Les différents amendements dont nous sommes saisis, y compris celui du Gouvernement, sont la résultante d’une difficulté particulière liée à l’interprétation de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne relative à la directive Retour. La Cour a en effet indiqué qu’il n’était possible d’utiliser les procédures d’éloignement et d’emprisonnement qu’une fois épuisées toutes les mesures à la disposition de l’administration.
La question est de savoir à quel moment ces mesures peuvent être considérées comme épuisées, autrement dit à quel moment l’administration est libérée de l’obligation qui lui incombe d’utiliser toutes ses ressources pour permettre le départ de l’étranger.
Je veux pour preuve de cette difficulté le problème d’interprétation que pose le cas de la libération d’un étranger, alors même que la mesure de rétention a été prise sur la base d’une situation effectivement irrégulière et constatée comme telle par le juge administratif, justifiant une obligation de quitter le territoire français.
Si cette personne est libérée parce que les conditions de sa rétention sont jugées insatisfaisantes, doit-on considérer que l’administration a entrepris toutes les diligences nécessaires et est en situation d’engager une procédure pénale, ou bien qu’elle doit recommencer la procédure administrative qui reste disponible ? La question reste pendante et nous ne disposons pas aujourd’hui de réponse véritablement satisfaisante.
Nous avons d’ailleurs interrogé les services du ministère de l’intérieur, et notamment le cabinet du ministre, et nous cherchons depuis le début une réponse satisfaisante.
La rédaction proposée par la commission était relativement simple : elle visait les décisions dès lors que ces dernières avaient été placées normalement sous le contrôle des juges dont elles pouvaient relever – administratif et judiciaire – et qu’elles étaient devenues définitives : on peut en effet considérer que, compte tenu du caractère suspensif des recours sur la nature de ces mesures, les diverses procédures avaient été épuisées sur le plan juridictionnel ; à partir de là, il était possible de passer à la deuxième phase.
Mais cette interprétation reste cependant toujours relativement fragile.
Monsieur le ministre, je ne suis pas convaincu que l’amendement du Gouvernement, qui représente pourtant un effort louable, comme vient de le rappeler Alain Richard, satisfasse tout à fait notre volonté de clarification.
Ne vaudrait-il pas mieux – et ma proposition explique l’avis défavorable rendu par la commission sur ces deux amendements –, en rester pour l’instant à la rédaction de la commission ? Vous pourriez profiter de la discussion à l’Assemblée nationale pour clarifier cette question, que nous reverrions ensuite, le cas échéant, en commission mixte paritaire ?
Nous sommes aujourd’hui confrontés à des difficultés que nous ne sommes pas parvenus à résoudre totalement. Cela étant dit, si le Gouvernement peut nous fournir une interprétation claire de cette disposition, s’agissant en particulier du cas spécifique que j’ai indiqué, nous sommes tout à fait prêts à l’entendre. En attendant, il subsiste de nombreuses incertitudes.