Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous prie tout d’abord d’excuser notre collègue Bruno Sido, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire, qui est retenu dans son département de la Haute-Marne.
Alors que nous examinons aujourd’hui les conclusions de la commission mixte paritaire qui s’est réunie le 13 janvier dernier sur la proposition de loi visant à rendre obligatoire l’installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d’habitation, un seul mot me vient à l’esprit, monsieur le secrétaire d’État : enfin !
Il aura en effet fallu près de cinq ans pour que nous soyons sur le point d’adopter définitivement cette proposition de loi qui a été, je le rappelle, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 28 septembre 2005…
Le parcours de cette proposition de loi a été chaotique et semé d’embûches. Face aux gouvernements successifs qui n’ont guère fait preuve de volonté pour la soutenir, il aura fallu l’engagement résolu de parlementaires, au premier rang desquels les auteurs de cette proposition de loi, Damien Meslot et Pierre Morange, et de vous-même, monsieur le secrétaire d’État, pour que ce texte puisse être sur le point d’aboutir.
Le débat d’aujourd’hui n’aurait également pu avoir lieu sans le soutien sans faille de mon collègue Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, dont j’ai pu mesurer – et apprécier – la force de conviction.
Je remercie également de leur soutien actif le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat, MM. Bernard Accoyer et Gérard Larcher. La réunion de la commission mixte paritaire a en effet été provoquée, ce qui constitue une première, par l’action conjointe des présidents des deux assemblées, en vertu de l’article 45 de la Constitution dans la rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
L’enjeu de l’installation des détecteurs de fumée est – je le sais – une préoccupation partagée sur l’ensemble des travées de notre assemblée. Chaque année, plus de 10 000 personnes sont blessées, dont près de 3 000 avec une invalidité lourde, et 800 périssent dans des incendies.
Chacun d’entre nous, en tant qu’élu local, a été confronté à des tragédies de ce type et en est resté profondément marqué.
Or nombre de ces drames pourraient être évités. Dans les pays comparables à la France, le nombre des victimes d’incendies est inférieur de moitié, ce qui s’explique notamment par un taux d’équipement en détecteurs de fumée très supérieur au taux français. Ce taux atteint, par exemple, près de 90 % en Grande-Bretagne, alors qu’il est de seulement 2 % dans notre pays.
La présente proposition de loi vise par conséquent à rendre obligatoire l’installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d’habitation.
Les deux assemblées n’ont guère eu de difficulté à s’entendre sur le principe de cette proposition de loi et quatre des cinq articles de cette dernière ont été adoptés en termes identiques par nos deux assemblées. Seule restait en discussion la question, centrale, de la charge de l’installation des détecteurs de fumée.
La Haute Assemblée souhaitait confier aux propriétaires le soin d’installer les équipements et ne charger les locataires que de leur entretien. Nos collègues députés souhaitaient, quant à eux, faire peser la charge de l’installation sur les occupants des logements, option qui semble être acceptée par M. le secrétaire d’État.
Mes chers collègues, je ne vous le cache pas, et je l’ai clairement indiqué lors de la réunion de la commission mixte paritaire, j’aurais préféré que le Sénat soit suivi sur ce point. J’ai cependant considéré qu’après presque cinq ans d’attente il était nécessaire d’arriver à une solution et que la proposition de loi devait être adoptée.
J’ai donc soutenu la position retenue par la commission mixte paritaire et je remercie mes collègues qui représentaient le Sénat, tous groupes politiques confondus, d’avoir compris ma démarche et de l’avoir très majoritairement suivie.
L’article 2 de la proposition de loi a ainsi été adopté à l’unanimité des suffrages exprimés par la commission mixte paritaire, la proposition de loi ayant, quant à elle, été adoptée à l’unanimité moins une voix d’abstention. Vous le voyez, monsieur Raoul, je tiens à être très fidèle dans mon rappel des votes intervenus.
L’article 2, tel qu’il a été modifié par la commission mixte paritaire, fixe notamment les principes que je vais maintenant reprendre.
La charge de l’installation du dispositif est attribuée à l’occupant du logement, quel qu’il soit, l’occupant devant également veiller à l’entretien et au bon fonctionnement du dispositif.
Le propriétaire non occupant est responsable dans un nombre limité de cas qui seront définis par décret en Conseil d’État, décret qui devra notamment viser les locations saisonnières, les foyers, les logements de fonction et les locations meublées ; le décret prévu déterminera également les mesures de sécurité à mettre en œuvre par les propriétaires dans les parties communes des immeubles.
Si ce texte est adopté aujourd’hui par notre assemblée, avec la majorité que j’espère la plus large possible, il reviendra au Gouvernement de publier les textes d’application nécessaires.
J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que vous pourrez vous engager sur ce point aujourd’hui. Je n’ai d’ailleurs guère d’inquiétudes, puisque le Gouvernement, qui, en vertu de l’article 45 de la Constitution, peut seul inscrire la lecture des conclusions d’une commission mixte paritaire à l’ordre du jour parlementaire, a été très réactif s’agissant de la présente proposition de loi. Je tiens à vous en remercier.
J’ai d’autant moins de craintes à ce sujet que j’ai appris avec une certaine satisfaction que vous aviez lancé, monsieur le secrétaire d’État, une grande campagne d’information sur la prévention des incendies domestiques, reprenant ainsi l’un des éléments prévus à l’article 4 de la présente proposition de loi, dispositif auquel nombre de vos prédécesseurs avaient toujours été très réticents...
En conclusion, mes chers collègues, je vous invite à adopter cette proposition de loi telle qu’elle est issue des travaux de la commission mixte paritaire. J’espère qu’au terme de cinq années de discussions elle recueillera une large majorité de suffrages sur l’ensemble de ces travées.