Intervention de Michelle Demessine

Réunion du 29 octobre 2012 à 21h30
Programmation et gouvernance des finances publiques — Article 4

Photo de Michelle DemessineMichelle Demessine :

L’article 4 du projet de loi organique prévoit de doter les lois de programmation de dispositions à caractère coercitif, si l’on appréhende toutes les données du texte. En effet, il nous est indiqué : « La loi de programmation des finances publiques peut comporter des règles relatives à la gestion des finances publiques ne relevant pas du domaine exclusif des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale ainsi qu’à l’information et au contrôle du Parlement sur cette gestion. Ces règles peuvent en particulier avoir pour objet d’encadrer les dépenses, les recettes et le solde ou le recours à l’endettement de tout ou partie des administrations publiques. »

Il s’agit en fait de poser des règles qui n’auraient pas la vertu d’être validées par une disposition législative, ce qui constitue dans notre droit une nouveauté qui mériterait quelques explications.

Les éléments contenus dans le rapport ont le mérite d’être à la fois succincts et suffisamment explicites. D’une certaine manière, ils confirment ce que nous pouvions craindre quant au périmètre de prise en compte des exigences du traité budgétaire.

Il apparaît en effet clairement que seront intégrés dans le périmètre quatre types d’administrations publiques : l’État, ce qui ne surprendra évidemment personne ; les organismes de sécurité sociale, conformément à la logique infernale découlant du mouvement d’étatisation de la sécurité sociale, engagé en 1995 et poursuivi chaque année, et de fiscalisation de ses ressources que l’on entend apparemment prolonger ; les collectivités locales, au demeurant déjà porteuses d’une règle d’or – celle de l’équilibre obligatoire de leur section de fonctionnement – et dont la liberté d’administration va probablement être gravement attaquée par la loi organique telle qu’elle a été pensée à l’origine ; enfin, les organismes divers d’administration centrale, ou opérateurs de l’État, parmi lesquels se trouvent aussi bien Pôle emploi ou l’Office national des forêts que celui des anciens combattants et nos universités, maintenant qu’une loi libérale les a rendues autonomes et ainsi livrées à la concurrence et aux aléas du mécénat…

De fait, on peut fort bien concevoir qu’une loi de programmation des finances publiques restreigne la faculté des collectivités locales, ou de certaines d’entre elles, de recourir à l’emprunt, que l’on exige des universités de mener une politique d’augmentation des droits d’inscription ou de se fixer un objectif de financements extérieurs, en contrepartie du versement de la dotation annuelle de l’État par exemple.

L’article 4, c’est cela, cet outil de diffusion éventuelle du portage des déficits, et singulièrement de celui de l’État par d’autres partenaires obligés, condamnés à l’imagination en matière de solutions « austéritaires » pour répondre aux objectifs de la programmation.

Si nos universités sont autonomes et si nos collectivités territoriales s’administrent librement, contentons-nous de leur donner des conseils éclairés au lieu d’en surajouter dans les règles imposées.

Dans ces conditions, nous proposons de supprimer l’article 4.

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