Intervention de Jérôme Cahuzac

Réunion du 22 novembre 2012 à 11h00
Loi de finances pour 2013 — Discussion d'un projet de loi

Jérôme Cahuzac :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, comme Pierre Moscovici vient de l’indiquer, ce projet de loi de finances initiale que le Sénat s’apprête à examiner est à la fois une suite et un précédent.

Il est la suite de la loi de finances pluriannuelle que votre Haute Assemblée a déjà examinée, du projet de loi de financement de la sécurité sociale et de la loi de finances rectificative présentée au Parlement, et donc devant vous, l’été dernier.

Il est aussi un précédent, car, nous le savons, une deuxième loi de finances rectificative, bien classique, interviendra au mois de décembre, juste avant la fin de l’année.

Cette loi de finances est donc un ensemble dont toutes les parties se tiennent et se complètent. Cet ensemble est grave – le nier serait absurde –, mais le Gouvernement le tient pour nécessaire, tant il lui paraît indispensable de rompre avec une équation budgétaire dont on connaît les termes, des termes qui ont été maintenus ces dix dernières années et qui, en vérité, rendent cette équation insoluble.

Quels sont ces termes ? Il s’agit, dans un premier temps, de diminuer les ressources sans diminuer – loin s’en faut ! – à due concurrence les dépenses.

Les exemples abondent ces dix dernières années. Entre 2002 et 2007, le Président Jacques Chirac a délibérément diminué l’impôt sur le revenu d’environ 30 %, comme il s’y était engagé pendant sa campagne électorale présidentielle, et, de fait, les différents ministres du budget, notamment Jean-François Copé, ont mis un soin particulier à diminuer le rendement de cet impôt sur le revenu de 30 %. Il s’en faut aujourd’hui de 17 milliards d’euros de recettes qui manquent objectivement !

Il s’est agit aussi, dans cette même période, de majorer la dépense publique, puisque les niches fiscales ont progressé en nombre et que leur coût s’est surtout aggravé pour l’État. Ce coût des niches fiscales, qui était de 50 milliards d’euros en 2002, est passé à 75 milliards d’euros en 2007, soit une augmentation considérable de 25 %.

Le même mécanisme, les mêmes termes de cette équation insoluble ont été maintenus entre 2007 et 2012. Je voudrais rappeler qu’à l’été 2007 le paquet fiscal fut adopté par la majorité UMP pour un coût de 10 milliards à 12 milliards d’euros intégralement financé par l’emprunt.

La réforme de la taxe professionnelle, qui était peut-être nécessaire, mais dont le montant ne fut assumé, là encore, que par l’endettement, a représenté un coût de 7 milliards à 8 milliards d’euros la première année et 5 milliards d’euros en vitesse de croisière.

Le même exemple peut être donné avec l’abaissement de la TVA dans la restauration. Encore une fois, je ne préjuge pas la légitimité de cette mesure, ni même son intérêt pour les entreprises concernées. Je me permets simplement de constater que son coût réel et net, 2, 3 milliards d’euros, ne fut assumé, là encore, que par l’emprunt.

Comment imaginer résoudre cette équation dans laquelle les ressources de l’État sont délibérément abaissées et ses dépenses délibérément augmentées ? Comment imaginer que cette équation ait pu être résolue autrement que par l’endettement ? Et c’est bien cet endettement insupportable qui contraint aujourd’hui l’action publique des autorités de la France.

Cet endettement a abouti à un affaiblissement de la position de la France – peut-être pas dans le monde, mais certainement en Europe et en tout cas au sein de la zone euro – et, dès la loi de finances rectificative, a obligé le Gouvernement à prendre des mesures difficiles. Il est finalement peu surprenant que l’opposition les condamne, comme il est peu surprenant que la majorité et les membres du Gouvernement rappellent aux membres de cette opposition l’origine précise et véridique des efforts qu’il nous faut désormais demander aux Français.

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