Mieux, ou pire, c’est selon : les mêmes ont décidé de réformer l’ISF non pas pour en supprimer le principe, mais pour en diminuer la recette. Cette position présente un double inconvénient de leur point de vue : premièrement, ils en ont accepté le principe après en avoir condamné la nature pendant tant d’années ; deuxièmement, tout en en acceptant le principe, ils ont récusé le montant des recettes pour l’État puisque, alors même que les finances publiques se dégradaient et que l’on s’apprêtait à demander de manière inévitable un effort supplémentaire à l’ensemble de nos concitoyens, il était décidé d’épargner les plus aisés d’entre eux pour un montant annuel de 2 milliards d’euros ! Telle fut l’amputation des recettes publiques décidée par la majorité de l’époque qui, j’insiste sur ce point, a souhaité consacrer le principe de l’ISF tout en abandonnant la moitié des recettes de cet impôt.
La position du Gouvernement et le texte qu’il demande de voter procèdent, me semble-t-il, d’une plus grande cohérence : nous assumons le principe de l’ISF et, dès lors, nous en espérons une recette importante pour l’État, en tout cas à la hauteur des besoins du pays pour équilibrer les finances publiques.
Pour autant, le Gouvernement a bien conscience que la restauration ab initio de l’ISF n’aurait pas été chose raisonnable. C’est la raison pour laquelle le taux marginal a été fixé non pas à 1, 8 %, mais à 1, 5 %. C’est la raison pour laquelle, également, un plafonnement existe à 75 %. C’est la raison pour laquelle, enfin, il n’y a pas de plafonnement du plafonnement, disposition voulue à l’époque par le gouvernement d’Alain Juppé et votée par la majorité RPR-UDF. Certains des sénateurs qui critiquent aujourd’hui l’ISF ont bien dû voter à un moment ou à un autre ce plafonnement du plafonnement, avec les conséquences que l’on sait. Car la déstabilisation des foyers fiscaux éligibles à l’ISF procède non pas de l’instauration de l’ISF, mais bien du plafonnement du plafonnement. C’est en effet à compter de cette disposition que certains ont décidé de s’exonérer de cet impôt en s’expatriant, notamment dans des pays dotés de frontières communes avec la France.
La position du Gouvernement me paraît cohérente : l’ISF étant un bon impôt, il doit dès lors avoir un rendement satisfaisant, c'est-à-dire à la hauteur des besoins du pays. Ces principes étant assumés, il faut que l’ISF reste raisonnable. Le taux marginal est donc baissé parce que le loyer de l’argent n’est pas le même que celui qui prévalait lorsque le taux marginal de 1, 8 % fut établi en 1988.