Cet amendement a pour objet d’étendre aux banques populaires les compétences attribuées aux caisses d’épargne pour des missions d’intérêt général.
En effet, l’article L. 512-85 du code monétaire et financier dispose : « Le réseau des caisses d’épargne participe à la mise en œuvre des principes de solidarité et de lutte contre les exclusions. […] Il contribue à la protection de l’épargne populaire, au financement du logement social, à l’amélioration du développement économique local et régional et à la lutte contre l’exclusion bancaire et financière de tous les acteurs de la vie économique, sociale et environnementale. »
On notera d’ailleurs que cet article L. 512-85 a été assez nettement modifié par la loi de modernisation de l’économie, qui a également transformé les missions des caisses d’épargne. En effet, comme nous l’avons déjà indiqué, l’utilisation du dividende social des caisses d’épargne s’est trouvée quelque peu réduite par l’abrogation de l’article L. 512-91 du code monétaire et financier.
La loi de modernisation de l’économie a supprimé cet article et les mentions suivantes dans le texte du code monétaire et financier tel qu’il découlait de la codification introduite par la loi de 1999 relative à l’épargne et à la sécurité financière.
On peut notamment se référer à l’article 1er de cette loi, qui, entre autres mesures, apportait la précision suivante : « Dans les conditions fixées par l’article 6, les caisses d’épargne et de prévoyance utilisent une partie de leurs excédents d’exploitation pour le financement de projets d’économie locale et sociale. Elles présentent une utilité économique et sociale spécifique au sens du présent article. »
La disparition des notions de dividende social et d’utilité sociale des caisses d’épargne est donc évidente et les termes de la loi de modernisation de l’économie, qui semblent encore plus généraux et imprécis que ceux de la loi de 1999 relative à l’épargne et à la sécurité financière, n’apportent, de toute évidence, aucune garantie en la matière.
En vérité, nous sommes presque convaincus que l’article 147 de la loi de modernisation de l’économie visait, d’une certaine manière, à préparer le terrain pour la suite, en particulier pour le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui.
À force de réduire la portée de l’intérêt général, on peut finir par faire disparaître celui-ci de la loi et aboutir à une utilisation de l’instrument législatif à des fins plus privées. Pourtant, l’existence de missions d’intérêt général est intrinsèquement liée à l’histoire des caisses d’épargne.
Le statut des caisses d’épargne a évolué au fil des ans. Toutefois, cette prégnance de l’intérêt général se retrouve dans l’article L. 512-85 du code monétaire et financier qui définit les missions de la banque. Certes, sur bon nombre de points, cet article a un aspect cosmétique, notamment depuis la banalisation du livret A, mais il continue à conférer aux caisses d’épargne leur spécificité dans le paysage bancaire français.
De plus, les banques populaires et les caisses d’épargne ont déjà mis en commun certaines de leurs activités, par exemple par le biais de Natixis. Pourquoi, alors qu’on accepte que ces banques mutualistes s’orientent vers la spéculation et les opérations boursières, domaines bien éloignés de leurs compétences, refuserait-on l’idée qu’elles puissent agir de concert pour des missions d’intérêt général ?
Enfin, le vote de cet amendement permettrait de donner une forme de contrepartie aux 7 milliards d’euros d’argent public qui ont été injectés pour soutenir le groupe.
En raison du choix opéré par le Gouvernement et malgré l’importance de la somme investie dans le nouvel organe central, l’aide publique apparaît de plus en plus comme le gage de mise en œuvre d’un processus de fusion, ouvrant la porte à moyen terme à la banalisation pure et simple du regroupement des deux réseaux.
Il nous semble donc nécessaire de faire en sorte que les missions d’intérêt général, dévolues jusqu’ici aux caisses d’épargne, soient étendues aux différentes entités du groupe constitué.