Intervention de Raymond Couderc

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 20 novembre 2012 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2013 — Mission immigration asile et développement programme « immigration et asile » - examen du rapport pour avis

Photo de Raymond CoudercRaymond Couderc, co-rapporteur :

J'en viens à la deuxième partie de notre présentation sur les limites de ce budget. On a une impression de tonneau des Danaïdes ! Tout d'abord, concernant le traitement des demandes par l'OFPRA et la CNDA : à l'OFPRA, un important plan de recrutement, visant à résorber le stock de dossiers, a été mis en oeuvre depuis 2010. Le projet de loi de finances pour 2012 prévoyait la poursuite de cet effort, portant les effectifs à 455 ETP fin 2012. Toutefois ces moyens n'ont jusqu'à présent pas permis de réduction du stock de dossiers en attente, ni du délai de traitement, du fait de l'augmentation parallèle et continue de la demande d'asile depuis 2008. Ainsi, le délai moyen d'examen d'une demande à l'OFPRA est de 179 jours au premier semestre 2012 !

Or, ce problème a des conséquences autant sur le plan humain que financier. Sur le plan financier, un tel délai a un coût et des conséquences non négligeables sur les finances publiques. Sur le plan humain, il est impensable de laisser un demandeur d'asile dans l'incertitude aussi longtemps, délai d'autant plus allongé si la réponse s'avère négative et est suivie d'un recours auprès de la CNDA. Depuis 2009, ce nombre de recours est à la hausse. Ainsi, en 2011, ce sont 31 983 recours qui ont été enregistrés, soit + 16,5% par rapport à 2010. Néanmoins, et nous nous en félicitons, le plan d'action mis en oeuvre en 2010 à la CNDA a permis une progression très importante de sa capacité de jugement. En effet, le délai prévisionnel moyen de jugement, qui avoisinait 15 mois en 2010 a été réduit à 9 mois et 5 jours en 2011, soit six mois de moins en l'espace d'une année. Le délai prévisionnel moyen de jugement devrait être d'environ 8 mois fin 2012.

La question la plus épineuse, concernant l'asile, est celle de l'hébergement des demandeurs en cours de procédure. L'hébergement en centre d'accueil a été multiplié par quatre ces dix dernières années, portant à 21 410 le nombre de places fin 2011. Or, ce nombre est toujours insuffisant. Le PLF pour 2013 prévoit la création de 1 000 places supplémentaires, portant la capacité totale à 22 410 places, néanmoins au 8 août 2012 on comptait encore 33 000 personnes en attente d'une admission en CADA !

Or, ce manque de place a des répercussions sur les finances publiques, puisque les demandeurs non bénéficiaires d'une place en CADA perçoivent l'allocation temporaire d'attente (ATA), dont les crédits associés sont en progression et qui coûte plus cher que l'hébergement en CADA ou qu'un hébergement d'urgence. En effet, le coût unitaire moyen d'une place en CADA sera de 24 € par jour en 2013. En comparaison, le coût moyen journalier d'une place d'hébergement d'urgence s'élèvera à 15 € en 2013, auxquels il faudra ajouter le versement de l'ATA, et dont le montant est d'un peu plus de 11 € par jour, soit au total plus de 26 €.

Outre ces limites, une autre difficulté concernant l'asile tient à l'harmonisation complexe des législations européennes existant en la matière. Alors que la mise en place d'un régime d'asile européen commun (RAEC) était prévue pour fin 2012, l'établissement de normes communes est loin d'être simple et les négociations se poursuivent à Bruxelles sur la refonte de la directive « procédure » et du règlement « Dublin II ». Point positif, la directive « accueil » a, semble-t-il, été l'objet d'un accord politique le 25 octobre dernier lors du Conseil justice et affaires intérieures.

En conclusion, il s'agit d'un programme ambitieux qui voit son budget augmenter régulièrement depuis des années faisant ainsi honneur à la France en respectant sa tradition d'accueil. Pour autant et malgré une augmentation de l'investissement de l'Etat, tant en budget qu'en personnel dédié, les stocks de dossiers en attente ne se réduisent pas, avec les conséquences humaines et financières que je vous précisais plus tôt.

Sans réduction de temps d'examen des dossiers et avec une augmentation du nombre de demandeurs d'asile, il y a un fort accroissement de demandeurs non bénéficiaires d'une place en CADA, mais qui perçoivent une allocation temporaire d'attente (ATA) dont le coût est beaucoup plus élevé que celui de l'hébergement en CADA.

Aussi, je ne pense pas que ce budget réponde parfaitement à la situation actuelle. Pour cette raison, je vous propose de vous abstenir, comme je vais le faire moi-même, d'adopter les crédits du programme 303.

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