La séance est ouverte à dix heures.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2013, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 147, rapport n° 148).
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen, au sein de la première partie du projet de loi de finances, des dispositions relatives aux ressources.
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS (SUITE)
B. – Mesures fiscales
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. – À la fin du premier alinéa de l’article 885 A, les mots : « la limite de la première tranche du tarif fixé à l’article 885 U » sont remplacés par le montant : « 1 300 000 € » ;
B. – La section II du chapitre Ier bis du titre IV de la première partie du livre premier est complétée par un article 885 G quater ainsi rédigé :
« Art. 885 G quater. – Les dettes contractées par le redevable pour l’acquisition ou dans l’intérêt de biens qui ne sont pas pris en compte pour l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune dû par l’intéressé ou qui en sont exonérés ne sont pas imputables sur la valeur des biens taxables. Le cas échéant, elles sont imputables à concurrence de la fraction de la valeur de ces biens qui n’est pas exonérée. » ;
C. – L’article 885 O ter est ainsi rédigé :
« Art. 885 O ter. – Les éléments du patrimoine social non nécessaires à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société ne sont pas considérés comme des biens professionnels et doivent être compris, pour leur valeur au 1er janvier de l’année d’imposition, dans le patrimoine du ou des propriétaires des parts ou actions, à concurrence du pourcentage détenu dans cette société.
« Cette règle s’applique quel que soit le nombre de niveaux d’interposition entre la société et les biens non nécessaires à son activité. » ;
D. – L’article 885 U est ainsi rédigé :
« Art 885 U. – 1. Le tarif de l’impôt est fixé à :
En %
Fraction de la valeur nette taxable du patrimoine
Tarif applicable
N’excédant pas 800 000 €
Supérieure à 800 000 € et inférieure ou égale à 1 300 000 €
Supérieure à 1 300 000 € et inférieure ou égale à 2 570 000 €
Supérieure à 2 570 000 € et inférieure ou égale à 5 000 000 €
Supérieure à 5 000 000 € et inférieure ou égale à 10 000 000 €
Supérieure à 10 000 000 €
« 2. Pour les redevables dont le patrimoine a une valeur nette taxable égale ou supérieure à 1 300 000 € et inférieure à 1 400 000 €, le montant de l’impôt calculé selon le tarif prévu au tableau du 1 est réduit d’une somme égale à 17 500 € - 1, 25 % P, où P est la valeur nette taxable du patrimoine. » ;
D bis (nouveau). – L’article 885 V est abrogé ;
E. – Il est rétabli un article 885 V bis ainsi rédigé :
« Art. 885 V bis. – I. – L’impôt de solidarité sur la fortune du redevable ayant son domicile fiscal en France est réduit de la différence entre, d’une part, le total de cet impôt et des impôts dus en France et à l’étranger au titre des revenus et produits de l’année précédente, calculés avant imputation des seuls crédits d’impôt représentatifs d’une imposition acquittée à l’étranger et des retenues non libératoires, et, d’autre part, 75 % du total des revenus mondiaux nets de frais professionnels de l’année précédente, après déduction des seuls déficits catégoriels dont l’imputation est autorisée par l’article 156, ainsi que des revenus exonérés d’impôt sur le revenu et des produits soumis à un prélèvement libératoire réalisés au cours de la même année en France ou hors de France.
« II. – Pour l’application du I, sont également regardés comme des revenus réalisés au cours de la même année en France ou hors de France :
« 1° Les intérêts des plans d’épargne-logement, pour le montant retenu au c du 2° du II de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale ;
« 2° La variation de la valeur de rachat des bons ou contrats de capitalisation, des placements de même nature, notamment des contrats d’assurance-vie, ainsi que des instruments financiers de toute nature visant à capitaliser des revenus, souscrits auprès d’entreprises établies en France ou hors de France, entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année précédente, nette des versements et des rachats opérés entre ces mêmes dates ;
« 3° Les produits capitalisés dans les trusts définis à l’article 792-0 bis du présent code entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année précédente ;
« 4° Pour les porteurs de parts ou d’actions d’une société passible de l’impôt sur les sociétés, et à proportion des droits du redevable dans les bénéfices de la société, le bénéfice distribuable, au sens de l’article L. 232-11 du code de commerce, du dernier exercice clos entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année précédente, minoré du report bénéficiaire mentionné à ce même article et majoré des sommes à porter en réserve en application des statuts et des charges exposées au profit des porteurs. Les distributions se rapportant à des bénéfices pris en compte pour l’application du présent 4° ne sont pas prises en compte pour l’application du I.
« Le premier alinéa du présent 4° s’applique lorsque les droits détenus dans les bénéfices de la société par le redevable, directement ou par personne interposée ou par l’intermédiaire du conjoint ou du concubin notoire, de leurs ascendants et descendants ou de leurs frères et sœurs, ont dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années ;
« 5° Les plus-values ayant donné lieu à sursis d’imposition, au titre de l’année de l’opération ayant donné lieu au sursis ainsi que les gains nets placés en report d’imposition.
« III. – Les revenus et produits mentionnés aux 1° à 5° du II sont pris en compte sous déduction des mêmes revenus et produits déjà retenus pour l’application du présent article au titre des années antérieures en application des mêmes 1° à 5°. Cette disposition s’applique de la même façon lors du dénouement des contrats mentionnés au 2° du II.
« Le 4° du II ne s’applique pas au bénéfice de sociétés exerçant de manière prépondérante une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.
« Les plus-values, y compris celles mentionnées au 5° du II, ainsi que tous les revenus sont déterminés sans considération des exonérations, seuils, réductions et abattements prévus au présent code, à l’exception de ceux représentatifs de frais professionnels.
« Lorsque l’impôt sur le revenu a frappé des revenus de personnes dont les biens n’entrent pas dans l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune, il est réduit suivant le pourcentage du revenu de ces personnes par rapport au revenu total. » ;
F. – Le 2 du I de l’article 885 W est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « comprise dans les limites de la deuxième ligne de la première colonne du tableau du 1 du I de l’article 885 U » sont remplacés par les mots : « inférieure à 2 570 000 € » et, après le mot : « mentionnent », sont insérés les mots : « la valeur brute et » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « valeur », sont insérés les mots : « brute et la valeur » et les mots : « est portée » sont remplacés par les mots : « sont portées » ;
G. – Au I de l’article 990 J, la référence : « du I » est supprimée ;
H. – Après le deuxième alinéa du 1 du IV de l’article 1727, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En matière d’impôt de solidarité sur la fortune, le point de départ du calcul de l’intérêt de retard est le 1er juillet de l’année au titre de laquelle l’imposition est établie si le redevable est tenu à l’obligation déclarative prévue au premier alinéa du 2 du I de l’article 885 W. »
II. – S’agissant de l’impôt de solidarité sur la fortune dû au titre de l’année 2012, le point de départ du calcul de l’intérêt de retard prévu à l’article 1727 du code général des impôts est le 1er décembre 2012 si le redevable est tenu à l’obligation déclarative prévue au premier alinéa du 2 du I de l’article 885 W du même code.
III. – Le IV de l’article 1er de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Par dérogation au III du présent article, les a et b du 1° du II et le 3° du II du présent article s’appliquent pour le contrôle de l’impôt de solidarité sur la fortune dû au titre de l’année 2011. Pour l’application de cette disposition, les redevables mentionnés au 2 du I de l’article 885 W sont ceux dont le patrimoine est compris entre 1 300 000 € et 3 000 000 € et qui se sont acquittés de leur obligation déclarative. »
IV. – Le I s’applique à l’impôt de solidarité sur la fortune dû à compter de l’année 2013.
V
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention vaudra également présentation des deux amendements que notre groupe a déposés sur l’article 9, en l’occurrence les amendements n° I-153 et I-154.
Avec cet article, nous sommes face au retour d’un impôt de solidarité sur la fortune, ou ISF, plus conforme aux nécessités de notre temps. Nous avons aussi la confirmation de la situation que nous avons pu constater lors du collectif budgétaire de cet été.
Ainsi, pour le dire vite, les plus pauvres et les plus modestes des contribuables assujettis à l’impôt de solidarité sur la fortune, ceux dont le patrimoine atteint une valeur comprise entre 800 000 euros et 1, 3 million d’euros, ont la confirmation qu’ils sont dispensés du paiement de l’impôt.
Pour comprendre la démarche accomplie, chacun gardera évidemment en mémoire que le patrimoine médian des habitants de notre pays se situe aux alentours de 120 000 euros – le seuil d’imposition de l’ISF est plus de dix fois supérieur –et que, si environ 300 000 contribuables sont désormais exonérés, il en reste à peu près autant qui ne le sont pas et qui devront payer.
Voilà qui justifie pleinement, me semble-t-il, le fait que nous restions fidèles à l’ancien taux de l’ISF. Le barème commençait à hauteur de 800 000 euros et le nombre de contribuables, c'est-à-dire environ 600 000, continuait tout de même de représenter une minorité de personnes, au regard, par exemple, des 36 millions de Françaises et de Français qui font une déclaration pour le calcul de l’impôt sur le revenu.
Il est évidemment possible de se demander ce qui continue de motiver la démarche que le Gouvernement a finalement retenue pour relever le seuil d’imposition. Il s’agit, on peut au moins le penser, d’épargner le cadre supérieur parisien ou francilien en fin de carrière professionnelle qui disposerait d’un peu de bien…
Soyons clairs : nous ne croyons pas tout à fait à cette vision du contribuable de base de l’ISF, pas plus qu’à celle du pauvre paysan de l’Île de Ré qui serait soudain confronté à la hausse de la valeur de ses terrains du fait de leur rareté sur le marché.
D’autant que nos principes constitutionnels sont connus : l’impôt doit être justement réparti entre les membres de la société, et ceux qui ont des moyens et facultés plus importants que les autres doivent contribuer à raison de ces moyens et facultés.
En d’autres termes, l’intérêt particulier du contribuable doit s’effacer derrière l’intérêt général de la collectivité, un intérêt général dont il tirera au demeurant également parti.
Le paiement de l’ISF peut être ressenti comme une lourde charge par certains, voire comme une mesure pénalisante qui découragerait le travail et l’effort, mais il n’en demeure pas moins que nous avons aussi en France des routes, des écoles, des services publics, une police et une justice, bref tous les éléments d’un État moderne et toutes les infrastructures d’un pays avancé, et ce grâce à l’impôt. Les contribuables assujettis à l’ISF devraient être fiers de participer, plus encore que les autres, à cet effort, œuvrant in fine pour le bien de tous.
Comme nous l’avons souvent indiqué, pour un contribuable moyen, le taux de prélèvement constaté en matière d’ISF demeure relativement limité.
Y faire face impose soit de renoncer à une partie – mais c’est loin d’être le tout – du rendement d’un patrimoine dès lors que ce dernier est correctement géré, soit d’en céder quelques éléments pour pouvoir payer la facture.
Par conséquent, avec l’article 9, nous avons aujourd'hui un ISF qui est presque revenu à ses qualités d’origine et dont l’apport peut être déterminant dans la réduction des déficits publics.
Nous vous proposons tout simplement de le rendre plus opérationnel encore, en adoptant les amendements que notre groupe a déposés sur ce texte, afin de faire de l’ISF un élément essentiel, une sorte de pivot, de notre fiscalité du patrimoine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons cette séance du samedi avec l’article 9, qui concerne effectivement, comme nous l’indiquait M. Éric Bocquet, l’impôt de solidarité sur la fortune, un prélèvement que l’on va réformer une nouvelle fois.
Après la potion amère du collectif budgétaire de l’été dernier, qui a créé une contribution complémentaire non plafonnée, car dite « exceptionnelle », on pourrait estimer de prime abord que les retouches proposées ici sont finalement relativement minimes.
Il est envisagé, semble-t-il, de rétablir un barème progressif un peu plus léger que celui qui était en vigueur jusqu’à la réforme de 2011, avec, en particulier, un taux maximal de 1, 5 % au-delà d’un patrimoine de 10 millions d’euros.
En réalité, les apparences sont trompeuses. L’article 9, s’il était adopté, aurait des effets profondément nuisibles, et ce pour au moins trois raisons.
En premier lieu, depuis 2011, et du fait des gouvernements successifs, la fiscalité que supportent les revenus de l’épargne a été sensiblement alourdie. Le présent projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale sont tout à fait « exemplaires » à cet égard. Il faut tenir compte de cet élément lorsque l’on détermine les taux d’assujettissement des patrimoines.
En deuxième lieu, j’observe que le barème proposé s’appliquerait à une assiette élargie, du fait d’une disposition discrète, mais non moins réelle, relative aux biens considérés comme non indispensables à l’activité et logés au sein d’une société considérée, quant à elle, comme un bien professionnel. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
En troisième lieu, et c’est peut-être l’essentiel, le « plafonnement » de l’ISF qu’il est proposé d’instaurer, ou de réinstaurer, à cet article – en réalité, on s’efforce de traduire l’injonction du Conseil constitutionnel dans sa décision du 9 août dernier – est un leurre. En effet, seront inclus, pour le calcul du plafonnement, des revenus que n’aura pas perçus le contribuable, voire qu’il n’a pas la faculté de décider de percevoir.
Dès lors, ce mécanisme n’est pas vraiment protecteur. À mon sens, il est douteux – mais nous verrons bien ce qu’il adviendra – que la mesure corresponde aux critères dont le Conseil constitutionnel exige le respect et qu’il a réaffirmés le 9 août dernier.
Au total, cet article s’inscrit bien dans une logique « punitive » pour la détention du capital. Il est déconnecté de la réalité économique, en particulier en temps de crise. Comment taxer à 1, 5 % de leur valeur vénale des biens dont les revenus auront été frappés par un impôt de 45 %, majoré de 15, 5 % de contributions sociales, et le tout sans véritable plafonnement, sans plafonnement incontestable ?
Monsieur le ministre, j’aurais tendance à penser qu’une telle réforme n’est pas « Gallois-compatible », puisqu’il s’agit d’une référence à la mode.
Plus sérieusement, l’article 9 est, il faut le dire, dangereux. Il risque de faire fuir – nous en parlions d’ailleurs hier soir – de nombreux contribuables excédés par une pression fiscale aveugle.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Dès lors, mes chers collègues, le plus sage serait de ne pas adopter cet article ; c’est, bien entendu, l’appel que je lance à la Haute Assemblée. À tout le moins, il convient d’apporter de sérieux correctifs au dispositif, dans l’intérêt même du Gouvernement compte tenu de la conjoncture économique actuelle.
C’est pourquoi j’ai déposé deux amendements, parmi d’autres excellents amendements qui figurent sur notre dérouleur et que nous allons examiner dans quelques instants.
L'amendement n° I-204, présenté par MM. de Montgolfier, du Luart et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Albéric de Montgolfier.
La réforme que nous avions instaurée au mois de juillet 2011 avait deux objets : d’une part, diminuer le taux de l’ISF, pour le rendre plus compatible avec la réalité économique ; d’autre part, simplifier le dispositif, en créant deux taux d’imposition, l’un à 0, 25 % et l’autre à 0, 5 %. C’est donc une réforme qui s’inscrivait dans une perspective de bon sens économique et de simplification technique.
La réforme qui nous est proposée aujourd'hui va exactement dans la direction contraire, puisqu’il s’agit de revenir sur ce qui a été adopté au mois de juillet 2011. Comme l’a très bien dit Philippe Marini à l’instant, c’est une aberration économique, pour deux raisons au moins.
La première raison réside évidemment dans le taux tout à fait élevé, confiscatoire, de cet impôt, notamment par comparaison avec les autres pays d’Europe, dont la plupart n’appliquent pas ce type de fiscalité. Nous connaissons effectivement les risques de fuite d’entrepreneurs à l’étranger, en particulier en Belgique. §Les cas de « départ fiscal » sont régulièrement évoqués, et le relèvement des taux d’imposition aggravera évidemment la situation.
D’ailleurs, monsieur le ministre, vous reconnaissez vous-même que nous sommes à la limite du taux confiscatoire, puisque vous voulez réintroduire un mécanisme de plafonnement, certes sous l’injonction du Conseil constitutionnel.
La seconde raison est liée au taux lui-même, qui est totalement déconnecté des rendements des placements actuels.
Je vous le rappelle, dans les années quatre-vingt, lors de la création d’un impôt sur la fortune – à l’époque, c’était l’impôt sur les grandes fortunes, l’IGF –, le taux marginal était, de mémoire, de 1, 6 %. Mais le taux des placements était alors nettement plus élevé. En 1982, il y avait même des emprunts d’État à des taux de 14 % ou de 15 %. Dans ces conditions, un IGF au taux marginal de 1, 6 % pouvait être supportable.
Nous connaissons les rendements des placements financiers actuels ; ils sont, au mieux, très proches du taux d’inflation, quand ils ne sont pas nuls, voire négatifs ! Les placements en actions et les placements obligataires sont des placements à taux faibles. Et le taux marginal d’ISF qui nous est proposé aujourd'hui est totalement déconnecté de cette réalité.
Dès lors, pour acquitter l’impôt, les détenteurs de patrimoine doivent non seulement prendre sur le rendement, mais aussi, parfois, liquider une partie du patrimoine. Par conséquent, on s’approche bien du caractère confiscatoire de l’impôt !
Récapitulons : d’une part, votre réforme ne va pas dans le sens de la simplification ; vous créez un système complexe, en élargissant la base de l’impôt – Philippe Marini l’a rappelé – par un certain nombre de mesures techniques, certes un peu discrètes, mais qui auront des conséquences importantes ; d’autre part, le taux d’imposition devient totalement déconnecté des réalités économiques.
Par conséquent, le groupe UMP s’oppose fermement à l’article 9 et propose sa suppression. L’idéal serait de revenir à la réforme simplificatrice et salutaire adoptée au mois de juillet 2011.
Nous le voyons de nouveau ce matin – c’était déjà le cas cette nuit –, il y a bien deux logiques qui s’opposent.
D’un côté, il y a la logique de notre groupe majoritaire au Sénat. Nous considérons que le déficit public de la France est une catastrophe. Nous en connaissons les raisons, et nous en subissons aujourd'hui les effets. Nous voulons donc sortir de cette situation gravissime.
Dans cette perspective, et sur l’initiative de notre ancienne collègue l’excellente Nicole Bricq, aujourd'hui membre du Gouvernement, notre groupe majoritaire avait proposé l’an passé une trajectoire en vue de redresser les finances publiques, avec 50 % d’efforts sur les dépenses et 50 % sur les recettes. Nous avions ainsi proposé d’améliorer le solde budgétaire de 10 milliards d’euros. Le Gouvernement a retenu cette configuration.
De l’autre côté, il y a la logique de l’UMP, qui va en sens rigoureusement inverse. Alors que la responsabilité de la situation actuelle est clairement établie, les propositions de l’UMP – il y a eu un certain nombre d’amendements hier – se traduiraient, si elles étaient adoptées, par une dégradation globale du solde budgétaire d’au moins 10 milliards d’euros en 2013.
À cette fin, différentes mesures sont proposées pour réduire les recettes du projet de loi de finances. La disposition sur l’ISF fait partie du lot. Elle représente 1 milliard d’euros de recettes supplémentaires que l’on propose de supprimer.
La perte cumulée des mesures déjà proposées par l’UMP s’élève à 6 ou 7 milliards d’euros. Mais d’autres dispositions de ce type sont encore à venir : je pense notamment à l’article 15, où quatre suppressions de recettes sont prévues. Au total, les pertes s’élèveront certainement à plus de 10 milliards d’euros.
Deux logiques sont donc face à face.
Nous avons, pour notre part, le souci du redressement des finances publiques. C’est dans cet esprit que le Gouvernement nous présente le projet de loi de finances pour 2013. L’ISF doit à notre avis contribuer à l’effort. L’article 9 va dans un sens souhaitable, et la commission est donc défavorable à sa suppression.
Le Gouvernement est évidemment défavorable à l’adoption de cet amendement.
Plusieurs critiques ont été évoquées.
La première critique est de nature juridique : on suppose que la disposition ne résisterait pas à un examen par le Conseil constitutionnel. Nous avons déjà entendu cet argument lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative.
Le mécanisme n’était naturellement pas le même, mais certains étaient au moins aussi affirmatifs qu’aujourd’hui. Chacun sait ce qu’il en fut !
Le Gouvernement ne croit pas que la disposition proposée au Parlement serait censurée par le Conseil constitutionnel si elle était adoptée.
La deuxième critique est de nature politique. Je veux faire remarquer à ceux qui, aujourd’hui, souhaitent supprimer l’ISF qu’ils en ont eu la possibilité pendant dix ans et qu’ils ne l’ont pas fait !
Mieux, ou pire, c’est selon : les mêmes ont décidé de réformer l’ISF non pas pour en supprimer le principe, mais pour en diminuer la recette. Cette position présente un double inconvénient de leur point de vue : premièrement, ils en ont accepté le principe après en avoir condamné la nature pendant tant d’années ; deuxièmement, tout en en acceptant le principe, ils ont récusé le montant des recettes pour l’État puisque, alors même que les finances publiques se dégradaient et que l’on s’apprêtait à demander de manière inévitable un effort supplémentaire à l’ensemble de nos concitoyens, il était décidé d’épargner les plus aisés d’entre eux pour un montant annuel de 2 milliards d’euros ! Telle fut l’amputation des recettes publiques décidée par la majorité de l’époque qui, j’insiste sur ce point, a souhaité consacrer le principe de l’ISF tout en abandonnant la moitié des recettes de cet impôt.
La position du Gouvernement et le texte qu’il demande de voter procèdent, me semble-t-il, d’une plus grande cohérence : nous assumons le principe de l’ISF et, dès lors, nous en espérons une recette importante pour l’État, en tout cas à la hauteur des besoins du pays pour équilibrer les finances publiques.
Pour autant, le Gouvernement a bien conscience que la restauration ab initio de l’ISF n’aurait pas été chose raisonnable. C’est la raison pour laquelle le taux marginal a été fixé non pas à 1, 8 %, mais à 1, 5 %. C’est la raison pour laquelle, également, un plafonnement existe à 75 %. C’est la raison pour laquelle, enfin, il n’y a pas de plafonnement du plafonnement, disposition voulue à l’époque par le gouvernement d’Alain Juppé et votée par la majorité RPR-UDF. Certains des sénateurs qui critiquent aujourd’hui l’ISF ont bien dû voter à un moment ou à un autre ce plafonnement du plafonnement, avec les conséquences que l’on sait. Car la déstabilisation des foyers fiscaux éligibles à l’ISF procède non pas de l’instauration de l’ISF, mais bien du plafonnement du plafonnement. C’est en effet à compter de cette disposition que certains ont décidé de s’exonérer de cet impôt en s’expatriant, notamment dans des pays dotés de frontières communes avec la France.
La position du Gouvernement me paraît cohérente : l’ISF étant un bon impôt, il doit dès lors avoir un rendement satisfaisant, c'est-à-dire à la hauteur des besoins du pays. Ces principes étant assumés, il faut que l’ISF reste raisonnable. Le taux marginal est donc baissé parce que le loyer de l’argent n’est pas le même que celui qui prévalait lorsque le taux marginal de 1, 8 % fut établi en 1988.
Nous estimons que le plafonnement du plafonnement n’est pas une bonne chose. Un plafonnement simple à 75 % est donc établi.
Le niveau de recettes proposé, sans égaler celui de l’ISF avant la réforme voulue par l’UMP, est néanmoins majoré, car tout le monde – et tout particulièrement ceux qui ont le plus de moyens – doit consentir un effort en faveur du redressement du pays.
Telle est l’économie générale de l’article que le Gouvernement propose au Parlement d’adopter.
J’ai bien entendu que certains espéraient davantage – je ne crois pas que ce serait raisonnable –, que d’autres estiment que les actuels redevables de l’ISF devraient être affranchis de cet impôt, et ce au moment où un effort de solidarité est demandé au pays et où les mêmes trouvent acceptable une augmentation du taux normal de TVA dès cette année : il s’agit là, nous semble-t-il, d’une cohérence contestable.
Par ailleurs, les modifications que nous avons apportées au dispositif qui prévalait jusqu’en 2011 tiennent à notre avis bien compte des réalités économiques, dont aucun impôt ne peut s’affranchir.
Bref, la réforme que propose le Gouvernement ne mérite « ni cet excès d’honneur ni cette indignité ». C’est une disposition raisonnable, légitime, assumable par le pays, par la majorité gouvernementale et par le Gouvernement au nom duquel je m’exprime. §
Personne, dans cette assemblée, ne peut affirmer qu’il a le monopole du redressement des finances publiques, car c’est un objectif que nous partageons tous.
Nous verrons d’ailleurs, en examinant les crédits des missions, quelles mesures d’économie seront proposées sur telles ou telles travées. Pour notre part, nous aurons des propositions extrêmement intéressantes à faire à cet égard.
Il y a entre nous une différence de philosophie, car, contrairement à nos collègues qui siègent sur les travées de gauche de cet hémicycle, nous souhaitons faire porter l’effort essentiellement sur les dépenses.
Concernant les recettes, l’amendement que nous proposons ne vise pas à supprimer l’ISF, surtout dans le contexte actuel de redressement des finances publiques. Il tend simplement à en revenir à une disposition plus raisonnable, tenant compte du rendement actuel des placements. Un taux marginal de 1, 5 % nous paraît en effet totalement déraisonnable au vu du rendement des taux d’emprunt, des obligations assimilables du Trésor, les OAT, et du taux Euribor, bref au vu des placements financiers.
Si une telle disposition était votée, l’impôt prendrait un caractère confiscatoire puisque le contribuable, ne pouvant plus compter sur le seul rendement de ses placements, se verrait obligé de procéder à la liquidation d’une partie de son patrimoine pour acquitter l’impôt.
La suppression de l’ISF aurait peut-être pu être envisagée à une autre époque ; dans le contexte actuel, ce ne serait pas raisonnable. C’est la raison pour laquelle nous avions proposé en juillet 2011 une réforme de simplification faisant preuve de réalisme économique et tenant compte du rendement des placements. C’est également ce que nous vous proposons aujourd’hui.
Cette mesure, qui conserve tout son rendement pour l’ISF, s’accompagnera, du côté des dépenses, de propositions de mesures d’économie.
Non, monsieur le rapporteur général, vous n’avez pas le monopole des économies ! Vous n’êtes pas le seul à vouloir redresser les finances publiques ! C’est un souci que nous partageons tous. Nous vous ferons des propositions très précises en ce sens.
Aujourd’hui, nous ne pouvons pas nous permettre d’évacuer cette question et accepter de revenir à des taux aussi déraisonnablement élevés.
Je ne peux pas résister au plaisir, en ce samedi matin, non pas de rouvrir le débat de fond sur l’ISF, mais d’affirmer un acte de foi : l’ISF est absurde !
Nous ne l’avons pas fait, mais la majorité sortante, loin de n’avoir que des qualités, a aussi quelques défauts : elle a esquivé un certain nombre de sujets majeurs.
Pourquoi l’ISF est-il une absurdité ? D’abord, en raison même de la nature du capital. Il ne faut pas oublier que, dans notre pays, le revenu est imposé depuis 1917 – gloire, cher monsieur Marini, à votre prédécesseur Joseph Caillaux, que vous avez évoqué hier ! –, tout comme les plus-values, les successions et toutes les formes d’enrichissement.
Le capital n’est jamais que du travail accumulé. Pourquoi la détention du capital devrait-elle être sanctionnée ? Pourquoi celui qui épargne devrait-il encore payer des impôts sur ce qu’il a déjà payé ? De mon point de vue, c’est parfaitement immoral.
Par ailleurs, nous avons les uns et les autres l’ambition, à juste titre, de maintenir à nos compatriotes un haut niveau de pouvoir d’achat et de protection sociale, ce qui implique une forte valeur ajoutée par emploi. Cela entraîne nécessairement des investissements et une intensité capitalistique par emploi créé largement supérieurs à ce qui se pratiquait lorsque Marx a rédigé Le Capital.
Nous avons donc besoin des capitaux. Si nous les faisons fuir, nous ne pourrons pas financer les emplois à forte valeur ajoutée dont notre pays a besoin.
Pour finir – mais Albéric de Montgolfier a évoqué ce point avec plus de précisions que je ne saurais le faire –, si on impose les revenus de la rente, on doit tenir compte à la fois d’une inflation qui approche les 2 % et d’un rendement d’Euribor qui est inférieur à 1 %. Cela signifie que le capitaliste est dépouillé, quoi qu’il en soit, de 1 % de son patrimoine chaque année. Si l’on ajoute à cela le taux de 1, 5 % déplafonné que le Gouvernement propose, on aboutit à la spoliation constante de celui qui a épargné. Ce dernier aura alors deux tentations : la première est de ne pas épargner et donc de priver l’économie des capitaux nécessaires ; la seconde est d’épargner ailleurs, ce qui revient à priver notre économie de capacités de développement.
Je profite donc de cette explication de vote pour affirmer que je suis fondamentalement défavorable à l’ISF.
Je livrerai quelques éléments de réflexion.
Les propos de M. le rapporteur général m’ont semblé très excessifs. Il n’y a pas deux camps, ceux qui voudraient réduire le déficit et redresser les finances publiques de la France, et les autres. Il y a uniquement deux façons de faire.
Nous avons la conviction profonde que nous devons réduire fortement les dépenses publiques, et, contrairement à ce que j’ai entendu M. le rapporteur général affirmer hier soir, ce n’est pas une posture de notre part.
Le niveau de dépenses publiques dans notre pays est énorme, et ce n’est pas en augmentant la fiscalité en permanence que nous trouverons des solutions.
M. le ministre a affirmé que la baisse de la dépense serait plus récessive que l’augmentation de la fiscalité. Je n’y crois pas. La dépense publique, selon moi, comprend une part qui est efficace et une part qui ne l’est pas. Aujourd’hui, nous devons impérativement nous attaquer à la dépense inefficace qui pèse sur notre économie.
C’est sur cette logique que nous fondons notre raisonnement. C’est la raison pour laquelle je souhaite que nous puissions examiner la seconde partie du projet de loi de finances. Comme l’a souligné Albéric de Montgolfier, nous ferons des propositions d’économie qui, même si elles paraîtront peut-être excessives à certains, me semblent absolument indispensables.
Mon groupe ne souhaite pas la suppression de cet article. Il proposera donc tout à l’heure un aménagement pour effacer un certain nombre d’anomalies qui se sont glissées dans le texte.
Sur le fond, c’est à mon avis une logique d’économies réelles sur les dépenses qui doit prévaloir, et non une logique de non-augmentation des dépenses. Le Gouvernement appelle « économies » une non-augmentation des dépenses. Mais quand les ménages ont besoin de faire des économies, ils les font non pas en se disant qu’ils n’achèteront pas telle ou telle chose, mais en cherchant à réduire certaines dépenses. Nous devons adopter la même démarche pour le budget de la France.
Nous ne voterons bien sûr pas cet amendement.
Un certain nombre de déclarations me font réagir. Quand j’entends certains de nos collègues pleurer sur le faible rendement des placements, je voudrais leur rappeler la situation inquiétante de l’emploi et des demandeurs d’emploi dans notre pays. Les contribuables qui sont redevables de l’ISF disposent quand même d’autres ressources et peuvent participer au redressement de la situation.
Par ailleurs, je rappelle à ceux qui affirment que la dépense publique est trop élevée que, en 2008, tous se sont réjouis que la dépense publique et l’ensemble des services publics aient permis d’amortir le choc de la crise financière, faute de quoi la situation aurait été catastrophique.
On ne peut pas, à un moment, vanter l’intérêt de la dépense publique, puis, quand la crise financière s’est un peu estompée, dire qu’il faut absolument la réduire.
Certains affirment que les rendements sont insuffisants pour pouvoir payer l’ISF. Utiliser le mot « rente », monsieur Longuet, est un peu facile, car il fait penser aux petits épargnants…
… ayant un livret de Caisse d’épargne. L’emploi de ce terme vise à faire oublier de qui l’on parle.
En l’espèce, on ne parle pas des petits épargnants !
Pour terminer, je formulerai une observation : d’une certaine manière, l’exigence d’une forte rémunération des capitaux placés conduit à la destruction de l’activité économique dans laquelle ils sont investis. La preuve en est que, depuis quinze ou vingt ans, la part de la richesse produite par les entreprises consacrée aux salaires stagne - la masse salariale est en diminution -, de même que la part de l’investissement, et c'est la part affectée à la rémunération du capital qui, elle, a largement augmenté. Voilà ce dont souffre notre économie !
Parce que je suis, au contraire, favorable à un meilleur équilibre dans la participation à l'effort, je voterai contre cet amendement.
Je ne souhaitais pas intervenir dans ce débat, le rapporteur général ayant bien exposé notre position et expliqué les raisons pour lesquelles nous ne voterons pas cet amendement. Cependant, le discours ambiant m’oblige à réagir.
M. Longuet a employé deux termes intéressants.
D’abord, il a parlé d’« acte de foi », ce qui fait référence à une croyance, qu’elle soit, ou non, aveugle. Or l’économie, ce n'est pas du tout cela !
Ensuite, il a évoqué la « rente ». L'un des problèmes de notre pays, c'est justement qu’il est un pays de rente. Cependant, bien que l’épargne, dont le taux est supérieur à 16 %, y soit élevée, elle ne bénéficie pas aux entreprises ou à l'investissement.
Et ce ne sont pas les taux que vous avez évoqués, monsieur Longuet, qui peuvent y changer quoi que ce soit, d’autant que le Libor, le London Interbank Offered Rate, et l’Euribor, l’Euro Interbank Offered Rate, ne sont pas de bons exemples. Au moins d’août dernier, nous avons vu de quelle façon ils avaient été manipulés par une bande de gangsters organisée sous forme de banque à Londres.
Vous reconnaissez que vous auriez dû supprimer l'ISF, comme les 35 heures d’ailleurs, mais vous ne l’avez pas fait. Bientôt, vous regretterez de ne pas avoir supprimé les congés payés… On n’en est pas loin, cela vient !
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Quant au monopole, si nous ne pouvons pas y prétendre, en effet, permettez-moi de vous dire que vous avez, vous, celui des déficits ! En dix ans, vous avez même réussi à faire sauter la banque !
Nous proposons une politique de raison – nous en avons longuement discuté, elle vise à faire porter l’effort pour deux tiers sur les recettes et pour un tiers sur les dépenses –, qui permettra à la fois de diminuer les déficits tout en maintenant une certaine croissance, même si celle-ci reste bien évidemment trop faible, évitant ainsi à notre pays d’entrer en récession, et de protéger l’une des caractéristiques de notre pays, son modèle social, que nous ne voulons pas jeter par-dessus bord. Nous ne sommes pas la Californie ! Nos propositions en matière de déficits correspondent bien à l'originalité du modèle français et, d'une certaine façon, européen.
Mes chers collègues, je tenais à réagir aux propos que j’ai entendus. Vous l’avez compris, nous ne voterons pas cet amendement tendant à la suppression de l'ISF.
Je voudrais tout de même rappeler que Jean Arthuis proposait depuis des années la suppression de l'ISF dans le cadre d'un fameux triptyque qui fut ensuite adopté par notre commission des finances.
Je rejoins ici mon collègue Vincent Delahaye. C'est la raison pour laquelle nous pensons qu'il faut aménager l’ISF. En tout cas, je ne pouvais pas laisser dire que personne dans cet hémicycle ne souhaitait la suppression de l'ISF.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de quinze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-190 rectifié, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I - Les articles 885 A à 885 Z du code général des impôts sont abrogés.
II - Les pertes de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 402 bis, 438, 520 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-153, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Éric Bocquet.
L'amendement n° I-336, présenté par M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer le montant :
par le montant :
La parole est à M. Jean-Vincent Placé.
Cet amendement, qui est similaire à celui du groupe communiste, s'inscrit dans le souci du Gouvernement de rétablir le barème progressif de l'ISF pour augmenter le rendement de l’impôt et renforcer l'équité de l’imposition.
Il me semblait que nous pouvions avoir un débat serein sur l'ISF, mais je suis, comme toujours, très surpris des interventions pour le moins étonnantes de mes collègues de l'UMP et, sur ce sujet, de mes collègues centristes.
M. Yung l’a dit à juste titre, il est tout de même incroyable, et je le dis vraiment avec sincérité, d’avoir été aux responsabilités pendant dix ans et de continuer à vanter un modèle libéral sans avoir mené la moindre politique allant en ce sens !
Cette attitude pose problème, notamment en matière de politique fiscale : chers collègues, quand vous êtes au pouvoir, vous diminuez un petit peu le taux de l'impôt et, quand nous revenons, nous le relevons, mais proportionnellement moins que vous ne l'avez baissé. On alterne donc de petites doses de libéralisme et de social-libéralisme, ce qui n’aide pas à résoudre les difficultés du pays.
Depuis que j’ai été élu sénateur, il y a un an, je vous entends vanter un modèle libéral de compétitivité et de baisse des crédits, comme vient de le faire M. Delahaye. Mais n’attendez donc pas d’être dans l’opposition, agissez quand vous êtes dans la majorité ! À entendre les partenaires patronaux nous exposer, comme c'est bien légitime, leurs idées fortes et leurs souhaits en matière économique, on a vraiment l'impression que rien n'a été fait pendant dix ans !
Franchement, qu'avez-vous fait pendant cette période ? Je trouve cela tout à fait stupéfiant, et je tenais à le dire.
L’amendement que nous proposons est tout à fait raisonnable et en cohérence avec la politique fiscale du Gouvernement et ses grands objectifs généraux. Nous souhaitons, en effet, que tous contribuent à l’effort national, mais les plus fortunés davantage, ce qui me semble plus naturel que de faire contribuer les plus démunis.
Avec cet amendement, nous souhaitons simplement revenir, dans le cadre du débat que j'essaie de lancer, au barème de l’impôt de solidarité sur la fortune d’avant 2011.
Si le précédent gouvernement a eu à cœur de favoriser les plus fortunés en multipliant les cadeaux fiscaux, nous appelons de nos vœux une véritable rupture avec cette politique indécente, notamment en période de crise. Le Président de la République a affirmé cette volonté de changement, en rappelant qu’il ne fallait pas confondre solidarité et spoliation, et je suis tout à fait d'accord avec lui.
Toutefois, je note une certaine distorsion dans l’article 9 : l’impôt de solidarité sur la fortune ne s’applique, en réalité, qu’à partir du moment où l’on atteint 1, 310 million d’euros de patrimoine. Une fois ce montant atteint, la fraction de la valeur nette du patrimoine supérieure à 800 000 euros est taxée à 0, 50 %. Pourquoi ne pas fixer directement le seuil d’entrée à 800 000 euros ?
Notre amendement vise donc à remédier à cette confusion en rétablissant le niveau d’entrée dans l’ISF à celui qui était en vigueur avant 2011.
Monsieur le président, j'ai présenté quelque peu longuement cet amendement, mais mon intervention vaut défense des deux amendements de repli suivants par lesquels, dans un esprit de pédagogie, je reprends les taux de l’ISF de 1982 et de 1997, pour remémorer les temps glorieux des gouvernements Mauroy et Jospin !
L'amendement n° I-217, présenté par M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer le montant :
par le montant :
II. - Alinéa 10, tableau
Rédiger ainsi ce tableau :
En %
Fraction de la valeur nette taxable du patrimoine
Tarif applicable
N'excédant pas 886 326€
Supérieure à 886 326 € et inférieure ou égale à 1 440 751€
Comprise entre 7 640 000 F et 15 160 000 F1 440 751 à 2 858 873€
Supérieure à 2 858 873 € et inférieure ou égale à 4 439 173 €
Supérieure à 4 439 173 € et inférieure ou égale à 8 595 476 €
Supérieure à 8 595 476€
Cet amendement a été précédemment défendu.
L'amendement n° I-218, présenté par M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Remplacer le montant :
par le montant :
II. - Alinéa 10, tableau
Rédiger ainsi ce tableau :
En %
Fraction de la valeur nette taxable du patrimoine
Tarif applicable
N’excédant pas 1 064 250€
Supérieure à 1 064 250 et inférieure ou égale à 1 773 750€
Supérieure à 1 773 750 et inférieure à 3 547 500€
Au-dessus de 3 547 500€
Cet amendement a été précédemment défendu.
L'amendement n° I-154, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10, tableau, septième ligne
Remplacer cette ligne par deux lignes ainsi rédigées :
Supérieure à 10 000 000 € et inférieure ou égale à 15 000 000 €
Supérieure à 15 000 000 €
II. – Alinéa 11
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
L'amendement n° I-57, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Alinéas 5 à 7
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Philippe Marini.
avec la suppression de trois alinéas qui opèrent un élargissement aussi discret que nuisible de l’assiette de l’ISF.
Dans le droit actuel, pour le calcul de l’impôt, seule la fraction de la valeur des parts ou des actions correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaires à l’activité de la société est considérée comme un bien professionnel : elle est donc exonérée de l’ISF. Cela apparaît logique au regard des principes sur lesquels repose depuis l'origine, dans les années quatre-vingt, cette imposition.
Or l’article 9 prévoit que les biens non nécessaires à l’activité seront désormais compris, pour leur valeur au 1er janvier de l’année d’imposition, dans le patrimoine du ou des propriétaires des parts ou actions, à concurrence de leur pourcentage de détention.
C’est bien davantage qu’une précision, car cela signifie, dans la plupart des cas, un triplement ou un quadruplement, voire davantage, de la valeur des biens concernés dans l’assiette de l’ISF des intéressés, puisqu’il ne sera plus tenu compte de la structure du passif de la société, en particulier de son endettement. D’ailleurs, paradoxalement, plus une entreprise sera endettée, plus l’effet du changement de calcul proposé affectera ses actionnaires.
C’est pourquoi il apparaît beaucoup plus sage d’en rester à la situation actuelle, les règles en matière d’abus de droit donnant déjà à l’administration fiscale les moyens d’agir lorsque cela s’impose.
Pour toutes ces raisons, je suggère la suppression de ces alinéas.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à votre disposition des exemples concrets montrant les nombreux effets pervers de cette disposition, qui conduirait à imposer un actionnaire sur une propriété virtuelle. Je peux, si vous le souhaitez, vous apporter des précisions sur ces points.
L'amendement n° I-291 rectifié, présenté par M. Yung, Mme M. André, MM. Berson, Botrel et Caffet, Mme Espagnac, MM. Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Miquel, Patient, Patriat, Rebsamen, Todeschini et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
… - L'article 885-0 V bis est ainsi modifié :
1° À la dernière phrase du premier alinéa du 1. du I, le montant : « 45 000 € » est remplacé par le montant : « 22 500 € » ;
2° Le 2. du III est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le montant : « 18 000 € » est remplacé par le montant : « 22 500 € » ;
b) À la seconde phrase, le montant : « 45 000 € » est remplacé par le montant : « 22 500 € ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Yung.
Cet amendement vise à renforcer l'attractivité de l'investissement dans les PME innovantes. De ce point de vue, il est au cœur de la politique fiscale en faveur de l'innovation que nous voulons promouvoir.
Force est en effet de constater que l’activité de capital-investissement est actuellement en perte de vitesse. En 2011, les sociétés françaises de capital-risque ont investi 822 millions d’euros seulement dans les nouvelles entreprises, jeunes pousses ou start-up, soit une chute de 20 % par rapport à 2010.
Je note avec satisfaction que l’Assemblée nationale, sur proposition de son rapporteur général, a prorogé jusqu’au 31 décembre 2016 la réduction d’impôt sur le revenu accordée au titre des souscriptions en numéraire à des fonds de capital-risque, à savoir les fonds communs de placement dans l’innovation, FCPI, et les fonds d’investissement de proximité, FIP. C’est une excellente mesure.
Je vous propose de modifier le dispositif, créé en 2007, de réduction du plafond de l’ISF pour investissement dans une PME en alignant le plafond de l’avantage fiscal prévu pour les FCPI et les FIP sur celui qui est applicable aux investissements directs ou intermédiés dans le même domaine.
Aujourd'hui, le plafond est différent selon qu’il s’agit de FCPI - 18 000 euros - ou d’investissements directs ou intermédiés - 45 000 euros. Par conséquent, les investissements d’innovation réalisés via des FCPI sont pénalisés.
Je vois bien la critique qui peut m’être faite : au fond, les FCPI, c'est le système bancaire. À cela je répondrai qu’ils sont aussi un outil très utile et important pour investir dans les PME. En effet, comment un épargnant peut-il savoir dans quelles PME innovantes investir ? Les FCPI ou les FIP font ce travail.
J'ai d’abord souhaité aligner les deux plafonds sur le plus élevé, celui de 45 000 euros. Mais, pour que les choses soient parfaitement régulières – c'est d’ailleurs la raison pour laquelle l’amendement que je vous soumets a été rectifié –, je propose finalement un même plafond fixé à 22 500 euros.
L'amendement n° I-247, présenté par MM. Adnot, Masson, Türk, Darniche et Bernard-Reymond, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 14
a) Après les mots :
« année précédente »
Insérer les mots :
ainsi que des prélèvements de nature fiscale et des contributions exceptionnelles
b) Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette réduction ne peut excéder une somme égale à 50 % du montant de cotisation résultant de l'application de l'article 885 V ou, s'il est supérieur, au montant de l'impôt correspondant à un patrimoine taxable égal à la limite supérieure de la troisième tranche du tarif fixé à l'article 885 U.
II- La perte de recettes éventuelle pour l'État résultant du I est compensée par la création à due concurrence d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Alinéas 15 à 23
Supprimer ces alinéas.
IV. - Alinéa 24
Remplacer les mots :
y compris celles mentionnées au 5° du II, ainsi que tous les revenus sont déterminés
par les mots :
déterminées
V. - Alinéa 25
a) Au début
Insérer les mots :
Pour l'application du premier alinéa,
b) Après le mot :
fortune
Insérer les mots :
du redevable
VI. - En conséquence, alinéa 24
Faire précéder cet alinéa de la mention :
II. -
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-385, présenté par M. Delahaye et Mme Létard, est ainsi libellé :
Alinéas 19 à 21
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
L’article 9 du projet de loi de finances pour 2013 prévoit la restauration d’un barème progressif pour l’ISF, avec, en contrepartie, un plafonnement de cet impôt à 75 % des revenus du contribuable.
Monsieur le ministre délégué, si votre objectif est louable, votre dispositif pénalisera toute une partie d’actionnaires familiaux qui ont organisé la détention et la gestion de leur patrimoine autour de holdings animatrices et de sociétés familiales de gestion mobilière, notamment celles qui ont opté pour l’impôt sur les sociétés.
Or ces structures ne peuvent être regardées systématiquement comme fictives ! En effet, il s’agit d’outils juridiques favorisant le réinvestissement des liquidités dégagées par une entreprise A dans une entreprise B et permettant aussi la gestion et la transmission du patrimoine familial.
L’objet de cet amendement est simple : par la suppression de trois alinéas de l’article 9, …
… nous proposons de sortir du calcul du plafonnement, d’une part, les sommes détenues par les holdings qui n’ont pas été distribuées et que les actionnaires n’ont pas à leur disposition, puisqu’ils ne peuvent décider de leur distribution, …
… et, d’autre part, les plus-values latentes, dont il est tout de même assez aberrant de tenir compte puisque, par définition, ces plus-values ne sont pas encore réalisées.
Monsieur le ministre, si mon amendement ne recueille pas un avis favorable du Gouvernement et n’est pas adopté, que se passera-t-il pour le contribuable imposé avec un plafonnement ayant intégré des plus-values latentes qui ne se vérifient pas ? Le constat que la plus-value latente dont on a tenu compte l’année N n’existe plus l’année N+1 lui permettra-t-il d’être remboursé ?
L'amendement n° I-58, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 19 et 20
Supprimer ces alinéas.
II. - En conséquence, alinéa 23
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Philippe Marini.
Là encore, il ne s’agit que de supprimer quelques petits alinéas, mais des alinéas loin d’être anodins, comme le remarquait, à l’instant, notre collègue Vincent Delahaye !
Cet amendement vise à supprimer la prise en compte d’une catégorie de prétendus « revenus » que l’article 9 prévoit d’intégrer dans le calcul du plafonnement de l’ISF.
Il est déjà anormal de prendre en compte des revenus virtuels, comme les revenus capitalisés des contrats d’assurance-vie, dans le calcul du plafonnement, alors même que la valeur de rachat des bons ou des contrats de capitalisation est susceptible de baisser et que racheter ses parts signifie, dans les premières années, subir une fiscalité alourdie.
Mais il est profondément choquant d’intégrer, dans ce calcul, des « revenus » que, dans d’assez nombreux cas, le contribuable n’aura pas la liberté de décider de percevoir ou non ! Tel est, par exemple, le cas du « bénéfice distribuable » d’une société holding. De fait, les critères proposés pour bénéficier de ce dernier – avoir détenu, avec son cercle familial élargi, plus de 25 % des droits dans les bénéfices à un moment quelconque des cinq dernières années – ne sont pas des critères de contrôle de la société.
En pratique, la mesure introduite par le Gouvernement concernera de très nombreux actionnaires minoritaires ne maîtrisant pas la décision de percevoir ou non le « bénéfice distribuable » !
Dès lors, on pourrait à bon droit s’interroger, rue de Montpensier...
À cet égard, on peut rappeler que, dans le commentaire de sa décision n° 2012-654 DC du 9 août dernier, le Conseil constitutionnel, évoquant l’ancien plafonnement dit « Rocard », a souligné que ce mécanisme « permettait de s’assurer que l’acquittement de l’ISF, ajouté à celui de l’impôt sur le revenu ainsi que des prélèvements sociaux, n’excédait pas une fraction du revenu disponible du contribuable ». « Disponible », monsieur le ministre… Or, dans de nombreux cas, le revenu distribuable des sociétés visées dans le mécanisme proposé ne sera précisément pas « disponible » pour le redevable. Le « nouveau plafonnement » n’offrira donc pas les mêmes garanties que l’ancien.
De plus, cette mesure est mauvaise sur le plan économique, puisqu’elle constituera une incitation très forte à se faire verser la quasi-totalité du revenu distribuable afin de pouvoir acquitter son impôt. Ainsi, tandis qu’aujourd’hui les holdings de tête servent souvent à financer les sociétés les moins rentables d’un groupe familial, grâce aux bénéfices des sociétés les plus performantes, elles risquent de perdre ce rôle à l’avenir, au détriment de l’activité, et sans doute aussi de l’emploi.
Monsieur le ministre, il serait plus sage de supprimer ce dispositif, la notion d’abus de droit devant permettre à l’administration fiscale de surmonter les montages réalisés pour se soustraire à l’impôt.
J’espère que vous serez sensible à ces arguments techniques et de bon sens !
Les amendements n° I-34 rectifié et I-118 sont identiques.
L'amendement n° I-34 rectifié est présenté par MM. Doligé, P. André et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Cambon, Charon, Cléach, Cornu et Couderc, Mme Deroche, MM. P. Dominati et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Grignon et Houel, Mlle Joissains, MM. Lefèvre, de Legge, P. Leroy, du Luart et Pointereau, Mme Sittler et M. Trillard.
L'amendement n° I-118 est présenté par Mme Des Esgaulx.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 19, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Ce bénéfice peut être réduit à hauteur des sommes que les porteurs de parts s'engagent à investir dans des actifs professionnels au sens des articles 885 N à 885 R, avant la fin de la quatrième année suivant celle du dépôt de la déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Ces amendements ne sont pas soutenus.
Les amendements n° I-35 rectifié et I-119 sont identiques.
L'amendement n° I-35 rectifié est présenté par MM. Doligé, P. André et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Cambon, Charon, Cléach, Cornu et Couderc, Mme Deroche, MM. P. Dominati et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Grignon et Houel, Mlle Joissains, MM. Lefèvre, de Legge, P. Leroy, du Luart et Pointereau, Mme Sittler et M. Trillard.
L'amendement n° I-119 est présenté par Mme Des Esgaulx.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Après l'alinéa 25
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret précise les modalités de l'engagement d'investir prévu au 4° du II et de son suivi. En cas de non-respect de l'engagement, les sommes non réinvesties sont rapportées à l'impôt sur la fortune de la cinquième année suivant celle de l'engagement initial. Le montant des droits éludés est majoré d'une pénalité égale à 10 %. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Ces amendements ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur les neuf amendements restant en discussion ?
La commission, qui a examiné tous ces amendements hier matin, a considéré que, dans la rédaction actuelle du projet de loi de finances, l’ISF rapportera 4 milliards d’euros en 2013. Le dispositif prévu à l’article 9 doit rapporter 1 milliard sur ces 4 milliards d’euros, soit une recette déjà importante.
Quels sont les termes du débat ? Je les résumerai en une question : faut-il demander à l’ISF de rapporter plus ou de rapporter moins ? À cet égard, les amendements qui viennent de nous être présentés se répartissent en deux catégories.
Les auteurs des amendements de la première catégorie estiment qu’il serait bon de demander un peu plus à cet impôt, en réintégrant dans son assiette des contribuables dont le patrimoine dépasse, par exemple, 800 000 euros.
Tel est l’objet des amendements n° I-153 et I-336, ainsi que de leurs variantes consistant à revenir au barème en vigueur soit en 1997, soit en 1982.
Le Gouvernement a essayé de trouver un équilibre dans le dispositif, dont je vous rappelle qu’il a été réactualisé en juillet dernier, avec des bases d’ISF renouvelées et améliorées. Si l’article 9 du projet de loi de finances pour 2013 conduit à chercher des ressources supplémentaires dans l’ISF, d’autres dispositions du texte visent à frapper le patrimoine, la rente, les intérêts d’emprunt ou encore les plus-values.
Autrement dit, dans sa recherche de recettes nouvelles et de rendement fiscal, le Gouvernement a essayé de trouver un équilibre entre différents dispositifs : l’ISF, la taxation des plus-values et du patrimoine d’une façon générale, un certain nombre de mesures complémentaires… Aujourd'hui, il est opportun de s’en tenir à l’équilibre qui a été arrêté en ce sens.
La commission, qui a émis un avis défavorable sur les quatre amendements, est également défavorable aux amendements de la seconde catégorie, qui visent à restreindre le champ d’application de l’ISF. Je pense notamment aux amendements n° I-57 et I-58, défendus par Philippe Marini, qui tendent à retirer de l’assiette de l’ISF un certain nombre d’éléments de patrimoine, ou à l’amendement n° I-385 de M. Delahaye, dont l’adoption aurait pour effet de retirer deux types de revenus du calcul du plafonnement de l’ISF.
Je crains que nos collègues ne fassent fausse route par rapport à l’ambition qui est aujourd'hui clairement la nôtre : faire en sorte que nos concitoyens les plus aisés soient sollicités un peu plus et améliorer leur contribution à l’effort de redressement collectif que nous devons entreprendre, à travers l’impôt frappant leur patrimoine.
Quant à l’amendement n° I -291 rectifié de notre collègue Richard Yung, qui porte sur le plafonnement de la réduction d’ISF-PME applicable aux fonds de capital-investissement, la commission des finances, quelque peu circonspecte à l’égard de ces questions de plafond, a estimé qu’il était opportun de solliciter l’avis du Gouvernement.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements de M. Foucaud et de M. Placé qui tendent à rétablir le seuil d’assujettissement à 800 000 euros.
Je vous rappelle que le Gouvernement propose d’instaurer un seuil de déclenchement à 1 300 000 euros : dès lors que ce seuil serait franchi, le contribuable serait taxé sur la fraction du patrimoine supérieure à 800 000 euros. Rendre éligibles à l’ISF les patrimoines compris entre 800 000 euros et 1, 3 million d’euros ne nous semble pas être forcément une bonne chose. En revanche, en maintenant ce seuil d’entrée dans l’ISF, le Gouvernement a pris une décision équilibrée.
Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n°I-154, lequel revient à restaurer le taux marginal à 1, 8 %. Ce taux fut établi à une époque où le loyer de l’argent n’avait rien à voir avec ce qu’il est aujourd'hui. Du reste, il me semble que le maintien du taux de 1, 5 %, que propose le Gouvernement, légitime peut-être davantage l’ISF que ne le ferait un taux marginal tel que vous l’envisagez. On ne peut tout de même pas faire comme si les conditions économiques étaient, en 2012, les mêmes qu’en 1988 !
Il faut savoir s’adapter à la réalité économique sans rien renier du principe qui guide l’action publique : utiliser l’ISF pour faire contribuer le capital détenu au financement des services publics et des politiques publiques.
Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n° I-57 présenté par Philippe Marini. En effet, la nouvelle rédaction du code général des impôts que le Gouvernement propose a pour objet de clarifier l’intégration, dans le patrimoine taxable à l’ISF, de la part non professionnelle des titres, ce qui évitera au redevable de procéder à une valorisation de cette dernière au 1er janvier de l’année d’imposition. Il me semble qu’il s’agit plutôt d’une mesure de simplification.
A contrario, monsieur Marini, la mesure que vous suggérez serait inutilement complexe.
S’agissant de l’amendement n° I-291 rectifié, je crains, monsieur Yung, que nos analyses ne diffèrent !
Vous souhaitez aligner sur le plafond d’exonération prévu pour l’ISF-PME celui qui est consenti aux FCPI ou aux FIP. Or, les activités de risque financés par ces deux dispositifs ne sont pas identiques, ni même comparables, loin s’en faut !
Il me paraît légitime que le dispositif finançant des risques supérieurs – les investissements directs – bénéficie d’un avantage fiscal supplémentaire…
… par rapport aux investissements réalisés via des fonds, intermédiation qui, on le sait, élimine une part notable de risques.
Par conséquent, monsieur Yung, si vous ne retiriez pas votre amendement, le Gouvernement appellerait le Sénat à le rejeter, afin de maintenir la justification même de l’ISF-PME, que le Gouvernement a décidé de conserver : le financement d’une activité plus risquée que celle qui financée via des fonds.
Enfin, le Gouvernement est défavorable aux amendements n° I-58 de M. Marini et n° I-385 de M. Delahaye, qui visent à la prise en compte de revenus capitalisés. En effet, notre objectif est de lutter clairement contre certaines pratiques d’optimisation fiscale que l’on a pu constater ces dernières années. Ce système nous paraît plus juste que le « plafonnement du plafonnement » qui fut instauré, en 1995-1996, par le gouvernement d’Alain Juppé, et dont beaucoup ont estimé qu’il avait été à l’origine d’un exil fiscal sans précédent jusqu’alors.
Je rappelle que seuls sont concernés par cet élargissement de la base « revenus » les bénéfices des sociétés patrimoniales, à l’exception donc des bénéfices des sociétés d’exploitation. On sait à quels excès les avantages fiscaux dérogatoires ont pu conduire la gestion de sociétés patrimoniales : nous avons tous en tête des exemples extrêmement célèbres, dont la justice peut, à l’occasion, être saisie.
Enfin, monsieur Marini, les plus-values latentes ont toujours été taxées à l’impôt de solidarité sur la fortune, il ne s’agit donc pas d’une nouveauté.
Elles sont calculées sur la base de la valeur vénale, c’est la raison pour laquelle certains, dont je suis, considèrent que l’ISF est un bon impôt et d’autres estiment qu’il devrait être supprimé.
Quoi qu’il en soit, le Gouvernement ne fait que rétablir une disposition qui a toujours existé. D’ailleurs, la partie de l’article visée par votre amendement ne mentionne que le plafonnement et non l’assiette au titre des plus-values latentes.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements qu’il demande au Sénat de rejeter.
L’amendement n’est pas adopté.
Je ne voterai pas l’amendement de M. Placé, mais je saisis cette occasion pour répondre à notre excellent collègue.
M. Placé affiche ses convictions européennes, et je lui en suis reconnaissant car je les partage. Je me permets cependant de lui objecter qu’on ne trouve d’ISF dans aucun autre pays important de l’Union européenne. Il n’y a donc aucune incompatibilité entre le fait d’être européen et de ne pas avoir d’ISF !
Si ! Il y a un impôt sur le patrimoine au Danemark, aux Pays-Bas ! L’Espagne l’a rétabli…
Nous entrerons à un autre moment dans ce débat !
Je me résume. Article premier : l’Europe, dans son immense majorité récuse l’ISF. Article deux : pendant les dix ans où nous avons été au pouvoir, nous n’avons pas supprimé l’ISF, c’est une erreur, mais nous en avons diminué le montant de manière significative par le biais de dispositions que vous venez de supprimer.
À tout pécheur miséricorde : nous n’avions fait qu’une partie du chemin, mais vous nous privez de ce chemin que nous avions parcouru !
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n’est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote sur l’amendement n° I-57.
Monsieur le ministre, sur cette question, les enjeux, loin d’être purement techniques, sont vraiment économiques : ils concernent plus spécialement le monde de la petite et moyenne entreprise.
Derrière cette nouvelle rédaction proposée pour l’article 885 O ter du code général des impôts se cache une innovation qui va durcir sensiblement le régime d’exonération du patrimoine professionnel.
Cette mesure peut en effet avoir des conséquences très significatives pour de nombreux dirigeants de PME qui, par précaution, « laissent » dans leur entreprise les bénéfices dont ils n’ont pas besoin pour vivre afin de pouvoir faire face aux aléas économiques.
Cette disposition concerne directement une population de plusieurs dizaines de milliers de personnes disséminées sur l’ensemble du territoire, constituée pour l’essentiel de patrons de PME. Elle fait disparaître toute incitation à conserver les bénéfices en réserve et pousse à les distribuer, ce qui va clairement à l’encontre des objectifs qu’affiche le Gouvernement.
Le nouveau dispositif méconnaît la structure de financement type des PME et ouvre à l’administration fiscale un nouveau « permis de redresser » : le passage à une réintégration des actifs eux-mêmes conduira à une augmentation quasi automatique de la fréquence des redressements. Il suffira désormais à l’administration de partir de la lecture directe des postes de l’actif sur les liasses fiscales pour pouvoir faire une notification, dès lors qu’elle estimera qu’un poste n’est pas indispensable à l’exploitation. La charge de la preuve contraire incombera au chef d’entreprise.
Le régime actuel est moins automatique, parce qu’il nécessite de se livrer à une estimation de la valeur des actions, exercice plus complexe qui requiert davantage de nuances.
Il faudra s’attendre, mes chers collègues, à beaucoup d’erreurs et de contestations.
En pratique, dans les sociétés non financières, les redressements vont en effet porter typiquement sur deux types d’actifs.
En premier lieu, ils viseront la trésorerie jugée excédentaire. Du point de vue des chefs d’entreprise, le sujet est potentiellement explosif, tout d’abord parce que ces redressements signifieront que l’administration juge, à leur place, de la marge de sécurité qu’ils peuvent conserver pour faire face à une éventuelle baisse d’activité ;…
… ensuite parce que l’accumulation de trésorerie pendant un certain temps, en période de crédit rare, est une condition nécessaire pour financer des projets de développement.
En second lieu, les redressements vont porter sur la détention de biens immobiliers non utiles à 100 % à l’exploitation de l’entreprise. Ce sujet est également très sensible pour tous les patrons de PME, car les biens immobiliers sont souvent les seuls investissements sur lesquels les banques acceptent d’accorder des crédits longs, lesquels servent en fait à sécuriser l’entreprise dans son ensemble.
Par ailleurs, beaucoup d’entrepreneurs ont des droits à pension modiques et considèrent que c’est la valeur de leur entreprise qui leur permettra de vivre une fois à la retraite. L’immobilier confère un socle tangible à cette valeur et la stabilise à travers les cycles économiques.
Enfin, même s’il est avéré que l’usage d’un actif est mixte, à la fois personnel et professionnel, le fait de le réintégrer dans l’assiette de l’impôt pour sa valeur brute sera perçu comme une iniquité, surtout si l’on tient compte du fait qu’un particulier peut, lui, déduire de sa base taxable à l’ISF l’emprunt contracté pour un achat immobilier.
Cette mesure est complètement démotivante : quelle justice y a-t-il à durcir la taxation annuelle des patrimoines professionnels des dirigeants qui restent à leur poste, alors qu’il vient d’être décidé d’alléger l’imposition des plus-values de ceux qui vendent leur entreprise ? Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, vous avez été sensibles à la situation des « pigeons » qui s’envolent, mais il faudrait également prendre soin de ceux qui restent !
Sourires.
La modification de l’article 885 O ter du code général des impôts introduite dans ce projet de loi de finances ne peut demeurer en l’état. Le Gouvernement lui-même – j’ai toujours soin de le protéger, monsieur le ministre ! – risque de s’exposer à un retour de flamme sur ce dossier : comme il n’y a eu aucune communication sur cette disposition, c’est à l’occasion des premiers redressements que sa véritable portée apparaîtra. Cela augure d’une vague de récriminations d’autant plus violente que le durcissement de l’ISF pour les biens professionnels sera perçu comme ayant été effectué à la sauvette.
En déposant cet amendement, mes chers collègues, j’aurai au moins essayé de contribuer à lever le voile sur cette mesure discrète !
Je souhaiterais surtout répondre à M. le rapporteur général.
En admettant même que trouver 4 milliards d’euros soit un objectif utile et nécessaire, …
… vous manquez d’imagination par rapport à votre homologue de l’Assemblée nationale.
Plutôt que d’essayer d’intégrer dans la base imposable des recettes plus ou moins virtuelles, des recettes bien plus précises s’offraient à vous. M. Eckert, quant à lui, a proposé d’intégrer dans l’assiette, de façon intelligente, le business des œuvres d’art, plutôt que le fait de posséder quelques œuvres d’art.
Quand on voit le résultat des ventes de M. Bergé, on se rend compte qu’il existe là une matière fiscale réelle, monsieur le rapporteur général !
Pour être équitable dans ma présentation des choses, je rappelle que la commission d’enquête dont M. Bocquet était rapporteur nous a permis de découvrir les « trusts Wildenstein » : on ne peut pas dire qu’il n’y ait pas, là aussi, quelque argument fiscal, et même moral, à intervenir !
Monsieur le rapporteur général, vous qui êtes si vigilant quant au maintien des équilibres, plutôt que de taxer une matière virtuelle, pourquoi ne pas déposer quelques amendements du même esprit que ceux qu’a défendus M. Eckert, afin que nous ayons un vrai débat sur cette question ?
Je voterai l’amendement n° I-57 de notre collègue Philippe Marini.
Qu’est-ce qu’un bien « non nécessaire » ? La responsabilité d’en décider incombe au chef d’entreprise.
Nous pourrions d’ailleurs peut-être trouver un compromis entre la position du Gouvernement et celle défendue par Philippe Marini.
Prenons l’exemple des comptes courants : un entrepreneur qui décide de ne pas prélever tous les profits qu’il pourrait dégager de l’exploitation de son entreprise laisse les sommes correspondantes sur des comptes courants ; si ceux-ci étaient bloqués, peut-être pourriez-vous accepter, monsieur le ministre, qu’ils soient exclus de l’assiette de l’ISF, car ils apportent une sécurité financière en garantissant la solvabilité de l’entreprise vis-à-vis de ses créanciers et, en particulier, des banques.
Encore une fois, mes chers collègues, qu’est-ce qu’un « bien non nécessaire à l’exploitation » ? Le fisc est incapable d’en donner la définition. Une entreprise confrontée à un marché en difficulté ou, au contraire, une entreprise en croissance, qui doit évoluer, qui a des ambitions d’acquisition, doit pouvoir conserver des marges de manœuvre. Si l’on considère qu’elle ne peut les mobiliser qu’au moment de la décision, elle va se retourner vers ses financeurs, ses banquiers, qui lui demanderont de quels actifs elle dispose.
Lorsqu’une entreprise accumule des actifs qui, sans être directement nécessaires à son exploitation, apportent un élément de stabilité dans le temps ou peuvent contribuer au financement de nouveaux développements créateurs de valeur ajoutée – je vous renvoie sur ce sujet au rapport Gallois, que vous avez eu raison de citer – ou permettant l’accès à des marchés nouveaux, je crois qu’il faut envisager d’exonérer ces biens. On pourrait introduire, comme condition, que ces biens soient « bloqués » dans l’entreprise pour une période de deux ans ou trois ans, par exemple.
En effet, si je reprends l’argument développé par mon collègue Francis Delattre, il serait tout à fait paradoxal qu’un chef d’entreprise qui consacre les sommes disponibles sur ses comptes courants à l’acquisition de biens de collection ne soit pas taxé à l’ISF, mais qu’il le soit s’il garde cet argent dans son entreprise pour sécuriser son développement et son avenir et contribuer ainsi au maintien de l’emploi ! J’espère que vous ne serez pas insensible à cet argument, madame Beaufils…
Je vais bien sûr voter l’amendement de notre collègue Philippe Marini, mais je souhaite intervenir un instant pour expliquer en quoi cet article 9 risque à mes yeux de créer une rupture de l’égalité devant les charges publiques.
En effet, si l’on se reporte à l’exposé des motifs, figure parmi les objectifs de cette réforme le souci « d’élargir les revenus pris en compte au titre du plafonnement de l’ISF aux revenus capitalisés ». Tel est précisément l’objet de l’article 9, qui intègre dans les « revenus mondiaux nets » sur lesquels le plafond de 75 % est calculé, les revenus « regardés comme des revenus réalisés au cours de la même année ».
Cela étant, l’examen des revenus désignés comme « capitalisés » appelle de sérieuses réserves, dans la mesure où cette désignation paraît tout à fait contraire à l’objectif constitutionnel de plafonnement et à la décision du Conseil constitutionnel d’août 2012 que nous avons tous en tête.
En effet, pour l’essentiel, les revenus ainsi désignés par le projet de loi de finances sont des revenus que non seulement le contribuable n’a pas appréhendés juridiquement, mais que, bien souvent, il ne peut pas juridiquement appréhender. Pour le dire autrement et pour reprendre la définition générale du revenu imposable telle qu’elle est donnée par l’article 12 du code général des impôts, les revenus ainsi désignés ne correspondent pas à « des bénéfices ou revenus que le contribuable [a réalisés] ou dont il [a disposé] au cours de la même année ».
Cette situation est patente dans le cas des holdings familiales de participation, sociétés généralement destinées à pérenniser, en faveur des générations suivant celle des fondateurs, le contrôle des affaires créées par ces derniers, en évitant la dispersion des intérêts ou la dilution de leur capacité d’intervention, si nuisibles au développement ou même à la simple survie de ces affaires.
Le risque d’une rupture de l’égalité devant les charges publiques est réel et je pense que le Conseil constitutionnel se penchera sur cette question. Face à ce risque d’inconstitutionnalité, je ne peux que souscrire à l’amendement déposé par Philippe Marini.
L’amendement n’est pas adopté.
M. Richard Yung. M. le ministre nous a dit qu’il souhaitait maintenir la différence de plafond d’exonération : celui-ci s’établirait à 45 000 euros pour les investissements directs dans l’innovation et à 18 000 euros pour les fonds communs de placement dans l’innovation. Je suis prêt à le suivre sur ce terrain, mais je souhaite pouvoir poursuivre la discussion sur cette question avec les services compétents, parce qu’elle me semble au centre du débat sur le financement de l’innovation, élément essentiel du pacte de compétitivité qui nous tient à cœur. Il serait important de prolonger notre réflexion dans ce domaine, monsieur le ministre.
M. le ministre délégué acquiesce.
L’amendement n° I-291 rectifié est retiré.
La parole est à M. le ministre délégué.
Je vous remercie, d’avoir bien voulu retirer votre amendement, monsieur le sénateur, et je suis d’accord pour poursuivre la discussion. Mais convenons d’une chose : l’investissement via les FCPI est moins risqué que l’investissement en direct d’une personne seule via l’ISF-PME. Le risque étant mutualisé, il est moins élevé.
Telle est la base de mon raisonnement.
L’avantage fiscal afférent à l’ISF-PME mérite donc d’être plus important précisément pour cette raison.
Je suis toutefois d’accord pour discuter avec vous de l’essentiel, c'est-à-dire du financement de l’innovation, et pour voir comment il est possible de l’améliorer.
La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote sur l'amendement n° I-385.
Je tiens à apporter quelques précisions.
M. le rapporteur général a parlé de revenus. Peut-être me suis-je mal fait comprendre, mais il est clair pour moi que cet amendement vise à exclure du plafonnement des ressources qui, en fait, ne sont pas des revenus.
Les ressources financières bloquées dans une holding ou les plus-values latentes ne sont pas des revenus. Or l’amendement n° I-385 vise à exclure du dispositif des éléments qui ne me paraissent pas être des revenus.
Ensuite, je renouvelle ma question, à laquelle je n’ai pas obtenu de réponse, ce que je regrette : en cas de non-constatation des plus-values latentes l’année suivante ou les années ultérieures, revient-on sur le plafonnement ou non ? Dans le cas d’une absence de plus-value réelle, que se passe-t-il puisque des plus-values latentes ont été imposées qui se révèlent inexistantes ?
Je partage totalement l’avis de Vincent Delahaye, qui, en effet, n’a pas obtenu de réponse.
Il est question d’intégrer dans le plafonnement des revenus qui ne sont pas perçus et qui ne le seront peut-être jamais. Il y a là un véritable problème d’égalité devant l’impôt.
Permettez-moi d’ajouter un élément aux arguments qui viennent d’être avancés et qui ne suscitent manifestement aucune réponse de la part du Gouvernement.
Alors qu’on demande avec beaucoup d’amabilité à notre collègue Richard Yung de retirer son amendement, de façon très justifiée d’ailleurs, les amendements présentés par le groupe de l'UDI-UC et le nôtre, qui portent sur un aspect que nous considérons comme préoccupant, sont, eux, balayés d’un revers de la main, sans aucune considération et sans réponse sur le fond.
Sourires sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.
Nous posons une question technique, économique, mon cher collègue. Il s’agit que cette assemblée conduise des travaux préparatoires qui soient clairs, qui soient corrects.
Il vous faut des preuves d’amour ?... (Nouveaux sourires sur les mêmes travées.)
Mais ce n’est pas une question d’amour, c’est une question de droit parlementaire ! Le Parlement doit faire son travail, quelles que soient, cher collègue, nos opinions.
La nouvelle définition du passif figurant à l’article 9 amplifie encore le phénomène que j’ai dénoncé.
Désormais, seules les dettes se rapportant à des actifs taxables seraient admises en déduction du patrimoine taxable, à l’exclusion de celles se rapportant à des actifs hors du champ de l’ISF ou exonérés.
Ainsi, un contribuable qui s’est endetté pour financer son outil professionnel pour un montant supérieur à celui de son patrimoine privé pourrait très facilement être imposé pour un montant supérieur au rendement de ses actifs.
Par ailleurs, lorsque l’outil professionnel du contribuable est constitué de titres d’une société, les éléments du patrimoine social non nécessaires à l’activité de la société ne seraient plus considérés comme des biens professionnels, quel que soit le nombre de niveaux d’interposition entre la société et les biens non nécessaires à son activité.
Ces mesures élargiraient considérablement l’assiette de l’ISF, puisqu’elles pourraient conduire à soumettre à l’impôt toutes les liquidités et disponibilités de la société, ainsi que tous ses actifs rentables, mais non directement nécessaires à son activité principale.
Je fais ce commentaire, qui porte sur une matière connexe à celle de l’amendement, parce que tout cela constitue un ensemble.
Mes chers collègues, que penser d’un dispositif aux termes duquel les contribuables seront imposés en considération de revenus dont ils n’ont pas la disposition, seront susceptibles de payer des impôts supérieurs à leurs revenus et, en définitive, seront chaque année appauvris par l’impôt, obligés d’amputer leur patrimoine pour faire face à leurs obligations fiscales ?
Faire rentrer des revenus de capitalisation déjà assujettis à la CSG chaque année revient à dénaturer l’esprit de l’épargne longue, qui sera taxée de toutes les façons à sa sortie et dont le Gouvernement a le projet, semble-t-il – M. le ministre pourrait d’ailleurs nous en parler – d’allonger la durée de détention.
Ce que l’on fait, par ces dispositions très techniques apparemment anodines au sein de l’article 9 du projet de loi de finances, est en réalité très significatif, et en tout cas en totale contradiction avec le rapport, dont je ne citerai pas l’auteur, sur lequel vous vous fondez pour alimenter votre pacte de compétitivité, monsieur le ministre.
Désormais, certains contribuables seront de fait taxés trois fois : une fois annuellement à la CSG, une fois en faisant apparaître un revenu non liquide, et une troisième fois à la sortie de l’épargne longue.
Un dispositif de cette nature n’est pas acceptable dans notre État de droit.
Sous l’apparence de taux nominaux acceptables – à cet égard, je salue l’habileté technique et la qualité de la communication du Gouvernement – et d’un plafonnement de principe avantageux, le législateur adopterait des mesures de taxation dont le taux réel serait en définitive bien plus élevé que celui qui est annoncé, du fait de l’élargissement de l’assiette de l’impôt. Surtout, ces mesures reviendraient, pour la première fois en matière de fiscalité des particuliers, à taxer, qui plus est de façon dissimulée, des revenus virtuels.
Vous comprendrez donc que nous dénoncions, de ce côté-ci de l’hémicycle, une démarche aussi insidieuse.
Chacun peut appliquer les conceptions qui sont les siennes, mais au moins, monsieur le ministre, qu’on le fasse franchement et avec courage, qu’on dise la vérité ! Cela vous épargnera bien des mécomptes dans les mois qui viennent.
Notre collègue Vincent Delahaye ayant indiqué que nous avions un point de désaccord, je vais compléter l’avis que j’ai donné tout à l’heure sur son amendement.
J’ai effectivement parlé de revenus pour le calcul du plafonnement de l’ISF, car je prends en considération deux choses.
Pour évoquer le cas des bénéfices distribuables des holdings familiales, prenons l’exemple de la holding Bettencourt, dont le nom est connu en France aujourd'hui. Je pense que Mme Bettencourt n’a pas besoin, pour ses menues dépenses ou pour assurer son train de vie – je ne sais pas s’il est important, là n’est pas le sujet – de prendre tous les bénéfices distribuables qu’elle a dans sa holding.
Elle prend ce dont elle a besoin et laisse le reste dans la holding.
Nous estimons qu’il n’y a pas de raison que ces revenus, ces bénéfices laissés dans la holding ne soient pas soumis à l’ISF. Même si cet argent n’est pas capté par Mme Bettencourt, il doit être soumis à l’ISF.
De la même façon, chers collègues, il est clair que les plus-values en report d’imposition enrichissent le patrimoine des intéressés, même si elles sont provisoirement réinvesties et bénéficient à ce titre d’un dispositif d’exonération sur cinq années.
Il faut admettre qu’il y a là incontestablement enrichissement du patrimoine, même si le dispositif d’affichage immédiat conduit à penser qu’il y a réinvestissement.
De notre point de vue, il s’agit bien là des éléments de revenus implicites, qu’il faut donc conserver dans la taxation.
Je vais bien évidemment répondre et à M. Marini et à M. Longuet.
Lorsque M. Marini a évoqué des travaux préparatoires, il pensait sans doute non pas tant aux travaux du Sénat qu’à ceux d’une instance qui lui est bien supérieure en droit. Je m’en voudrais donc de ne pas lui répondre, car cette instance bien supérieure doit être parfaitement éclairée sur les intentions du Gouvernement : si cette instance n’a pas à se faire expliquer la lettre, elle a très certainement à se faire préciser l’esprit.
Vous vous êtes beaucoup exprimés sur les passifs. Le texte que nous proposons consolide les exonérations des biens professionnels, mais veille à ce qu’elles ne soient pas détournées de leur objet. Il nous semble donc que nous faisons là œuvre tout à fait utile. Toutefois, je vous rassure : nous estimons – au moins sur ce point sommes-nous d’accord – que les biens professionnels, dès lors qu’il s’agit réellement de biens professionnels, n’ont pas à être intégrés dans l’assiette de l’impôt de solidarité sur la fortune.
De la même manière, vous conviendrez avec moi que les passifs afférents à des biens exonérés n’ont pas à venir en déduction des actifs qui, eux, sont taxés. Seuls viennent en déduction des actifs taxés les passifs de ces sociétés ou de ces biens qui sont éligibles à l’ISF. Vous suggéreriez – mais peut-être ai-je mal compris, monsieur Marini – que viendraient en déduction des actifs taxés le passif de biens non taxés. Cela n’est pas cohérent. Je vous précise donc, monsieur le sénateur, que, pour le Gouvernement, les passifs afférents à des biens n’étant pas eux-mêmes éligibles à l’ISF ne peuvent venir en déduction de l’assiette.
Cette confusion entre biens éligibles et biens non éligibles et entre les passifs afférents aux uns et aux autres ne nous paraît pas raisonnable.
Je tenais donc à vous indiquer quelle était clairement l’intention du Gouvernement. Je doute que le Conseil constitutionnel, puisque c’est à cette instance que vous avez discrètement fait allusion tout à l’heure, monsieur Marini, trouve quoi que ce soit à redire à ce raisonnement.
De la même manière, un bien personnel ne doit pas être assimilé à un bien professionnel au seul motif qu’il est détenu par la société. Cette sortie des biens non professionnels a d’ailleurs toujours été prévue. Elle n’a jamais été censurée ni même contestée. Simplement, elle est aujourd'hui considérée de manière différente.
Jusqu’à présent, la valeur d’une société était calculée déduction faite de la valeur des biens professionnels. Ainsi, la valeur d’une société possédant un avion privé ou un yacht – tant mieux pour ceux qui en bénéficient – était jusqu’alors calculée déduction faite de la valeur de ce yacht ou de cet avion. Désormais, nous demandons que cette valeur soit identifiée. Il nous paraît en effet plus facile de déclarer la valeur d’un bien de cette nature plutôt que de la déduire de la valeur de la société. Nous ne proposons pas de changement fondamental. Ce n’est là qu’une mesure de simplification.
Enfin, vous avez largement abordé la question des holdings patrimoniales. Les exemples sont nombreux, certains très célèbres. On sait que ces holdings ont de facto permis de ne pas intégrer dans l’assiette de l’ISF des biens qui, logiquement, étaient éligibles à cet impôt.
Que les choses soient claires : une société opérationnelle qui réinvestit n’est pas concernée par la disposition que le Gouvernement propose au Parlement. En revanche, parce que nous avons constaté des optimisations massives, nous estimons que le revenu capitalisé doit être pris en compte, non pas une deuxième fois, mais une fois, et au début. Dès lors que des titres sont versés ou donnés à une société patrimoniale - c’est à ce moment-là que l’on doit considérer la plus-value - l’ISF doit s’appliquer, et non plus au moment où ladite société verse à celles ou à ceux qui la possèdent les ressources nécessaires à leur train de vie. Vous voyez très bien à quoi je fais référence.
Cantonner les plus-values dans une société patrimoniale et, au motif que cette société patrimoniale serait assimilée à un bien professionnel, exonérer d’ISF les titres et les plus-values ainsi cantonnés a abouti à des excès tout à fait déloyaux à l’égard du fisc, donc du pays.
C’est pour revenir sur ces excès que nous proposons cette disposition.
Il n’y a nulle spoliation, nulle déloyauté à l’égard des contribuables concernés ; il y a simplement une clarification qui permet à ces sociétés patrimoniales de jouer pleinement leur rôle, mais pas au-delà, et certainement pas un rôle d’optimisation fiscale. Le pays ne peut plus se permettre ce type de procédé !
Voilà, monsieur le président de la commission, les explications que vous aviez sollicitées, en espérant vous avoir convaincu.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Marini, pour explication de vote sur l’amendement n° I-58.
Un dernier mot sur cette affaire… Je remercie M. le ministre de ses explications. Celles-ci cependant ne me convainquent pas, car on peut toujours poursuivre sur la base de l’abus de droit. Par ailleurs, s’agissant des conditions de prise en compte du passif, vous auriez à mon sens pris moins de risques en maintenant le statu quo législatif.
Je voudrais simplement vous citer un exemple en matière de biens professionnels et de passif.
Une société commerciale a acquis, il y a dix ans, une société civile immobilière qui détenait le siège social de la société commerciale. Il y a cinq ans, cette société commerciale, compte tenu de son développement, a acquis un autre immeuble qui est devenu son siège social, mais elle n’a pas cédé la filiale immobilière. L’ancien siège est loué à un tiers et les loyers permettent de rembourser le solde de l’emprunt.
On suppose que la société civile immobilière a une valeur de 1 million d’euros et que le solde de l’emprunt contracté pour l’acquisition de l’immeuble est de 550 000 euros. Si le chef d’entreprise avait réalisé l’opération dans son patrimoine personnel, il devrait déclarer à l’actif de son ISF 1 million d’euros et au passif 550 000 euros ; il serait donc taxé sur 450 000 euros. Or, selon l’article 9 du projet de foi de finances pour 2013, le chef d’entreprise devra déclarer 1 million d’euros, sans tenir compte des 500 000 euros restant dus par la société.
De ce fait, l’entreprise va être pénalisée par rapport à ce qu’eût été la situation du particulier. À mon avis, c’est un effet pervers auquel vos services n’ont probablement pas songé, mais je pense qu’un certain nombre de situations de cette nature vont se produire.
En guise de conclusion, je voudrais examiner, encore à titre d’exemple, le traitement des contrats d’assurance-vie en unités de compte.
La valeur des actifs sous-jacents de ces contrats fluctue et les détenteurs de ces derniers n’ont aucune garantie sur leur valeur finale. Tant que le contrat n’est pas dénoué, la valeur de rachat reste soumise à l’aléa de la valeur des sous-jacents et la plus-value ou la moins-value reste non seulement latente mais provisoire.
Il serait extravagant, et je pèse mes mots, que des plus-values provisoires d’actifs sous-jacents dans des contrats d’assurance-vie ou autres puissent de fait être taxées au titre de la réduction ou de la suppression du bénéfice du plafonnement, alors qu’elles ne sont pas prises en compte en cas de détention directe de ces actifs.
Il y a là une dissymétrie qu’il convient de souligner : les variations annuelles à la hausse comme à la baisse de ces actifs entraîneraient une très grande instabilité de la matière imposable au titre de l’ISF. Dans une année de baisse, la perte en capital sur ces actifs pourrait même être supérieure aux autres revenus du contribuable, ce qui réduirait à zéro son revenu de référence, alors que, les années de hausse, le revenu de référence pourrait entraîner la disparition de ses droits au plafonnement. Dans un cadre annuel, la même plus-value pourrait être taxée plusieurs fois.
Bref, monsieur le ministre, il me semble que vos services vous ont mal inspiré §en sortant de leurs tiroirs des suggestions qui auraient sans doute pu être présentées à tout ministre siégeant au sixième étage de Bercy. Je crois sincèrement que vous allez essuyer des mécomptes sérieux avec cette affaire, et je pense ici non seulement à l’illustre institution de la rue de Montpensier, mais aussi, ce qui est peut-être aussi grave, au public des épargnants et des patrons de PME.
J’ai donné à plusieurs reprises des indications concrètes et précises sur des situations qui vont se produire. Il était de mon devoir, me semble-t-il, de les expliciter. Maintenant, il appartient à la Haute Assemblée de trancher !
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote sur l’article 9.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviens au nom de l’UMP.
L’article 9 revient sur l’allégement de l’ISF voté par le précédent gouvernement. Il vise à complexifier de nouveau le barème de l’ISF autour de six tranches, alors que le gouvernement de Nicolas Sarkozy l’avait simplifié avec seulement deux taux.
Certes, le taux avait été allégé à 0, 5 %, au lieu de 1, 8 %, pour la plus haute tranche, mais il s’agissait de taux purement théoriques, car le taux réel moyen pratiqué pour la plus haute tranche était en fait de 0, 22 %, grâce à l’optimisation fiscale que pouvaient se payer les contribuables les plus fortunés.
Le groupe UMP note néanmoins avec satisfaction que vous avez conservé l’un des aspects de la réforme de l’ISF instaurée par Nicolas Sarkozy, à savoir la suppression de la première tranche, qui soumettait à l’ISF des contribuables uniquement en raison de la bulle immobilière qui a valorisé leur bien sans pour autant que leurs revenus soient nécessairement élevés. L’abattement de 30 % sur la résidence principale a été également maintenu, et nous nous en félicitons.
Néanmoins, le durcissement de l’ISF, couplé à la contribution de 75 % sur les revenus supérieurs à 1 million d’euros par part, envoie un très mauvais signal aux investisseurs étrangers, à notre jeunesse désireuse d’entreprendre et de réussir, ainsi qu’aux Français qui créent aujourd’hui la richesse et l’emploi.
Je rappelle, d’ailleurs, que la création d’une tranche à 75 %, mesure purement idéologique et démagogique qui rapporte fiscalement très peu, répond à une promesse que François Hollande a « sortie de son chapeau » en pleine campagne présidentielle, lors d’une émission télévisée, sans concertation avec son propre camp, et qui avait alors surpris M. Cahuzac lui-même.
Bercy s’est depuis évertué à amoindrir la portée de cette mesure, qui a été en grande partie vidée de son contenu. Seuls les revenus d’activité sont concernés, et non les revenus du patrimoine, et les prélèvements sociaux sont inclus dans les 75 %.
Pour autant, si cette version light touche concrètement très peu de personnes, soit 1 500 environ, elle présente le désavantage, en se cumulant avec le durcissement de l’ISF que vous nous proposez aujourd’hui, de donner de la France une image désastreuse pour les investisseurs, …
La preuve que non : il y a plus d’investissements étrangers en France qu’ailleurs !
… où les créateurs de richesses et d’emplois sont stigmatisés et plus taxés qu’ailleurs.
Cela décourage la réussite et le mérite. C’est un contresens, du point de vue tant économique que fiscal, car les recettes fiscales escomptées seront moindres dans la réalité, tant le nombre d’exilés fiscaux augmente depuis l’annonce de ces deux mesures, auxquelles il convient d’ajouter la taxation renforcée du capital liée à la « barémisation ». C’est une réalité.
C’est pourquoi le groupe UMP votera contre le durcissement de l’ISF tel qu’il est proposé à l’article 9.
Monsieur le rapporteur général, je suis au regret de constater que votre argumentation principale pour rejeter nos amendements n’a pas changé depuis hier. Vous nous reprochez de vouloir creuser le déficit en supprimant des recettes.
Pourquoi reprocher à l’opposition de s’opposer ? Nous avons toujours dit que nous étions farouchement opposés à ce matraquage fiscal et que l’effort sur les dépenses était insuffisant.
Les recettes supprimées doivent être compensées par des économies en dépenses. Vous nous dites que, si nos amendements de suppression étaient adoptés, nous amputerions le budget de 10 milliards d’euros…
Mais, monsieur le rapporteur général, je crois que vous n’avez pas bien regardé tous nos amendements.
À l’article d’équilibre, l’article 45, notre groupe a déposé un amendement prévoyant justement 10 milliards d’euros d’économies supplémentaires. Et ne nous dites pas qu’un tel effort n’est pas possible !
Le Gouvernement vient d’annoncer 10 milliards d’euros de réduction de dépenses ? Chiche ! Mais pourquoi attendre ? Incluons-les d’ores et déjà dans le projet de loi de finances pour 2013 !
Monsieur le ministre, vous nous reprochez l’allégement de l’ISF voté par le précédent gouvernement en arguant de notre absence de vertu budgétaire, cet allégement ayant coûté 2 milliards d’euros aux finances publiques, mais vous omettez bien sûr de préciser que cet allégement était compensé par la suppression du bouclier fiscal §et la hausse de cinq points de la taxation des grosses successions et des plus gros contrats d’assurance-vie !
… mais la différence entre vous et nous, vous avez raison sur ce point, est de nature idéologique : nous jugeons le matraquage fiscal contre-productif économiquement et nous pensons qu’il existe de très importants gisements d’économies aujourd’hui inexploités.
L'article 9 est adopté.
L'amendement n° I-359, présenté par Mme Morin-Desailly et M. Roche, est ainsi libellé :
Après l'article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article 298 septies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après l’année : « 1934, », sont insérés les mots : « et sur les services de presse en ligne reconnus en application de l'article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse » ;
2° Le dernier alinéa est supprimé.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin du III de l’article 641 bis, l’année : « 2012 » est remplacée par l’année : « 2017 » ;
2° À la première phrase de l’article 750 bis A, l’année : « 2014 » est remplacée par l’année : « 2017 » ;
3° Aux première et seconde phrases du premier alinéa de l’article 1135, l’année : « 2014 » est remplacée par l’année : « 2017 » ;
4° Le I de l’article 1135 bis est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, l’année : « 2012 » est remplacée par l’année : « 2017 » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « 2013 et le 31 décembre 2017 » sont remplacés par les mots : « 2018 et le 31 décembre 2022 » ;
c) Au dernier alinéa, l’année : « 2018 » est remplacée par l’année : « 2023 ». –
Adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-156, présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L'article 278-0 bis est complété par un G, un H et un I ainsi rédigés :
« G. - Les opérations suivantes réalisées dans le cadre de la politique sociale :
« 1. Les livraisons de terrains à bâtir consenties aux organismes d'habitations à loyer modéré visés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation ou aux personnes bénéficiaires, au moment de la livraison, d'un prêt mentionné à l'article R. 331-1 du même code pour la construction de logements visés aux 3° et 5° de l'article L. 351-2 dudit code ;
« 2. Les livraisons de logements sociaux neufs à usage locatif mentionnés aux 3° et 5° de l'article L. 351-2 du même code et qui bénéficient de la décision favorable prise dans les conditions prévues aux articles R. 331-3 et R. 331-6 du même code à compter du 1er octobre 1996, et dont l'ouverture de chantier est intervenue à compter de cette date, lorsque l'acquéreur bénéficie pour cette acquisition d'un prêt prévu à l'article R. 331-1 du même code ou d'une subvention de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine et a conclu avec l'État une convention en application des 3° ou 5° de l'article L. 351-2 du même code ;
« 3. Le premier apport de logements sociaux à usage locatif dont la construction a fait l'objet d'une livraison à soi-même mentionnée au II, réalisé dans les cinq ans de l'achèvement de la construction au profit d'un organisme d'habitations à loyer modéré visé à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation, à la condition que l'acte d'apport prévoie le transfert de la société cédante à la société bénéficiaire de l'apport, du prêt prévu à l'article R. 331-1 du même code et de la convention mentionnée aux 3° ou 5° de l'article L. 351-2 du même code ;
« 4. Les livraisons de logements destinés à être occupés par des titulaires de contrats de location-accession conclus dans les conditions prévues par la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière, qui font l'objet, dans des conditions fixées par décret, d'une convention et d'une décision d'agrément prise par le représentant de l'État dans le département ;
« 5. Les livraisons de logements aux structures d'hébergement temporaire ou d'urgence faisant l'objet d'une convention entre le propriétaire ou le gestionnaire des locaux et le représentant de l'État dans le département et destinées aux personnes visées au II de l'article L. 301-1 du code de la construction et de l'habitation ;
« 6. Les livraisons de logements sociaux à usage locatif à l'association mentionnée à l'article L. 313-34 du même code, lorsqu'elle a conclu avec l'État une convention en application du 4° de l'article L. 351-2 dudit code ;
« 7. Les livraisons de logements à usage locatif à l'association mentionnée à l'article L. 313-34 du même code ou à des sociétés civiles immobilières dont cette association détient la majorité des parts, situés dans des quartiers faisant l'objet d'une convention prévue à l'article 10 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine et destinés à être occupés par des ménages dont le total des ressources n'excède pas le montant mentionné à l'article R. 391-8 du code de la construction et de l'habitation ;
« 8. Les livraisons de locaux aux établissements mentionnés aux 6° et 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, agissant sans but lucratif et dont la gestion est désintéressée, de même pour la seule partie des locaux dédiée à l'hébergement s'agissant des établissements mentionnés au 2° du I du même article, lorsqu'ils hébergent à titre permanent ou temporaire des personnes handicapées, ou des personnes âgées remplissant les critères d'éligibilité au prêt prévu à l'article R. 331-1 du code de la construction et de l'habitation, et que ces locaux font l'objet d'une convention entre le propriétaire ou le gestionnaire des locaux et le représentant de l'État dans le département ;
« 9. Les cessions de droits immobiliers démembrés de logements sociaux neufs à usage locatif mentionnés aux 3° et 5° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation, lorsque l'usufruitier bénéficie d'un prêt prévu à l'article R. 331-1 du même code et a conclu avec l'État une convention en application des 3° ou 5° de l'article L. 351-2 du même code ;
« 10. Les livraisons d'immeubles et les travaux réalisés en application d'un contrat unique de construction de logements dans le cadre d'une opération d'accession à la propriété à usage de résidence principale, destinés à des personnes physiques dont les ressources à la date de signature de l'avant-contrat ou du contrat préliminaire ou, à défaut, à la date du contrat de vente ou du contrat ayant pour objet la construction du logement ne dépassent pas les plafonds prévus à la première phrase du huitième alinéa de l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation et situés dans des quartiers faisant l'objet d'une convention prévue à l'article 10 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 précitée ou entièrement situés à une distance de moins de 500 mètres de la limite de ces quartiers ;
« 11. Les apports des immeubles sociaux neufs aux sociétés civiles immobilières d'accession progressive à la propriété effectués dans les conditions prévues aux articles L. 443-6-2 et suivants du code de la construction et de l'habitation :
« H. - Les livraisons à soi-même d'immeubles dont l'acquisition aurait bénéficié du taux réduit en application du G.
« I. - Les livraisons à soi-même de travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement ou d'entretien, autres que l'entretien des espaces verts et les travaux de nettoyage, lorsqu'ils ne bénéficient pas du taux réduit de 7 % de la taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article 279-0 bis et dans la mesure où ces travaux portent sur les locaux mentionnés aux 2 à 8 du G. » ;
2° L’article 278 sexies est abrogé.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Par cet amendement, nous souhaitons permettre la réalisation des objectifs fixés par le Président de la République en matière de construction de logements sociaux.
En effet, depuis le vote de la quatrième loi de finances rectificative pour 2011, le taux de TVA a été relevé pour la construction de logements sociaux, passant de 5, 5 % à 7 % et pénalisant les bailleurs sociaux.
Ainsi, selon l’Union sociale pour l’habitat, l’USH, cette hausse du taux de TVA s’est traduite par un « accroissement des dépenses du secteur HLM de 225 millions d’euros par an. Ce surcoût a rendu plus difficile le montage des opérations nouvelles de construction de logements sociaux pour les organismes HLM et plus chers les loyers pour les locataires, alors que le pays connaît un fort déficit de logements à loyer abordable ».
Alors que le Président de la République a pris des engagements forts pour la construction de logements sociaux, en indiquant un objectif de 150 000 par an, nous estimons qu’il est urgent de revenir sur cette mesure et de rompre avec le désengagement de l’État qui prévaut dans ce secteur depuis 2002.
En effet, le budget du logement a été en constante diminution et son financement a de plus en plus été externalisé, reposant pour une part conséquente sur les acteurs du logement, que ce soit le « 1 % logement », les bailleurs sociaux ou encore les collectivités territoriales.
Il faut revenir au rôle régalien de l’État en la matière. Cela passe à notre sens par un renforcement des aides directes à la pierre. Or, dans ce cadre, force est de constater que l’effort réalisé n’est pas à la hauteur. Cela passe aussi par une réflexion sur les contours que pourrait revêtir un prêt à taux zéro pour les offices, comme nous en avions acté le principe l’année dernière. Cela passe enfin par la sortie des offices de l’étau financier dans lequel ils sont enfermés.
Alors que les perspectives du Pacte de compétitivité sont particulièrement inquiétantes pour le logement, qui verrait le taux TVA qui lui est appliqué encore augmenté pour atteindre 10 %, je pense qu’il est important aujourd'hui d’envoyer un signal clair aux acteurs du logement social.
Si nous voulons atteindre l’objectif de 150 000 logements sociaux construits chaque année, il faut une politique volontariste.
Nous vous proposons donc de revenir dès maintenant à un taux de 5, 5 % de TVA sur la construction de logements sociaux, permettant ainsi de dégager des marges de manœuvres utiles pour les offices d’HLM.
Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° I-271 rectifié est présenté par Mme Jouanno.
L'amendement n° I-328 rectifié est présenté par MM. Labbé, Placé et les membres du groupe écologiste.
L'amendement n° I-403 rectifié est présenté par Mme Lienemann, MM. Raoul et Bérit-Débat, Mme Bataille, M. M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Dilain, Fauconnier, Guillaume et S. Larcher, Mme Nicoux, MM. Mirassou, Vaugrenard, Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 9 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au premier alinéa de l’article 278 sexies du code général des impôts, le taux : « 7 % » est remplacé par le taux : « 5, 5 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-271 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à M. Joël Labbé, pour défendre l'amendement n° I-328 rectifié.
Le taux de TVA réduit à 5, 5 % s’applique aux produits et services de première nécessité en général. Nous estimons que la production de logements sociaux relève bien évidemment de la première nécessité.
Le présent amendement vise donc à appliquer le taux de TVA de 5, 5 % aux opérations d’investissement réalisées pour la construction et les travaux portant sur les logements locatifs sociaux, les établissements d’hébergement temporaire ou d’urgence, les établissements d’hébergement de personnes âgées ou handicapées, ainsi que certaines formes d’accession sociale à la propriété ; autant de domaines où il est nécessaire d’intensifier les efforts.
Il est à noter que le fait de ramener le taux de TVA de 7 % à 5, 5 % permettra de dégager une capacité d’investissement supplémentaire pour les bailleurs sociaux de l’ordre de 225 millions d’euros. Cette mesure paraît donc nécessaire au regard des objectifs nationaux du Gouvernement, lequel entend lutter contre la précarité énergétique et construire 150 000 nouveaux logements par an.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° I-403 rectifié.
L’objet de cet amendement est tout à fait comparable. Je souhaiterais simplement fournir quelques arguments complémentaires.
Le passage à un taux de TVA à 5, 5 % pour le logement social a été décidé par M. Périssol, dans le cadre d’un changement du mode de calcul global du financement du logement social. Ce système a remplacé celui qui était fondé sur les aides à la pierre, qui représentaient des sommes très importantes, octroyées de manière annuelle, et très fortement liées aux aléas de la conjoncture. Il a donc été décidé de suivre l’exemple de très nombreux pays européens, et de considérer le logement social, en particulier le logement locatif – au contraire d’autres pays dont la tradition est différente, l’accession n’en fait pas partie –, comme un bien de première nécessité, soumis à un taux de TVA parmi les plus faibles.
Le taux de 5, 5 % s’explique donc historiquement par ce changement de mode de calcul.
En faisant passer le taux de TVA de 5, 5 % à 7 %, le gouvernement précédent a rompu avec la conception même du financement du logement social, tout en le fragilisant.
Il faut bien en avoir conscience, les échéances seront délicates à tenir et l’objectif de construire 150 000 logements sociaux par an pendant cinq ans suppose la mobilisation de tous. D’ailleurs, même si les collectivités territoriales parvenaient à maintenir leur effort, ce qui ne sera pas toujours possible, du fait de la hausse des autres dépenses, de nombreux départements ne pourront pas accompagner le passage de l’objectif de construction de 120 000 à 150 000 logements, impliquant de leur part une participation plus grande.
De plus, l’augmentation des prix de la construction a été considérable, en comparaison avec les prix des loyers pratiqués dans le logement social. Les prix eux-mêmes sont plus élevés.
La part que la Caisse des dépôts et consignations peut consacrer diminue. Je veux parler non pas de l’enveloppe globale, rendue disponible par la collecte des sommes placées sur le livret A, dont le plafond a été relevé, mais de la quotité de prêts accordés aux organismes sociaux. Elle était, en moyenne, de 82 % il y a quelques années de cela ; la voilà tombée à 74 %. Cela s’explique par le fait que, au moment de déterminer les conditions d’équilibre de l’opération, la Caisse des dépôts et consignations constate que l’augmentation du prix des loyers est moins rapide – même si, pour les locataires, elle l’est toujours trop – que celle des prix de la construction. Dès lors, les opérations ne s’équilibrent plus. La Caisse des dépôts et consignations ne pouvant pas prêter si l’opération est risquée, la quotité baisse.
Pour compenser le phénomène, les fonds propres des organismes ont dû augmenter. Ils sont passés, en moyenne, à 20 % du prix du logement. En Île-de-France, les fonds propres vont de 35 % à 40 %. Monsieur le ministre, la limite est atteinte.
Des marges de manœuvre existent pourtant. Le mouvement HLM s’est engagé devant le Premier ministre, qui a fait, à cette occasion, un excellent discours.
Quand on fait le bilan de ce que je viens d’indiquer, on s’aperçoit que, en l’état actuel des choses et en dépit des efforts consentis dès à présent par le Gouvernement, nous n’avons pas les moyens de financer sérieusement des logements qui permettent un niveau de loyer correct. En effet, nous construisons massivement des logements auxquels s’applique un loyer plafond, qui est bien supérieur au plafond de l’aide personnalisée au logement, l’APL. Dès lors, même avec l’aide du prêt locatif aidé d’intégration, le PLAI, le loyer payé reste insuffisant.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous plaidons donc pour le retour à un taux de 5, 5 %, ce qui représente un coût de 230 millions d’euros. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, de nouvelles recettes sont possibles. À ce titre, vous le verrez, j’ai déposé un amendement tendant à dégager des recettes complémentaires, fidèle à l’engagement pris par le Président de la République devant la Fondation Abbé Pierre de créer une cotisation de solidarité urbaine pour les transactions excédant 10 000 euros au mètre carré, transactions qui, vous en conviendrez, sont assez minoritaires.
M. Éric Bocquet applaudit.
Les amendements qui viennent d’être présentés sont très voisins, à quelques nuances près. Si vous le voulez bien, j’émettrai donc, au nom de la commission, un avis global.
Ces amendements visent à appliquer, dès le 1er janvier 2013, un taux de TVA à 5, 5 % à la construction de logements sociaux, à la place du taux actuel de 7 %.
Je comprends la préoccupation de nos collègues. C’est un vrai problème, mais il ne peut s’agir, pour la commission des finances, que d’amendements d’appel.
J’ai bien compris que les auteurs des amendements s’inquiètent de la mise en place du taux intermédiaire de 10 %, qui a été vaguement évoqué à la suite de la publication du rapport Gallois.
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Il pourrait, en effet, se substituer, pour certaines activités, au taux de 7 % actuellement applicable, qui a lui-même remplacé le taux de 5, 5 %.
Ces amendements veulent donc attirer l’attention sur les conséquences, pour la construction de logement et tout particulièrement de logement social, de cet éventuel relèvement.
Il me semble que cette préoccupation, essentielle et très largement partagée, devra entrer en ligne de compte quand nous serons saisis des textes financiers qui mettront en œuvre le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi.
Ce sujet ne me semble pas être d’actualité immédiate, même s’il est très important. Nous devrons en débattre dans les prochaines semaines, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, qui a vocation à mettre en œuvre les dispositifs évoqués.
Pour cette raison, la commission des finances suggère aux auteurs de bien vouloir retirer leurs amendements.
Il est maintenu, monsieur le président, car, pour nous, le problème se pose dès cette année.
La construction d’un logement HLM demande au moins trois ans. Je tiens donc à attirer l’attention du Gouvernement sur le fait que l’objectif de construire 150 000 logements par an sur toute la durée du mandat ne pourra être respecté si les organismes HLM ne disposent pas, dès cette année, des financements adéquats.
Pour avoir eu des responsabilités dans ce secteur, je sais que la tentation est grande de prendre du temps. Je suis donc bien placée pour vous dire que, dans le domaine du logement, nous ne pouvons pas nous le permettre.
J’insiste sur le fait qu’il existe d’autres recettes possibles. La proposition ne date d’ailleurs pas d’hier, nous l’avions formulée alors que nous étions dans l’opposition. Pour ma part, je pense qu’elle garde toute leur actualité.
Il est maintenu également, monsieur le président, pour exactement les mêmes raisons que celles qu’a développées Mme Lienemann.
Les recettes nécessaires à la compensation sont prévues. Il s’agit d’une des grandes causes nationales. Nous souhaitons donc que le retour au taux de 5, 5 % soit décidé dès cette année, pour une application en 2013.
Il est maintenu, monsieur le président.
Je partage complètement les propos tenus par Marie-Noëlle Lienemann. L’abaissement du taux de TVA à 5, 5 %, qui peut être voté dès aujourd’hui, sera pris en compte dans les programmations et les plans de financement, permettant de concrétiser des projets dans de meilleures conditions et donc de faire sortir de terre les immeubles, si c’est ce que nous voulons vraiment.
Avec un taux de TVA à 7 %, on sait d’ores et déjà qu’il ne sera pas possible de financer le même nombre de projets.
C’est pour cela qu’il ne faut pas attendre un autre débat. Nous avons la possibilité de le faire aujourd’hui, et dans de bonnes conditions.
Nous soutenons ces différents amendements. Je rappelle que le Sénat, en application de l’article 24 de la Constitution, représente les collectivités territoriales. On trouve, parmi nous, nombre d’élus locaux directement concernés par la construction de logements sociaux, au sein de leurs départements.
Le logement social est une priorité nationale, cela a été rappelé par le Gouvernement. Des engagements ont été pris sur le nombre de logements devant être construits au cours des cinq prochaines années. Il ne peut pas y avoir de promesses à géométrie variable.
C’est notre sentiment, en tout cas. Ou alors, cela ne serait pas cohérent !
Pour siéger depuis de longues années dans des organismes d’HLM, offices départementaux ou sociétés anonymes d’HLM, nous connaissons la difficulté, de plus en plus prégnante, d’arriver à construire des logements en nombre suffisant.
Monsieur le rapporteur général, ces amendements sont cohérents avec ce qui a été dit au Sénat au début du mois de septembre, lors de la discussion de la loi sur le logement social. À l’époque, il fallait voter dans les plus brefs délais, tellement l’urgence était grande. Résultat : nous sommes allés tellement vite qu’il a fallu rétropédaler !
Par souci de cohérence, il semble nécessaire d’aller dans le sens voulu par les auteurs de ces amendements, et de les voter. Il y a urgence, et nous sommes convaincus qu’il faut aller vite.
MM. Yvon Collin, Joël Labbé, Claude Dilain et Éric Bocquet applaudissent.
Je souhaite défendre la position de la commission, qui est hostile à ces amendements, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, monsieur le ministre, nous nous attendons à une initiative du Gouvernement sur les taux de TVA. Mais nous avons besoin de savoir quand cela se fera. Il faut donc que vous nous répondiez clairement.
Cela se fera-t-il dans le collectif budgétaire de fin d’année ou non ? Ce projet de loi de finances rectificative se bornera-t-il à inscrire les dispositions relatives au crédit d’impôt « Gallois compatible » ? Ira-t-on plus loin, en abordant le financement de ce nouveau dispositif ? Proposera-t-on au Parlement d’inscrire dans la loi la nouvelle architecture des taux de TVA, même si son effet est différé ? Nous avons besoin de le savoir.
La commission des finances, en tant que telle, ne peut pas souscrire à une mesure ponctuelle et spécifique, s’appliquant à un sujet particulier, dès lors qu’une démarche plus globale, visant à redéfinir et à simplifier l’architecture des taux de TVA, est annoncée.
Ensuite, madame Lienemann, le gage figurant dans votre amendement n’est pas celui que vous avez annoncé. Votre amendement compense la perte que son adoption impliquerait par le traditionnel « gage tabac », et non par une nouvelle taxe additionnelle sur les transactions portant sur des terrains dont la valeur est de plus de 10 000 euros le mètre carré. Si vous vouliez ce gage, il fallait l’inscrire dans votre amendement. Or vous nous proposez de voter un amendement qui n’est pas conforme au contenu de votre intervention !
Enfin, monsieur le ministre, je voudrais dire, et il me semble que tous les membres de la commission des finances peuvent partager ce point de vue, que les perspectives du logement social nous inquiètent tous. Elles nous inquiètent d’autant plus que les parcours résidentiels, dans lesquels nous croyons, peuvent être mis à mal si le lancinant problème du Crédit immobilier de France n’est pas réglé. Il s’agit aussi d’une branche de ce que l’on appelait le « mouvement HLM ».
Monsieur le ministre, vous êtes sensible, je le sais, à cet aspect des choses. Pour encourager la rotation nécessaire dans le parc HLM, des prêts à l’accession sociale à la propriété sont nécessaires. Une solution au problème posé par le Crédit immobilier de France doit donc être trouvée ; nous en avons besoin.
Notre rapporteur général, d’ailleurs, a pris l’initiative, avec une participation très pluraliste, de mener des auditions sur le sujet. Il va rassembler nos idées dans un rapport, qui sera prochainement publié.
Alors, oui, monsieur le ministre, il existe une forte inquiétude quant à la satisfaction des besoins en matière de logement social.
Non sans avoir rappelé qu’au nom de la commission des finances je m’oppose à ces différents amendements et en demande moi aussi le retrait, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous apportiez des éclaircissements, d'une part, sur l'architecture des taux de TVA, d’autre part, sur les dispositifs en matière de logement social qui ont été évoqués.
Décidément, les sujets se suivent et ne se ressemblent pas...
Avec ces amendements, nous avons maintenant l'occasion de vérifier que nous sommes véritablement le Parlement des territoires, si je puis dire, puisque le logement social constitue l'une de nos missions fondamentales. Or, en la matière, le retard est certain. Si nous ne saisissions pas cette occasion, nous serions la préfiguration de ce que pourrait être, pour certains, le Parlement après la fin du cumul des mandats : la réunion d'individus insensibles aux territoires !
Oui ! J'espère que, dans cette enceinte, ceux qui sont en prise avec les réalités du terrain insisteront sur la nécessité de créer du logement social.
Je ne suis pas certain que tout le monde en soit convaincu. Certains avancent une série d'arguments techniques pour ne pas répondre à cette nécessité première ; dans un passé proche, d’autres ont voulu taxer le logement social fortement. Pour ma part, je ne voudrais pas être de ceux-là, même pour promouvoir une taxation plus légère.
Le logement social est un produit de première nécessité, et il justifie les efforts qu’il exige. Je me rallie à ces amendements pour que, sans délai, nous votions ce message fort en direction des territoires.
Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette fin de matinée, il serait dommage de laisser s'installer un clivage entre ceux qui seraient pour et ceux qui seraient contre le logement social.
Nous sommes tous attentifs ici à l'équilibre du logement dans nos villes et nos cités, cumul ou pas. Lorsque l'on est parlementaire, on connaît son territoire. Et ne sommes-nous pas les élus des élus ? Il faut donc sortir de ce schéma.
Je lance un appel à nos collègues qui ont déposé ces amendements : il faut entendre les arguments du rapporteur général. Dans quelques semaines, nous aurons à trancher ces questions. N’en doutons pas, le ministre nous apportera dans quelques instants des éclaircissements.
Le ministre sait aborder les débats et les problématiques de manière approfondie. Il en donne régulièrement la preuve, monsieur le président de la commission des finances, puisqu’il vous répond toujours avec soin et précision.
Pour ma part, je considère qu’il serait sage de suivre le rapporteur général, qui n’est pas absent du terrain, chers collègues.
Je m'exprimerai ici en mon nom propre.
J'ai bien entendu les arguments de la commission sur la redéfinition de l’architecture des taux de TVA qui nous est annoncée, sans que nous en connaissions encore les premières pistes.
« Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras », dit l’adage. Pour ma part, j'estime que le coup de pouce en faveur du logement social doit passer par la TVA. C’est un dispositif efficace et, surtout, immédiat, d'autant que le texte de Mme Duflot qui nous sera de nouveau soumise dans quelques semaines exigera des collectivités territoriales un effort supplémentaire de construction. Or il faut rassurer les territoires en décidant de mesures efficaces et d’application immédiate. Au passage, cela donnera du travail aux artisans et aux constructeurs et aura donc un effet vertueux sur notre économie.
Par conséquent, je voterai cet amendement.
Ainsi donc, il y aurait d’un côté des défenseurs du logement social et, de l’autre, ceux qui seraient insensibles à cette cause. Certains s'autoproclameraient donc plus légitimes que d'autres à défendre le logement social, au motif qu’un amendement visant à baisser le taux de TVA aurait été déposé dans le cadre de la discussion d’un projet de loi de finances.
Je ne crois pas qu'il s'agisse là d'une présentation très objective ni même très honnête de la réalité.
Monsieur le président de la commission des finances, tout le monde sait qu’un plan de compétitivité a été proposé par le Gouvernement, dont le financement sera assuré par une modulation des taux de TVA. Par conséquent, très prochainement, le Parlement sera saisi de cette problématique qui touche différents domaines. Anticiper sur les propositions du Gouvernement ou sur le vote du Parlement – ce qui revient à préjuger de l'équilibre global de cette réforme – ne me paraît ni de bonne pratique ni de bonne politique.
Je vois bien que certains pourraient y gagner en visibilité, mais je mesure aussi le risque de contestation que cela pourrait entraîner pour le Gouvernement et la majorité qui, en principe, soutient sa politique.
Madame Lienemann, au regard du projet du Gouvernement en la matière et des modalités de financement qui sont prévues, je souhaite que, contrairement à ce que vous avez tout à l’heure indiqué, vous retiriez en définitive l'amendement n° I-403 rectifié.
Donner l'impression que rien n'a été fait en faveur du logement social ces dernières semaines témoigne d’un certain manque de lucidité.
Je rappelle que les exonérations de plus-values en cas de cession à un bailleur social ont été prorogées jusqu'en 2014. C'était une volonté très forte du Président de la République, que le Gouvernement a traduite en actes dans des délais très brefs et que le Parlement a adoptée. Ce n'est pas rien !
Je rappelle aussi la suppression du prélèvement sur le potentiel financier, le PPF, instauré par la majorité précédente, qui a assez sévèrement pénalisé la trésorerie des bailleurs sociaux. Là encore, cela répond à une demande très forte du logement social.
Surtout, et même si cette mesure est moins populaire que la baisse de la TVA, car elle est moins immédiatement compréhensible, pour autant, elle est d’un rendement tout à fait considérable, je citerai l’extension aux produits de cession de certificats d’économie d'énergie de l'exonération de l'impôt sur les sociétés des bailleurs sociaux, exonération qui, en l’état, coûte déjà 1 milliard d’euros.
Il me semble donc que le Gouvernement n'a pas été hésitant, dès lors qu'il s’est agi d'aider le logement social.
En résumé, ces décisions très récentes sont à mettre à l’actif du Gouvernement et de la majorité qui le soutient. J’ai aussi évoqué le projet de loi qui permettra au Parlement de se saisir très rapidement de la question de la modulation des taux de TVA.
Le nécessaire équilibre de ce projet de loi de finances est déjà compromis par le vote des groupes UMP, UDI-UC et CRC intervenu hier soir pour supprimer l'article 6, qui prévoyait la mise au barème de l'impôt sur le revenu des plus-values de cession. Or le vote de ces amendements constituerait une mise à mal supplémentaire de l'article d'équilibre. En effet, si elle était adoptée, cette disposition aurait un coût compris entre 130 millions d'euros et 150 millions d'euros, gagé par l'augmentation des prix du tabac.
Madame Lienemann, une augmentation des prix du tabac de 150 millions d'euros ne passerait pas inaperçue chez les buralistes et serait tout sauf anodine, je puis vous l’assurer !
En effet, étant opposé à l'adoption de cet amendement, le Gouvernement ne lèvera pas le gage et le Sénat sera alors responsable d'une augmentation à due concurrence des prix du tabac.
Alors qu’une augmentation de 6 % décidée par le gouvernement précédent et acceptée par ce gouvernement au nom de la continuité de l'État est entrée en vigueur au 1er octobre dernier et qu’une autre est prévue au 1er juillet 2013, la promulgation de cette loi entraînerait une nouvelle hausse des prix du tabac au 1er janvier prochain.
Mesdames, messieurs les sénateurs, dans la mesure où le Parlement sera saisi dans quelques semaines d’un projet de modulation des taux de TVA, je vous remercie, forts de cet engagement, de bien vouloir retirer les amendements que vous avez déposés. Si vous n’en faites rien, je demanderai à la Haute Assemblée de ne pas les voter, car cela compliquerait davantage encore la rédaction de l'article d'équilibre et compromettrait peut-être la première partie de ce projet de loi de finances pour 2013, dont le vote conditionne l’examen de la seconde partie.
Je précise à l’intention de nos collègues qui ne sont pas membres de la commission des finances que nous avons émis à l'article 10 un avis favorable sur l'amendement n° I-253 du groupe CRC visant à réactiver un dispositif en faveur du logement social pour une durée de deux ans.
En effet, nous avons bien conscience que, en matière de logement social, il est urgent d’intervenir et qu’il faut tenir compte des préoccupations qui se sont exprimées.
En revanche, dans la mesure où nous engagerons très prochainement un vaste débat sur l'ajustement des taux de TVA, il me semble prudent et raisonnable de nous en tenir aux dispositions actuellement en vigueur.
C'est la raison pour laquelle je confirme ma demande de retrait de l'amendement n° I-403 rectifié.
M. le ministre vient d'évoquer un certain nombre de mesures favorables au logement social, notamment en ce qui concerne les certificats d’économie d'énergie, mais, parallèlement, on nous propose dans ce projet de loi de finances l’affectation du prélèvement sur la part du 1 % logement à d'autres financements que l'État n'a plus à faire en direct. Si nous travaillons ainsi alors que les mesures sont sans lien les unes par rapport aux autres, nous aurons les plus grandes difficultés à nous y retrouver !
Le rapporteur général a précisé à juste titre que notre amendement n° I-253, que nous examinerons tout à l’heure, avait reçu un avis favorable de la commission des finances.
Monsieur le ministre, je ne peux accepter que vous nous reprochiez de ne pas avoir voté l'article 6. Je rappelle que le projet de loi de finances pour 2013 prévoyait initialement une ressource supplémentaire de 1 milliard d'euros grâce aux dispositions de cet article. Or, à l'issue de son examen à l'Assemblée nationale, celle-ci n'était plus que de 150 millions d'euros ! Cette perte importante n'est pas de notre fait. Vous avez fait ce choix pour accéder à la demande de ceux que l'on a surnommés les « pigeons », mais cette mesure ne reçoit pas notre accord.
Si nous proposons aujourd'hui que la TVA soit ramenée à 5, 5 %, comme c’était le cas avant l’intervention du gouvernement précédent, c’est bien parce que nous voulons affirmer les moyens de la politique du logement en loi de finances.
Séparer cette politique du pacte de compétitivité n'a rien de choquant à mes yeux.
Le retour à une TVA à 5, 5 % est une demande constante des groupes de gauche de cette assemblée et du mouvement HLM. Elle est bien antérieure à tout le débat sur l'évolution du taux de TVA, qui semblait bien peu à l’ordre du jour ces derniers mois.
Par ailleurs, aucune réponse ne nous a été apportée à la question de savoir si la redéfinition de ce taux de TVA dans le cadre d'un projet de loi de finances rectificative aurait un impact immédiat sur l'année 2013.
Sans ces ressources, et en dépit des efforts réels du Gouvernement et de la remise en cause des décisions tout à fait inacceptables du gouvernement précédent, la montée en puissance que le Président de la République a demandée pour atteindre l'objectif de 150 000 logements sociaux ne sera pas au rendez-vous.
J’entends l’argument du gage, mais chacun sait bien à quelle étape du débat budgétaire nous sommes ; chacun sait bien que, si notre assemblée n’opère pas certains choix politiques dès aujourd'hui, il sera extrêmement délicat de les faire prendre en compte ultérieurement. Je n’ai certes pas gagé ma proposition sur d’autres recettes, mais je souhaite indiquer à mes collègues que nous examinerons plus tard des amendements prévoyant de nouvelles recettes, qui me paraissent raisonnables et à la hauteur des dépenses supplémentaires qu’entraînerait le rétablissement du taux de TVA à 5, 5 % pour le logement social.
Que se passe-t-il, mes chers collègues, quand le taux de TVA ne permet pas la bonne fin des opérations pilotées par les organismes d’HLM ? On ne construit pas assez de logements ! Et si l’on construit moins, les recettes de TVA diminuent. Or, si l’on fait le bilan de ce que l’État verse pour la construction d’un logement social et de ce qu’il touche du fait de cette construction, on prend la mesure des taxes – taxe foncière sur les propriétés bâties, etc. – que perçoivent les collectivités publiques et on réalise que, parfois, l’organisme verse plus qu’il ne reçoit. A minima, les flux sont à peu près équilibrés. Et je ne parle pas de l’impact sur l’emploi.
Je me souviens du débat que nous avons eu à l’occasion de la discussion du prélèvement sur les organismes d’HLM. Le Gouvernement nous avait demandé de retirer notre amendement qui, disait-il, posait problème. Mais, dans sa sagesse, notre assemblée a voté la suppression du prélèvement sur les organismes d’HLM, et les choses sont rentrées dans l’ordre : la suppression du prélèvement est devenue un acte législatif, qui sera consacré dans le nouveau projet de loi que le Gouvernement a déposé après la censure de son premier texte par le Conseil constitutionnel.
J’estime que la question de la TVA est non pas simplement conjoncturelle, mais bien structurelle. Le secteur du logement social doit-il bénéficier structurellement d’un taux de TVA minoré ? Pour ma part, je pense que oui, et c’est pourquoi, sans préjuger des décisions ultérieures, je soutiens tous les amendements qui vont dans ce sens.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC.
Les propos de M. le ministre ne laissent aucun doute sur la forte volonté qu’a le Gouvernement de contribuer à résoudre le grave problème du logement dans notre pays. Cependant, je ne crois pas que nous puissions nous contenter de renvoyer le débat, même temporairement, avec la promesse de procéder ultérieurement à un examen global du problème.
Non, le logement social étant une urgence, il est urgent d’y apporter des solutions. C'est pourquoi il faut dès maintenant appliquer le taux de TVA à 5, 5 % aux opérations d’investissement réalisées dans le secteur du logement social. D'une part, cela enverra un signal à la population française, et, d'autre part, cela permettra aux organismes d’HLM de tracer des perspectives pour l’avenir. Je maintiens donc mon amendement et, le cas échéant, notre groupe votera les amendements de nos collègues Éric Bocquet et Marie-Noëlle Lienemann.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.
Je mets aux voix les amendements identiques n° I-328 rectifié et I-403 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° I-269 rectifié, présenté par Mme Jouanno, est ainsi libellé :
Après l'article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au premier alinéa de l’article 279-0 bis du code général des impôts, le taux : « 7 % » est remplacé par le taux : « 5, 5 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-292, présenté par Mme M. André, MM. Berson, Botrel et Caffet, Mme Espagnac, MM. Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Miquel, Patient, Patriat, Rebsamen, Todeschini, Yung et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa du 1° du I de l’article 726 du code général des impôts, le taux : « 0, 1 % » est remplacé par le taux : « 0, 2 % ».
La parole est à Mme Michèle André.
Il s’agit d’un amendement de cohérence, qui vise à aligner le taux du droit d’enregistrement portant sur les cessions de droits sociaux sur celui de la taxe sur les transactions financières, la TTF, propre à certaines cessions d’actions de sociétés cotées. La première loi de finances rectificative pour 2012 avait fait de ce droit l’équivalent pratique de la TTF pour les cessions d’actions n’entrant pas dans le champ de cette dernière. Son taux avait donc logiquement été aligné sur celui de la TTF, à savoir 0, 1 %. La deuxième loi de finances rectificative pour 2012 ayant porté le taux de la TTF à 0, 2 %, nous proposons d’harmoniser à nouveau les deux taux.
Je suis bien entendu favorable à cet amendement, puisqu’il est identique à un amendement que j’avais proposé à la commission. Il s'agit d’un amendement de cohérence, qui devrait rapporter plusieurs dizaines de millions d'euros.
Je vous remercie d’avoir rattrapé ce qui était incontestablement une erreur ou une malfaçon technique.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9 bis.
Mes chers collègues, à cette heure, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures vingt, est reprise à quatorze heures trente.