Cet amendement vise à supprimer l’article 8, qui tend à instaurer une contribution exceptionnelle de 18 % aboutissant de fait à une taxation globale au taux de 75 %.
L’application d’une telle mesure comporte deux vrais risques. Le premier est d’ordre économique, le second d’ordre constitutionnel. Il ne s’agit pas ici d’idéologie.
Nous pouvons craindre, tout simplement, une délocalisation des cadres dirigeants. Je prendrai un exemple très précis, qu’Éric Doligé et moi-même connaissons bien, puisque nous sommes d’une région comportant des entreprises cotées en bourse, qui exportent fortement, dans le domaine, notamment, du luxe. Leurs cadres dirigeants de haut niveau travaillent dans le monde entier. Ils l’affirment très clairement, si cette mesure était appliquée, les cadres de leur groupe habiteraient désormais à l’étranger. On le sait, lorsque les centres de décision ne sont plus en France, il existe un risque de délocalisation des centres de production. Ce n’est donc pas une affaire idéologique !
L’article 8 nous fait également courir un risque constitutionnel, et je pèse bien mes mots, monsieur le ministre.
Il y a, selon moi, une vraie rupture en matière d’égalité devant les charges publiques, puisque le principe retenu en matière d’impôt sur le revenu est, jusqu’à maintenant, l’imposition par foyer fiscal. Pour cette contribution exceptionnelle, vous avez individualisé la taxation retenue par le législateur, en prévoyant une imposition non plus par foyer mais par personne.
À cet égard, je reprendrai l’exemple que cite en détail M. François Marc dans son rapport. Un couple qui perçoit 1, 2 million d’euros peut se retrouver dans une situation tout à fait différente selon que l’un des conjoints ou les deux travaillent : dans le premier cas, le prélèvement supplémentaire sera de 36 000 euros ; dans le second, il n’y en aura aucun. Autrement dit, le système entraîne une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques.
En outre, ce nouvel impôt revêt tout simplement un caractère confiscatoire. Avec un taux de 75 %, auquel il faudra ajouter encore d’autres impositions, notamment fiscales, on risque d’atteindre la borne que le Conseil constitutionnel considère comme celle à ne pas dépasser.
J’ajouterai que la mesure est éminemment contestable, dans la mesure où, vous l’avez avoué vous-même, monsieur le ministre, ce n’est pas une mesure de rendement. Elle rapporterait quelque 200 millions d'euros. M. le rapporteur général prévoit une fourchette plus large, mais je fais le pari que les montants annoncés ne seront pas au rendez-vous.
Cette contribution est instituée pour deux ans. Il s’agit là d’une sage décision, monsieur le ministre. Je fais effectivement un autre pari : au bout de trois ans, il n’y aura plus de contribuables pour la payer, ils auront tous disparu !