La commission examine le rapport pour avis de MM. Jean Besson et René Beaumont sur les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2013 : mission Action extérieure de l'Etat (programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence »).
Je vous prie de bien vouloir excuser le président Jean-Louis Carrère qui est bloqué dans un embouteillage automobile et a demandé à ce que nous commencions sans attendre nos travaux. Nous ouvrons l'examen des rapports sur les programmes de la mission « action extérieure de l'Etat » par la présentation du programme 185 « diplomatie culturelle et d'influence ».
Au sein de la mission « action extérieure de l'État », le programme 185 regroupe l'ensemble des moyens destinés aux politiques culturelle, linguistique, universitaire, scientifique, et relatives aux échanges sur les enjeux globaux. Il porte également sur les crédits destinés au service d'enseignement français à l'étranger. Il représente 25 % des crédits de cette mission.
D'un montant de 748 millions d'euros, le programme 185 connait une diminution de 0,54 % par rapport à 2012. Sa composante majeure, au moins en termes budgétaires, l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, qui représente 56,9 % des crédits, n'est pas affectée par les règles de cadrage strictes posées par le Premier ministre dans le cadre de la politique de redressement des finances publiques, en raison de la priorité donnée par le président de la République au secteur de l'éducation. Cela explique cette stabilité apparente.
La préparation du projet de loi de finances pour 2013 a consisté à concilier les normes d'évolution des emplois et des crédits avec les priorités fixées dans le secteur de l'éducation et la nécessité de préserver la viabilité des outils d'influence essentiels, comme les bourses allouées aux étudiants étrangers, les échanges d'expertise et les échanges scientifiques, dont les crédits sont maintenus.
En compensation, des économies ont dû être réalisées sur les instruments de la diplomatie culturelle. Les normes gouvernementales ont été appliquées de façon différenciée pour tenir compte de ces priorités, mais aussi de la capacité des différentes composantes du réseau culturel à augmenter ses ressources propres.
L'accroissement de la capacité d'autofinancement de certaines institutions et établissements et leur capacité à mobiliser des financements complémentaires sont devenus un indicateur de gestion et de performance. Cette politique présente toutefois des limites.
D'abord, selon la nature des activités et la conjoncture économique, la régularité de la ressource peut être plus ou moins certaine. Ensuite, des disparités existent selon les domaines d'activité et selon les pays, Enfin, il ne faudrait pas que cette quête introduise des facteurs d'exclusion : frais de scolarité élevés dans les lycées ou pour les cours de langue française, moindre programmation culturelle dans les pays les plus pauvres ou économiquement les plus vulnérables...
Il est légitime de ne pas faire supporter par le contribuable l'ensemble des coûts de fonctionnement. Il importe néanmoins de faire preuve de prudence et de discernement dans l'application de ces orientations et ne pas en surestimer les résultats attendus du dynamisme d'un gisement d'ores et déjà exploité.
Comme vous les savez, notre diplomatie culturelle et d'influence repose, à l'étranger, sur l'action de deux réseaux de nature et de culture différente : le réseau des instituts français résultant de la fusion des services de coopération et d'action culturelle et des établissements à autonomie financière d'une part, le réseau associatif des alliances françaises d'autre part.
L'Institut Français, en tant qu'opérateur, apporte son concours aux réseaux.
S'agissant du réseau des instituts français, le processus de fusion, qui a concerné d'ores et déjà 93 pays, s'achèvera en 2013 dans les 5 pays restants (Argentine, Brésil, Colombie, États-Unis et Japon). L'objectif consistant à n'avoir qu'un seul établissement par pays sera atteint.
Parallèlement dans 12 pays est conduite une expérimentation du rattachement du réseau culturel à l'Institut Français sur laquelle je reviendrai.
Enfin dans le cadre des objectifs fixés pour le budget triennal 2013-2015, le ministère poursuivra l'adaptation de son réseau. Vous savez que deux missions sont en cours sur la réorganisation des réseaux diplomatiques et consulaires, il n'est pas exclu qu'une articulation soit recherchée pour les outils de notre diplomatie culturelle.
Cette réforme a permis une mutualisation des moyens qui a été bénéfique en termes de programmation, de gestion et de gouvernance. Les établissements sont devenus plus professionnels dans leur gestion et dans l'adaptation de leurs offres de prestation.
Les dotations en fonctionnement des EAF, qui figurent dans l'action 01 « animation du réseau », est dotée en 2013 de 36,96 millions d'euros. A périmètre constant, ces crédits baissent de 4 %.
Il est attendu du réseau qu'il compense cette perte de ressources publiques par son dynamisme, qu'il s'agisse d'autofinancement ou de projet cofinancés.
Le ministère des affaires étrangères met en avant l'importance des ressources propres et l'accroissement du taux d'autofinancement qui a atteint en moyenne 62,3 % en 2012, tout en soulignant que ce ratio varie selon les pays. En règle générale, les ressources propres issues des cours de langue, des certifications ou des procédures CEF équilibrent les dépenses concourant à ses activités et contribuent également au financement du fonctionnement des établissements. Le montant des recettes propres sur l'ensemble du réseau s'élève à 89 millions d'euros en 2011. Ces recettes sont toutefois la contrepartie de prestations.
Quant aux cofinancements, le produit est extrêmement variable d'un exercice à l'autre. Lors de son audition devant la commission, M. Mattéi, directeur général de la mondialisation, du développement et des partenariats, a fait état d'un montant de 174,6 millions d'euros collectés en 2011, mais d'une prévision de 145 millions d'euros en 2012, ce qui constitue un écart de plus de 15 %. De fait, ces ressources sont de nature très diverses et il faudrait distinguer celles qui sont attachées à des activités récurrentes dont elles constituent le socle du financement, de celles plus occasionnelles, levées à l'occasion de l'organisation d'une saison ou d'un évènement culturel.
Nous souhaiterions avoir des informations plus précises sur la comptabilisation de ces ressources.
S'agissant des alliances françaises qui, je vous le rappelle, sont des associations fondées à l'initiative de personnalités de la société civile locale et organisées de façon décentralisée, les plus importantes, au nombre de 445 en 2012, sont conventionnées et reçoivent des subventions et/ou d'autres formes de soutien comme la mise à disposition de personnels. En contrepartie, elles proposent toute la palette d'activités d'un centre culturel (cours de langue, programmation culturelle, médiathèque). Elles sont parfois, dans certains pays, et notamment en Amérique latine, le principal opérateur culturel des postes.
En application de la norme de réduction décidée par le Gouvernement pour le triennum 2013-2015 pour les opérateurs, le soutien financier de l'État baisse de 7 % en 2013. Il est constitué :
- d'une part par une subvention à la Fondation et à ses délégations générales pour 1,41 million d'euros). Elle connaît une baisse de 3 %.
- et d'autre part, par les subventions versées par les ambassades aux alliances françaises locales, pour un montant de 5,9 millions d'euros (6,4 millions d'euros en 2012). Ces crédits sont en baisse de 7,8 %.
Cette nouvelle baisse des subventions de l'État n'est pas sans inquiéter les dirigeants de la Fondation.
L'Institut Français, créé par la loi du 27 juillet 2010 et constitué sous forme d'établissement public industriel et commercial est l'opérateur de cette politique.
Un contrat d'objectifs et de moyens a été signé avec l'État le 10 février 2012. A ce document sont associées des prévisions de ressources budgétaires et des outils d'évaluation.
Saisie pour avis sur le rapport de notre collègue Gilbert Roger, votre commission a émis un certain nombre d'observations sur ce contrat, et notamment, sur « le luxe de réserves » avec lesquelles étaient présentés les engagements financiers de l'État. Cette remarque prend tout son sens à l'aune de la baisse de 10 % de la subvention pour charges de service public dans le projet de loi de finances pour 2013.
Parallèlement à son activité classique de soutien au réseau dans ses différentes missions, l'Institut Français s'est attaché à renouveler les modalités d'action de notre diplomatie culturelle et à renforcer nos leviers d'influence et de dialogue avec les sociétés civiles et les nouvelles élites. Il a, dès sa création, intégré la dimension numérique dans ses missions par la diffusion culturelle à l'international à travers Internet. Ces outils numériques développés au profit du réseau sont des facteurs importants de mutualisation et d'économies d'échelles.
Il a également mis en place un programme de formation des agents du réseau dans ses deux composantes. En 2012, l'effort de formation devrait pouvoir bénéficier à 1 500 agents pour un budget de 1,4 million d'euros.
L'Institut Français a renouvelé sa politique de mécénat, créé un pôle Europe afin de répondre à des appels à propositions et à des appels d'offres européens et informer le réseau sur les financements européens et développé des conventions avec les collectivités locales (24 ont été signées en 2011 qui ont permis des cofinancements à hauteur de 2 millions d'euros en 2012).
L'expérimentation du rattachement à l'Institut Français de douze postes a été mise en oeuvre. Elle doit faire l'objet d'une évaluation en 2013. Nous avons eu l'occasion, par des entretiens et par un déplacement dans un poste expérimentateur à Belgrade, de vérifier les conditions de sa mise en place et de son déroulement. Ce travail n'avait pas pour objectif de se prononcer sur l'opportunité du rattachement, mais sur les outils dont disposeront les pouvoirs publics à son terme pour décider du rattachement de l'ensemble des instituts locaux à l'opérateur ou, au contraire, l'abandon de ce projet. Nous vous livrerons nos conclusions en janvier.
La dotation à l'Institut Français est réduite de 5,2 millions d'euros :
- moins 4,7 millions d'euros, pour la subvention du ministère des affaires étrangères qui passe de 46,76 millions d'euros en 2012 à 42,02 millions d'euros ;
- moins 0,52 million d'euros de la subvention par le ministère de la culture et de la communication, 1,36 million d'euros contre 1,88 million d'euros en 2012, soit (- 27,6 %).
Au total, le montant des ressources apportées par l'État connaissent une baisse de 10 %.
Si l'on retire de cette enveloppe les crédits destinés aux postes de l'expérimentation, c'est une dotation de 32,1 millions d'euros qui pourra être inscrite au budget de l'établissement. L'engagement de l'État au titre du contrat d'objectifs et de moyens signé le 10 février dernier qui prévoyait un financement à hauteur de 36,50 millions d'euros n'est pas respecté pour la deuxième année consécutive (en 2012, la dotation s'est vu imposée une mesure de régulation à hauteur de 10 %).
Cette situation est préoccupante car elle n'est que le premier volet de la mise en oeuvre du triennum 2013-2015 qui prévoit une réduction de 4 % par an sur les exercices 2014 et 2015. Elle est inquiétante compte tenu de la structure des ressources de l'opérateur, les dotations budgétaires représentant les trois quarts de ses produits.
Pour compenser cette perte de ressources de 5,2 millions d'euros, il faudrait que l'Institut soit en mesure de faire progresser ses ressources propres (15,5 millions d'euros en 2012) de près d'un tiers. Or plus de la moitié de ses ressources sont dégagées par les postes expérimentateurs et sont donc la contrepartie de prestations de services et donc de charges pour les réaliser. Les recettes de mécénat ne dépasseront pas 1,4 million d'euros en 2012 pour une prévision de 2,7 millions d'euros en raison du contexte économiquement peu favorable pour les entreprises. En outre, la baisse des activités et de la programmation ne pourra qu'avoir un effet négatif sur ses ressources propres.
De fait, sauf à accepter un résultat déficitaire en fin d'exercice (le budget prévisionnel pour 2012 prévoyait déjà un résultat déficitaire de 1,8 million d'euros financé par un prélèvement sur le fond de roulement), c'est à une réduction de ses activités que va se trouver contraint l'opérateur.
Nous regrettons vivement cette situation qui conduit à restreindre de façon drastique les moyens d'un opérateur en phase de montée en puissance et risque, en conséquence, de compromettre de façon irréversible le développement de ses activités.
Le conseil d'orientation stratégique du 17 octobre 2012 a ébauché des pistes, mais il reste encore très difficile pour le ministère de définir de véritables priorités géographiques et au sein des objectifs pour lesquels il sollicite l'intervention de l'opérateur. Nous espérons vivement que le ministre des affaires étrangères sera en mesure de tenir les engagements qu'il a pris devant votre commission lors de son audition le 16 octobre, je cite : « S'il se trouvait freiné dans ses activités, j'envisagerai des mesures en gestion pour compenser ces diminutions ».
La situation est moins défavorable concernant les deux volets importants que sont la politique d'attractivité et l'enseignement français à l'étranger.
288 544 étudiants étrangers sont inscrits dans les établissements de l'enseignement supérieur en France. Ils représentent aujourd'hui 12,3 % des étudiants inscrits, soit une augmentation de plus de 65 % en dix ans.
Selon les données de l'UNESCO, la mobilité étudiante internationale s'est accrue depuis 2005 de plus de 30 % avec 3,3 millions d'étudiants en 2009. Les projections pour 2025 tablent sur un nombre d'étudiants en mobilité à l'étranger de 7 millions. Le marché de la formation universitaire à l'étranger est donc en plein développement et il est devenu très concurrentiel.
Aujourd'hui 8 pays concentrent près de 70 % des étudiants en mobilité internationale. La France serait aujourd'hui à la 3ème. Elle est la deuxième destination des étudiants en échange Erasmus derrière l'Espagne.
Dans ce contexte, la politique d'attractivité de qualité à l'attention des élites étrangères, tend à promouvoir la mobilité des étudiants dans des disciplines prioritaires (sciences, économie, droit) à des niveaux master et doctorat et de rééquilibrer les flux en faveur de la France.
Cette politique repose sur la promotion des études en France à travers le réseau culturel, mais aussi sur l'allocation de bourses.
En 2011, le nombre total de bourses du Gouvernement français s'élève à 14 687. Ce nombre est en baisse sensible depuis une dizaine d'années (22 437 en 2002). Les crédits affectés n'ont cessé de diminuer passant de 105 millions d'euros en 2005 à 70,5 millions d'euros en 2012. La France peine donc à maintenir sa politique en la matière. Il faut donc se réjouir du maintien des crédits en 2013, malgré le contexte économique.
Les étudiants originaires du continent africain ne représentent plus que 39,5 % des boursiers ; la part des Européens reste stable (18,8 %) mais cette part modeste s'explique par la montée en puissance des systèmes de bourses sur fonds communautaires. Le continent asiatique (18,2 %) progresse, ce qui est conforme à l'action menée en direction des émergents, comme le Proche-Moyen Orient et le continent américain.
Les orientations suivies en matière de disciplines sont respectées : les étudiants en sciences et sciences de l'ingénieur représentent 36 % des boursiers, ceux en administration-économie-gestion 20 %, les étudiants en droit et sciences politiques 6 %.
Une réforme est en cours de préparation pour simplifier le système des bourses. Le nouveau dispositif devra permettre une importante simplification des procédures de traitement des dossiers par l'opérateur et une plus grande visibilité pour les postes diplomatiques prescripteurs. La réforme devrait être effectuée à coût constant et préserver le volume des bourses. La mise en oeuvre de la réforme pour la rentrée universitaire 2013 est visée.
Comme prévu par la loi du 27 juillet 2010, Campus France a été créé sous forme d'établissement public industriel et commercial. Sa mise en place est effective depuis le 1er mai 2012. Le transfert des bourses gérées par le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires a eu lieu le 1er septembre. Un contrat d'objectifs et de moyens est en préparation.
La France dispose désormais comme ses concurrents allemands et britanniques avec le DAAD et le British Council, d'un véritable opérateur.
Pour mener à bien son action, l'établissement s'appuie sur le réseau des Espaces Campus France, intégrés au réseau diplomatique et culturel, mais aussi, en France, sur le « forum Campus France » qui anime la communauté des établissements qui reçoivent des étudiants étrangers.
L'attribution des bourses reste de la compétence du réseau ou de l'administration centrale. La mission de Campus France consiste à prendre en charge l'étudiant à son arrivée et à lui verser en temps utile la bourse qui lui a été allouée. En contrepartie, Campus France reçoit une rémunération pour frais de gestion.
Outre, la gestion des bourses du Gouvernement français ou le l'AEFE, une part de l'activité de Campus France consiste à gérer les bourses dites « des Gouvernements étrangers » qui sont en réalité mises en place par des institutions de nature diverse. Ces bourses représentent aujourd'hui entre un quart et un tiers des fonds gérés par l'établissement (40 millions d'euros sur 150 millions d'euros).
La présence d'un opérateur identifié et performant est un atout puisqu'il permet de proposer à des bailleurs étrangers une prestation de qualité, adaptée à leur besoin et enrichie de prestations de conseil, de placement des étudiants auprès des établissements, de suivi.
Le développement de ces prestations répond à un besoin comme en témoignent les récentes conventions conclues par la France avec plusieurs pays étrangers, la plus emblématique étant celle conclue avec le Brésil dans le cadre de son programme « Science sans frontière » qui prévoit de former d'ici 4 ans 10 000 étudiants. Ces activités nouvelles, outre qu'elles répondent à l'objectif d'attractivité, sont en mesure de pallier les insuffisances de notre politique en lui permettant de se concentrer sur des cibles plus précises et d'être plus sélective. Elle permet en outre à l'établissement de se procurer des ressources propres pour financer ses activités grâce aux frais de gestion qu'il facture.
Si la subvention de fonctionnement de Campus France est stabilisée en euros courants en 2013 à hauteur de 1,82 million d'euros afin d'assurer le bon déroulement de sa mise en place, l'opérateur bénéficie d'un transfert de 2,40 millions d'euros destinés à financer la reprise des activités internationales du CNOUS. Cette subvention couvrira la rémunération de 25 ETP ainsi qu'une part du fonctionnement de l'établissement pour les activités transférées. Le montant global de la subvention de Campus France en 2013 sera donc de 4,22 millions d'euros et le plafond d'emplois de l'opérateur s'établira à 243 ETP sous plafond et de 43 ETP hors plafond (financés par les ressources propres de l'EPIC).
Cette subvention pour charges de service public est complétée par l'allocation de 1,9 million d'euros du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Nous nous réjouissons du maintien de l'essentiel des crédits destinés aux bourses du Gouvernement français, et de la subvention de fonctionnement à Campus France en phase de montée en puissance. Nous comptons beaucoup sur le dynamisme de cet établissement et sur la cohérence de ses actions pour développer un pan important de notre politique d'attractivité.
L'enseignement français à l'étranger est l'un des instruments majeurs de la présence et de l'influence de la France dans le monde, de la promotion de la langue française et de la francophonie.
L'AEFE est l'opérateur pivot dans le dispositif. Sur les 485 établissements homologués, l'AEFE gère directement 75 d'entre eux dits « établissement en gestion directe » (EGD), et a passé des conventions avec 159 autres établissements dits « conventionnés ». Les premiers sont des services déconcentrés de l'Agence, les seconds des entités juridiquement distinctes avec lesquelles celle-ci entretient des liens contractuels. Ces 234 établissements, conventionnés et en gestion directe, constituent le réseau proprement dit de l'AEFE. Ils perçoivent des subventions versées par l'Agence qui assure également la rémunération des personnels titulaires détachés grâce à la subvention allouée par l'État.
A la demande de l'État, l'AEFE a renforcé son rôle en matière d'animation du réseau des autres établissements homologués en signant des accords avec la quasi-totalité d'entre eux.
L'appui du MAE apporté aux établissements couvre principalement le financement de personnels titulaires, l'attribution de bourses - les crédits correspondants sont inscrits au programme 151 - ainsi que la formation continue des enseignants
Dans l'ensemble, le périmètre du réseau varie peu et se développe sur tous les continents. Sa croissance est surtout le fait du rattachement d'établissements par homologation alors que le nombre des établissements en gestion directe ou conventionnés diminue.
Le réseau scolaire français à l'étranger scolarise dans sa totalité 306 475 élèves (en hausse de 8,9 % par rapport à l'année précédente) avec une part d'élèves étrangers qui représentent 62,6 % des effectifs.
Le nombre d'enfants scolarisés est en forte croissance, et dans tous les cycles.
Pour satisfaire une demande de scolarisation en hausse dans son réseau, l'AEFE est confrontée à plusieurs défis : la gestion du parc immobilier des établissements en gestion directe, le recrutement et l'affectation des professeurs, et le financement de son activité.
Compte tenu de la demande croissante des familles, la problématique immobilière est une contrainte forte. Elle a représenté pour l'année 2011 un montant de 15 millions d'euros de dépenses et génère une prévision de dépenses pour 2012 de l'ordre de 41 millions d'euros.
Le financement des opérations est assuré par prélèvement sur le fonds de réserve de l'établissement concerné ; par une aide de l'AEFE prélevée sur ses fonds propres ; par recours à des avances de France Trésor sur autorisation annuelle.
Si l'Agence n'est plus autorisée à contracter des emprunts bancaires d'une durée supérieure à un an, elle pourra recourir à des avances de l'Agence France Trésor, pour un montant de 12,5 millions d'euros en 2013. Ces avances sont servies à un taux d'intérêt réduit mais elles ne sont consenties que pour une période de huit ans. En conséquence, la charge de l'annuité de remboursement pour les établissements peut être importante. L'assouplissement de ce dispositif et l'allongement de la durée de remboursement des avances mériteraient d'être étudiés pour les gros projets.
Dans les pays où la situation politique devient instable, l'Agence doit renforcer les conditions de sécurité de ses établissements, comme cela a été le cas récemment dans les pays d'Afrique du Nord et du Sahel. Une subvention exceptionnelle a été allouée à hauteur de 4 millions d'euros pour la sécurisation des locaux en 2012 par le MAE.
Une seconde contrainte concerne le recrutement de personnels enseignants titulaires détachés de l'éducation nationale. Leur présence est une garantie de l'enseignement dispensé et de l'attractivité des établissements, c'est d'ailleurs une des conditions de leur homologation. Or le ministère de l'éducation nationale soumis à ses propres contraintes de recrutement de professeur titulaire est moins en mesure de satisfaire la demande pour ne pas démunir son propre réseau et combler les « vides » par des personnels moins qualifiés.
En 2012, l'AEFE rémunère 10 819 ETP en poste dans son réseau : 6 353 emplois sous plafond et 4 466 emplois hors plafond (financés sur ressources propres). Pour 2013, elle est autorisée à recruter 95 ETP hors plafond.
L'Agence est financée par l'allocation d'une dotation budgétaire annuelle de fonctionnement et par des ressources propres. Le montant de la dotation pour 2013 s'établit à 425 millions d'euros. Elle bénéficie de la priorité donnée par le président de la République à l'éducation. La subvention est majorée de 5,5 millions d'euros destinés à couvrir pour partie le coût de la part patronale de la pension civile. Entre 2012 et 2015, la croissance de la pension civile est estimée à 25 millions d'euros. Le Gouvernement a souhaité accompagner l'effort budgétaire à accomplir par une dotation supplémentaire de 5,5 millions d'euros en 2013 et 2014 puis de 10,5 millions d'euros en 2015 par rapport à 2012. L'effort supplémentaire à fournir pour absorber pleinement la charge pour pensions civiles devra être financé sur ses ressources propres par l'Agence.
Nous ne pouvons qu'être satisfaits de voir l'opérateur et les établissements échapper aux contraintes qui pèsent sur les autres opérateurs de l'action extérieure de l'État, nous nous inquiétons néanmoins de l'accroissement des charges qui incombent à l'Agence et qui ne reçoit depuis plusieurs années que des financements palliatifs au compte-goutte ce qui conduit les établissements à rechercher par l'augmentation des scolarités demandées aux familles les moyens de leur développement au risque d'en exclure certaines. L'articulation avec le système des bourses est dès lors une question sensible.
Cette situation, comme les évolutions perceptibles dans les systèmes éducatifs de certains pays, oblige naturellement à se reposer la question de nos outils. La place de l'enseignement français à l'étranger est incontestablement un atout, mais il est sans doute possible, à partir de ce socle, de faire évoluer notre action avec des outils nouveaux. L'AEFE a ouvert un champ de coopération avec les établissements étrangers qui ont développé des sections bilingues en créant en 2012 le label d'excellence « FrancÉducation » pour distinguer ceux qui satisfont aux critères d'un cahier des charges ambitieux. Ce label a été attribué à 17 établissements depuis mars 2012 et pourrait en concerner une centaine à l'horizon 2014/2015.
Une réflexion est par ailleurs en cours au ministère sur le réseau d'enseignement français à l'étranger, qui débouchera en 2013 sur une réforme du système d'attribution des bourses, mais également sur la définition de nouvelles orientations stratégiques. Elle arrive à un moment opportun.
C'est sur la base de ces travaux qu'un nouveau contrat d'objectifs et de moyens devrait être signé avec l'État en novembre 2013. Nous souhaitons qu'il soit soumis pour avis aux commissions compétentes des assemblées parlementaires, ce qui n'avait pas été le cas en 2010.
En conclusion, notre satisfaction doit toutefois être assortie d'un bémol : l'essentiel des augmentations de crédits portent sur des ajustements techniques qui n'impactent pas le niveau de la dépense publique puisqu'il s'agit pour l'AEFE de la compensation d'une hausse de la contribution au CAS Pensions, et pour Campus France d'un simple transfert du budget du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche vers celui des affaires étrangères. Leur impact sur le niveau d'activité des opérateurs sera donc peu élevé.
En conclusion, le ministère des affaires étrangères a dû réaliser des arbitrages, en fonction des priorités qu'il a définies et en tenant compte de façon probablement un peu optimiste de la capacité à développer, dans un contexte économique difficile, des ressources propres pour compenser les moindres ressources budgétaires. Certains de ces arbitrages sont évidemment critiquables, mais il eût été plus critiquable encore de ne pas choisir.
Sans doute en résultera-t-il une certaine baisse des activités de notre diplomatie culturelle et d'influence, mais leurs fondements ne nous en paraissent pas menacés.
Cette situation doit surtout inviter le Gouvernement, mais aussi nos diplomates et les opérateurs, à un effort de réflexion, d'une part pour redéfinir de façon plus exigeante le niveau de nos ambitions et faire de véritables choix entre les objectifs, mais aussi entre les territoires vers lesquels nous devons faire porter nos efforts, d'autre part pour développer et mettre au point des méthodes et des outils plus efficaces et moins coûteux.
C'est une tâche difficile, nous en convenons, car la diplomatie culturelle est prisonnière d'un héritage prestigieux et d'un désir de France sincère et perceptible sur tous les continents, mais c'est une tâche nécessaire au nom de l'efficience et de la transparence.
Sous réserve de ces observations, et pour ce qui concerne le programme 185, je vous recommande de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « action extérieure de l'État ».
Je m'en remets pour ma part à la sagesse de la commission et à titre personnel, je m'abstiendrai.
Je vous remercie. Je vous rappelle que nous procèderons à un vote jeudi matin, lorsque nous aurons examiné l'ensemble des crédits de la mission « action extérieure de l'État ».
L'État consacre un budget non négligeable à ces actions de diplomatie culturelle et à l'enseignement français à l'étranger, dispose-t-il des moyens d'en évaluer l'efficacité ? Je souhaiterais également rappeler la place importante qu'occupent dans le réseau les agents recrutés locaux et qui globalement ont un coût moins élevé que les expatriés.
Le matériel de présentation des études en France est souvent peu adapté aux différents pays, et paradoxalement, il est mieux conçu pour les pays non-francophones que pour les pays francophones. S'agissant de Campus France, l'arrimage entre l'établissement et le CNOUS semble avoir connu quelques difficultés, avez-vous des informations sur ce point ? Je m'interroge sur la capacité d'autofinancement de certains établissements du réseau ou de certaines alliances françaises, notamment dans les pays les plus pauvres et qui ne doivent pas pour autant être négligés.
Le journal Le Monde a fait état dans un article récent de dysfonctionnements importants dans la reprise des bourses jusqu'alors servies par le CNOUS par Campus France. Avez-vous pu aborder cette question ? J'ai également des inquiétudes sur les relations concurrentes entre les alliances françaises et l'Institut Français notamment sur le financement des alliances françaises dont une grande partie des ressources viennent de la vente de cours de français. Je suis également préoccupée par l'incapacité que vont avoir certaines familles expatriées à maintenir leurs enfants dans les établissements d'enseignement français en raison des frais de scolarité élevés et de l'éloignement de la gratuité qui était un espoir pour beaucoup d'entre-elles, notamment pour l'enseignement secondaire. S'agissant des personnels du réseau, si l'on doit saluer le travail des agents de droit local, il faut aussi considérer celui des expatriés à sa juste valeur ; ainsi, les établissements de l'AEFE n'auraient-ils pas la même notoriété, ni le même succès, si des professeurs titulaires français de l'éducation nationale n'y enseignaient pas en proportion suffisantes.
S'agissant de l'AEFE, et de sa diversification pour former des professeurs des écoles des pays d'accueil, c'est une idée intéressante mais les établissements de l'AEFE sont aussi financés par les familles et il serait abusif de distraire des enseignants de ces établissements pour effectuer une mission au profit d'autres établissements. Je souhaiterais aussi signaler une certaine incompréhension lorsque le financement de la construction d'un établissement scolaire est pris en charge, comme à Alger ou à Pondichéry, par un établissement existant alors que cela entraîne une augmentation des frais de scolarité pour des familles qui n'en bénéficieront pas.
La francophonie passe par les établissements scolaires. L'éducation nationale est souvent brocardée, mais je voudrais souligner la qualité de nos établissements à l'étranger, leur succès auprès des expatriés comme des populations locales et leurs résultats. Ceci démontre la performance des méthodes pédagogiques françaises développées par l'éducation nationale.
Je reconnais également que les personnels de droit local sont souvent moins onéreux pour notre réseau et effectuent un travail remarquable.
La relation entre alliances françaises et l'Institut Français a été marquée dès le départ par une certaine suspicion, mais je pense que cela est en train de s'améliorer dans le travail concret. L'Institut Français, opérateur, travaille au profit des deux composantes du réseau, les instituts locaux et les alliances.
L'accueil des étudiants étrangers en France suppose un niveau minimal de français pour pouvoir suivre les études en France. Il y a ensuite la question de l'obtention d'un visa. La circulaire Guéant a été abrogée, c'était un obstacle. Il faut être vigilant à l'accueil à l'arrivée en France, notamment dans les premiers jours, car souvent, même s'ils ont un niveau suffisant de français, les jeunes qui arrivent ont un peu de mal à s'orienter et trouver des repères. J'ai déjà évoqué cette question avec les responsables de Campus France.
Selon les indications que nous a données l'AEFE, il n'y a pas eu de désinscriptions en nombre significatif à la suite de la suppression de la prise en charge. Il faut être vigilant sur l'augmentation des frais d'écolage, pour ne pas exclure des familles en difficulté. C'est toute la difficulté de faire fonctionner notre action extérieure en période de crise économique avec moins de moyens budgétaires. Il ne serait pas acceptable, sous prétexte que l'on peut collecter des ressources propres plus facilement dans certains pays que dans d'autres, que nous orientions notre action de façon privilégiée vers ces pays.
La relation entre Campus France et le CNOUS n'est pas au beau fixe, car ce dernier a le sentiment d'avoir été dépossédé de ses compétences en matière de gestion des bourses pour les étudiants étrangers, le législateur ayant souhaité un guichet unique. Néanmoins, il faut relativiser la question du transfert de la gestion des bourses, 8 dossiers actifs n'ont pas été renouvelés qui concernent 785 étudiants boursiers sur les 12 400 transférés par le CNOUS, c'est regrettable mais c'est parfois aussi le choix des partenaires ou l'absence d'interlocuteurs comme avec la Syrie en ce moment. Les frais de gestion ont augmentés, c'est vrai, mais les tarifs du CNOUS n'avaient pas été ajustés, semble-t-il, depuis 1998. Il y a aussi une limite à la générosité car ce sont des dispositifs à l'initiative d'institutions étrangères et un établissement public ne peut travailler à perte sur cette activité qui n'est pas couverte par la subvention pour charges de service public.
S'il y a un secteur pour lequel nous disposons d'instruments d'évaluation, c'est bien celui de l'enseignement français à l'étranger, à travers les résultats des élèves aux diplômes qui sont excellents et leur taux d'intégration à des établissements d'enseignement supérieur en France, à travers des procédures parfois sélectives, car nombre d'entre eux poursuivent des études en France, qu'ils soient français ou étrangers. C'est un motif de satisfaction.
Il serait bien de demander au ministère des éléments sur les méthodes et les critères d'évaluation et sur le suivi de ces résultats.
Puis la commission a émis un avis favorable, à l'adoption des crédits du programme 185 au sein de la mission « Action extérieure de l'État ».
La commission procède à la nomination d'un rapporteur pour avis sur le projet de loi de finances pour 2013 :
Je vous propose d'officialiser une situation qui perdure. Sur le programme 146, trois collègues travaillent en permanence ensemble : MM. Daniel Reiner, Xavier Pintat et Jacques Gautier. Or, seuls Daniel Reiner et Xavier Pintat sont officiellement reconnus comme co-rapporteurs de l'avis budgétaire que nous émettons. Je vous propose donc d'accepter, exceptionnellement, que sur ce programme 146, la commission ait 3 co-rapporteurs.
Est désigné rapporteur pour avis :
- Mission Défense : . Programme 146 : équipement : M. Jacques Gautier.
La commission examine le rapport pour avis de MM. Alain Néri et Raymond Couderc sur les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2013 : mission Immigration, asile et développement (programme 303 « Immigration et Asile »).
La mission « Immigration, asile et intégration » a été créée en 2007 et comprend deux programmes : le programme 303 porte sur « l'immigration et l'asile », le programme 104 sur « l'intégration et l'accès à la nationalité française ». Depuis cette création, votre commission se saisit pour avis sur le programme 303. Seule l'action 2 « garantie de l'exercice du droit d'asile » fait l'objet d'un examen par la Commission.
Cette action a pour objectif de garantir aux demandeurs d'asile un traitement optimal de leur demande, ainsi qu'une bonne prise en charge en termes de conditions matérielles d'accueil et d'accès aux soins pendant la durée d'instruction de leur demande. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) puis, en cas de recours, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), qui relève du programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives », instruisent les demandes d'asile.
Le programme 303 concentre la majorité des crédits dévolus à la mission Immigration, asile et intégration, soit 90% des crédits totaux. Les autorisations d'engagement (596 millions d'euros en 2013 contre 553 millions en 2012, soit + 7,9 %) ainsi que les crédits de paiement (604 millions d'euros en 2013 contre 560 millions en 2012, soit + 8 %), sont en progression.
Au sein du programme 303, c'est l'action 2 « garantie de l'exercice du droit d'asile » qui concentre l'essentiel des dotations, puisqu'elle représente 84 % des autorisations d'engagement demandées pour 2013.
Les dépenses de fonctionnement regroupent les dotations versées à l'OFPRA. Elles sont cette année en augmentation de 2,75 millions d'euros par rapport à la LFI 2012 afin de permettre à l'OFPRA d'améliorer le délai de traitement des demandes enregistrées. Le plafond des emplois est également relevé de 10 ETP.
Les dépenses d'intervention sont relatives à la prise en charge sociale des demandeurs d'asile pendant toute la durée d'instruction de leur dossier. Elles regroupent les dotations liées aux centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA), les dispositifs d'hébergement d'urgence, l'allocation temporaire d'attente (ATA), et l'accompagnement social spécifique des demandeurs d'asile.
Cette année, l'accent est mis sur l'hébergement des demandeurs d'asile en cours de procédure. En effet, la très forte augmentation des crédits alloués au programme 303 porte essentiellement sur les dotations relatives aux dispositifs de prise en charge des demandeurs d'asile (+24%). Ainsi, le PLF 2013 prévoit la création de 1 000 places supplémentaires en CADA, portant leur nombre à 22 410 fin 2013. Indicateur de performance du programme 303, le taux d'hébergement en CADA des demandeurs d'asile en cours de procédure tend à s'améliorer et à progresser régulièrement pour atteindre 40% en prévision 2012 et 45% en cible 2015.
Outre les dispositions concernant les CADA, la dotation relative à l'hébergement d'urgence sera abondée de 34 millions en 2013. De même, les crédits relatifs au versement de l'ATA seront augmentés de 50 millions en 2013. C'est donc un effort conséquent qui est engagé sur cette question de la prise en charge des demandeurs d'asile. C'est d'autant plus louable et remarquable que le problème de l'insincérité budgétaire avait maintes fois été souligné lors des exercices précédents.
Fidèle à ses valeurs de protection et de défense des droits de l'homme, la France est le premier pays d'accueil des demandeurs d'asile en Europe. En 2011, la demande d'asile a connu sa quatrième année de hausse consécutive, avec 57 337 demandes enregistrées (mineurs accompagnants et demandes de réexamen inclus), soit +8,7% par rapport à 2010. Les dix principaux pays de provenance des demandeurs d'asile sont le Bangladesh, la République démocratique du Congo, l'Arménie, le Sri Lanka, la Russie, la Chine, Haïti, le Kosovo, la Guinée et la Turquie.
Le taux d'acceptation est de 10,8 % des demandes d'asile en 2011 contre 13,5 % en 2010 (décisions OFPRA). Si l'on ajoute les recours déposés ensuite devant la CNDA et accordés, le taux d'accord global est d'environ 25%.
J'en viens à la deuxième partie de notre présentation sur les limites de ce budget. On a une impression de tonneau des Danaïdes ! Tout d'abord, concernant le traitement des demandes par l'OFPRA et la CNDA : à l'OFPRA, un important plan de recrutement, visant à résorber le stock de dossiers, a été mis en oeuvre depuis 2010. Le projet de loi de finances pour 2012 prévoyait la poursuite de cet effort, portant les effectifs à 455 ETP fin 2012. Toutefois ces moyens n'ont jusqu'à présent pas permis de réduction du stock de dossiers en attente, ni du délai de traitement, du fait de l'augmentation parallèle et continue de la demande d'asile depuis 2008. Ainsi, le délai moyen d'examen d'une demande à l'OFPRA est de 179 jours au premier semestre 2012 !
Or, ce problème a des conséquences autant sur le plan humain que financier. Sur le plan financier, un tel délai a un coût et des conséquences non négligeables sur les finances publiques. Sur le plan humain, il est impensable de laisser un demandeur d'asile dans l'incertitude aussi longtemps, délai d'autant plus allongé si la réponse s'avère négative et est suivie d'un recours auprès de la CNDA. Depuis 2009, ce nombre de recours est à la hausse. Ainsi, en 2011, ce sont 31 983 recours qui ont été enregistrés, soit + 16,5% par rapport à 2010. Néanmoins, et nous nous en félicitons, le plan d'action mis en oeuvre en 2010 à la CNDA a permis une progression très importante de sa capacité de jugement. En effet, le délai prévisionnel moyen de jugement, qui avoisinait 15 mois en 2010 a été réduit à 9 mois et 5 jours en 2011, soit six mois de moins en l'espace d'une année. Le délai prévisionnel moyen de jugement devrait être d'environ 8 mois fin 2012.
La question la plus épineuse, concernant l'asile, est celle de l'hébergement des demandeurs en cours de procédure. L'hébergement en centre d'accueil a été multiplié par quatre ces dix dernières années, portant à 21 410 le nombre de places fin 2011. Or, ce nombre est toujours insuffisant. Le PLF pour 2013 prévoit la création de 1 000 places supplémentaires, portant la capacité totale à 22 410 places, néanmoins au 8 août 2012 on comptait encore 33 000 personnes en attente d'une admission en CADA !
Or, ce manque de place a des répercussions sur les finances publiques, puisque les demandeurs non bénéficiaires d'une place en CADA perçoivent l'allocation temporaire d'attente (ATA), dont les crédits associés sont en progression et qui coûte plus cher que l'hébergement en CADA ou qu'un hébergement d'urgence. En effet, le coût unitaire moyen d'une place en CADA sera de 24 € par jour en 2013. En comparaison, le coût moyen journalier d'une place d'hébergement d'urgence s'élèvera à 15 € en 2013, auxquels il faudra ajouter le versement de l'ATA, et dont le montant est d'un peu plus de 11 € par jour, soit au total plus de 26 €.
Outre ces limites, une autre difficulté concernant l'asile tient à l'harmonisation complexe des législations européennes existant en la matière. Alors que la mise en place d'un régime d'asile européen commun (RAEC) était prévue pour fin 2012, l'établissement de normes communes est loin d'être simple et les négociations se poursuivent à Bruxelles sur la refonte de la directive « procédure » et du règlement « Dublin II ». Point positif, la directive « accueil » a, semble-t-il, été l'objet d'un accord politique le 25 octobre dernier lors du Conseil justice et affaires intérieures.
En conclusion, il s'agit d'un programme ambitieux qui voit son budget augmenter régulièrement depuis des années faisant ainsi honneur à la France en respectant sa tradition d'accueil. Pour autant et malgré une augmentation de l'investissement de l'Etat, tant en budget qu'en personnel dédié, les stocks de dossiers en attente ne se réduisent pas, avec les conséquences humaines et financières que je vous précisais plus tôt.
Sans réduction de temps d'examen des dossiers et avec une augmentation du nombre de demandeurs d'asile, il y a un fort accroissement de demandeurs non bénéficiaires d'une place en CADA, mais qui perçoivent une allocation temporaire d'attente (ATA) dont le coût est beaucoup plus élevé que celui de l'hébergement en CADA.
Aussi, je ne pense pas que ce budget réponde parfaitement à la situation actuelle. Pour cette raison, je vous propose de vous abstenir, comme je vais le faire moi-même, d'adopter les crédits du programme 303.
Certes, le traitement des dossiers est encore trop long et le nombre des places d'accueil et d'hébergement reste insuffisant. Mais en dépit de la situation d'un budget plus que contraint et très difficile, il convient de prendre en compte l'augmentation des autorisations d'engagement de l'ordre de 43 millions d'euros, soit près de 8%, la progression des crédits de paiement de 44 millions d'euros, soit 8% également, et la création de 10 postes supplémentaires de contractuels à l'OFPRA et de 1 000 places d'hébergement en CADA.
A l'évidence, cela marque la volonté d'améliorer la garantie de l'exercice du droit d'asile par un effort progressif et maintenu les prochaines années. C'est pourquoi je vous propose de donner un avis favorable au programme 303 et de l'adopter.
Par treize voix pour, zéro voix contre, et six abstentions, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission Immigration, asile et intégration.