Intervention de Jean-Vincent Placé

Réunion du 29 octobre 2012 à 14h30
Programmation et gouvernance des finances publiques — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi organique dans le texte de la commission

Photo de Jean-Vincent PlacéJean-Vincent Placé :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs, qu’on le veuille ou non, le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire est définitivement adopté. Je m’y étais opposé, mais nous sommes en démocratie ; la ratification du traité a été approuvée à une très grande majorité des voix tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Sa transposition en droit interne est donc maintenant une obligation. J’ai écouté attentivement M. Arthuis : les arguments qu’il a avancés pour expliquer en quoi cette transposition était insuffisante sont précisément ceux qui m’amènent à la soutenir…

Plusieurs options s’offraient au Gouvernement ; je le dis sans détour : il a pris la bonne décision, celle de ne pas constitutionnaliser la règle d’or, contrairement à ce que proposait Nicolas Sarkozy, et de légiférer par le biais d’une simple loi organique, ce qui est à mon sens la solution la plus judicieuse.

Graver l’obligation de l’équilibre budgétaire dans la Constitution aurait été un coup terrible, non seulement pour l’économie, mais aussi pour la démocratie. Cela aurait instauré durablement l’austérité qui sous-tend le traité, d’une part, la censure des représentants nationaux, d’autre part.

Si le Conseil constitutionnel jugeait lui-même du respect de l’objectif de réduction du déficit, ses préconisations s’appliqueraient de façon contraignante et automatique, sans laisser aucune marge de manœuvre, ni au Gouvernement ni au Parlement. Or le Parlement n’est pas une chambre d’experts comptables – soit dit avec tout le respect que j’ai pour cette profession –, c’est l’organe de la délibération démocratique.

Lorsque j’entends les libéraux réclamer l’inscription de la règle d’or dans la Constitution, je m’interroge : le vote des électeurs n’a-t-il donc aucune valeur ? Ce sont d’ailleurs les mêmes qui ont réussi, en seulement cinq ans, à creuser la dette publique de plus de 612 milliards d’euros, et qui nous ont légué 1 700 milliards d’euros de déficits ! Vouloir voir appliquer des règles auxquelles on a soi-même tant dérogé est sans doute l’hommage du vice à la vertu…

Le choix du recours à la loi organique, c’est aussi celui d’une transposition souple du traité, le choix du respect de la représentation nationale.

L’interprétation des dispositions du TSCG qui sous-tend le projet de loi organique préserve, en réalité, une forte part de libre arbitre pour le Parlement et permet d’atteindre les objectifs budgétaires de la façon la plus flexible et la plus intelligente possible. Ce texte laisse le débat ouvert, car il ne contient pas de règles intangibles ni de sanctions automatiques. Le Haut Conseil des finances publiques, dont il a été beaucoup question, n’émettra qu’un simple avis, ce dont je me réjouis.

J’ai également entendu M. le ministre de l’économie et des finances nous garantir que les prérogatives du Parlement ne seront pas altérées. Cela va mieux en le disant !

Les élus de la République conserveront donc leur pouvoir budgétaire et fiscal, ce qui me semble essentiel. Le législateur gardera ainsi des marges de manœuvre quant à la manière de gérer la réduction des déficits. Nous aurons l’occasion de le prouver, notamment, lors de l’examen du projet de loi finances, au travers des amendements que les écologistes déposeront.

N’oublions pas que ce que le Parlement a fait, il peut le défaire. Nous aurons des débats ; nous avons ainsi déjà entendu des paroles fortes du président de l’Assemblée nationale, mon ami Claude Bartolone, ou du nouveau premier secrétaire du parti socialiste, qui a montré toute son autorité hier et s’est interrogé sur la course vers les 3 % de déficit. Certains ont affirmé que l’objectif était intenable, voire absurde, qu’il avait été décidé sur un coin de table. Je n’irai pas aussi loin ; comme tous les écologistes, je suis attaché à l’objectif de désendettement, en vertu du principe de soutenabilité des finances publiques : il faut notamment conserver des marges de manœuvre, y compris pour réaliser des investissements écologiques. Il est indispensable de trouver un équilibre, le désendettement ne devant pas se réduire à l’application mécanique de normes comptables. Nous devons être attentifs aux fortes souffrances économiques, sociales et environnementales que connaît notre société.

Je ne veux ni surestimer ni sous-estimer le vote que nous allons émettre aujourd’hui : il est important, sans être pour autant essentiel.

Les écologistes seront particulièrement vigilants, dans les mois et les années à venir, à ce que le respect des engagements en faveur de l’emploi, de la recherche, de l’innovation, de la réduction des émissions de CO2 ou encore du développement des énergies renouvelables soit prioritaire, plutôt que la recherche à toute force de la réduction des déficits, lesquels permettent d’ailleurs souvent la relance de l’activité.

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