Intervention de Philippe Marini

Réunion du 23 novembre 2012 à 21h30
Loi de finances pour 2013 — Article 6

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini :

Je souhaiterais, l’occasion de l’examen de ces amendements de suppression, que je voterai bien entendu, revenir en quelques mots sur la question des plus-values de cession et sur le résultat obtenu par ce groupe spontané de chefs d’entreprises et d’investisseurs qui s’étaient eux-mêmes dénommés les « pigeons ».

Je m’interroge encore sur le texte adopté par l’Assemblée nationale, après un recul assez significatif du Gouvernement. En effet, le nouveau dispositif prévoit un régime assez innovant, il faut bien en convenir, pour la fiscalité des plus-values de cession. Mais, en dépit du recul que je viens de mentionner, ce régime demeure nuisible pour l’attractivité de notre pays.

En tout cas, ledit régime est d’une rare complexité, probablement inégalée dans les systèmes étrangers traitant du même sujet. L’article 6 comporte pas moins de neuf hypothèses différentes d’imposition des plus-values de cession d’actions, dont sept concernent les seuls entrepreneurs, en négligeant quelques variantes additionnelles issues de dispositifs particuliers qui préexistaient.

À mon avis, ce nouveau dispositif crée des inégalités flagrantes entre actionnaires, ainsi que des rigidités qui n’ont pas de véritable justification économique. J’en donnerai trois exemples : en premier lieu, les salariés actionnaires sont exclus de mesures présentées comme favorables ; en deuxième lieu, l’article 6 instaure une différence de traitement fiscal en fonction de seuils ou de durées de détention, de situations ou de liens entre l’entrepreneur et ses cofinanceurs, s'agissant en particulier des fameux anges providentiels, et ce système entraîne une « inéquité », ou en tout cas une nette inégalité entre des investisseurs pourtant placés dans une situation comparable ; en troisième lieu, l’article 6 exclut sans justification les secteurs financiers et immobiliers, comme s’il ne pouvait pas s’y conduire de projet d’entreprise.

Ce nouveau régime, même présenté comme plus favorable, crée donc des effets pervers allant à l’encontre de la croissance et du développement des entreprises, en particulier des entreprises petites, moyennes et de taille intermédiaire. J’ajoute que notre fiscalité des plus-values de cession d’actions, qui était déjà parmi les plus élevées d’Europe, se prépare à battre encore des records, puisqu’elle pourra atteindre, dans certains cas, plus de 60 %.

La mise en place d’un tel dispositif ajouterait donc de la complexité à l’injustice. Je me permets de rappeler que le Conseil constitutionnel a coutume de veiller au principe d’intelligibilité de la loi. À cette heure de la soirée, je vous avoue, mes chers collègues, que je ne me reconnais plus très bien dans cet article 6, et je crois que, si j’étais un responsable d’entreprise, je m’y reconnaîtrais encore moins.

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