Intervention de Marie-Hélène Des Esgaulx

Réunion du 29 octobre 2012 à 14h30
Programmation et gouvernance des finances publiques — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi organique dans le texte de la commission

Photo de Marie-Hélène Des EsgaulxMarie-Hélène Des Esgaulx :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a quelques jours, le groupe UMP a apporté son soutien à la ratification du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire.

En effet, comme l’ont alors expliqué nos collègues Philippe Marini et Jean Bizet, nous sommes convaincus qu’il est indispensable de respecter nos engagements européens, en l’occurrence ceux qui ont été pris par le Président Nicolas Sarkozy en décembre 2011.

Autrement dit, nous sommes convaincus qu’il est indispensable d’accepter de nous fixer des règles de politique économique, en coordination avec nos partenaires européens, si nous voulons que la zone euro soit une union monétaire cohérente et efficace, source de richesse et de solidarité.

Les grands principes inscrits dans le traité ayant été acceptés, nous abordons aujourd’hui la question de leur traduction concrète dans notre droit et dans notre procédure parlementaire.

Dans quelques jours, lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 et du projet de loi de finances pour 2013, nous devrons nous assurer que vos choix économiques, monsieur le ministre, garantiront que la France pourra respecter ses engagements.

Permettez-moi d’être d’ores et déjà très dubitative sur ce dernier point… Mais nous aurons l’occasion d’en débattre plus précisément et d’examiner, le moment venu, si les règles figurant aux articles 3 et 4 du traité s’appliquent bien aux lois de programmation des finances publiques comme aux lois de finances.

Le présent projet de loi organique vise donc à transcrire dans notre droit le traité européen. Je m’en tiendrai ici à ses trois dispositions principales : la fixation d’un objectif de moyen terme en matière de solde structurel, l’instauration d’une règle d’or, c’est-à-dire d’un mécanisme qui assure la réduction progressive des déficits en tenant compte des aléas de la conjoncture, et la création d’un Haut Conseil des finances publiques.

Je me féliciterai tout d’abord du retour à la raison d’une bonne partie de la gauche française, qui s’est longtemps opposée à toute disposition un tant soit peu contraignante visant à réduire nos déficits. Or de telles dispositions sont un préalable indispensable à la réduction de notre endettement, ainsi qu’un moyen de retrouver des marges de manœuvre budgétaires et de garantir l’indépendance nationale.

Tels étaient bien les objectifs de notre majorité, qui a lancé tout le travail préparatoire à l’élaboration de ces mesures, avec notamment la conférence sur les déficits publics, le rapport de M. Camdessus et différents projets de loi, en particulier un projet de réforme constitutionnelle.

Aujourd’hui, nous regrettons que, pour des raisons de cohésion au sein de votre majorité, vous n’ayez pas choisi la voie constitutionnelle. En effet, au-delà de la force du symbole, constitutionnaliser une règle économique d’équilibre budgétaire est presque devenu une nécessité au regard du principe de réalité lorsqu’aucune majorité, ni de gauche ni de droite, n’a réussi à voter un budget en équilibre depuis plus de trente ans, même en période de croissance.

Cette question dépasse donc largement les considérations partisanes. Que le Conseil constitutionnel ait jugé qu’il n’y avait pas d’abandon de souveraineté est une bonne chose, mais rien n’empêchait que l’on procède à une modification de notre Constitution. Elle n’est pas obligatoire, certes, mais elle aurait été bien plus qu’un symbole : un véritable engagement de responsabilité.

Oui, mes chers collègues, inscrire la règle d’or dans le marbre de la Constitution lui aurait donné une plus grande force et une plus grande portée juridique. Une loi organique n’aura pas la même solennité.

Mais soit : pas de loi constitutionnelle, une loi organique… L’essentiel n’est-il pas que vous ayez finalement accepté un cadre définissant une trajectoire de retour à l’équilibre des finances publiques ?

En effet, il est aujourd’hui clair que ni la croissance ni l’inflation ne suffiront à rééquilibrer nos comptes. L’enjeu est donc bien de parvenir à inscrire notre action de réduction des déficits dans la continuité. Il s’agit de se fixer des limites pour l’avenir : l’objectif est non pas de dépenser plus ou de dépenser sans compter, mais de choisir la dépense publique juste et efficace au regard du niveau des recettes.

En conséquence, une règle de moyen terme est pour la France une option raisonnable et conforme à ses engagements européens.

En revanche, nous devons avoir conscience que la notion de solde structurel, qui figure à l’article 3 du TSCG, est tout de même relativement compliquée.

Nous avons déjà débattu de cette notion en 2011. Le mode de calcul est complexe, car il repose sur des hypothèses théoriques qui ne permettent pas de corriger totalement les fluctuations conjoncturelles.

Même si la perfection mathématique est difficile à atteindre, il n’est pas impossible de calculer le solde structurel, dont tout l’intérêt réside précisément dans la prise en compte des variations économiques de court terme ; d’autres pays, notamment l’Allemagne, utilisent cette notion. Nous devons veiller à ce que les modalités de son calcul soient claires, non polémiques et compréhensibles par nos concitoyens.

Cela signifie que ces modalités doivent être homogènes avec ce que font nos partenaires européens. La Commission européenne doit garantir la compatibilité des méthodes, à défaut de leur uniformité. Nous espérons, monsieur le ministre, que c’est bien dans cette voie que vous engagerez notre pays.

À cet égard, je me permets de rappeler que mes collègues Philippe Marini et Jean Arthuis avaient proposé la création d’une autorité européenne des comptes publics.

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