Intervention de François Marc

Réunion du 22 novembre 2012 à 11h00
Loi de finances pour 2013 — Discussion d'un projet de loi

Photo de François MarcFrançois Marc :

Les investisseurs ne perçoivent toujours pas notre zone monétaire comme un ensemble cohérent. Si les choses n’évoluent pas plus mal, c’est parce que les Européens ont réussi à faire passer l’idée qu’ils sont, sinon solidaires, du moins unis. La Banque centrale européenne a fait beaucoup à cet égard. Les États européens ont pris leur part et sont parvenus à lancer le mécanisme européen de stabilité, le MES.

On parle beaucoup moins ces temps-ci dans la presse de notre « pare-feu » contre les attaques spéculatives sur nos dettes souveraines. Il n’empêche que l’enjeu demeure crucial et que la consolidation de la zone euro reste notre première priorité, y compris sur le plan budgétaire.

Dans ce projet de loi de finances, nous dépensons 6, 5 milliards d’euros pour doter en capital le mécanisme européen de stabilité. C’est la plus grosse dépense nouvelle de ce budget ! Nous ne lésinons pas avec la stabilité de la zone euro, car toutes nos finances publiques en dépendent. Le lien entre secteur bancaire et dettes souveraines peut encore produire des effets redoutables, et c’est pour cette raison que l’union bancaire doit vite voir le jour. Quand l’Europe n’avance plus, elle recule. Il faut donc se réjouir que la France soit aux avant-postes du camp du progrès et du mouvement.

Dans ce contexte, le Gouvernement doit être présent sur trois fronts à la fois, sans qu’il soit possible de les hiérarchiser, au risque de fragiliser l’ensemble.

Premier front : la discipline budgétaire.

Qu’on le veuille ou non, la capacité à respecter leur trajectoire de finances publiques est un élément désormais essentiel de la crédibilité des États.

Deuxième front : la compétitivité et la recherche de la croissance de l’économie.

Si l’on considère que la crise de la zone euro s’explique mieux par les déséquilibres des balances des paiements que par les finances publiques, alors il nous faut remédier à notre déficit du commerce extérieur.

Troisième front : la justice sociale.

Une nouvelle majorité a été élue au printemps. Elle doit répondre aux attentes qui se sont exprimées. Elle doit le faire parce que les efforts qui seront demandés seront acceptés s’ils sont perçus comme justement répartis ; elle doit le faire parce que le chômage et la crise menacent la cohésion de notre société ; elle doit le faire parce que les inégalités sociales se creusent dans notre pays et qu’il ne faut pas s’y résoudre.

De mon point de vue, ce projet de loi de finances répond aux attentes sur ces trois points.

Du point de vue de la discipline budgétaire, je rappelle juste que le déficit budgétaire de l’État serait ramené de plus de 83 milliards d’euros à 61 milliards d’euros, l’une des plus fortes baisses jamais enregistrées. Le déficit primaire se réduit de 60 % pour retrouver un niveau d’avant la crise.

Pour tenir le déficit, la méthode est connue : elle vise en particulier à interdire que les dépenses de l’État ne progressent plus vite que l’inflation et à stabiliser en valeur des dépenses autres que la charge de la dette et les pensions.

Cela implique de réaliser une dizaine de milliards d’euros d’économies, en mettant à contribution, pour ce qui est du fonctionnement et des interventions, l’ensemble des ministères. Cela implique de stabiliser les effectifs et la masse salariale.

Cet effort sur les dépenses est conçu dans la durée, car le fonctionnement des services publics ne peut s’accommoder de coups d’accordéon qui conduiraient à réduire massivement les crédits une année, pour en réattribuer l’année suivante.

Mais j’entends déjà les critiques sur ce qui serait le point faible – ou l’un des deux principaux points faibles – de ce projet de loi de finances, à savoir la concentration sur l’année 2013 de l’effort en recettes.

Pour ce qui concerne le budget de l’État, on ajoute une quinzaine de milliards d’euros de hausses d’impôts aux 4 milliards d’euros issus des effets, en 2013, des mesures votées par la majorité précédente et aux 3 milliards d’euros issus des effets pour 2013 des mesures du collectif budgétaire.

Mes chers collègues, de mon point de vue, ce choix est le meilleur possible. Comme je l’avais expliqué au moment du collectif budgétaire, à court terme les hausses d’impôts sont moins récessives que les baisses de dépenses. Les travaux théoriques récents du Fonds monétaire international ne font que confirmer cette analyse.

De mon point de vue, l’affichage de mesures de recettes lisibles et bien calibrées ne peut que crédibiliser notre détermination à respecter l’objectif de déficit de 3 % du PIB en 2013.

L’autre faiblesse alléguée du projet de loi de finances, c’est l’hypothèse de croissance du PIB, dont dépend notamment l’évolution spontanée des recettes. On peut toujours se livrer à des exercices de simulation pour évaluer les effets sur le solde d’une prévision de croissance différente de celle qu’a retenue le Gouvernement. C’est tout à fait légitime et cela permet de se préparer à toutes les éventualités. En revanche, pour contester une hypothèse de croissance, il faut être autrement armé. Certes, les gouvernements ont toujours un biais optimiste dans leurs prévisions, mais je constate simplement que l’écart constaté cette année avec le consensus n’est pas plus grand que d’habitude.

Je rappelle aussi que, sur l’initiative du Sénat, le projet de loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques oblige le futur Haut Conseil des finances publiques à se référer au consensus pour apprécier les hypothèses retenues dans les lois de finances. J’en tire comme conclusion qu’il est inutile de chercher de mauvaises querelles cette année et que, dès le 1er mars, la donne aura changé avec la création de cette instance.

J’en viens maintenant à la compétitivité et à la recherche de la croissance. Ce sujet nous occupera dans les semaines qui viennent avec la mise en place du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Quoi que l’on pense de la décision et des motivations de l’agence Moody’s, qui l’ont conduite ces derniers jours à dégrader d’un cran la note de la France, il nous faut en tirer la conclusion que les réformes structurelles ne peuvent attendre et qu’il faut les mettre en œuvre le plus vite possible.

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