans la Constitution ou les insérer dans une loi organique, c’est-à-dire une loi de procédure.
Je le dis au passage à l’intention de ceux qui auraient pu s’émouvoir de l’inscription de la règle d’or dans la Constitution – si tel avait été le sens de la décision du Conseil, nous aurions nous-mêmes adopté une autre attitude – qu’il n’y a ici ni règle d’or ni inscription de la règle d’or dans la Constitution. Le raisonnement du Conseil constitutionnel, imparable, s’impose à tous.
Là aussi, des débats très intéressants ont eu lieu au sein de votre commission des finances pour préciser les références au regard desquelles le Haut Conseil se prononcera sur l’existence d’un éventuel écart à la trajectoire. D’ores et déjà, je puis vous dire que l’examen des amendements déposés en ce sens devrait nous permettre de progresser.
J’ai conscience de la complexité législative induite par l’intégration des mécanismes européens dans les temps parlementaires nationaux, comme j’ai conscience de l’attachement de la représentation nationale à sa maîtrise de l’exercice budgétaire. Je sais ces attentes, j’y suis attentif, et je souhaite que nous puissions travailler ensemble à une meilleure lisibilité des échéances financières.
C’est dans cette optique que le Traité lui-même se réfère, en son article 13, à une conférence interparlementaire. Il me semble toutefois qu’il s’agit là, en définitive, d’un enrichissement du rôle d’un Parlement qui contrôlera mieux l’application des règles européennes, et donc d’un progrès démocratique.
Le texte issu des travaux de la commission spéciale de l’Assemblée nationale affirme par ailleurs le droit du Parlement de s’exprimer sur la gouvernance économique et budgétaire européenne, au-delà même des outils dont il dispose déjà aux termes de la Constitution, en prévoyant la possibilité d’organiser des débats parlementaires sur les documents produits par le Gouvernement et les institutions européennes au titre de la coordination des politiques économiques et budgétaires. C’est une aspiration à laquelle souscrit le Gouvernement, au-delà des dispositions présentées dans ce projet de loi organique, et qui trouvera certainement un écho dans cette assemblée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi organique n’est peut-être pas le texte le plus visible, le plus spectaculaire de cette session, mais il est sans doute l’un des plus importants, parce qu’il est profondément structurant et qu’il engage l’avenir. Nous dessinons en effet avec ce texte, enrichi par vos travaux, le cadre des futures discussions financières de la représentation nationale, et l’outil de travail des commissions des finances du Parlement.
Ce texte, que je n’hésite pas à qualifier de « décisif », va nous permettre de déployer notre stratégie pour les finances publiques, au sein d’un cadre qui allie souplesse – grâce au pilotage structurel, plutôt que nominal, nous pourrons à l’avenir laisser jouer les stabilisateurs automatiques, comme l’a dit la directrice générale du Fonds monétaire international – et robustesse, avec un mécanisme de correction qui offre des gages de crédibilité.
Il constitue donc, j’en suis profondément convaincu, un pas important sur la voie de ce redressement des comptes que nous avons résolument engagé, et qui trouvera son point d’aboutissement en fin de mandat, avec une étape décisive dès 2013.
J’espère que ce texte, ainsi paré de toutes les vertus que j’ai dites, fera l’objet d’une large approbation dans cette enceinte, comme cela a été le cas à l’Assemblée nationale, et j’attends avec intérêt les interventions des membres de la Haute Assemblée.