Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous allons examiner, sur l’initiative de notre collègue Alain Richard, a pour objectif de réintroduire la souplesse et la liberté de négociation dont les collectivités ont besoin pour achever la recomposition de leurs intercommunalités.
La loi du 16 décembre 2010 avait, certes, permis d’avancer sur la voie de l’achèvement de la carte intercommunale, mais elle n’a pas été suffisante pour aboutir partout.
Dans cette perspective, il revient au législateur de définir un cadre normatif plus souple, permettant aux communes de faire pleinement valoir leur liberté de regroupement dans une démarche volontaire.
La gouvernance des EPCI exige, dans son fondement même, une procédure fondée sur l’échange et le respect mutuel, dans l’écoute et la prise en considération de toutes les communes, quels que soient leur taille, leur poids économique ou leur importance démographique.
Il s’agit là d’une attente des collectivités, que les états généraux de la démocratie territoriale ont d’ailleurs rappelée avec force. Le législateur doit donc les aider à avancer sur la voie de la recomposition de l’intercommunalité.
C’est dans ce but, déjà, que la loi du 29 février 2012, à l’origine de laquelle se trouvait le président Sueur, a été adoptée pour mettre fin aux situations de blocage constatées dans plusieurs dizaines de départements. Cette loi était nécessaire, mais elle n’est pas suffisante. Elle a permis de maintenir les mandats en cours des délégués intercommunaux et elle a renforcé les droits accordés aux suppléants de ces délégués, mais elle n’a pu véritablement revenir, comme nous le proposions alors au Sénat, sur les règles régissant la composition des conseils communautaires des EPCI et le nombre de leurs vice-présidents. Or ces règles sont centrales en ce qu’elles conditionnent le processus de négociation entre les communes membres.
La loi de 2010 avait posé en la matière des règles strictes, sur lesquelles Mme la rapporteur est précisément revenue. Je ne m’y attarderai donc pas.
Je constate cependant que ces règles étaient porteuses d’un risque, celui de voir la représentation des petites communes fragilisée. De même, elles pouvaient conduire à une mauvaise appréciation des réalités de chaque territoire, ce qui explique les difficultés ayant pu apparaître pour faire aboutir les redécoupages.
Dans ce contexte, la proposition de loi présentée par notre collègue Alain Richard a pour objectif central, majeur, de faciliter la négociation entre collectivités. En ce sens, elle répond à un véritable besoin et à une réelle attente des élus locaux.
Elle a également le mérite d’intervenir au bon moment, quand il en est encore temps, si je puis dire. Nous devons effectivement aller vite, car, en cette matière, il nous faut sécuriser rapidement les règles de composition des EPCI en prévision du renouvellement de 2014, donc avant le 31 décembre 2012.
Agir vite est donc nécessaire, mais agir en vue d’assouplir les règles dans ce domaine est indispensable. La proposition de loi réintroduit justement cette souplesse qui manquait sans doute dans la loi de 2010.
Elle permettra aux élus, si nous l’adoptons, d’augmenter, si besoin, de 25 % en plus le nombre de délégués communautaires et de fixer à 30 % de l’effectif de l’organe délibérant le nombre des vice-présidents, dans la limite maintenue de quinze vice-présidents.
Le cadre fourni par la loi de 2010 serait alors préservé, mais le présent texte y apporterait de réels assouplissements en « redonnant du grain à moudre » aux collectivités, sans déstabiliser les accords déjà intervenus ou en passe d’être finalisés.
En l’occurrence, il s’agit non pas de défaire ce qui avait été patiemment et souvent laborieusement tissé jusqu’à présent sur la base de la loi de 2010, mais bel et bien de faciliter les négociations encore en cours – et c’est essentiel – en faisant valoir le lien de confiance réciproque entre les parties prenantes. C’est, finalement, ce qui manquait à la loi de 2010, et il nous appartient, à travers ce texte, de redonner tout son sens à ce lien de confiance.
Ainsi, nous faisons confiance à l’intelligence territoriale, et ce de manière responsable. J’entends par là que cette proposition de loi n’a pas pour but de délivrer une sorte de blanc-seing aux EPCI. L’ajustement du nombre de délégués et de vice-présidents doit se faire aussi en responsabilité. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ces éventuels ajustements, qui n’ont rien d’obligatoire, devront se faire à enveloppe budgétaire constante.
Je me félicite de la reconnaissance des majorités qualifiées des communes membres pour entériner ces accords locaux. J’approuve par ailleurs, bien sûr, le nouveau statut accordé aux suppléants, car il permet aux plus petites communes d’avoir une représentation garantie et facilite l’implication des suppléants eux-mêmes.
Je m’interroge toutefois, madame la rapporteur, sur la pertinence de la nomination d’un suppléant pour les communes ayant de un à quatre délégués communautaires. Le fait de désigner un suppléant pour les seules communes ayant un seul délégué me semblait nécessaire et suffisant. Pour les autres communes, l’utilisation des pouvoirs, largement répandue dans les EPCI, a fait ses preuves. Est-il nécessaire de modifier la situation actuelle ?
Au-delà, j’estime que cette proposition de loi est conforme à l’idée que nous devons nous faire du fonctionnement des collectivités en général et de la coopération intercommunale en particulier : souplesse, négociation, responsabilisation et équilibre en sont les maîtres mots. Je sais qu’en l’adoptant nous répondrons à une attente de nos élus locaux.
Aussi, je dirai pour conclure que ce texte confirme la volonté de notre assemblée de poser des bases solides avant d’entrer dans la nouvelle phase de décentralisation dont la France a besoin. Il nous appartient maintenant de concrétiser cette volonté ici même, au Sénat, qui est la chambre des collectivités territoriales. §