Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe écologiste du Sénat a unanimement voté en faveur du présent projet de loi organique lors de son premier examen par notre assemblée. Il votera de nouveau en sa faveur ce soir, alors que nous examinons les conclusions de la commission mixte paritaire qui s’est réunie à son propos le 8 novembre dernier.
L’essentiel ayant déjà été dit lors de notre précédente discussion, je serai bref.
Si les écologistes ont dès le départ choisi de soutenir ce projet de loi organique, c’est parce qu’il découle d’une obligation légale consécutive à la ratification du traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance en matière économique.
C’est aussi parce que, en choisissant la voie d’une loi organique plutôt que d’une modification de la Constitution, le Président de la République et le Gouvernement ont préservé la capacité des pouvoirs publics et du législateur à modifier les dispositifs que ce texte vise à mettre en place, si le besoin devait s’en faire sentir à l’avenir.
Vous le savez, les écologistes ne sont pas en parfait accord avec certains aspects de ces dispositifs. La gouvernance budgétaire nous semble ici trop étroitement conçue, trop étriquée. Le retour très rapide à un déficit maximal égal à 3 % du PIB nous semble brutal et manquer un peu de réalisme.
Tout à l’heure, au début de la discussion relative au projet de loi de finances pour 2013, nous avons rappelé certaines de nos inquiétudes. Nous les avions aussi évoquées lors des débats sur le présent projet de loi organique. Nous avions déposé plusieurs amendements qui visaient à préciser le rôle ou à améliorer le fonctionnement du Haut Conseil des finances publiques, que ce projet de loi organique tend à instituer.
Certains, de nature très technique, portaient, par exemple, sur les demandes d’explication et de transparence concernant les hypothèses prises en compte par le Haut Conseil dans la formulation de ses avis.
D’autres étaient de nature plus politique et, osons l’expression, d’inspiration plus citoyenne ; j’ai en tête la question de la composition du Haut Conseil des finances publiques que nous avions suggéré de rendre plus paritaire.
Sept de nos amendements avaient été adoptés par le Sénat ; quatre d’entre eux ont, depuis, été confirmés par la commission mixte paritaire, dont celui qui visait la question de la parité hommes-femmes, parité qui, lors des travaux de la CMP, a pu être améliorée, notamment en étant élargie à l’ensemble des membres du Haut Conseil.
Je tiens à remercier tout particulièrement M. le rapporteur général de la commission des finances, ma collègue Michèle André et tous les membres de la CMP qui ont contribué à cette très grande avancée.
Rien ne nous garantit encore la qualité des travaux de ce Haut Conseil – seul l’avenir nous le dira ! –, mais, à l’échelon européen, il est d’ores et déjà devenu un symbole de l’instauration de la parité hommes-femmes dans le milieu de la finance jusque-là terriblement rétif à la présence de femmes dans ses organes décisionnaires ou même simplement consultatifs.
La portée politique de ce projet de loi organique n’en est évidemment que plus grande !
Je veux voir dans ce processus un signe très positif. Je veux y voir la preuve que nos assemblées parlementaires, trop souvent et trop longtemps considérées comme des chambres d’enregistrement par les gouvernements passés, constituent bien plutôt des instances de réflexion, d’innovation et d’avancées déterminantes sur le plan sociétal.
Nous n’insisterons jamais assez sur l’importance que revêtent pour nous et pour le débat citoyen le respect que le Gouvernement accorde aux travaux du Parlement et la bonne intelligence dont les parlementaires doivent faire preuve lors de l’amélioration des propositions gouvernementales. C’est le propre d’un régime politique à la fois sain et efficace et d’une démocratie riche et cohérente avec elle-même que d’agir comme le Gouvernement et le Parlement ont su le faire à propos de ce texte.
En conclusion, madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne résiste pas à l’envie de revenir une dernière fois sur la dimension européenne du présent projet de loi organique et d’évoquer le Conseil européen qui s’ouvre en ce moment même à Bruxelles.
Comme vous le savez sans doute, ce dernier doit examiner la nomination éventuelle au sein du directoire de la Banque centrale européenne du Luxembourgeois Yves Mersch, dont la candidature a été rejetée le 25 octobre dernier par le Parlement européen, lequel n’a malheureusement en la matière qu’une voix consultative.
La raison de ce rejet tient précisément à l’absence totale de femmes au sein de ce directoire, et, plus largement, au sein des instances dirigeantes des institutions économiques et financières européennes.
Cette absence scandalise bien au-delà du Parlement européen puisque près de 250 parlementaires nationaux – italiens, allemands, espagnols ou français, dont 55 sénateurs appartenant à tous les groupes de cette assemblée – ont adressé ces derniers jours un appel au président Van Rompuy pour l’alerter sur cette situation.
Catherine Tasca et moi-même avons aujourd’hui écrit au Président de la République afin que la France agisse en conséquence : soit en refusant la candidature de M. Mersch, soit en promouvant la nomination d’une femme à la tête du futur office de supervision bancaire européenne.
Mes chers collègues, les multiples plafonds de verre qui continuent de contraindre nos sociétés et empêchent la parité hommes-femmes d’être effective dans tous les grands champs de la vie publique doivent tomber.
C’est notre devoir démocratique de saisir toutes les opportunités qui se présentent à nous pour œuvrer en ce sens. Nous avons su le faire avec ce projet de loi en France. L’Europe doit savoir le faire, dès à présent, lors de la tenue de l’actuel Conseil européen. §